Bienvenue à la N.H.K ! : Infiltration - Partie Un

From Baka-Tsuki
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Partie Un[edit]

Ça avait peut-être finalement un rapport avec le dérèglement hormonal de mon cerveau. Comme des vagues qui s'avancent et qui se retirent, folie et dépression alternaient en moi, et c'était comme ça tous les jours. Juste au moment où je pensais me sentir mieux, je mourrais d'envie de me taillader les veines le lendemain, tellement je me sentais vraiment inutile.

Malgré l'utilisation de drogues pour me rendre plus énergique, je retombais dans mes travers dès que les effets s'estompaient. La honte de mon passé et des inquiétudes sur mon avenir, ainsi que plusieurs autres peurs, m'assaillaient simultanément. Cette dépression qui s'en suivait était le revers de mes moments ultra speed, et, comme tel, extrêmement dure.

Même les thérapies du soir de Misaki, auxquelles j'aurais déjà dû être habitué depuis le temps, étaient toujours aussi effrayantes pour moi. Une inquiétude d'origine inconnue m'avait enveloppé, et la très grande incertitude entourant cette origine avivait d'autant plus ma peur.

Le premier symptôme facilement identifiable était que mon regard commençait à s'égarer et j'étais petit à petit incapable de regarder mon interlocuteur dans les yeux. Oh, j'étais exactement comme un petit collégien trop complexé. J'avais honte du fond de mon cœur. Et comme j'en étais conscient, mon comportement devenait de plus en plus étrange et suspect. C'était un cercle vicieux.

Quoi qu'il en soit, ce soir-là, j'essayai de fumer pour me calmer devant Misaki. Mes mains, maintenant sujettes à des tremblements, sortirent une cigarette et tentèrent de l'allumer, avec un briquet bon marché. Bon sang ― il était à court d'essence ! Comment est-ce possible ? Ça craint ! Je ne savais pas quoi faire du tabac et du briquet que je tenais dans les mains, mais j'étais prêt à tout pour éviter l'humiliation d'avoir à les ranger dans ma poche. J'insistai encore et encore. Clic, clic, clic, clic... Je continuai à me battre comme un beau diable et, finalement, je réussis ― Dieu merci !

Je me détournai immédiatement de Misaki et me concentrai un peu trop à fumer ma cigarette. Je me contentai de continuer de fumer, gaspillant cinq yens à chaque bouffée. Mes poumons souffraient, mes entrailles aussi. Le bout de ma cigarette tremblait beaucoup. Le long de ma nuque, de la sueur froide-

― Un problème, Satô ? demanda Misaki.

Comme d'habitude pendant nos sessions de thérapie, on était l'un en face de l'autre sur un des bancs du parc.

― C'est lié à ma maladie chronique ! répondis-je.

― C'est-à-dire ?

Voilà ce qui me dérangeait vraiment. Les jeunes filles de nos jours n'y connaissent vraiment rien. Retourne potasser tes cours ! J'avais envie de lui crier dessus ; bien entendu, ça m'était impossible. Ces horribles et inutiles traits de caractère acquis après plusieurs années de hikikomorisme ― mon agoraphobie, ma peur du contact visuel, et toutes mes autres phobies ― m'entravaient désormais avec une force considérable.

Hm... Est-ce que j'avais bien fermé ma porte en partant ? Étais-je certain d'avoir éteint ma cigarette ? Et surtout : Misaki, arrête de me regarder avec ces adorables yeux ! Et arrête d'être aussi silencieuse. Oui, arrête de me regarder sans rien dire ! Ça me rend extrêmement nerveux. J'ai vraiment mal au ventre.

Il fallait que je dise quelque chose et vite.

― Au fait, Misaki, tu aimes les petits gâteaux ?

Mais qu'est-ce que c'était censé vouloir dire ?!

― Non.

― Généralement, les filles de ton âge passent leur journée à manger ce genre de choses, non ? Comme un petit animal... crunch, crunch, crunch, crunch. Comment ça se fait ? Est-ce que c'est parce qu'elles sont jeunes et qu'elles ont un métabolisme rapide qu'elles doivent continuellement refaire le plein de calories sans quoi elles en meurent ? Ce doit être pour ça, non ?

Devrais-je me pendre ?

Elle demeura silencieuse.

Devrais-je me tailler les veines ?

― Je ne mourrai pas ! Et c'est parce que je suis un homme plein de vie ! Cette énergie débordante est sans égale ! J'ai que vingt-deux ans ! L'avenir me tend les bras ! « Un nouuuuuuveau lendemaiiiiiin est arrivé, empli d'espoiiiiir... », chantai-je.

Misaki s'agrippa à la manche de ma chemise.

― Hum ?

― Allons en ville, après-demain, dit-elle, tout en continuer de tirer sur ma manche, près de la gare, peut-être. Ensemble. Quelqu'un d'important a dit ça un jour, « jetez vos livres et allez en ville », ou quelque chose du genre. Je ne mens pas. C'était écrit dans un livre que j'ai lu récemment, alors il est temps pour nous d'aller en ville. En faisant ça, je suis sûre que tu feras un grand pas en avant dans la bonne direction. D'accord ?

Sans réfléchir, j'acquiesçai.





La requête de Misaki avait insufflé une nouvelle peur en moi. Aller en ville, en plein jour, avec une mystérieuse fille dont j'ignorais toujours complètement la véritable identité... C'était clair et net que ce geste irréfléchi allait me placer sous une immense quantité de stress. Complètement écrasé par cette dernière, il allait sans dire que j'allais très sûrement faire quelque chose dont j'aurais honte après, une fois encore. C'était inéluctable. Ah, je n'avais pas envie d'y aller. Je voulais rester cloîtrer dans ma chambre.

Quoi qu'il en soit, une promesse est une promesse. Je me souvins que le premier pas pour devenir un membre respecté de la société était de respecter ses promesses... J'étais en marge de la société par contre ; j'étais juste un hikikomori.

De toute façon, je ressentais une douleur aigue au ventre. La tension et l'impatience constante que je ressentais me rappelaient les périodes d'examen. Pour quelqu'un d'aussi faible que moi, cette pression s'exerçait sur moi très fortement.

Mais, comme l'a écrit Dostoïevski ou un autre, avec une douleur dépassant les frontières du supportable venait également un plaisir indéniable. En gros, quand le stress dépasse une certaine limite, les humains y prennent goût pour une raison ou une autre. Par exemple, en se faisant dénigrer de façon extrême, une personne peut devenir impulsivement aimable. À son tour, ce sentiment peut engendrer excitation et plaisir.

― Pas vrai, Yamazaki ?

― Mais oui, mais oui. Enfin, je sais pas du tout de quoi tu parles, par contre.

Aujourd'hui, comme d'habitude, Yamazaki bûchait sur son jeu depuis le petit matin. Son corps trahissait d'une façon ou d'une autre le lugubre plaisir qu'il ressentait au travers son activité du moment.

― Voyons voir où t'en es, lui dis-je.

Mais il cacha l'écran avec son corps. Il devait être en train de créer un jeu particulièrement érotique.

Enfin, Yamazaki pouvait bien travailler sur l'eroge le plus bizarre du monde, ça ne me faisait ni chaud ni froid. Je décidai qu'il était temps de prendre le petit déjeuner et j'ouvris le réfrigérateur.

― Hein ? Quoi, Yamazaki, ton frigo est vide ?

― Hé ! Ça se fait pas de se servir dans le frigo des autres sans leur permission ! T'es chez moi, là, pas chez toi !

― J'ai pas le choix, j'ai dû vendre le mien...

Tout en essayant de me trouver des excuses, je pris des nouilles instantanées à l'endroit habituel dans le placard.

Pile à ce moment-là, la sonnette retentit. Un visiteur ?

Yamazaki se leva lentement de son bureau et alla ouvrir la porte d'entrée. Là, se tenaient debout deux religieux. Mais aujourd'hui, ce n'était pas Misaki et sa tante, mais un jeune homme d'une vingtaine d'années, en costume, et un collégien en blazer marin. Je me suis dit qu'elles avaient peut-être changé de trajet.

En tout cas, leurs méthodes étaient similaires.

― Hum, nous distribuons ces magazines...

Le religieux tendit deux brochures à Yamazaki.

― Euh, en fait, nous essayons d'informer les gens sur notre religion...

Yamazaki tenta poliment de faire partir les deux religieux.

En les voyant, une sublime idée me traversa l'esprit. Après les avoir rejoints à l'entrée, je tapai Yamazaki aussi fort que possible dans le dos juste avant de dire :

― Mais qu'est-ce que tu racontes, Yamazaki ?! Tout à l'heure, tu m'as pas dit que t'étais intéressé par ce genre de littérature ?

― Hein ?

Tout en ignorant Yamazaki, qui s'était retourné en me regardant l'air de dire, « Qu'est-ce que t'as fumé, espèce d'abruti ? », je fis face aux religieux et leur dis d'une traite :

― En fait, ça fait un moment que votre religion nous intéresse. Serait-il possible de nous laisser participer à l'un de vos meetings ?


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