Utsuro no Hako:Volume 1 FR

From Baka-Tsuki
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Prologue[edit]


Ce n’est pas comme si je l’avais complètement oublié. Je me souviens probablement encore de cet endroit, et je rêve même de son paysage, ce que je fais en ce moment même.

Je ne peux me souvenir de cet endroit que dans mes rêves.

Oui. Ce n’est pas comme si je l’avais oublié. Je ne peux simplement pas trouver d’indices pour m'aider à retrouver ces souvenirs. Il n’y a simplement rien dans le monde réel qui y ressemble. Si j’essayais, je pourrais certainement m’en souvenir, mais je n’ai pas l’opportunité de le faire.

Absolument rien dans ma vie de tous les jours ne pourrait me rappeler cette personne en face de moi.

« As-tu un souhait ? »

Le visage de la personne qui me posa calmement cette question se métamorphosait continuellement en de nouvelles faces. Mon rêve était généré par mon propre subconscient, mais d’une certaine façon, je ne pouvais pas saisir les traits de son visage. Je le voyais, bien sûr. Enfin, je crois. C’est juste comme s’il ou elle ressemblait à tout le monde et à personne en même temps.

À ce moment-là, j'imagine avoir donné une réponse passive, inoffensive à sa question, bien que je ne puisse plus me souvenir précisément de ma réplique. Quoi qu’il en soit, quand il ou elle entendit ma réponse, il ou elle me présenta un récipient.

« Ceci est une boîte pouvant accorder n'importe quel souhait. »

Ça ressemble bien à une boîte, maintenant qu’il ou elle le dit.

Je concentrai mon regard sur la boîte. Ma vision n’était pas mauvaise, mais je ne pouvais malgré tout pas la voir clairement. Il n’y avait rien dans cette boîte, si ce n’est que cette étrange sensation. C’était comme tenir une boîte à cookies fermée qui fait du bruit lorsqu’on l’agite, mais qui est vide quand on l’ouvre.

Je pense lui avoir demandé quelque chose de trivial, du style « Pourquoi me la donnez-vous ? ».

« Parce que tu es vraiment intéressant ! Je ne peux distinguer un humain d’un autre humain, malgré ma fascination pour l’humanité. Ironique, tu ne trouves pas ? »

Je ne compris pas vraiment ce qu’il ou elle essayait de me dire, mais hochai la tête, sans enthousiasme toutefois.

« Mais tu es une exception. Je peux te distinguer du reste de l’humanité. Tu dois penser que ce n’est rien de spécial, mais c’est plus que suffisant pour retenir mon attention ! »

Je regardai dans la boîte. Bien que la boîte soit vide, j’eus comme la sensation d’être attaqué par une sensation désagréable, comme si mon corps tout entier était attiré vers le fond de la boîte. Je détournai vite les yeux.

« Cette boîte accordera n’importe quel souhait. Je me fiche de ce que tu souhaites. Je ne t’arrêterai pas, même si tu souhaites détruire toute l’humanité. Je suis juste intéressé par ce que toi, ou ton espèce, pourriez souhaiter. »

Je répondis quelque chose, puis il ou elle se mit à sourire.

« Hé, hé… Non, non. Ce n’est pas une sorte de pouvoir spécial. Les humains ont déjà le pouvoir de réaliser leurs souhaits juste en formant une image claire de ce qu’ils désirent. Je suis juste capable de donner à cette capacité un petit coup de main. »

J’acceptai la boîte.

Bien sûr, je ne me souviendrai plus de ce rêve lorsque je me réveillerai.

Mais je vais clairement me souvenir de ce que j’ai pensé de lui ou elle. C’était la même impression que j’avais de lui ou elle dans tous mes rêves précédents.

D’une certaine manière, cette personne n’est-elle pas…

… répugnante ?


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1re fois[edit]


« Je m’appelle Aya Otonashi. Heureuse de vous rencontrer, » dit l’élève transférée avec un léger sourire.


23e fois[edit]


« Je suis Aya Otonashi… Cordialement… », dit l’élève transférée, indifférente, impassible.


1050e fois[edit]


« Aya Otonashi. », prononce l’élève transférée sans même nous regarder, visiblement ennuyée au-delà de toute croyance.


13118e fois[edit]


Je regarde l’élève transférée, dont je ne connais pas encore le nom, qui est debout sur l’estrade.

« Aya Otonashi. »

L’élève transférée murmure son nom à voix basse, comme si elle ne se souciait nullement de savoir si les élèves pouvaient l’entendre. Cependant, sa voix est claire.

— Oui. Je connais déjà son nom, malgré le fait que je l’entende pour la première fois.

Toute la classe retient son souffle, non pas à cause de la présentation monotone et simpliste, que l’on ne pourrait même pas qualifier de présentation, mais bien parce que cette fille est incroyablement belle. Elle se distingue sans peine des autres élèves présents dans la pièce.

Tout le monde attend qu’elle continue.

Elle ouvre la bouche.

« Kazuki Hoshino. »

« Quoi ?… »

Pour une raison singulière, elle cite mon nom. Tout le monde dans la classe me regarde d’un air curieux. Ne me regardez pas comme ça, je suis tout aussi confus.

« Je suis ici pour y mettre fin. », déclare-t-elle subitement. « Il s’agit de mon 13 118e transfert. Même moi, je ne peux m’empêcher d’être folle de rage. C'est pourquoi cette fois-ci, c’est la guerre. »

Elle ne se préoccupe même pas des élèves éberlués, et me fixe.

« Kazuki Hoshino. Je te ferai céder. Tu ferais mieux de me donner ce que tu as de plus précieux rapidement. Toute résistance est inutile. Pourquoi ? C’est simple. Car je serai… »


Aya Otonashi sourit, puis termine sa phrase.


« … toujours à tes côtés, peu importe le temps qui passe. »


10876e fois[edit]


Nous sommes le 2 mars. Nous sommes supposés être le 2 mars aujourd’hui.

Pourquoi est-ce que je confirme la date d’aujourd’hui ?

... Probablement parce que le ciel est nuageux, malgré le fait que l’on soit en mars. C’est sûrement ça. Le ciel me rend mélancolique. Dernièrement, le ciel bleu est caché par les nuages.

Bon sang, je me demande quand le ciel va se décider à s’éclairer.

Je suis dans ma classe avant le début des cours, regardant par la fenêtre, les bras croisés et ne pensant à rien d’important.

J’imagine que ces pensées viennent du fait que je ne me sente pas très bien. Non, ce n’est pas que je ne me sens pas bien. Je me sens comme toujours. Je me sens juste… mal à l’aise. Je ne peux pas l’expliquer, mais j’ai comme l’impression d’être soudainement la seule personne sans ombre. C’est ce sentiment qui me dit que « quelque chose ne va pas ». Ce genre de gêne.

Bizarre… Je ne trouve aucune raison à tout ça. Rien d’inhabituel n’est arrivé hier, j’ai mangé mon petit-déjeuner ce matin, j’ai écouté le nouvel album de mon chanteur préféré dans le train, et j’ai eu l’habituelle « chance moyenne » à l’émission de divination que j'ai regardé.

Je décide de ne pas faire plus de mal à mon cerveau, et prends un umaibō [1] dans mon sac. L’umaibō d’aujourd’hui est saveur porc. J’en prends un peu. Eh bien, peu importe combien j’en mange, je ne me lasse jamais de cette saveur.

« Encore un umaibō ? Tu ne t’en lasses vraiment pas, hein ? Si tu continues de manger des umaibōs tout le temps, ton sang va finir par en prendre sa couleur, tu sais ? »

« Euh, et de quelle couleur exactement ? »

« Qui sait ! »

La fille qui plaisante est ma camarade de classe, Kokone Kirino. Ses cheveux bruns, quelque part entre le long et le presque long, sont liés en une queue de cheval ornant le haut de sa tête. Kokone change de coupe tout le temps, mais on dirait qu’elle aime sa coupe actuelle. Enfin, c’est ce que je pense. J’ai le sentiment qu’elle s’est attachée à ce style depuis un moment.

Kokone se saisit de la place à côté de la mienne et commence à se maquiller à l’aide de son miroir bleu. C’est un outil que moi, en tant que garçon, ne connais pas très bien. Si seulement elle pouvait mettre autant d’effort dans tout ce qu’elle faisait, et pas seulement dans son maquillage.

« Maintenant que j’y pense, tu aimes beaucoup le bleu, non ? »

« Ah oui, j’aime le bleu… Ah, au fait, Kazu ! Il y a quelque chose de différent chez moi aujourd’hui ? Il y a quelque chose ? », me demande soudainement Kokone avec des yeux pleins d’étoiles.

« Hein ? »

Comment pourrais-je le savoir ? Il n’y a aucune chance que je puisse répondre à ça sur le coup.

« Je vais te donner un indice ! Mon atout de séduction principal a changé ! »

« Hein ? »

Je regarde instinctivement sa poitrine.

« Ouah ! Eh ! Pourquoi tout de suite les seins ?! »

Eh bien, parce que tu fanfaronnes tout le temps sur le fait que tu sois passée au D, donc je me suis dit que…

« Ce sont évidemment mes yeux, mon atout de séduction ! Et de toute façon, les seins ne prennent pas du volume d’un coup ! Ou c’est ce que tu aurais aimé ?! Pervers ! Obsédé ! »

« Désolé… »

Ce n’était pas possible que je devine son soi-disant atout de séduction, mais je vais juste m’excuser pour le moment.

« Alors ? »

Kokone me fixe avec des yeux pleins d’attente. Je dois avouer que ses yeux sont plutôt larges. Je me sens un peu timide après m’en être rendu compte.

« Je pense que ton visage est le même que d’habitude… », dis-je, sans vraiment la regarder.

« Hein ? Quoi? Tu dis que mon visage est aussi mignon d’habitude ? »

« Non, je n’ai pas dit ça. »

« Dis-le ! »

Je me sens légèrement forcé.

« En fait, j’utilise du mascara aujourd’hui. Comment tu le trouves ? Comment tu le trouves ? »

Je ne vois aucune différence. Je ne peux pas faire de distinction entre son look d’hier et d’aujourd'hui.

« Non, pas moyen que je remarque quelque chose comme ça, » lui dis-je avec grande honnêteté, et en ratant son test au passage.

« “Quelque chose comme ça”, tu dis ?! »

Elle me frappe.

« Aïe… »

« Tss ! Quelle chiffe molle ! », s’exclame-t-elle. Mais… Ah ! elle doit être légèrement en colère. Kokone fait semblant de me cracher dessus puis s’en va montrer son maquillage à d’autres camarades de classe.

« Ha… »

Maintenant je suis fatigué. Kokone peut être amusante, mais je ne peux pas comprendre son tempérament.

« Vous avez fini votre querelle amoureuse ? »

La première chose que je vois après m’être retourné est un trio de piercing sur une oreille droite. Il n’y a qu’une personne avec de tels piercings.

« Daiya… C’était pas une querelle amoureuse. Comment as-tu pu arriver à cette conclusion ? »

Mon ami Daiya Oomine ricane à mon objection. Oui, arrogant comme toujours. Enfin, je suppose qu’il serait étrange qu’une personne comme lui s'abaisse au niveau de ceux qui nous ignorent. Après tout, il a choisi de porter ces accessoires malgré l’interdiction au sein de l'école, et va même jusqu’à le montrer en public.

« Mais tu n’as vraiment pas remarqué le mascara ? Même moi, j’ai remarqué la différence. Et pourtant, cette fille ne m’intéresse pas. »

« … Sérieusement ? »

Ils sont voisins et amis d’enfance. Le fait qu’il ne soit pas intéressé par elle est sans aucun doute un mensonge. Cela dit, ne pas repérer quelque chose que même Daiya a remarqué peut être un petit problème. Après tout, il est complètement désintéressé par les autres et ne semble même pas les regarder.

« Mais, tu sais… »

J’ai l'impression qu’elle a aussi appliqué du mascara hier.

« Je vois, j’ai compris, Kazu. Donc tu as dit à la gourde “Tu ne m’intéresses pas.” Je suis d’accord avec toi. Je suis du même avis que toi, mais je vais être plus direct. »

« Espèce de délégué malveillant ! Je peux clairement t’entendre ! »

Daiya ignore la fille à l’ouïe fine et continue.

« Kazu, arrêtons de parler de cette fille sans importance. Tu savais qu’un nouvel élève arrive aujourd’hui ? »

« Un nouvel élève ? »

Je vais encore le répéter, on est le « 2 mars » aujourd’hui. Pourquoi un élève serait transféré si près de la fin d’année ?

« Un nouvel élève !? Vraiment !? »

Comme on pouvait s’y attendre, Kokone nous a entendus parler.

« Kiri. Je ne suis pas en train de te parler. Ne viens pas fourrer ton nez là-dedans. Oh, et ne t’approche pas de moi ! Ce visage désespérément faux n’est pas bon pour ma santé mentale. »

« Que… quoi ?! Tu peux parler, Daiya ! Tu devrais commencer par t’occuper de ta personnalité malhonnête le plus rapidement possible. Peut-être qu’on devrait te mettre la tête à l’envers 24 heures pour qu’un peu de sang atteigne ton cerveau ! Peut-être seras-tu enfin capable de dire quelque chose d’intelligent après ça. »

Dans l’objectif d’interrompre ces échanges de politesse, j’élève un peu ma voix pour retourner au sujet initial.

« Un nouvel élève, pas vrai ? Je pense avoir entendu quelque chose comme ça. »

Daiya ferme sa bouche et me regarde fixement.

« Qui t’en as parlé ? », me demande-t-il avec un regard sérieux.

« Hein ? Pourquoi tu veux le savoir ? »

« Ne réponds pas à ma question par une autre question. »

« Euh… Qui était-ce déjà ? C'était pas toi ? »

« Impossible. Je viens de l’entendre en revenant de la salle des professeurs. Tu ne devrais avoir eu aucune opportunité de le savoir. »

« Ah bon ? »

« Ce genre de rumeur se propage partout, et souvent rapidement. Mais apparemment, même la bavarde Kiri, ne le savait pas. »

Daiya a probablement raison, si on considère la réaction de Kiri. Et pas seulement elle, aucun première année ne semblait le savoir.

« C’est pourquoi j’ai conclu que cette information était tenue secrète jusqu’à aujourd'hui, le jour du transfert. Mais si c’est le cas, comment l’as-tu su ? »

« Hein? »

Je me le demande.

« Enfin bref. Mais tu ne trouves pas ça étrange Kazu ? Pourquoi quelqu’un serait transféré à ce moment de l’année ? Il y a sûrement des raisons particulières. Par exemple, qu’il s’agisse d’un enfant à problème expulsé de tout un tas d’autres écoles ? Si c’est le cas, ça expliquerait qu’on nous l’ai caché. »

« Daiya, ce n’est pas bon de spéculer sur les nouveaux élèves. C’est un préjudice de ta part. Je veux dire, cet élève est déjà suspect, même sans ton intervention. Et puis, tout le monde écoute en cachette ce qu’on dit. »

Les autres élèves, qui écoutaient effectivement notre conversation, ont un petit sourire aux lèvres.

« Ah ? Pourquoi je devrais m’en occuper ? »

Ouah…

Au moment où je laisse échapper un soupir à son attitude désinvolte, la sonnerie retentit. Mes camarades se précipitent tous à leur place.

Kokone, assise près de la fenêtre, l’ouvre et s’y penche. On dirait qu’elle veut voir le nouvel élève le plus tôt possible.

« Oh ! »

Tiens… On dirait qu’elle a repéré quelqu’un qui semble être le nouvel élève. Après avoir lâché ce petit « Oh, » Kokone se pose sur sa chaise avec une expression de glace, et ce malgré sa joie d’il y a quelques instants, juste avant qu’elle ne regarde par la fenêtre.

Je me demande ce qui ne va pas.

Kokone sourit et murmure « C’est incroyable ! » Tout le monde veut probablement savoir ce qu’il se passe, mais notre professeur vient d’entrer dans la classe. La silhouette d’une fille peut être vu derrière la vitre de la porte de la classe. Ce doit être la nouvelle élève. Après avoir jeté un œil sur classe, le professeur réalise que tout le monde se demande qui est cette personne derrière la porte, et l’appelle pour la faire entrer.

La silhouette derrière la porte bouge.

Et alors… je l’ai vu.


En un instant…

Le paysage a changé d’un coup, comme si j’avais été poussé d’une falaise.

D’abord, j’entends un son. Le son d’une scène qui se déchire. Avec force, violemment, une image après l’autre est plantée dans mon cerveau. Encore et encore, des morceaux d’une scène similaire apparaissent. Je sens que ma conscience est sur le point d’exploser, mais est en même temps retenue sur place, comme dans une boîte en métal. Déjà vu. Déjà vu.

« Je suis Aya Otonashi. » J’ai entendu.

« Je suis Aya Otonashi. » J’ai entendu.

« Je suis Aya Otonashi. » Ça suffit, je t’ai entendu !

Je rejette toute cette masse d’informations qui tente de percer ma conscience. Je veux dire, il n’y a aucun moyen que tout ça s’emboîte. Mon cerveau surchargerait. Je ne peux pas traiter toutes ces informations.

« Ah… »

Quelle…

Quelles choses incompréhensibles… suis-je… ?

Je réalise que mes pensées deviennent un véritable pêle-mêle, et force mon cerveau à s’arrêter de penser… puis je reviens à moi.


Hein ? À quoi je pensais déjà ?

Ayant oublié ce à quoi je pensais, je fais face au tableau et la regarde à nouveau. Je regarde la nouvelle élève, Aya Otonashi, dont je ne connais pas encore le nom.

« Aya Otonashi. »

La nouvelle élève murmure son nom, comme si elle se fichait de savoir si on peut l’entendre ou non.

Aya Otonashi descend de la plateforme.

Son introduction qu’on ne peut même pas qualifier de « simple » a généré un flot de bavardage en classe.

Elle ne prête aucune attention à ses nouveaux camarades de classe et se met à marcher…

… dans ma direction,

me fixant directement.

Elle s’assoit naturellement à la place à côté de la mienne, comme si cette place lui était destinée depuis le début.

Otonashi fronce les sourcils tandis que je la regarde en silence.

Je pense que je devrais dire quelque chose.

« Euh, enchanté de te rencontrer. »

Ses sourcils froncés ne changent pas cependant.

« C’est tout ? »

« Hein ?… »

« Je t’ai demandé si c’était tout. »

Il y avait quelque chose d’autre à dire ? Même si tu me le dis, je ne vois vraiment pas quoi. Après tout, c’est la première fois qu’on se rencontre.

Mais l’atmosphère me force à dire quelque chose.

« Euh, ton uniforme… C’est celui de ton ancienne école ? »

Otonashi ne réagit pas à mes paroles frénétiques et continue simplement de me regarder.

« Euh, alors ? »

Voyant ma confusion, Otonashi laisse échapper un soupir puis se met à sourire. Son sourire semble montrer l’étonnement d’un enfant.

« Je vais te dire quelque chose d’intéressant, Hoshino. »

Tiens ? Je ne lui ai même pas encore dit mon nom.

Mais cette pensée n’est rien. Otonashi a ensuite dit quelque chose qui m’a immobilisé sur ma chaise pour au moins cinq secondes.

« Kasumi Mogi porte une culotte bleue aujourd’hui. »



La tenue de Kasumi Mogi en EPS est un uniforme régulier différent des habits de gym.

Aujourd’hui, elle regarde encore les garçons qui jouent au foot. Elle porte son uniforme comme d’habitude, tout en restant inexpressive.

Les jambes blanches dépassant de la jupe de Mogi sont si minces, on dirait qu’elles pourraient céder à tout moment.

Et, pour une certaine raison, ma tête repose sur ses genoux.

Ah oui. Je n’ai pas la moindre idée de ce qu’il se passe. Pendant que je ressens certainement une sensation de bonheur pur, je ne peux pas vraiment en profiter puisque j’essaye désespérément de stopper mon saignement de nez avec un tissu.

Au passage, je peux maintenant me souvenir de comment j’ai fait pour finir comme ça. À cause des actions d’Otonashi, qui m’ont laissé confus, j’ai laissé un ballon de foot embrasser mon visage, me faisant saigner du nez. Mogi était inquiète pour moi et pour une certaine raison, m’a laissé me reposer sur ses genoux.

Les genoux de Mogi ne sont pas doux du tout. Pour être honnête, être allongé dessus me fait fait un peu mal à la tête.

Je me demande pourquoi elle s’occupe de moi comme ça. Je relève le visage pour regarder Mogi. Son visage inexpressif ne me donne pas de réponse.

Mais je suis heureux.

Vraiment, vraiment heureux.

Le commentaire d’Otonashi à propos de la « culotte ».

Bien sûr que ça m’a surpris, et pas seulement en raison de sa soudaineté et l’absence de contexte. Ce que je veux dire, c’est que Otonashi a dit « Je vais te dire quelque chose d’intéressant. » Concrètement, elle a déclaré que cette information à propos de Kasumi Mogi était quelque chose d’intéressant pour moi.

Je n’ai même pas dit à Kokone ou Daiya mon béguin pour Kasumi Mogi. Il n’y a donc aucun moyen qu’Otonashi, que je rencontre pour la première fois aujourd'hui, soit au courant de ça. Néanmoins, elle l’a bien dit.

« Dis-moi, Mogi-san. »

« Oui ? »

Mogi répond d’un air posé. Sa voix est comme celle d’un petit oiseau, dont les plumes s’harmonisent très bien avec son petit corps et son apparence délicate.

« Aujourd'hui, eh bien, est-ce qu’Otonashi t’a parlé ? »

« La nouvelle élève ? Non… »

« Vous deux n’êtes en aucun cas des connaissances, pas vrai ? »

Mogi hoche la tête.

« T’a-t-elle fait quelque chose de suspect ? »

Elle réfléchit pendant un moment puis secoue la tête. Ses cheveux légèrement ondulés se balancent.

« Pourquoi me demandes-tu tout ça… ? », m'interroge-t-elle en inclinant sa tête.

« Ah, eh bien… Si rien n’est arrivé, alors rien. »

Je détourne mes yeux pour fixer le terrain. Otonashi reste seule au centre du terrain, ne montrant aucun intérêt pour le ballon ou les filles qui courent après. Quand le ballon vient rouler près d’elle, elle donne un faible coup de pied dedans pour la renvoyer. Euh, elle ne vient pas de tirer volontairement sur une fille de l’autre équipe ?

« Euh… »

J’ai peut-être trop réfléchi à ce qu’elle a dit, en pensant que Otonashi avait remarqué mes sentiments pour Mogi.

Otonashi avait eu pas mal d’impact à cause de son apparence et de son attitude. Ouais. J’ai simplement trop lu dans son commentaire parce qu’il était venu aussi brusquement par une personne dont la présence est remarquable. C’est une logique à laquelle tout le monde peut croire.

Et pourtant… Pourquoi je ne peux pas le croire ?

Otonashi me fixe pendant un moment, ne regardant nulle part ailleurs.

Me regardant droit dans les yeux, elle expose un sourire en coin. Bien que le cours de sport ne soit encore terminé, elle commence à marcher dans ma direction.

Avant même de le savoir, je me suis levé. J’ai abandonné le privilège de dormir sur les genoux de Mogi, ce qui est censé être la source de mon plus grand bonheur. Mon corps tout entier frémit. Ce n’est pas une hyperbole, je frissonne vraiment de la tête aux pieds.

Mogi, qui semble aussi avoir remarqué Otonashi, se crispe et se lève.

Avec un sourire audacieux, Otonashi me pointe du doigt… Non, elle pointe Mogi.

Juste après.

Il y a eu un coup de vent. Un coup de vent complètement imprévisible. Un coup de vent que personne ne pourrait avoir anticipé.

Ce coup de vent soudain a levé la jupe de Mogi.

« … ! »

Mogi baisse immédiatement sa jupe, mais seulement à l’avant. Je suis derrière elle. Juste après le coup de vent, Mogi se retourne et me regarde. Elle est toujours aussi inexpressive, mais ses joues semblent un peu rouges.

Elle forme à voix basse les mots « est-ce que tu l’as vue ? ». En fait, elle a peut-être crié, mais je n’ai pas entendu sa voix. Je secoue la tête frénétiquement. Je crois que cette réaction frénétique indique que j’ai bien vu sa culotte. Mais Mogi ne répond pas et baisse les yeux.

À ce moment-là, Otonashi est debout juste à côté de moi.

J’ai alors un aperçu de son expression actuelle.

« Ah… »

Je réalise pourquoi je tremble autant. J’ai compris l’expression d’Otonashi. Elle reflète un sentiment qui n’a jamais été dirigé vers moi jusqu’à aujourd’hui.

De l’hostilité.

Pourquoi ? Pourquoi fait-elle preuve d’hostilité envers quelqu’un comme moi ?

Otonashi reprend son sourire en coin et me lance un regard noir. Alors que je suis encore tremblant, comme paralysé, elle place sa main sur mon épaule et approche ses lèvres de mon oreille.

« Elle était bleue, n’est-ce pas ? »

Otonashi sait tout. Mon affection pour Mogi, qu’un vent imprévisible allait exposer sa culotte, elle savait tout.

La déclaration d’Otonashi ce matin n’était pas une blague. C’était une menace insinuant qu’elle me connaît parfaitement, qu’elle connaît ma façon de penser, qu’elle peut me contrôler.

« Hoshino, tu devrais t’en rappeler maintenant, non ? »

Otonashi m’observe pendant que je suis pétrifié. Nous restons comme ça pendant un petit moment, mais pendant que je suis silencieux, elle laisse échapper un soupir et baisse les yeux au sol.

Elle murmure sa plainte : « Alors c’est inutile, alors que je suis allée si loin… Je vois, tu es un peu plus terne aujourd’hui. »

« Si tu as oublié, rappelle-t’en maintenant. Mon nom est Maria. »

Maria ? Non, euh… tu es Aya Otonashi, pas vrai ?

« Ce… c’est ton pseudonyme ou quelque chose du genre ? »

« Tais-toi. »

Elle me menace du regard, sans même chercher à cacher son irritation.

« Eh bien. Tu ne contestes pas du tout, donc je vais agir à ma guise, » me dit Otonashi en me tournant le dos.

« Ah, attends… »

Je l’ai arrêtée instinctivement. Elle se retourne, apparemment stressée. Je ne peux pas m’empêcher de grimacer à la vue de son froncement de sourcils.

Je ne suis pas sûr. Mais à juger par son l’attitude d’Otanashi-san, peut-être…

« Se pourrait-il que l’on se soit déjà rencontrés avant ? »

En entendant ces mots, Otonashi soulève le coin de sa bouche.

« Oui, nous étions amants dans notre vie précédente. Oh, mon bien-aimé Hathaway, comme ton état actuel est misérable ! Tu n'étais pas tel poltron lorsque tu m’as sauvée, moi, Princesse des terres ennemie. »

« Euh, quoi ? »

Je ne sais plus quoi dire. Otonashi semble satisfaite de mon état de confusion. Pour la première fois aujourd’hui, elle affiche ce qui semble être un sourire sincère.

« Je rigole. »


Le jour suivant.

J’ai vu le cadavre d’Aya Otonashi.


8946e fois[edit]


En entendant mes mots, Mogi commence à avoir les larmes aux yeux, puis elle se met à réfléchir un moment. Avec une expression paraissait anxieuse, elle marmonne alors :

« S’il te plait, attends jusqu’à demain. »


2601e fois[edit]


« Je m'appelle Aya Otonashi. »

L'élève transférée murmure seulement ces mots, rien de plus.



« Mon Dieu, c'est si intense ! »

Mon ami Haruaki Usui, qui est assis à côté de moi, s'exclame d'une voix plutôt forte. Il le fait quand bien même nous sommes toujours en plein cours, et me tape énergiquement dans le dos.

Haruaki ? Tu sais, ça fait vraiment mal, et puis le regard que nous lance toute la classe est aussi assez gênant...

Les yeux de Haruaki sont déjà tournés vers le fond de la salle où l'élève transférée, Aya Otonashi, est assise.

« On s'est croisé du regard, c'est si intense ! »

« Eh bien, si tu te retournes pour la regarder, c'est normal que vos yeux se croisent. »

« Hoshii, c'est LE DESTIN ! »

Attends, quoi ? Le destin ?

« En tout cas, elle est vraiment jolie ! Elle pourrait vraiment passer pour une œuvre d'art sur le marché mondial... et donc être reconnue comme un trésor national. Ah, c'est trop tard, elle s'est déjà emparée de mon cœur... Je vais lui déclarer ma flamme. »

C'est rapide !!

La sonnerie retentit. Après s'être dressé et avoir salué le professeur, Haruaki se rue vers Otonashi, en oubliant de s'asseoir en premier. « Aya Otonashi ! Je suis tombé amoureux de toi dès le premier regard. Je t'aime ! »

Ah ouais, il l'a vraiment fait...

Je n'ai pas entendu la réponse d'Otonashi directement, mais le visage de Haruaki le trahit. En fait, non... même pas besoin de regarder son visage.

Haruaki revient et se tient devant mon bureau.

« C'est absurde... J'ai été rejeté ? »

Il pensait qu'il allait être accepté... ? Ça fait peur parce qu'il a vraiment l'air sérieux.

« C'est pourtant évident, non ? Lui avouer des sentiments comme ça, sortis de nulle part, ne pourra que l'agacer ! »

« Ouais, je vois ce que tu veux dire. Eh bien, je réessayerai. Mais la prochaine fois, je ne lui dirai pas aussi soudainement ! Mes sentiments lui parviendront un jour ! »

D'un côté, sa façon positive de penser est presque enviable, mais d'un autre côté, je ferais juste mieux de l'éviter totalement.

« Vous vous amusez bien ? Vous êtes une très bonne source de distraction pour moi, mais les filles vous jettent à tous les deux des regards avec un sérieux mépris. »

Daiya se joint à nous sur ces mots.

« Hein !? Mais c'est pas juste Haruaki qu'elles regardent comme ça !? »

« Nan, je parle bien de vous deux. Les filles vous considèrent comme les deux faces d'une même pièce. »

« Oh oh, tu veux dire qui se ressemble s'assemble ? Ah ça, quel honneur ! Tu ne trouves pas, Hoshii ? »

T-tout mais pas...

« Bref, Daiyan, même toi tu aimerais aller vers elle, hein ? »

Haruaki donne un coup de coude à Daiya. Il est capable de faire ça à Daiya sans avoir peur, sûrement parce qu'ils sont amis d'enfance. Ou alors parce qu'il agit juste inconsciemment sans se soucier des conséquences...

Daiya soupire et répond immédiatement.

« Pas du tout. »

« C'est impossible ! Dans ce cas, Daiyan, qui pourrait donc faire battre ton cœur ? »

« Ça n'a aucune importance si mon cœur bat plus vite à cause du regard d'Otonashi. Je peux bien reconnaitre sa beauté, mais je n'ai quand même aucune envie d'aller vers elle. »

« Ah... ? »

« Haruaki, tu ne comprends rien, n'est-ce pas ? Eh bien, évidemment de tels sentiments ne peuvent pas être compris par un singe comme toi, qui vit en suivant ses instincts et pourrait sortir avec n'importe quelle fille, du moment qu'elle a un joli visage. »

« Quoi !? Tout d'abord, qu'est-ce que l'instinct a à voir avec se préoccuper des apparences !? »

« C'est de l'ordre de l'instinct humain d'être attiré par quelqu'un de magnifique pour qu'un magnifique enfant augmente les chances de survie de ta lignée. »

« Ooh », « Ooh » Haruaki et moi laissons simultanément un souffle d'admiration. Daiya semble stupéfait, comme s'il était choqué que l'on ne sache pas quelque chose d'aussi basique.

« Ah, j'ai compris, Daiyan ! Donc tu es en train d'expliquer que sa beauté est tellement hors de portée que même toi tu ne peux pas aller vers elle ! Défaite inévitable ! C'est ça, hein ? Comme le renard qui s'autopersuade que "ce raisin est aigre" quand il ne peut pas l'atteindre. Tu cherches juste à te trouver des excuses. Pas cool ! C'est vraiment pas cool, Daiyan ! »

« Qu'est-ce que tu as écouté dans ce que j'ai dit, exactement ? Sérieusement ? ... Bon, la première partie de ton affirmation n'était pas nécessairement fausse. Par contre, pour ce qui est de l'autre moitié... Je vais te tuer ! »

« Oh oh, donc tu ne peux vraiment pas aller vers elle. »

Haruaki révèle un regard triomphant sur son visage. Daiya frappe enfin Haruaki. Ouah, c'est comme si toute la frustration de Daiya était concentrée dans ce poing...

« Ce n'est pas que "je ne peux pas aller vers elle." C'est qu'"elle ne viendra pas vers moi." »

« Quel prétentieux... Hé, Hoshii, tu ne trouves pas que ce gars s'emballe un peu trop juste à cause de son apparence ? » Haruaki parle sans montrer aucun signe de regret.

« Ce n'est pas qu'elle ne peut pas venir vers moi parce que je suis hors de portée ! Enfin, ça pourrait très bien être possible, mais dans son cas, ça ne s'applique même pas. »

« Ouah, il dit des choses bizarres avec audace. »

« Elle ne me voit pas comme étant hors de portée, non, elle n'engagerait même pas une telle classification. Pour commencer, elle ne s'intéresse pas à nous. Elle ne nous regarde même pas de haut. Tout comme nous consignons les insectes comme des insectes, elle consigne les gens comme des gens. C'est tout. Elle ne s'occupe pas des différences minimes entre les personnes comme mon magnifique visage ou le visage laid de Haruaki. Tout comme l'idée de connaitre le genre d'un cafard ne te traverse même pas l'esprit. Comment peut-on seulement aller vers une fille pareille ? »

Même Haruaki semble submergé par cette impitoyable déclaration à propos d'Otonashi, et reste dans un mutisme absolu.

« … Daiya. »

J'ouvre la bouche à la place de Haruaki.

« On dirait que tu es étonnement intéressé par Otonashi. »

Daiya est bouche bée. Ah, ça c'est une réaction extrêmement rare. Mais n'avais-je pas raison ? En supposant que son point de vue soit correct, il a dû l'observer décemment afin de fournir une telle analyse.

« ... Pff, elle ne m'intéresse pas ! »

« Oh, tu as rougi ! »

« ... Hé, Kazu. Si tu continues dans cette direction, tu risques de t'aventurer en terrain glissant. Est-ce que tu veux que je te montre comment utiliser un poireau d'une manière que tu ne pourrais même pas imaginer ? Tu finiras avec un tel cas de TSPT[2] que rien que la simple vue d'un poireau te causera de l'urticaire ! »[3]

Je réalise que Daiya est assez en colère, alors j'essaye de changer de sujet en riant nerveusement.

De toute manière, Daiya semble comprendre que lui et Otonashi sont complètement incompatibles.

« Malgré ton sens pourri de l'intuition équivalent à celui d'un insecte, même toi, tu deviendras bientôt conscient de son anormalité. »

Ça ressemblait un peu à une mauvaise excuse comme ça.

Mais ça ne l'était pas du tout.

En fait, il avait complètement raison.



Juste après la fin du cours, Otonashi lève soudainement la main. Notre professeur, Monsieur Hokubo, la remarque, mais Otonashi ne se soucie pas de savoir s'il la connait ou non. Elle se lève et commence à parler avant même qu'il ne puisse la lui accorder.

« Vous tous de la classe 1-6, je vais vous faire faire quelque chose tout de suite. »

Otonashi ignore notre réponse abasourdie, et continue.

« Ça prendra cinq minutes. Vous pouvez bien m'accorder ce temps-là, n'est-ce pas ? »

Personne ne répond, mais elle se dirige vers la tribune quand même. Elle fait sortir nonchalamment Monsieur Hokubo de la classe, et prend alors sa place sur la tribune. Malgré l'anormalité de la situation, d'une certaine manière, elle arrive à la rendre complètement naturelle. À en juger de la réaction de mes camarades de classe, ils ressentent la même impression.

Un mutisme absolu s'éleva dans la classe.

Tandis qu'elle se tient sur la tribune, Otonashi parle en regardant droit devant elle.

« Vous allez maintenant écrire "une chose en particulier" pour moi. »

Otonashi se retire de la tribune et donne quelques papiers aux élèves de la première rangée. Ces mêmes élèves prennent chacun une feuille et passent le reste aux autres élèves derrière eux ; tout comme ils le font habituellement avec les polycopiés qui doivent être distribués à la classe entière.

Je reçois finalement une copie. C'est une quelconque et ordinaire feuille de papier recyclée d'à peu près 10cm de long et de large.

« Une fois que vous avez terminé, rendez-la-moi s'il vous plaît. »

« Et alors, c'est quoi cette "chose en particulier" ? »

Après que Kokone ait posé la question qui résonnait dans la tête de tout le monde, Otonashi répond simplement :

« Mon nom. »

Après cette remarque, la classe auparavant silencieuse commence à devenir bruyante. Très bien, mais je comprends toujours pas. Son nom ? Tout le monde sait comment elle s'appelle. Elle vient juste de se présenter en tant que « Aya Otonashi » ce matin après tout.

« Quelle stupidité ! », s'exclame quelqu'un. Il n'y a qu'une seule personne possible qui ait pu dire une chose pareille à Otonashi.

Daiya Oomine.

Mes camarades de classe retiennent tous leur respiration. Tout le monde sait que Daiya pourrait faire un ennemi terrible.

« Ton nom est Aya Otonashi. Pourquoi veux-tu que nous le notions ? Tu veux tant que ça qu'on se souvienne de ton nom ? »

Otonashi reste calme malgré les paroles agressives de Daiya.

« Je pourrais écrire "Aya Otonashi". Mais je viens juste de te le dire. Donc j'ai plus besoin de l'écrire maintenant, si ? »

« Non, je m'en fiche. »

Apparemment il ne s'attendait pas une affirmation aussi simple et se retrouve démuni de parole.

Il fait claquer sa langue, déchire le papier aussi bruyamment que possible et quitte la classe.

« Qu'est-ce qui va pas ? Pourquoi tu n'écris rien ? »

Personne n'arrivait à commencer à écrire. Ça peut ne pas paraître évident, mais tout le monde est surpris et submergé par elle et son comportement. Elle vient de répliquer à Daiya. En tant que camarades de classe de Daiya, on sait bien à quel point c'est impressionnant.

Tout le monde reste figé pendant un moment. Mais dès que le son du grattement d'un stylo brise le silence, un son de griffonnage commence à résonner à travers la classe.

Je parie que personne ne comprend les intentions d'Otonashi. Mais ça n'a aucune importance. Au final, il n'y a qu'une chose que l'on puisse écrire, après tout.

Il n'y a que le nom « Aya Otonashi ».

La première personne à rendre son papier à Otonashi est Haruaki. Une fois qu'il s'est levé, plusieurs élèves ont fait de même. L'expression d'Otonashi ne change pas vraiment lorsqu'elle accepte le papier de Haruaki.

C'était probablement… la mauvaise réponse.

« Haruaki. »

Je l'appelle tandis qu'il retourne à sa place après avoir échangé un ou deux mots avec Mogi.

« Qu'est-ce qu'il y a, Hoshii ? »

« Qu'est-ce que tu as écrit ? »

« Hmm ? Bah, on peut seulement écrire "Aya Otonashi", non ? Quoique j'ai failli oublier la dernière lettre. » Haruaki répond tandis qu'il semble un peu désolé pour une raison ou une autre.

« … Eh bien oui, je suppose que c'est la seule possibilité… »

« N'hésite pas trop... écris-le directement ! »

« Tu penses réellement qu'elle a fait tout ça juste pour qu'on écrive son nom ? »

Si c'était le cas, je comprends vraiment pas ce qui la préoccupe.

Haruaki répond immédiatement avec « Bien sûr que non, » confirmant mes doutes.

« Hein ? Mais pourtant… tu as écrit "Aya Otonashi", non ? »

« Ouais… écoute, Daiyan est tellement intelligent que c'en est même pas drôle, n'est-ce pas ? Eh bien, d'un autre côté, sa personnalité est tellement mauvaise que c'en est pas drôle non plus. »

Parce qu'il a brutalement changé de sujet, j'acquiesce.

« Et il a dit qu'il aurait simplement écrit "Aya Otonashi". Donc il n'aurait jamais pu penser à écrire autre chose. Évidemment, j'ai pas fait mieux. Ce que j'essaye de dire c'est que, bah, on ne peut pas arriver à une autre alternative, alors on ne peut rien écrire d'autre non plus. »

« Si on ne peut pas penser à quelque chose... on ne peut pas le marquer. »

« Exactement. En d'autres termes, cet exercice n'était pas porté directement sur nous. »

J'ai l'impression que Haruaki vise juste. Il doit avoir raison.

En d'autres termes, Otonashi ne se préoccupe pas de la plupart des ses camarades de classe et fait ça seulement pour la personne qui "peut" réellement penser à quelque chose d'autre.

Je comprends pourquoi Haruaki semblait si déprimé à l'instant. Je veux dire, il est tombé amoureux d'elle au premier regard. Sa déclaration aurait pu être faite à moitié pour plaisanter, mais je ne connais personne d'autre à qui il s'est déclaré. Alors il était en réalité plus ou moins sincère.

Mais elle ne lui a pas retourné son affection. Son existence même à été ignorée... tout comme Daiya le disait.

« ... Haruaki, tu es étonnement brillant. »

« Le "étonnement" n'était pas nécessaire ! »

Pendant que j'essaye de cacher ma remarque inconvenante derrière un sourire timide, Haruaki réagit en souriant avec amertume.

« À plus tard. Si je ne pars pas maintenant, mes seniors vont me tuer. Non, je n'exagère rien ! »

« Ah, ouais. Vas-y alors. »

Notre équipe de baseball moyenne semble très exigeante.

Je baisse les yeux vers ma feuille de papier blanche. Je suis presque sur le pont d'écrire « Aya Otonashi », mais je n'y arrive pas.

Je fixe Otonashi du regard. Son expression ne change pas le moins du monde tandis qu'elle regarde les papiers qui lui ont été remis. Je parie qu'il y a écrit « Aya Otonashi » sur chacun d'entre eux.

... quelqu'un qui ne peut pas penser à une chose en particulier ne peut pas l'écrire.

« —— »

Alors, qu'est-ce que je suis censé faire ?

Après tout ça, je parviens enfin à penser à quelque chose. Pour une raison ou une autre, le nom absurde de « Maria » me vient à l'esprit.

Je sais que quelque chose cloche avec moi. « Maria » en particulier. Je n'ai aucune idée d'où vient ce nom. Si je lui remets mon papier avec ce nom, elle va juste me hurler dessus, et dire quelque chose comme « Tu te moques de moi ! »

Mais, et si c'était, par hasard, la réponse qu'elle attendait... ?

Après quelques tergiversations sévères, je commence à écrire sur ce morceau de papier recyclé de 10cm de long et de large.

"Maria"

Je me lève et me dirige vers Otonashi. Il n'y a plus aucune queue. On dirait que je suis la seule personne qu'il reste. Je lui tends nerveusement mon papier. Otonashi l'accepte sans dire un mot.

Alors, elle regarde ce qui est marqué dessus.

Et son expression change. Massivement.

« ... Hein ? »

Otonashi a les yeux écarquillés, alors qu'elle ne montre pas le moindre signe de gêne face à notre professeur et Daiya ?

« Fufufu… »

Elle éclate soudain de rire.

« Hoshino. »

« Oh, tu te souviens de mon nom. »

J'ai immédiatement regretté ce que je venais de dire. Parce que lorsqu'elle s'est arrêtée de rire, elle me fusilla du regard comme si j'étais son pire ennemi.

« … Toi… ! Tu plaisantes, tu te fous de moi ?!? »

Elle semble avoir frénétiquement effacé sa colère, lorsqu'elle commence à parler dans une voix basse et forte. Je m'attendais à la partie de la « plaisanterie », mais là, le ton de sa voix est plutôt surprenant.

Elle me prend par le col de toutes ses forces.

« Ah ! J-je suis désolé ! J-je ne voulais pas me montrer irrespectueux... »

« Donc, tu veux dire que tu peux avoir dit une réponse pareille sans que ce ne soit une blague ? »

« ... Euh, eh bien. Tu... dois avoir raison. J'ai sûrement voulu plaisanter. »

Ça aurait pu être le coup de grâce.

Sans même relâcher son emprise de mon col, elle me traine sur son sillage, tout le chemin jusqu'à l'arrière du bâtiment de l'école.



« Hoshino. Est-ce que tu te moques de moi ? »

Otonashi me pousse contre le mur du bâtiment de l'école et me lance un regard noir.

« Je ne suis pas spécialement douée pour faire des plans. J'en ai conscience. Alors je suis venue avec un plan fou qui est du niveau à dire "Coupable, rendez-vous !" Non, on ne peut même pas appeler ça un plan. Et pourtant... Pourquoi faut-il que tu aies mordu à l'hameçon !? Et c'est déjà la deuxième fois que je fais ça ! La première fois tu l'as complètement ignoré ! »

Elle retire sa main de mon col, mais la pression de son regard furieux est plus que suffisante pour me tenir en place.

Otonashi continue de me lancer un regard noir tandis qu'elle se mord les lèvres, et soupire alors.

« ... Non, je perds mon sang-froid parce que j'ai enfin une réponse en utilisant une méthode aussi ridicule. Mais ça veut dire sans aucun doute que la situation s'améliore, donc je pense que je devrais en réalité être contente. »

« ... Oui, je pense aussi. Tu devrais être contente ! Hahaha. »

Otonashi prend de nouveau un air renfrogné face à mon sourire forcé. Je devrais sûrement simplement rester silencieux.

« ... Je comprends pas. En fait, je pensais que tu aurais été froissé pas ma persistance... Mais ça veut dire quoi ce visage ignorant et décontracté ! »

Je ne suis pas ignorant, je comprends rien de ce dont tu me parles !

« Tu n'as pas cessé de m'ignorer pendant 2600 itérations. Je refuse d'abandonner, peu importe combien de temps cette récurrence interminable doit durer. Malgré tout, je ressens quand même de la fatigue. Tu dois te sentir pareil, alors comment fais-tu pour garder un tel sang-froid ? »

Qu'est-ce que je dois... Je ne vois pas de quoi tu parles.

Apparemment, elle remarque enfin ma confusion et me regarde suspicieusement.

« … Peut-être n'es-tu pas conscient de toi-même ? »

« Conscient de moi-même ? De quoi ? »

« ... Très bien. Que tu fasses la comédie ou pas, une explication devrait pas faire de mal. Hum, d'accord. Pour faire simple... J'ai déjà été "transférée" 2601 fois. »

Je ne pouvais que réagir avec un air ahuri, ébahi.

« Si tu fais juste semblant, alors tu es assez incroyable. Mais si tu "ne sais vraiment pas", ce serait sans aucun doute naturel pour toi d'avoir un regard aussi terne. Peu importe. Je t'expliquerai ce que je sais. Hmm, d'accord... aujourd'hui nous sommes le 2 mars, n'est-ce pas ? »

Je hoche la tête.

« Il serait facile de dire que j'ai répété cette journée du 2 mars 2601 fois, mais ce n'est pas tout à fait vrai. Pour cette raison, j'utilise l'expression transfert d'école, même si ce n'est pas plus approprié non plus. »

« Haa... »

« Je suis retournée au 2 mars, à 6 heures 27, un nombre de 2601 fois. »

« … »

« 'Retournée' est l'expression correcte depuis ma propre perspective, mais n'est pas correcte universellement. Alors j'utilise l'expression transfert d'école ici, qui est du coup plus proche de ce qu'il s'est vraiment passé...»

Otonashi voit que ma mâchoire s'est décrochée, ce qui la rend un peu perplexe.

« Aah, bon sang ! À quel point es-tu stupide ! S'il y a quoi que ce soit que tu désapprouves en ce qui concerne l'horaire de 6 heures 27, tu déclares simplement que c'est "nul et non avenu", hein ! » Elle me hurle dessus, pratiquement bouillonnant de l'intérieur. Non, non... personne dans ma position n'aurait été capable de suivre son raisonnement.

« Je ne comprends pas vraiment, mais tu répètes le même jour encore et encore ? »

Ça s'est produit juste à l'instant où j'ai dit ça.

« Ah... »

Quoi ? Qu'est-ce que c'est que ça ?

Je presse ma poitrine, où une intense et étrange sensation m'attaque. Je me sens mal à l'aise... non, "mal à l'aise" est un euphémisme. C'est une profonde et inquiétante sensation, comme si ta ville natale était soudainement remplacée par une ville totalement différente, et tu es le seul à le remarquer.

Ce n'est pas tout à fait comme si mes souvenirs étaient revenus. Je ne me suis souvenu de rien de nouveau.

Mais pour une raison ou une autre, je peux sentir que quelque chose "était" là.

Otonashi dit la vérité.

Rien que la stricte vérité.

« Est-ce que tu comprends enfin ? »

« ... A-attends une seconde. »

Elle a expérimenté le jour du 2 Mars 2601 fois. Rien que ça aurait dû être plus que suffisant pour capter mon attention, mais ce que Otonashi explique essentiellement :

« … Est-ce que je suis le responsable de tout ça ? »

« Oui. » Otonashi répond sur le coup.

« P-pourquoi est-ce que j'aurais fait ça ? »

« Comment veux-tu que je connaisse ton mobile. »

« Ce n'est pas moi qui ai fait ça ! »

« Comment peux-tu dire ça alors que tu n'es même pas conscient de toi-même ? »

J'étais sur le point de dire « Pourquoi moi ? », mais je me suis rendu compte qu'il n'y avait qu'une chose qui m'avait fait me démarquer.

J'ai écrit "Maria" sur cette feuille de papier.

« Tout comme tu n'avais pas conscience de ces récurrences jusqu'à maintenant, quelqu'un d'autre qui a été traîné dans cette situation n'a aucun moyen de se souvenir des itérations qui ont été déclarées "nulles et non avenues". En d'autres termes : à part moi, seul le coupable doit être capable de noter le nom "Maria", que j'ai seulement mentionné dans d'anciennes itérations. »

Mais je me souvenais de ce nom. Je dois admettre que c'est inconcevable pour un nom comme "Maria" de remonter spontanément dans mes pensées.

« Je ne sais pas si c'est efficace, mais j'essaie toujours de me comporter de telle manière que je puisse me démarquer dans les souvenirs des autres. J'attends le coupable, qui doit aussi se souvenir des itérations passées qui ont été déclarées "nulles et non avenues", pour faire une erreur. À vrai dire, je n'attendais pas vraiment grand-chose de cette stratégie... »

« ... Quand as-tu commencé à me suspecter ? Je veux dire, tu m'as spécifiquement mentionné le nom - "Maria" - dans une ancienne itération, non ? »

« En réalité, tu semblais simplement inoffensif, donc je ne t'ai pas spécifiquement suspecté. »

« Et donc... ? »

« Hmph, bien sûr j'ai essayé à un temps différent à chaque fois de mentionner ce nom à chaque personne. Après tout, mon temps est fondamentalement illimité. »

Son temps est illimité.

Le temps que Otonashi a utilisé. Une quantité de temps si énorme que "illimité" ne peut même plus être qualifié d'une figure de style.

Je comprends. Son temps est fondamentalement illimité, et c'est donc pour cette raison qu'elle est venue avec ce plan aléatoire de faire marquer la classe son nom... dans le maigre espoir que quelqu'un écrive "Maria". Même si elle n'a pas de réelle chance de succès. Tous ses meilleurs plans ont été épuisés depuis bien longtemps avant le 2601e transfert d'école, donc c'était sans doute juste un moyen pour elle de tuer le temps jusqu'à ce qu'elle trouve un nouveau plan. Pour rester sain d'esprit, essayer un plan presque sans espoir est toujours mieux que de ne rien faire du tout. Après tout, le temps qu'elle passe dans ces "transferts d'école" pourrait durer éternellement.

C'est pourquoi Otonashi s'est mise en colère lorsque je suis tombé dans son piège. C'est comme si, peu importe à quel point tu essayes, tu ne peux pas battre un ennemi dans un RPG et, par conséquent, tu t'entraînes et gagnes des niveaux désespérément... tout ça alors que tu pourrais l'avoir battu facilement, juste en utilisant un certain objet facile à obtenir. Tu as réussi ton objectif au final, mais tu ressens désespérément l'impression d'avoir gâché tout ton temps et tes efforts.

« Bien, interrompons là nos bavardages sans intérêt. Après tout, rien n'a été résolu. »

« C'est vraiment le cas ? »

« Évidemment. À moins que la situation semble réglée pour toi ? Est-ce que ce cauchemar consécutif, la Classe Rejetée, a l'air de s'être terminé pour toi ? »

La Classe Rejetée ? Je suppose que c'est comme ça qu'elle appelle son enfer qui se répète.

En tout cas, il reste juste un dernier point qui m'embête encore.

« Tu sais, je peux comprendre pourquoi tu me considères comme le coupable parce que j'ai écrit "Maria". Mais écoute, pour commencer, pourquoi n'es-tu pas affectée par cette Classe Rejetée ? »

« Ce n'est pas comme si j'étais non affectée ; Je suis juste autant affectée pas la Classe Rejetée que tous les autres. Si j'abandonnais et arrêtais d'essayer de préserver mes souvenirs, la "Classe" m'aurait directement capturée. J'aurais vécu futilement dans cette récurrence sans fin. Céder serait aussi facile que de renverser un gobelet d'eau que tu as mis en équilibre instable au-dessus de ta tête. Nous aurons continué pour l'éternité à vivre cette unique journée que tu rejettes. »

« Tout ça serait arrivé si tu oubliais simplement ? »

« Réfléchis. Est-ce qu'il pourrait y avoir quelqu'un d'autre qui remarque éventuellement cette récurrence ? Après tout, même toi, tu n'étais pas conscient de la récurrence, et c'est toi qui l'a mise en place... »

... Elle doit avoir raison. Après tout, elle a déjà répété 2601 itérations.

« Ce serait infiniment plus facile pour moi d'abandonner l'effort de me souvenir. Mais ça n'arrivera absolument jamais. »

« ... Jamais ? »

« Ouais, jamais. C'est impossible que j'abandonne. Je m'en fiche si je dois répéter ce jour 2000 fois, 20000 fois ou un million de fois, je vais surmonter cette récurrence et accomplir mon objectif. »

2000 fois. Nous utilisons souvent "2000" comme unité au quotidien. Mais si nous devons vraiment empiler les jours, pièce par pièce... Par exemple, il y a 365 jours dans une année, 1825 jours équivaut à cinq ans... Et ce n'est toujours pas encore assez pour atteindre 2000 jours.

Otonashi a déjà passé plus de temps que ça dans la Classe Rejetée.

« Hoshino. Es-tu aussi inconscient de la raison pour laquelle tu as créé cette Classe Rejetée ? »

« Hein ? ... Oui. »

« Fufu, je vois. En supposant que tu joues juste l'imbécile pour éviter cette question, il y a sûrement un certain sens derrière tout ça. Si c'est le cas, ton jeu d'acteur est sacrément bon. »

« J-je ne joue pas ! »

« Eh bien, alors permets-moi de te demander... »

Otonashi sourit faiblement.

« Hoshino, tu l'as rencontré... lui, n'est-ce pas ? »

... Qui ?

… n'est pas la question que je me suis posée sur le coup, pour une raison ou une autre. Qui ai-je rencontré ? Je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas.

Malgré cela, je comprends.

J'ai rencontré "*".

Quand ? Où ? Bien sûr, il m'était impossible de le savoir. Ça ne fait pas partie de mes souvenirs. Malgré tout, je peux sentir que nous nous sommes rencontrés.

J'essaie de me souvenir. Mais l'information est bloquée, comme si elle l'était par la rapidité extrême à laquelle la vitesse d'obturation capture. Attention ! Vous ne pouvez pas entrer. Personnel autorisé seulement.

« Fufu, tu l'as donc bien rencontré. », glousse-t-elle.

Otonashi est maintenant convaincue. Et je le suis tout autant.

Moi, Kazuki Hoshino, suis la personne responsable de cette situation.

« Il a dû te la transmettre. La boîte qui t'exauce un seul souhait. »

Elle utilise soudainement le mot boîte. Selon ce qu'elle a dit jusqu'ici, cette boîte semble être l'outil qui a produit cette Classe Rejetée.

« Ah, je ne t'ai pas encore dit mon objectif. », me dit Otonashi en gloussant.

« Mon objectif est d'obtenir cette boîte. »

Alors, son rire disparait tout d'un coup. Otonashi, qui est convaincue que je possède la boîte, me fusille du regard froidement et émet un ordre :

« Maintenant donne-moi la boîte. »

Je possède forcément cette boîte. Il n'y a pas d'alternative, hein ?

Mais est-ce que ce serait vraiment bien de lui donner cette boîte qui pourrait lui exaucer n'importe quel souhait ?

Je veux dire, Otonashi a enduré 2601 répétitions juste dans l'intérêt de récupérer cette boîte. Alors elle a un souhait qui justifie un effort aussi immense. Elle veut exaucer son propre souhait ; même si ça voudra dire prendre à la légère mon souhait en volant ma boîte.

... Elle est poussée par une détermination qui borde l'anormalité.

C'est ça, c'est anormal. Aya Otonashi est anormale.

« ... Je ne sais pas comment. »

Je ne mens pas. Mais j'essaie aussi de montrer une certaine résistance.

« Je vois. Alors tu me la donneras une fois que tu auras trouvé comment faire ? »

« Eh bien... »

« Oublier comment l'abandonner est fréquent. Mais tu ne l'as pas oublié pour de bon ; quelque part, au fond de toi, tu sais toujours comment faire. Tout comme tu n'oublies jamais comment faire du vélo : tu ne sais peut-être pas comment l'apprendre à quelqu'un d'autre, mais tu comprends quand même instinctivement comment le faire. Tu es juste perplexe à l'idée de ne pas pouvoir convertir cette connaissance en mots. »

« ... Il n'y a aucun moyen de mettre fin à la Classe Rejetée sans enlever la boîte ? »

Otonashi me jette un regard froid.

« Donc tu n'as pas l'intention de me la donner. C'est ce que tu es en train d'essayer de me dire ? »

« C-ce n'est pas ce que... »

Détectant ma panique évidente, Otonashi lâche un soupir silencieux.

« Voyons voir. Je suppose que la Classe Rejetée se terminera aussi si on écrase la boîte avec son possesseur. »

« Si on l'écrase avec son possesseur... ? »

"Possesseur" fait probablement référence au coupable qui tient la boîte... En d'autres termes, moi. L'écraser avec moi ? En bref...

Otonashi réprime ses émotions et dit froidement : « La Classe Rejetée se terminera si tu meurs. »



Cette raison est-elle suffisante pour préparer un "*****" ?

Est-ce que tu es en train de me dire que tu comptes me le faire, si nécessaire ? Dans ce cas, fais-le rapidement s'il te plait ; ce serait plus facile à endurer.

Le matin du 3 Mars. Dans un carrefour pluvieux avec une faible visibilité.

J'ai jeté mon parapluie sur le côté et regarde en direction du "*****". Rien d'autre ne se démarquait. Le camion qui a percuté le mur et Otonashi, qui se tient juste là, n'est pas non plus traité par mon cerveau. Un liquide rouge coule continuellement ; Il y en a tellement que même la pluie ne peut pas tout enlever.

Un cor**, dont il manque la moitié de sa tête, dont le cerv*** a éclaté de toutes parts. ***ps. Corps. Corps. CORps. CorpsCorpsCORPS. corPS. CorpscorpsCORPS. Corps. Corps. Corps !

Le "Corps" de Haruaki.

« ... Ah. »

Une fois que j'ai finalement reconnu la chose devant mes yeux, je commence à vomir.

Je regarde en direction d'Aya Otonashi. Elle me fixe du regard, sans expression.

« … Haruaki. »

Mais ne t'en fais pas, Haruaki !

Tu sais, ça ne se fera pas de toute façon.

Ce sera commodément déclaré "nul et non avenu".

… Oh ? Est-ce que ce pourrait...

Est-ce que ce pourrait être la raison pour laquelle j'ai souhaité la Classe Rejetée... ? Parce que je rejette une situation comme celle-là ?


2602e fois[edit]


« Je suis Aya Otonashi. »


« ... Ah. »

Pile à ce moment, une image empourprée me traverse l’esprit. C’est une image qui a été gravée aux tréfonds de ma mémoire, bien que je ne l’ai vu qu'un instant.

Et, comme si cette image était connectée à mon cerveau par un fil, le reste de mes souvenirs de la 2.601e itération me revinrent.

Je devrais me féliciter de ne pas avoir crié tout haut.

« Hmm ? Qu’est-ce qu’il y a Hoshii ? Tu as l’air malade, t’es sûr que tu vas bien ? »

Haruaki, qui est assis juste à côté de moi, s’inquiète à mon propos.

Haruaki, qui aurait dû s’être fait écraser par un camion, me sourit.

Un mal-être inévitable. La nausée. Un énorme flot d’information m’engloutit, comme si j’étais sa proie et que je venais d’être totalement consommé. Mon cerveau ne peut plus endurer cette surcharge d’informations, j’ai comme l’impression qu’il va exploser.

Mes souvenirs des dernières itérations viennent tout juste d’être connectés avec ma mémoire actuelle.

Cette connexion, ces souvenirs, sont si vivants et nets...

« Vraiment, Aya est vraiment trop mignonne, je vais lui faire ma confession. »

... à cause du cadavre d’Haruaki.

Et maintenant c’est le coup de foudre avec Aya Otonashi, une fois de plus, bien qu’elle le fasse souffrir aussi terriblement .

Je regarde Otonashi et nos yeux se croisent. Elle me perce du regard. Avec un sourire audacieux, elle me perce du regard.

… Est-ce que le tuer était censé me forcer à donner ma boîte à Otonashi ?

Dans ce cas, son plan est vraiment efficace. Me menacer en me montrant un cadavre, sous-entendant que « Je te tuerai » … Et en utilisant le cadavre de mon ami, elle aussi veut me faire ressentir de la culpabilité. Je me rends compte qu’en théorie rien de tout cela n’est de ma faute ; c’est celle d’Otonashi. Mais confronté à un cadavre, la théorie n’est plus valable et elle se fait remplacer par l’instinct — mon esprit est facilement brisé.

Si je pouvais, je lui donnerais la boîte maintenant. Mais heureusement, je ne sais pas comment faire.

… Heureusement ? Pas exactement. Je veux dire par là que, puisque cette attaque est si efficace, Otonashi va sûrement continuer.

Jusqu’à ce qu’elle me brise.

Otonashi descend de la plateforme et s’approche de moi.

Elle se tient juste à mes côtés.

M’ignorant du regard, elle murmure :

« On dirait que tu t’en souviens. »

Si les choses continuent comme ça, elle va me briser.

J’ai ignoré Otonashi et fais comme si je ne savais pas de quoi elle parlait, même si je sais que c’est inutile.

Je dois essayer de trouver une sorte de contre-mesure, je me contenterai de l’éviter pour l'instant.

C’est pour cela...

« Tu m’as tout dit, Kazu ? »

... que j'ai consulté la personne la plus intelligente que je connaissais, Daiya Oomine.

Daiya est penché contre le mur du couloir et à l’air de mauvaise humeur, probablement parce que mon explication a duré tout le temps de la pause.

« Alors ? Qu’est-ce que tu veux que je fasse, après m’avoir parlé de cette idée de roman ? »

Je lui ai expliqué toute l’histoire, incluant tout ce qu’Otonashi m’a appris, sans omettre un seul détail. Mais ça reste quelque chose que personne ne croira, surtout une personne réaliste comme Daiya, c’est pourquoi j’ai changé ça en une idée de scénario pour un roman.

« Je me demandais ce que le protagoniste de cette histoire devrait faire. »

« Si on réfléchit à ses options, il est probablement supposé s’opposer à cette ‘’ Étudiante transférée ’’. »

Bien évidemment, je suis le protagoniste et Otonashi est l’étudiante transférée dans ce scénario.

Puisque je n’ai pas changé l’histoire, Daiya remarqua que l’élève qui a été transféré est ‘Aya Otonashi’. Mais il a juste souri et dit, « alors c’est elle le modèle pour ce personnage. » Il avait l’air sûr que notre discussion était purement hypothétique.

« Mais… Je ne pense pas que le protagoniste puisse rivaliser avec l’étudiante transférée. »

« Je pense que pour l’instant, c’est vrai. »

L’adversaire est Aya Otonashi. Une personne qui est allée jusqu’à se faire transférer 2.602 fois et qui fera tout ce qu’elle pourra pour obtenir la boîte, incluant la "production" de cadavres. Je ne pense pas avoir une chance de la battre.

« Mais c’est possible pour le protagoniste d’obtenir un ‘pouvoir’, à un point plus tardif, qui équivaudra à celui de l’élève transféré, » dit Daiya.

« Eh ? »

Évidemment, je consultais Daiya afin de trouver une solution. Mais je le fis presque sans y croire. Je ne m’attendais pas à ce qu’il trouve quelque chose.

« C’est quoi cette réaction ? Bon alors, dis-moi, qu’est-ce qui rend l’élève transféré supérieur au protagoniste ? »

« Eh ? Euh... »

« Aah, non, il vaudrait mieux que tu ne répondes pas. Tu vas juste me dégoûter avec une réponse totalement stupide. »

… Je peux m’énerver contre lui, non ?

« La différence entre le protagoniste et l’élève transféré est la quantité d’information qu’ils possèdent respectivement. L’élève transférée peut utiliser cette différence pour manipuler le protagoniste comme un pantin. C’est simple. Tout ce qu’elle a besoin de faire est de contrôler le flux de l’information et de ne donner au protagoniste que les informations qui lui seront bénéfiques. »

C’est… vrai. Otonashi pourra me contrôler au moment même ou j’oublierai les informations des itérations précédentes.


« D’un autre côté, s’il réduit l’écart qui les sépare, cela pourrait peut-être marcher. Il doit juste se débarrasser de ce handicap. »

« Mais c’est impossible ! »

Daiya sourit d’un air suffisant à ma réponse.

« Attends, tu m’as dit que le protagoniste peut réacquérir ses souvenirs des itérations précédentes. »

« Oui. »

« Alors la prochaine fois, s’il réacquiert les souvenirs de l’itération actuelle, parce que son incarnation actuelle a récupéré les souvenirs de l’itération précédente, il sera capable de reprendre les souvenirs de son avant-dernière itération. Qu’est-ce que t’en penses ? »

« … Euh, ouais, je pense. »

« Donc s’il peut reprendre les souvenirs de l’itération précédente, il peut aussi reprendre les souvenirs de l’avant-dernière itération. S’il reprend les souvenirs de l’avant-dernière alors il peut prendre les souvenirs de l’avant avant dernière itération. »

« … Donc... ? L’élève transféré lui aussi engrange des informations pendant ce temps. L’écart ne peut être comblé. Otonash... l’élève transféré a déjà tous ses souvenirs depuis la toute première itération. Qu’est-ce qui changera si le protagoniste obtient les souvenirs de la dernière ou de l’avant-dernière... »

« Répète ce processus 100,000 fois. »

« … Eh ? »

« On ne peut pas effacer les souvenirs des 2.601 itérations de l’élève transféré. On a alors qu’à rendre ses 2.601 fois négligeables. La différence en information entre 102.601 fois et 100,000 fois est de seulement 2%, approximativement. À ce niveau-là, il n’y a plus d’écart. Si le protagoniste répète ce processus plusieurs fois, il pourra donc s’opposer à l’élève transféré. Ensuite il devra utiliser les informations qu’il a acquises en prenant aussi en compte la fatigue de l’élève transféré pour l’affaiblir, la frustrer et la faire oublier les souvenirs qu’elle possède des anciennes itérations. »

« Je suis... »

Je suis supposé faire une chose comme ça ?

« Mais il ne sait déjà pas comment retenir sa mémoire. »

C’est vrai. J’ai été capable de retenir ma mémoire de la dernière itération, mais par pure chance.

« Tu as dit que le choc lié à la vue du corps a fait resurgir des souvenirs au protagoniste, non ? »

« C’est ce qui serait le plus plausible… je pense. »

Je n’arrive pas à trouver une autre raison et mon instinct me dit que c’est correct.

J’ai été capable de regagner mes souvenirs parce que j’ai aperçu le corps d’Haruaki.

« Bah alors, c’est simple, » dit Daiya

« Le protagoniste a juste besoin de cadavres. »

« ... Qu-Quoi ! »

Ce qu’il vient de dire me laisse sans voix.

« Commettre quelque chose comme ça... »

« Écoute. Je sais que c’est irraisonnable de tuer quelqu’un. Un protagoniste comme ça dégoûterait juste les lecteurs. Mais ce que je voulais dire, c’est que le protagoniste a juste besoin de trouver quelque chose qui a le même impact que celui d’apercevoir un cadavre. »

« … Cela pourrait sûrement… marcher. »

« Autrement dit, le protagoniste a juste besoin d’être plus tenace dans sa poursuite de la boîte que l’élève transféré. »

La sonnerie retentit. Daiya considère que notre discussion est finie et commence à s’en aller.

« Je retourne en classe. Tu devrais te dépêcher toi aussi, Kazu ! »

« D’accord… »

Mais je n’ai pas envie de retourner immédiatement en classe. À la place, je reste figé sur place. Daiya s’en va sans me prêter attention.

Je soupire.

« … Il doit sûrement y avoir un moyen de retenir mes souvenirs. Mais... »

... résister pendant 100,000 itérations ? Cela serait possible en théorie, mais ce n’est pas possible pour moi de l’appliquer en réalité. Ce n’est pas possible qu’un être humain puisse supporter cela. Cela serait comme si un inventeur me demanderait de conduire une voiture qui a pour vitesse maximale 20,000km/h. Même si la voiture peut aller si vite, mon corps ne pourra supporter la vitesse et finira pas dépérir. Mon esprit, non, l’esprit humain n’est pas capable d’endurer 100,000 répétitions du même jour.

Si Otonashi peut supporter ça, c’est un cas spécial. S’il vous plait, ne me mettez pas dans le même panier qu’un monstre comme elle.

Mais est-ce la seule solution qui existe qui me permette de m’opposer à Otonashi ? Est-ce que m’opposer à elle est, en soi, une bonne idée ? Ne serait-il pas mieux pour nous deux que je lève le drapeau blanc ?

Je soupire encore une fois puisque je n’arrive pas à me décider sur une idée de cette simplicité-là.

Quand je lève les yeux, me décidant à retourner en classe...

« ... ah. »

« ... Ah. »


Haruaki sort de derrière un pilier, ce qui fait que je hausse la voix instinctivement.

« … Haruaki. »

A-t-il entendu notre conversation ? Non, son visage semble trop sérieux. Après tout, on ne parlait que d’une ‘histoire fictive’.

Il commence à invoquer sans raison une excuse. « Franchement, puisque je suis ton ami, je deviens jaloux quand je te vois t’amuser avec les autres et que tu me laisses de côté, alors je pense qu’il est complètement normal pour moi de t’espionner. »


Malgré un ton amusé, durant tout ce temps son expression reste sérieuse.

« Alors, Hoshii... »

Haruaki se gratte les cheveux et demande.


« ... tu veux essayer de me tuer ? »


Ma respiration s’arrête.

Je ne sais pas qu’est-ce qu’il lui a fait dire des mots aussi stupéfiants.

Pendant un moment, Haruaki observe mon expression perplexe. Je n’arrive même pas à cligner des yeux. Soudainement, il me sourit complaisamment, et, ne pouvant apparemment pas se retenir d’avantage, éclate de rire.

« Ah, ne me dis pas que ! C’est cruel de ta part Haruaki ! Ne me taquine pas comme ça ! »

« Ahaha ! Non, non, je n’aurais jamais pensé que tu me prendrais au sérieux… !! C’était génial ! Hoshii, tu es juste trop marrant ! Bien évidemment, je rigole. »

C’est vrai aussi. Personne ne pourrait croire qu’une histoire de ce genre a vraiment lieu.

« C’est vrai… une blague… évidemment c’est juste une blague. »

« Évidemment c’est une blague... de me laisser faire tuer. »

Quelque chose est étrange dans ce qu’il vient de dire.

« Haruaki ? »

« Alors comment puis-je t’aider ? »

Aider ? De quoi est-il en train de parler ?

« Bah, puisque mes souvenirs s’effaceront de toute façon dans la prochaine itération, je pense que ce que je peux faire maintenant est limité. »

Aah, je vois...

Haruaki croit à la « Classe Rejetée ».

Il croit en une histoire à laquelle personne ne croirait ou penserait qu’elle est inventée.

« … Haruaki. »

« Qu’est-ce qu’il y a, Hoshii ? »

« Err… tu sais, c’était juste une invention de ma part. »

Haruaki rit et dit :

« C’est un mensonge, non ? »

« Qu... »

Je n’arrive même pas à lui demander comment a-t-il fait pour le savoir.

Je veux dire que, même moi je n’arriverais pas à croire à une histoire pareille si quelqu’un me demandait d’y croire.

« Wahaha ! Es-tu impressionné par la profondeur de mon amitié pour toi ? Je te croirais sans même hésiter ! »

« Ouais. »

Haruaki semble surpris quand j'acquiesce.

« … Ne dis pas des choses comme ça ! Tu vas me faire rougir ! »

« Au cas où tu n’aurais pas remarqué, Daiya aussi croit en cette histoire, que cela se passe vraiment. »

« Eh ? … Non, je ne pense pas. Je veux dire, on parle de Daiya le Réaliste, tu t’en souviens ? »

Cependant, maintenant qu’Haruaki en parle, Daiya agissait bizarrement. Après tout, il a choisit un endroit spécial pour que l’on puisse parler et il a aussi sacrifié sa pause. S’il pensait que ce n’était qu’un scénario de roman, il m’aurait envoyé balader en ajoutant un commentaire du genre « C’est ennuyeux. Ne l’écris pas. »


« OK, je pense qu’il n’y croit pas à 100%, mais crois-moi, il sait que la vérité n’est pas si loin que ça ! »

Quand j’y pense, les critiques de Daiya étaient un peu bizarres si elles étaient censées être des critiques par rapport à un roman. Il a clairement utilisé des réponses que le protagoniste voudrait connaître.

« J’ai une preuve assez tangible. Aya qui représente clairement l’élève transféré vient juste d’arriver aujourd’hui, donc ce n’est pas possible qu’en si peu de temps, une heure environ, tu aies réussi a élaboré une telle histoire ! »

« Ah... »

C’est pas faux.

« Je pense que tu dis la vérité. »

« … Pourquoi ? »

« C’est trop complexe pour que cela puisse être une de tes inventions. Ce n’est pas possible que t’aies une imagination si débordante, Hoshii. »

« T’es méchant… »

« Et puis même si tu pouvais inventer quelque chose comme cela en si peu de temps, je te croirais quand même. »

« … Pourquoi ? »

« Parce qu’on est ami, non ? »

Oula, pourquoi dit-il des choses comme ça…

Je veux dire, comment devrais-je… m’empêcher de rougir et de réagir s’il me dit des choses comme ça ?

Haruaki fronce les sourcils et met dans sa bouche une frite.

« Je vois. Alors Aya… non, Aya Otonashi m’a peut être tué… »

On a fini par aller au McDonald, c’était une proposition d’Haruaki. Deux étudiants en uniforme scolaire qui ont quitté l’école, car ils simulaient une maladie, s’amusaient au McDonald en plein jour. Je ne peux m’empêcher de remarquer les regards accusateurs des personnes nous entourant, qui me donnent l’envie de m’enfuir.

« Je me demande si Otonashi ferait attention au regard des autres si elle était au McDo dans son uniforme scolaire pendant les heures de cours. »

« Je pense que dans son cas, elle s’en ficherait. »

Haruaki sait maintenant qu’il a peut-être été tué par la fille dont il est tombé amoureux, alors il dit son nom avec une pointe d’hostilité.

« Autrement dit, elle s’est adaptée à cette situation sur une période de plus de 2000 itérations. »

Otonashi s’est familiarisée avec tout cela après chaque itération. Elle ne sera sûrement pas affectée par des choses aussi futiles que des regards accusateurs dans la Classe Rejetée.

Otonashi s’est adaptée a une situation anormale. Peut-on vraiment dire que sa personnalité est encore normale, cette Otonashi qui essaye de me tuer ?

« Cela était-il supposé être une tentative d’évasion ? »


Mon cœur arrête de battre.

Soudainement entendre la voix de la personne à laquelle je pensais… Je ne peux pas me tourner pour faire face à la personne derrière moi. Je suis cloué sur place.

Comment nous a-t-elle retrouvés ? Je n’en ai même pas parlé à Daiya.

Otonashi fait le tour et s’arrête en face de moi. Je suis incapable de relever ma tête.

« Laisse-moi te dire un truc, Hoshino, » dit-elle avec un sourire aux lèvres. « C’est mon 2.602e 2 mars. J’ai passé tout ce temps avec des personnes qui ne gardent aucun souvenir et qui ne sont même pas informées de ces boucles temporelles. »

Elle pose avec douceur sa main sur la table. Cette action seule me rend beaucoup plus tendu.

« Normalement, les gens changent, ainsi que leurs croyances. Par conséquent, ce n’est pas facile de pouvoir prédire leurs actions. Cependant, c’est d’une facilité déconcertante de prédire les vôtres parce que vous êtes coincés dans une impasse et que vous ne pouvez pas changer. C’est encore plus facile puisque l’on revit le même jour, Le 2 mars. Je peux même prédire les patterns de vos conversations. Hoshino, je peux facilement prédire les actions qu’un lycéen passif comme toi peut faire. »

Elle vient de me donner un avant-goût de la « différence d’information » dont parlait Daiya. Je pensais que cela ne concernerait que les informations impliquant la Classe Rejetée ou la boîte. Mais il n’y avait pas que ça. L’information la plus cruciale est celle concernant « Kazuki Hoshino » — moi-même. Et l’information que je dois obtenir est reliée à ‘Aya Otonashi’. C’est ce que voulait dire Daiya. C’est pour cela qu’il a dit que le fossé d’information qui nous sépare s’amoindrirait après plus de répétitions.

« Tu as compris ? Tu ne peux pas m’échapper, Hoshino. Tu es dans mon emprise. Je pourrais facilement te détruire. Mais si je le fais, je détruirai l’objet important que tu possèdes. C’est la seule raison pour laquelle tu es vivant. Compris ? Alors tu ferais mieux de ne pas m’énerver. »

Otonashi saisit ma main.

« Ne dis rien et suis-moi. Après, obéis-moi gentiment. »

Elle ne tient pas ma main très fort. Si j’essaye, je devrais être capable de me libérer. Mais… puis je faire ça ? … Je ne peux pas. Je suis déjà sous son contrôle. Je suis conscient que je suis misérable. Mais je ne peux pas… la défier. Je ne sais pas comment je le pourrais.

Et malgré ça — malgré le fait que je ne puisse la défier — ma main est libérée de l’emprise d’Otonashi.

« Qu’est ce que tu viens de faire ? », dit Otonashi. Je n’ai pas pu me libérer seul. Alors ces mots ne me sont pas dirigés.

« Tu me demandes, ce que je viens de faire ? … Ha ! »

Ses mots sont adressés à Haruaki, qui a séparé nos mains.

« Je ne te laisserais pas Hoshii ! Tu n’arrives pas à comprendre ça ? Tu es bête ? »

Les mots d’Haruaki sont enfantins, mais son visage reste sérieux. C’est un bluff total. Il ne traite personne comme cela normalement...

Évidemment, Otonashi ne se laisse pas avoir par cette provocation.

« Ce n’est pas ce que je te demande. Haruaki, on dirait que c’est toi qui n’utilises pas ton cerveau. Tes actions sont vaines. Futiles. On dirait que tu as décidé de sauver Hoshino, mais c’est tout simplement un rêve momentané, fragile, qui se termine bientôt. La prochaine fois, tu n’auras pas cette détermination et tu reviendras me confesser ton amour au lieu de t’opposer à moi. »

Haruaki semble décimé par ces mots. Il sait qu’elle a raison. Si ce monde se réinitialise, Haruaki aura oublié notre conversation durant cette itération. Et peu importe à quel point il est hostile envers elle à ce moment, il tombera amoureux d’elle encore une fois, et il se confessera de nouveau. Haruaki est et sera irrémédiablement dans cette impasse.

Mais malgré le fait qu’il soit confronté à cette vérité amère, Haruaki serre son poing.

« Non, c’est toi qui n’utilises pas ton cerveau, Otonashi ! Je vais peut-être revenir à mon « Moi ignorant » à chaque fois ! Je pense que je ne pourrais pas garder mes souvenirs et je ne suis pas aussi intelligent que Daiya. Mais tu sais quoi ? J’ai une grande confiance en moi. »

« Je ne comprends pas. Qu’essayes-tu de dire ? »

« Dis, Otonashi. Je suis dans un point mort, une impasse, et ne changerais donc jamais, n’est-ce pas ? »

« Oui, c’est pour cela que tu es impuissant. »

« Ha ! C’est l’inverse, Otonashi ! Si je ne vais pas changer, alors je me porte garant du moi dans les itérations futures. Après tout, ils vont tous être comme moi. Je peux facilement prédire leur comportement ! Ils vont croire en Hoshii à chaque fois qu’il leur expliquera la situation, et ils l’aideront à chaque fois. Il n’existe pas un monde où j’abandonnerai mon ami, Hoshii. Écoute et rappelle-toi bien de ce que je vais dire Otonashi... »

Il pointe son doigt vers Otonashi.

« Si Kazuki Hoshino est ton ennemi, alors par la même occasion tu te confronteras à un immortel ! »

Pour être honnête, sa posture est tout sauf convaincante. Il est sous pression, il bluffe et ses mains tremblent. Il est clairement anxieux. Des mots aussi cool ne lui vont pas du tout, ce n’est même pas drôle... en particulier parce qu’il fait souvent le clown à l’école.

Mais ses mots m’ont vraiment fait plaisir.

Je veux dire, il n’y pas la moindre trace de doute ou d’hésitation dans sa voix. Il n’y a pas une once de son ton dramatique qu’il utilise fréquemment. Haruaki parle calmement.

« ... »

Évidemment, Otonashi n’est pas troublée par la posture instable d’Haruaki. Mais elle ne répond pas immédiatement. Elle ferme la bouche pendant quelques secondes, mécontente.

« … Tu me fais passer pour la méchante de l’histoire. N’es-tu pas au courant du fait qu’Hoshino est la personne qui t’a amené dans cette Classe Rejetée ? »

Les mots d’Otonashi sont précis et blessants. Haruaki est blessé par chacun d’eux, malgré ça...

« Je ne douterai pas de mon allié à cause de ça ! »

Haruaki ne change pas son opinion. Il refuse de détourner son regard d’Otonashi même s’il est terrifié.

Ce n’est pas bien. Je veux dire, l’adversaire est Aya Otonashi ! Ce n’est pas elle qui souffrira quand Haruaki la déclare comme ennemie éternelle. Haruaki sera la personne à en souffrir. La fille dont il tombera amoureux indéfiniment le maltraitera sans raison valable. À partir de maintenant, Haruaki va souffrir dans toutes les itérations.

En contraste, elle ne ressentira sûrement aucun stress dû à l’opposition d’Haruaki.

Cependant :

« Cela ne m'intéresse plus. »

Otonashi est celle qui détourne le regard en premier et se tourne.

« Toutes tes actions seront insignifiantes dès que la prochaine itération commencera. »

Elle dit ses mots et partit.

Si quelqu’un d’autre qu’Otonashi avait dit quelque chose comme cela, ça aurait semblé être une sorte d’excuse. Mais venant d’elle, cela n’y ressemble pas. En premier lieu, comment Otonashi pourrait perdre contre lui si elle se fiche de lui ?

Par conséquent, elle vocalisa juste ses pensées. Elle arriva à la conclusion qu’il serait plus pratique pour elle de s’en prendre à moi dans une situation plus avantageuse la prochaine fois.

Otonashi ne ressent rien pour nous. Évidemment, elle n’a pas peur de nous, mais elle n’est pas énervée contre nous, et elle ne nous méprise pas non plus.

Alors je me demande... pourquoi ?

Non, ce n’est que mon imagination. Je dois me tromper. Un malentendu. Mais malgré ça, vraiment, pour un instant...

N’avait-elle pas l’air... triste ?

« Dis… Hoshii. »

Haruaki observe encore la porte automatique par laquelle Otonashi vient de sortir.

« Tu penses que je vais me faire tuer ? »

Pas possible… est ce que j’ai répondu. Mais je me rends compte que ce qui est arrivé la dernière fois peut très bien se produire encore une fois, alors je reste silencieux.

Sans surprise, il pleuvait le 3 Mars de la 2.602e itération . Je suis allé à l’école un peu plus tôt que la dernière fois, pour éviter l’endroit où l’accident se produit, malgré tout j’ai décidé de prendre un détour. J’ai fait cela comme contre-mesure à l’attaque d’Otonashi… ou pour dire vrai, je ne voulais pas revoir cette scène.

Daiya est déjà présent quand j’entre en classe. Il se rapproche quand il me voit.

« Qu’est-ce qui ne va pas Daiya ? »

Pour une raison que j’ignore, il ne répond pas immédiatement. Il regarde profondément dans mes yeux. Il est toujours aussi fort pour cacher ses sentiments, mais je peux quand même sentir qu’il y a quelque chose de bizarre qui se passe.

« … à propos du roman dont on a parlé hier. »

Il se réfère au ‘roman’, mais il parle en fait de ma ‘situation actuelle’.

« Il y a quelque chose qui me perturbe. Pourquoi l’étudiant transféré ne perd pas sa mémoire comme le protagoniste ? »

Je ne peux pas répondre à sa question, parce que je ne comprends pas pourquoi il en parle en premier lieu.

« Même le protagoniste — le créateur de la Classe Rejetée — perd sa mémoire. Alors même si on assume que l’élève transféré possède une sorte de pouvoir spécial, cela ne serait-il pas trop pratique pour elle de retenir automatiquement ses souvenirs des récurrences ? Je pense que cela serait mieux si le protagoniste et l’élève transféré sont tous deux capables de retenir leurs souvenirs en utilisant la même méthode. »

« … Tu as peut-être raison. »

Je suis d’accord, sans penser au sens profond de ce qu’il vient de dire. Peut-être que je suis incapable de comprendre parce qu’il en parle encore comme un ‘roman’.

« Le protagoniste a été capable de retenir ses souvenirs parce qu’il a vu un cadavre, c’est ça ? »

« … Je pense bien.»

« Le cadavre résulte d’un accident causé par un camion, n’est-ce pas ? Ce n’est donc pas possible que l’élève transféré, qui a vécu le même jour 2.601 fois, ne soit pas informé de ce camion, non ? S’il était impliqué, alors c’est sans aucun doute intentionnel. C’est pour ça que tu as que ‘l’ami du protagoniste’ ‘s’est fait tuer’. »

Je hoche la tête.

« Mais quelque chose me dérange dans ce scénario. »

« Quoi ? C’est pas ça ? »

« Non, pas du tout. C’est certainement un moyen efficace de s’en prendre au protagoniste… mais seulement si l’on assume qu’il retienne ses souvenirs. Cela ne sert à rien si le protagoniste oublie l’accident juste après. »

« Je ne comprends pas ce que tu veux dire … »

« Le but de l’élève transféré est de voler la boîte du protagoniste, non ? »

« Oui. »

« Essaye de penser de la perspective de l’élève transféré. Il vient juste de trouver la personne qu’il cherche — le protagoniste. Bien que l’élève transféré ait pu se taire, elle lui a tout expliqué sur la Classe Rejetée. Un adversaire ignorant contre un adversaire qui a été attaqué et qui est par conséquent sur ses gardes... il est plus facile de voler la boîte duquel des deux ? Évidemment de l’adversaire qui ne sait rien. Alors pourquoi penses-tu que l’élève transféré a expliqué la situation au protagoniste ? »

« Err… Parce que l’élève transféré pensait que le protagoniste oublierait ? »

« Oui. Elle a conclu que cela n’importerait pas. Qu’elle lui dise était probablement un moyen pour elle de se divertir; ou de la négligence. »

« Mais l’accident ne pouvait être qu’intentionnel, non ? Alors c’était sûrement une attaque contre moi… »

« Je pense que c’était intentionnel. Mais essaye de penser comme ça : l’élève transféré ne pensait pas que le protagoniste allait voir le corps ? »

Autrement dit, le but n’était pas de m’attaquer ?

Je médite sur ses mots encore une fois.

« Ah. »

« Ah... »

Je regarde rapidement autour de moi. L’élève transféré — Aya Otonashi — n’est pas là. Elle doit sûrement être sur le lieu de l’accident.

« C’est pas possible… c’est complètement aberrant. »

« Évidemment. Ce n’est pas possible qu’une personne qui s’est adaptée a 2.602 répétitions puisse rester complètement saine d’esprit. »

Aya Otonashi a tué quelqu’un.

Elle a fait ça non pas pour m’attaquer, mais afin de retenir ses propres souvenirs.

Je me rappelle. Je ne voulais absolument pas, mais je me rappelle. Cet accident n’était pas arrivé pour la première fois dans la 2.601e itération. Elle peut-être pu le causer durant chacune des 2.600 itérations.

Alors va-t-elle continuer de tuer des gens pour se « transférer » ?

Serais-je forcé à observer silencieusement ses meurtres ?

Haruaki sera-t-il tué cette fois ?

« Haruaki ! »

« Hmm ? Qu’est-ce qui ne va pas Hoshii ? »

Haruaki vient d’entrer en classe et se tient juste à côté de la porte.

Qu’est ce que ça veut dire ? Haruaki n’est pas la cible ? … Il n’y a aucune raison pour qu’il soit le cadavre cette fois, y en a-t-il une de raison ?

« Bon, assez avec ton roman Kazu… viens-en aux faits. » Daiya continue tout en ignorant Haruaki.

« On dirait qu’il y a eu un accident il y a une dizaine de minutes. »

Daiya prend une longue inspiration et dit, « Aya Otonashi s’est fait écraser par un camion. »

Quoi ?

Aah, je vois.

Même si elle est elle-même la cible, elle s’en fout.


4609e fois[edit]


« Haruaki s'est fait écraser par un camion. »


5232e fois[edit]


« Kasumi Mogi s'est fait écraser par un camion. »


27753e fois[edit]


Notre avons football pendant l’EPS.

Comme je saigne du nez, je me repose sur les genoux de Mogi-san.

Je commence soudainement à me préoccuper de ses sentiments. Est-ce qu’en me laissant me reposer sur ses genoux, elle essaye, ne serait-ce qu’un peu, d’attirer mon attention ?

Je n’en ai pas la moindre idée… Quand je jette des coups d’œil dans sa direction de temps en temps, elle reste toujours aussi inexpressive.

« … Mogi-san. »

« Qu’y a-t-il ? »

« À quoi penses-tu là maintenant ? »

« Eh ? »

Mogi-san penche sa tête sur le côté, mais elle ne semble pas avoir de réponse. Elle n’a qu’un regard perplexe en signe de réaction.

Cela me fait commencer à penser… s’il est si dur de reconnaître les sentiments de sa partenaire, est-ce que l’amour peut vraiment progresser ?

Pourquoi suis-je tombé amoureux d’une fille aussi compliquée ?

Vraiment… quand est-ce que je suis tombé amoureux d’elle pour la première fois ?

J’essaye de me souvenir.

« … Hein ? »

« … Un problème ? » me demande Mogi-san quand je fais un bruit soudain.

« N-Non… rien ! »

Mon visage ne doit sûrement pas dire « rien ». Mogi-san est consciente de cela. Mais comme elle n’est pas assez sociable pour me questionner à ce sujet, elle reste silencieuse et se retient de dire quoi que ce soit.

Je me lève sans prévenir Mogi-san.

« Ah, euh… on dirait que mon saignement de nez s’est arrêté. »

« … Hmm. »

Notre conversation s’achève sur ces simples mots.

Pourquoi ai-je abandonné volontairement une situation aussi merveilleuse ? Je n’aurais peut-être jamais une telle autre chance.

Mais… c’est impossible.

Parce qu’aussi durement que j’essaye… je ne peux pas m’en souvenir.

Je ne peux pas m’en souvenir. Je ne peux pas m’en souvenir. Je ne peux pas m’en souvenir ! … Je ne peux pas me souvenir de quand je suis tombé amoureux d’elle !

Pourquoi suis-je tombé amoureux ? Quelle en était la cause ? Ou ai-je simplement été attiré vers elle sans m’en rendre compte, même sans le moindre événement particulier ?

Je devrais le savoir, comment j’aurais pu l’oublier, mais… je ne peux pas m’en souvenir, quoi que j’essaye de faire.

Ce n’était pas un coup de foudre, et nous n’avons presque rien en commun hormis le fait d’être dans la même classe.

Et pourtant, pourquoi est-ce arrivé d’un coup ? Je ne peux pas être subitement tombé amoureux comme ça, n’est-ce…

« … pas… »

Bien que ce soit dur à croire, c’est la seule chose à laquelle je peux penser. Je suis subitement tombé amoureux.

« Qu’y a-t-il ? Tu vas bien ? … Doit-on aller à l’infirmerie ? »

Mogi-san fait des suggestions, aussi calme que jamais. Je suis en effet très heureux qu’elle s’inquiète pour moi. Simplement heureux. Ce sentiment n’est pas faux.

« … Je vais bien. J’étais juste en train de penser à quelque chose. »

Je continue de me demander si c’est une sorte d’erreur. Mais plus j’y pense, plus cela semble vrai.

Je n’étais pas attiré par Mogi-san.

Jusqu’à quand ? Oui…

Je n’étais pas attiré par elle jusqu’à hier.

« Ah, je vois. »

Je regarde Aya Otonashi, l’étudiante transférée qui se tient debout au milieu du terrain.

Quand s’est passé l’événement qui m’a attiré vers Mogi-san ? … ah, c’est facile. Ce n’était pas hier. Mais aujourd’hui je suis déjà amoureux. Alors quand était-ce ?

Ça ne pouvait donc être… que quelque part entre hier et aujourd’hui.

Pendant les plus de 20000 boucles qui se sont produites à cause de la Classe Rejetée.

Ah, je m’en souviens. Seulement un fragment, mais je m’en souviens un peu plus que le reste. Cela dit, ce n’est qu’un fragment, donc la plupart de mes souvenirs restent perdus.

J’avais perdu mon souvenir le plus important… comment je suis tombé amoureux de Mogi-san. Et je ne récupérerai définitivement pas ce souvenir. Je ne peux rien partager avec Mogi-san. Un amour à sens unique dont je ne peux rien faire, peu importe le temps qui passe ; seuls mes sentiments deviendront plus forts.

Non, ce pourrait être plus que ça. Cet amour pourrait disparaître dès que la Classe Rejetée s’achève. Je veux dire, cet amour ne devrait même pas exister en l’absence de la Classe Rejetée.

C’est étrange. C’est véritablement étrange. Cet amour n’est pas un mensonge.

Mais tout de même, est-ce que cet amour est un mensonge qui ne pourrait exister en l’absence de la boîte ?

Une soudaine rafale de vent souffle. Elle soulève la jupe de Mogi-san. Je me demande pourquoi j’ai la légère impression d’avoir déjà vu cette culotte bleu clair ?

Non, ça m’est déjà familier.

Je sais que Mogi-san porte une culotte bleu clair aujourd’hui.

Tout comme je sais qu’Aya Otonashi a sacrifié Kasumi Mogi plus que quiconque d’autre dans le but de conserver ses souvenirs.


Donc, je décide…

De défendre cette Classe Rejetée.



Cette fois, Aya Otonashi ne m’approche pas en premier.

En fait, la même chose s’est peut-être passée durant la précédente boucle. Mes souvenirs sont vagues, mais je pense que cette situation a persisté pendant un moment.

Aya Otonashi mange seule pendant la pause du midi, mâchant son sandwich avec une grande lassitude.

Cette fois, c’est moi qui l’approche.

Juste en faisant cela, mon corps se raidit et mon rythme cardiaque s’accélère. Le fait qu’Otononashi rejette les autres est devenu une immense barrière, suffisamment forte pour appliquer de la pression.

« … Otonashi-san. »

Je me prépare et l’appelle. Cependant, Otonashi-san ne se retourne même pas. C’est impossible qu’elle ne m’ait pas entendu d’aussi près, donc je continue quand même.

« J’ai quelque chose à te dire. »

« Moi pas. »

Elle me rejette sans sourciller.

« Otonashi-san. »

Aucune réaction. Elle continue de mâcher son sandwich avec peu d’enthousiasme.

Elle semble avoir prévu de m’ignorer quoi que je dise. Dans ce cas, je dois simplement faire en sorte qu’il soit impossible pour elle de m’ignorer.

La façon de faire surgit de mon esprit après y avoir un peu pensé.

« … Maria. »

Sa bouche s’arrêta de mâcher.

« J’ai quelque chose à te dire. »

Elle ne me regarde toujours pas. Elle ne dit rien non plus.

La salle de classe est complètement silencieuse. Nos camarades de classe nous regardent en retenant leur souffle.

Otonashi-san semble enfin perdre patience et soupire.

« Je n’aurais jamais pensé que tu utiliserais ce nom. On dirait que tu te souviens de beaucoup de choses cette fois. »

« Ouais, donc… »

« Pour autant, je n’ai rien à te dire. »

Elle recommence à mâchouiller son sandwich.

« Pourquoi ! »

Mes camarades reportent leur attention sur moi lorsque je commence soudainement à crier.

« Pourquoi !? Je ne suis pas celui contre qui tu as affaire !? Alors pourquoi tu n’essayes même pas de m’écouter !? »

« Pourquoi, tu me demandes ? » ricana-t-elle. « Tu ne le sais pas honnêtement ? Ha ! Regarde à quel point tu agis stupidement à nouveau. Tu ne penses jamais par toi-même. Pourquoi je devrais m’associer avec quelqu’un comme ça ? »

« … Je ne sais pas comment j’ai agi auparavant. »

« Auparavant ? C’est ridicule. Qu’est-ce qui est différent chez toi maintenant ? Tu es simplement le même ! »

« Comment tu peux en être sure ? Peut-être que je vais t’offrir mon aide. Dans ce cas… »

« Ça n’a fondamentalement aucune importance. »

Otonoshi-san crache ces mots sans même me laisser finir.

Je suis sur le point d’objecter instinctivement. Mais cette objection est effacée par la phrase suivante d’Otonashi-san.

« Parce que tu n’as pas déjà fait cette proposition que deux ou trois fois. »

« Eh ? »

Je suis si abasourdi que ma mâchoire se décroche presque. Avec un léger sourire, Otonashi-san recouvre son sandwich mangé à moitié et dit :

« Très bien. Je suis forcée de passer mon temps sur plein de choses inutiles de toute façon. Ce n’est pas juste la deuxième ou troisième fois que je te donne cette explication, mais je vais quand même te la redire. »

Otonashi-san, se lève et commence à s’en aller.

Je n’ai pas d’autre choix que de la suivre.



Comme toujours, elle me conduit à l’arrière du lycée. Et comme toujours, Otonashi-san s’appuie contre le mur.

« Je le dis tout de suite. Je ne vais pas discuter avec toi. Tu vas juste m’écouter comme un idiot. »

« … Je peux décider de ça tout seul. »

Je dis ça pour être un peu rebelle, mais Otonashi-san me poignarde du regard.

« Hoshino, tu sais à quelle itération nous sommes ? Non, pas du tout. C’est la 27753e itération. »

Ce nombre est bien trop scandaleux.

« … tu as compté spécifiquement à chaque fois ? »

« Ouais, puisqu’il n’y a aucun autre moyen de confirmer le nombre si je m’arrête de compter ne serait-ce qu’une fois. Si j’oublie de le faire, je me perdrai. Donc je continue toujours de compter. »

C’est certainement un peu rassurant de savoir combien de pas on a fait dans une direction inconnue.

« J’ai tout répété à de nombreuses reprises. J’ai déjà essayé de t’approcher par presque tous les moyens possibles. Je ne peux même pas imaginer quelque chose que je n’ai pas encore essayé. »

« C’est pour ça que tu penses que me parler est inutile ? »

« Ouais. »

« Tu n’essayes même pas de me persuader de te remettre la boîte ? »

« J’ai déjà abandonné cette idée depuis longtemps. »

« Pourquoi ? À un moment ou un autre dans ces récurrences, j’ai bien dû coopérer au moins une fois. »

« Oui, bien sûr. Il y a eu des itérations où tu m’as traitée avec hostilité, et il y a aussi eu des fois où tu as coopéré. Mais tu sais quoi ? Ça n’a pas d’importance. Quoi qu’il arrive, tu ne me remettras jamais la boîte. »

Je ne lui ai pas remis la boîte même quand je coopérais ? … En fait, c’est normal. Je ne serais pas là « maintenant » si Otonashi-san avait obtenu la boîte.

« Juste pour confirmer : tu es sure que je possède la boîte, hein ? »

« Ça a été affaire à un débat interne constant. Mais ma conclusion est toujours la même. Kazuki Hoshino est, sans aucun doute, le propriétaire. »

« Pourquoi crois-tu cela ? »

« Il n’y a pas autant de suspects que tu ne le penses. L’explication entière me prendrait trop de temps à expliquer, donc je vais faire court : c’est impossible pour les quelques suspects plausibles de me tromper pendant toutes ces 27753 fois. Par conséquent, tu es le seul propriétaire possible. En plus, il y a des circonstances incontestables qui sont non liées à la Classe Rejetée, pas vrai ? »

Elle avait raison… J’avais déjà rencontré précédemment le donneur de la boîte… « * ».

« Quoi qu’il en soit, tu n’as jamais sorti la boîte. Ou plutôt, tu ne peux pas. Je t’ai marqué comme le propriétaire il y a plus de 20000 itérations. »

« Donc tu as abandonné ? »

L’Otonashi-san qui n’a épargné aucun effort pour obtenir la boîte ?

« Je n’ai pas abandonné. Je ne peux juste pas obtenir la boîte. En supposant que tu cherches une pièce de 100 yens qui devrait être dans ton porte-monnaie, mais que tu ne peux pas trouver peu importe le nombre de fois que tu le retournes dans tous les sens. Chercher dans tous les coins du porte-monnaie est facile. Pourtant, tu ne peux pas trouver la pièce. Dans ce cas, tu dois supposer que la pièce n’est plus du tout là. De la même façon, après ces 27753 récurrences, j’en suis venue à la conclusion que "je ne peux pas obtenir la boîte de la part de Kazuki Hoshino". »

Otonashi-san me fait la tête un moment puis se retourne.

« Bon, l’attraction est terminée. Tu as encore quelque chose à dire ? »

« … Ouais ! C’est pour cela que je voulais te parler à la base. »

Je dois le dire.

Je l’ai décidé. J’ai décidé de défendre la Classe Rejetée.

Otonashi-san, qui est venue tuer Mogi-san d’innombrables fois, je vais faire…

« Je vais faire de toi, Otonashi-san, non, Aya Otonashi… »

« … un ennemi ? »

« … hein !? »

Elle a facilement prédit ma volonté audacieuse de l’opposer. Elle est toujours désintéressée et veut m’ignorer.

Quand elle voit que je reste sans voix et choqué du plus profond de mon cœur, Otonashi-san laisse échapper un soupir. Elle se tourne vers moi à contrecœur.

« Hoshino, tu ne comprends toujours pas ? Combien de temps crois-tu que j’ai passé avec toi, idiot ? C’est simplement un autre pattern que j’ai déjà répété suffisamment souvent pour en être lassée. Il n’y a aucune chance que je ne prédise pas cela, pas vrai ? »

« Q-Quoi… »

J’ai déjà essayé une chose aussi osée à de multiples reprises ?

Pourquoi ça a toujours été inefficace ?

« À ce propos, laisse-moi te dire une autre chose. Même si tes opinions ont façonné ta décision de t’opposer à moi, et que tu essayes de maintenir ces souvenirs à chaque itération : à la fin tu finis par abandonner ton opposition. J’en suis parfaitement sure. »

« Il-Il n’y a aucune… »

Cela voudrait dire que j’ai fini par accepter qu’elle tue Mogi-san ; que j’ai choisi d’effacer mes sentiments pour Mogi-san.

« Tu ne me crois pas ? Tu veux que je te dise pour quelle raison t’ai écouté de nombreuses fois auparavant ? »

Je me mords les lèvres.

Otonashi-san considère que la conversation est terminée et me tourne le dos.

« Tes valeurs ont pu survivre à plus de 20000 répétitions sans problème. Je t’accorde du crédit pour ça. »

Je lève spontanément ma tête.

Vient-elle juste de me "reconnaître" ? Cette Otonashi-san ?

« Attends un moment. »

Il y a une dernière chose que je dois demander, quoi qu’il arrive.

Otonashi-san tourne sa tête vers moi.

« Tu as arrêté d’essayer e récupérer la boîte de moi, pas vrai ? »

« Ouais. Ce n’est pas ce que j’ai dit ? »

« Alors… que comptes-tu faire à partir de maintenant ? »

Il n’y a aucun changement dans l’expression d’Otonashi-san. Elle continue de me fixer des yeux sans détourner le regard.

Son regard extrêmement franc me force à baisser les yeux en réponse.

« Ah… »

À cet instant… Otonashi-san s’en va sans rien dire de plus.

Sans avoir donné de réponse à ma question.



Otonashi-san n’est pas retournée en classe après… peut-être est-elle retournée chez elle.

Les mathématiques sont notre cinquième cours. Je ne peux pas comprendre les formules tout de suite, alors que j’ai déjà dû les voir une myriade de fois. À la place, je regarde Mogi-san pendant tout ce temps.

Vais-je vraiment abandonner Mogi-san ? Vais-je vraiment me séparer de mes sentiments pour elle de ma propre volonté ?

Non. C’est impossible. Ce que mon ancien moi pensait n’a pas d’importance.

Le moi actuel n’abandonnera pas Mogi-san. C’est tout ce qui compte.

Le cinquième cours se termine.

Je me dirige immédiatement vers Mogi-san. Elle me remarque et me regarde en retour avec ses yeux en amande. Mon corps se raidit comme de la pierre. Mon cœur perd son rythme habituel.

Juste en la regardant. Cela prouve que je suis sur le point de lui dire quelque chose de vraiment exceptionnel.

C’est une action que je ne prendrais jamais dans mon habituelle vie de tous les jours.

Mais je n’y peux rien. Je ne peux pas penser à un autre moyen de conserver mes souvenirs.

Je ne peux pas penser à une méthode autre que déclarer mon amour à Mogi-san.

« … Mogi-san. »

J’imagine que j’ai un drôle de visage en ce moment même. Mogi-san me regarde avec curiosité et penche sa tête sur le côté.

« Euh, il y a quelque chose que j’aimerais… »


"Attends demain s’il te plaît."


« Ah. »

Une image traverse mon esprit. Une voix commence arbitrairement à se rejouer dans ma tête. Je ressens une sensation claire et lumineuse qui me fait mal, comme si du verre avait été enfoncé dans mes yeux, mes oreilles et mon cerveau.

Ma poitrine bat agressivement comme si elle était frappée par un marteau.

N-Non…

Je ne veux pas m’en souvenir. Même si je ne veux pas m’en rappeler. Même si j’ai voulu effacer ce souvenir à chaque fois, il ne disparaît pas. Même si je peux oublier tous les autres souvenirs, peu importe à quel point ils seraient signifiants, c’est le seul que je ne peux pas oublier.

Ouais, c’est vrai…

Il y a longtemps… je me suis déjà déclaré à Mogi-san.

« … qu’est-ce qui ne va pas ? »

« … désolé, c’est rien. »

Je mets de la distance entre nous. Mogi-san hausse ses sourcils avec méfiance, mais ne me questionne pas plus.

Je retourne à ma place et laisse le haut de mon corps tomber sur le bureau.

« … Je vois. »

Maintenant que j’y pense, c’est évident. Après tout, j’ai déjà répété cette journée plus de 20000 fois.

Je me déclare à Mogi-san. Mais j’oublie. Donc je me déclare encore. Dans le but de résister à la Classe Rejetée, j’ai fait cette confession que je ne voulais même pas faire, encore et encore, encore et encore, et je l’ai oublié tout autant de fois.

Et à chaque fois, je reçois la réponse que je veux à tout prix éviter d’entendre.

C’est toujours la même. C’est toujours la même réponse. Bien sûr, il n’y a aucune chance qu’elle change. Mogi-san ne peut conserver ses souvenirs et donc sa réponse ne peut pas non plus changer.

Cette réponse…

"Attends jusqu’à demain".

C’est affreux. Ce demain dont tu parles ne viendra jamais.

J’ai pris une résolution incomparable, trouvé le courage dont je suis normalement incapable, tendu mes nerfs jusqu’à leur limite… mais à la fin, mes mots sincères disparaissent dans l’oubli. Je suis alors forcé d’interagir avec Mogi-san, qui a oublié mes confessions un nombre incalculable de fois.

… Je vois. Elles ne sont pas simplement invalides.

Il n’y a jamais rien eu pour commencer.

Le monde était vide depuis le tout début. Il n’y a aucune valeur à trouver dans un monde où tout ce qu’il se passe devient invalide. Il n’y a qu’une petite valeur à trouver dans les choses merveilleuses, dans les choses affreuses, dans les choses précieuses, dans les choses minables, dans les choses chéries, dans les choses haïssables.

Pour cette raison, rien n’existe. Il n’y a que du vide.

L’insaisissable vide appelé la Classe Rejetée.

Je me sens nauséeux. Je suis forcé de respirer dans un environnement épouvantable. Alors que je ressens le besoin de vider mes poumons de leur air, je ne peux pas, car je ne serais plus capable de vivre. Je ne peux pas vivre sans respirer. Mais si je continue de respirer ce vide, mon corps deviendra vide lui aussi. Je deviendrai aussi creux qu’une éponge.

Ou… était-il déjà trop tard pour moi, et étais-je déjà devenu vide ?

« Qu’y a-t-il, Kazu-kun ? Tu te sens mal ? »

Quand j’entends une voix familière, je lève ma tête lentement tout en restant avachi sur mon bureau. Kokone se trouve devant moi, les yeux froncés.

« Tu saignais du nez pendant l’EPS, hein ? C’est peut-être pour ça ? Si tu te sens pas bien, tu veux qu’on aille à l’infirmerie ? »

« Pas besoin de s’inquiéter pour lui, Kiri. Je parie que l’origine de sa maladie est les genoux sur lesquels il a dormi plutôt que son saignement de nez, » dit Daiya. Je ne l’ai pas remarqué, mais j’imagine qu’il se trouvait à côté.

« Genoux… ? … ah ! Je vois ! Quoi, c’est juste un chagrin d’amour… »

Puis elle fait un large sourire et me donne une tape sur les épaules en guise d’encouragement.

« T-oi ? Toi là ! C’est pas un peu trop osé pour toi ? Commence pas à te préoccuper de choses matures comme l’amour. »

« Conquis par une séduction aussi quelconque… ridicule. »

« N-Non ! J’ai toujours aim… »

Je m’arrête à mi-chemin. C’était un lapsus à de multiples niveaux. D’une part, j’admettais mes sentiments envers Mogi-san de cette façon, mais en plus de cela…

« Ha ? Tu n’avais pas de sentiments particuliers pour Mogi avant hier, non ? »

… ce ne serait pas vrai.

En réalité, je suis tombé amoureux d’elle aujourd’hui. Je suis subitement tombé amoureux, au moins du point de vue de Daiya et de tout le monde. Et c’est pourquoi personne n’était au courant de mon affection pour elle, même si mon attitude le rendait clairement visible.

« Hé, hé, Daiya, on dirait que ce gars vient d’admettre son amour à sens unique pour Kasumi. Uhihi. »

Kokone fait un grand sourire et donne un coup de coude à Daiya.

« Ouais. Dans le meilleur des scénarios, ça pourrait me fournir un divertissement de plus. »

« Uhehe… l’amour des autres est amusant après tout ! Hmm, hmm. Ne t’inquiète pas. Onee-chan te soutient ! Je vais te donner des conseils et t’aider ! Si tu te fais jeter, je viendrai même te consoler ! Mais si jamais tu réussis, je te tuerai, parce que ça m’énervera. »

« T’inquiète pas. Quand ils commenceront à sortir ensemble, je viendrai la lui voler. »

« Uwaa, ça semble amusant ! L’infortune des autres et mettre en pagaye les triangles amoureux ! Génial ! »

Ces deux-là sont vraiment cruels à ignorer que je ne suis pas dans mon assiette.

Bon, heureusement, XX n’est pas là. Si c’était le cas, il aurait saisi cette opportunité et mené la conversation dans un sens qui finirait dans un…

« Hein ? »

« Hmm ? Qu’y a-t-il, Kazu-kun ? »

« Non, c’est juste… je me demandais où il est. Il sèche ? »

« De qui tu parles ? » me demande Daiya avec un regard suspect.

C’est bizarre. Je pensais que Daiya saurait de qui je parlais au moment où j’ai dit ça.

« Tu ne sais pas ? Il s’agit bien sûr de… »

… Euh, qui ?

Hein ? Attends une seconde ! Je suis… Je suis sur le point de dire le nom de cette personne. Alors pourquoi j’ai non seulement oublié son nom, mais aussi son visage ?

« … Kazu-kun ? Qu’est-ce qui ne va pas ? De qui tu parles ? »

Je me sens mal, comme si j’avais avalé une chose à moitié liquide et visqueuse qui me donnait envie de m’arracher le gosier. Mais je suis chanceux d’être encore capable de sentir ce dégoût. Si je l’avale complètement et que je l’excrète, alors XX disparaîtra.

« H-Hé… Kazu-kun ! »

Pas de problème. Je peux m’en souvenir. Je peux m’en souvenir grâce à ce sentiment de dégoût.

« Haruaki. »

Le nom de mon cher ami. Le compagnon qui a juré d’être à jamais mon allié.

… Je ne m’accroche qu’à des brindilles, mais je continue d’espérer. Espérer que je suis le seul à avoir oublié Haruaki pour une raison que j’ignore. Mais je suis vraiment un idiot. Cet espoir…

« Dis, Kazu. Qui est cet "Haruaki" ? »

… ne pouvait en aucun cas être satisfait.

Je serre les dents en ressentant cette sensation vexante. Daiya et Kokone froncent des sourcils devant mon étrange comportement.

Ces deux-là l’ont oublié… alors qu’en tant qu’amis d’enfance, ils le connaissent depuis bien plus longtemps que moi.

Le fait que « Haruaki » n’existe pas ici me tombe dessus sans merci, et…

« Je rentre chez moi. »

… cause une blessure fatale.

Je me lève, attrape mon sac, leur tourne le dos et quitte la salle de classe.

Je ne peux plus endurer d’être là plus longtemps.

Pourquoi Haruaki n’est pas là ?

Je sais pourquoi. Je sais qu’Haruaki a été « rejeté ».

Par qui ? C’est évident. Il a définitivement été « rejeté » par le protagoniste qui a créé la Classe Rejetée.

Je n’avais rien compris. Je pensais que la Classe Rejetée allait préserver le flot de la vie quotidienne à jamais. Quelle absurdité. Il n’y a aucune chance que les choses se passent de cette manière. La vie de tous les jours s’appelle ainsi parce qu’elle coule en continu. Si on stoppe le flot d’une rivière, alors la boue s’accumulera et la noircira. Aussi simplement que ça. Des sédiments s’étaient aussi rassemblés ici.

Aah, je vois. J’imagine que j’ai déjà remarqué ce phénomène à de nombreuses reprises. Peu importe le nombre de boucles que j’endure, je redécouvre toujours ce fait. Puis j’arrête de m’opposer à Aya Otonashi.

Aya Otonashi va détruire la Classe Rejetée.

Et en sachant ce que je sais désormais, pourquoi l’arrêterais-je ?

La cloche sonne. La plupart de mes camarades de classe ont dû retourner à leurs places à présent.

Donc avant de quitter la salle de classe, je me retourne.

Un siège vide. Un autre siège vide. Un autre siège vide. Et encore un là. Aah… je le comprends enfin, mais personne d’autre ne trouve le nombre de sièges vides bizarre.



J’aurais probablement pu le comprendre, mais je ne l’ai pas fait parce que je ne voulais pas l’admettre.

Aya Otonashi est venue à la conclusion qu’il était impossible de m’extraire la boîte.

Il devrait être suffisamment simple de mettre un terme à la Classe Rejetée une fois le coupable identifié. Elle a déjà traversé plus de 20000 itérations dans le but de récupérer la boîte.

Donc… que devrait-elle faire ?

N’est-ce pas évident ?


Mes membres tournoient lorsque je me fais percuter par le camion. C’est plutôt comique de voir mes propres jambes partir loin de moi.

« Alors ça s’arrête là… »

J’ai été « tué ». Je me suis laissé faire tuer.

« 27753 récurrences inutiles. Donc tout ce temps finit par être des efforts gâchés ? Je dois… je dois admettre que même moi je suis fatigué. »

Pour être précis, je ne suis pas encore mort. Mais gisant dans une mare de sang, je le sais : je vais mourir. Je ne vais pas être sauvé. Et j’ai en effet bien été tué par elle.

« Beurk… ! J’ai passé tout cet immense temps et c’est ce que j’obtiens. Je n’ai jamais autant haï ma propre impuissance autant que maintenant… ! » murmure-t-elle avec un regret amer.

« … Passons à autre chose. Puisque je n’ai pas pu trouver la boîte ici, je n’ai qu’à trouver la prochaine. »

Les yeux d’Aya Otonashi ne me perçoivent plus du tout. Non, ces yeux ne m’ont sûrement pas perçu proprement depuis le début.

Du début à la fin, Aya Otonashi n’a fait que regarder la boîte à l’intérieur de moi.

Est-ce que ce jour sera aussi rendu « invalide » ? Non, il ne le sera pas. Si la boîte appelée Classe Rejetée se trouve dans mon corps, alors elle se fera pulvériser quand je mourrai. Et comme ma chair était réduite en bouillie par le camion, la boîte l’est déjà aussi.

Ce jour ne se répétera plus.

Aah, quelle ironie. Si c’était le seul moyen de mettre fin à la Classe Rejetée, alors la mort est la seule chose qui était prédestinée depuis le début. Eh bien, c’est naturellement vide. Ce monde l’était certainement… le monde après ma mort.

Mais avec cela, notre combat se termine.

C’était un combat à sens unique sans la moindre surprise, mais il prend fin ici.


Ouais… c’est ce dont tu es convaincue, pas vrai ? Otonashi-san ?


Je te plains. Je te plains vraiment, Otonashi-san !

J’imagine que c’est parce que tu continues de m’ignorer. Tu n’aurais pas commis une telle erreur autrement.

C’est pourquoi tu as gâché autant de temps.

Écoute, Otonashi-san. C’est suffisamment simple si tu y penses. Il n’y a aucune chance qu’une personne normale comme moi puisse être le protagoniste.

Je veux lui dire ça, mais je ne suis plus capable de le dire. Je ne peux même plus bouger ma bouche.

Ma conscience s’efface. Je meurs.

Ce qui… n'arrête rien.

Interlude[edit]


Je suis à l’intérieur d’une scène dont je peux seulement me rappeler quand je rêve.

J’ai accepté la boîte de la part de cette personne.

« Ne t’inquiète pas ! En général, les choses comme celles-ci ont un coût, une compensation, mais celle-ci n’en a pas. Tu ne perdras rien qui ne t’ait précieux, et ton âme ne te sera pas volée non plus. Tu sais, ce n’est pas dans la nature de la boîte de causer des choses si tragiques, mais dans la nature de l’être humain qui l’utilise. Si tu l’utilises correctement, ton vœu s’exaucera sans que tu ne coures le moindre risque. »

Si tu l’utilises correctement...

Est-ce vraiment si facile de l’utiliser correctement ? Je ne sais pas. Je ne sais pas, mais même si utiliser une boîte est dangereux, cela reste une opportunité rarissime. C’est comme gagner à la loterie. Il y a toujours la possibilité qu’avec l’argent que tu viens d’obtenir, tu puisses ruiner ta vie. Mais on ne s’en inquiéterait pas, n’est-ce pas ?

Alors qui pourrait refuser d’accepter cette boîte ?

« Qu’est-ce que cela veut dire ? »

Parce que voilà une personne qui choisit de refuser la boîte.

« Te retiens-tu à cause d’une raison que j’ignore ? Ne me crois-tu pas ? Ou... as-tu peur de moi ? »

Évidemment que tout ce qu’il vient de dire me gêne.

Mais la raison principale pour laquelle je rejette cette boîte est tout autre. Je n’en ai simplement pas besoin.

Vous voyez, mon vœu est que ma routine quotidienne continue. J’ai déjà atteint ce but sans recourir à la boîte.

Je suis comme un millionnaire, qui n’essaierait pas d’obtenir un millier de plus. Évidemment, je suis conscient de sa valeur. Malgré cela, je n’ai pas besoin d’accepter la boîte d’une personne si mystérieuse.

C’est vrai. J’ai rejeté la boîte.

Par conséquent...

Même si j’avais souhaité que ce monde récurrent existe pour que ma vie quotidienne continue, ce n’est pas possible que je sois le coupable.


27753rde fois (2)[edit]


*grincement* *grincement* *grincement* *grincement* ...

Quel est ce son ? Il provient de l’intérieur de mon corps, et il est léger au point que j’ai failli ne pas le remarquer... mais l’ignorer serait une grave erreur.

*grincement* *grincement* *grincement* *grincement* ...

Il y a une petite râpe qui est utilisée sur moi. Où ? Eh bien, le son vient d'à l'intérieur de moi, alors elle écorche tout ce qu’il y a à l’intérieur, évidemment.

*grincement* *grincement* *grincement* *grincement* *grincement* *grincement* ...

Je dois couvrir mes oreilles parce que le son semble incroyablement bruyant - bien qu’il ne le soit pas — mais en me bouchant les oreilles j’ai l’impression qu’il s’amplifie. Aah, bien sûr. Évidemment que j’entendrais le son qui provient de moi encore mieux si je bloque les sons extérieurs. Donc je ne peux même pas couvrir mes oreilles. Je ne serai jamais capable d’échapper de ce son : celui où je me fais rogner.

Et puis cela fait mal. Se faire rogner fait toujours mal. Je parie que c’est ce que l’on ressent quand notre cœur se transforme en fugu... une douleur piquante et continue. Seraient-ce des sentiments de culpabilité ? Ils sont plus têtus que je ne le pensais. J’étais sûre que cette culpabilité serait le premier sentiment que j’allais perdre.

*grincement* *grincement* *grincement* *grincement* *grincement* *grincement* ...

Je suis en train de me faire rogner.

Mon cœur.

Ma personne.

Aah, si ça continue, mes entrailles perdront leurs formes et s’effriteront en petits bouts comme des copeaux de bois. Non... c’est déjà... trop tard. Je me suis déjà fait réduire en petits fragments.

Durant ces 20,000 itérations, j’ai perdu mon sens d’Être. J’en suis consciente. Je ne pouvais endurer cet ennui et j’ai perdu mon cœur. Je ne peux même plus communiquer proprement avec les autres.

Ce monde me rejette.

Évidemment. Dès le tout début, ce n’était pas un endroit auquel j’appartenais. Je m’y suis introduite de force. Leur salle de classe me rejette constamment.

Je sais comment me soulager.

Mais je ne choisirais pas de le faire.

Car... mon vœu n’a pas encore été exaucé.

... Hein ? Mais je suis déjà éparpillée en petits bouts. Alors comment se fait-il que la seule chose que je retienne soit ce vœu ? Est-ce possible ? Mon vœu s’est fait rogner tout comme mon cœur. Pour preuve...

... Je n’arrive pas à m’en rappeler.

« ... Ahaha. »

Je ris sans faire exprès. C’est vrai, je ne m’en souviens plus. Quel était mon vœu déjà ? Allez, laisse-moi me rappeler ! Ahaha arrête de t’amuser avec moi ! Pourquoi ai-je enduré cette torture éternelle avec ces itérations ? Je ne peux que rire. Bien que je ne puisse que rire... aah ? Cela fait bien longtemps que j’ai déjà oublié comment véritablement rire, et donc je ris impassiblement sans une once d’émotion.

Alors... je pourrais m’arrêter de rire, il n’y aura pas de différence.

Une conclusion extrêmement simple. Pourquoi m’a-t-il fallu autant de temps pour la trouver ?

Je dois juste le tuer. Oui, je n’ai qu’à le tuer. Je n’ai qu’à tuer Kazuki Hoshino. Après tout, il est l’origine de cette agonie. Si je peux me soulager en faisant cela, alors je n’ai qu’à le tuer rapidement.

Mais d’une certaine façon, je sais.

Ces « chaines » qui étaient à une certaine époque mon « vœu » ne me libéreront jamais.


Utsuro no Hako vol1 pic2.jpg

27754e fois[edit]


Mon corps devint rapidement froid et vide. J’aurais dû être également devenu vide, mais j’ouvre les yeux normalement. Incapable de supporter le froid glacial qui aurait dû déjà s’être dissipé, je m’étreins dans le lit et tremble.

J’ai été tué.

Durant le 2 Mars d’une certaine boucle temporelle.

C’est vrai, même si je meurs, la Classe Rejetée reste inchangée. Après l’avoir réalisé, je me sens comme si je devenais réellement vide. La gelée ne semble pas prête à fondre de sitôt.

Je ne peux pas me lever pour rester là très longtemps, alors je pars tôt pour l’école sans manger de petit déjeuner convenable.

Je vois le ciel nuageux familier. Il va pleuvoir demain. Je me demande quand j’ai vu le soleil pour la dernière fois ?

Il n’y a personne dans la classe. En même temps, c’est logique vu que j’y suis une heure en avance.

Une question me vient soudainement à l’esprit. Pourquoi est-ce que je revisite ma classe aussi obstinément ? J’ai déjà été témoin de la récurrence de la Classe Rejetée un grand nombre de fois; j’en suis conscient, encore aujourd’hui. Alors, je ne peux pas simplement éviter d’aller à l’école pour résister à cette récurrence ?

Non... Je vais y aller ! Ouais, je vais encore y aller. Tant que je suis en bonne santé, je vais à l’école. C’est ma vie quotidienne. C’est certainement pas quelque chose que je changerais, pas même dans mes rêves. Un acte que je poursuivrai à n’importe quel prix ; maintenir ma vie quotidienne. Ma seule et unique conviction.

Ah, je vois. Ce doit être la raison pour laquelle je suis toujours ici. Je ne comprends pas du tout la logique sous-jacente, mais c’est simplement ce que je ressens.

Même si je me retrouve seul dans cette classe.

« ... »

Je me déplace vers le centre de la classe. Je monte sur le bureau de quelqu’un sans enlever mes chaussures. J’essaye de m’excuser silencieusement, mais quand je tente de me rappeler à qui appartient le bureau sur lequel je me tiens, je n’arrive pas à me souvenir du nom ou du visage de la personne. Malgré cela, je suis vraiment désolé.

Je regarde aux alentours. Ce n’est pas comme si je m’attendais à provoquer un changement en me tenant sur un bureau, mais il n’y a personne dans la classe mal éclairée.

Il n’y a personne dans la classe.

Il n’y a personne dans la classe.

« … Hum, j’ai un peu froid. »

Je m’étreins.

La porte de la classe s’ouvre avec un léger bruit. La personne arrive en me repérant directement sur son bureau et fronce les sourcils.

« … Qu’est-ce que tu fais là, Kazu ? »

Daiya m’envoie un regard pesant.

Après cette simple interaction de tous les jours, mon visage se relâche.

« … Aah, vraiment, je suis soulagé... » je murmure, et descends du bureau. Daiya continue de froncer les sourcils en me regardant. « Tu sais, Daiya, te voir m’apaise vraiment. »

« C’est... une chance. »

« Après tout, tu es sans aucun doute le vrai Daiya. »

« … Hé, Kazu. Pour la première fois depuis longtemps, je me sens effrayé par un être humain. »

« Mais tu sais, même si tu es le vrai Daiya, ce monde reste une fausse vie quotidienne. Je ne peux rien partager avec toi. Le prochain Daiya ne connaitra pas le moi actuel. C’est comme si j’étais le seul à l’extérieur de la télévision. C’est une amitié non partagée. Alors est-ce que je peux vraiment affirmer que tu es là ? »

C’est pourquoi il n’y a personne ici.

— personne ?

« Ah... »

Non, ce n’est pas correct.

Il y a une autre personne ici.

Il y a une autre personne qui peut partager des souvenirs avec moi. Il y a une personne qui ne peut pas s’enfuir tant que je m’assure de conserver mes souvenirs.

Aah, je vois. Pendant tout ce temps, seulement nous deux étions à l’intérieur de la Classe Rejetée. Nous avons été l’un à côté de l’autre tout le temps, incapables de nous échapper et même pas de prendre la peine d’essayer, confinés dans ce tout petit, minuscule espace de la dimension de notre classe. Mais je n’avais jamais eu l’occasion de m’en rendre compte parce qu’elle me traite comme un ennemi.

Je m’assois à ma propre place.

Sa place est celle juste à côté de la mienne.

… J’y crois pas. Juste en l’imaginant assise là, je me suis un peu calmé... bien que ce soit la personne qui m’ait tué.



Est-ce à cause de ça ?

À cause ? À cause de quoi ? Je ne comprends pas ce que ça veut dire. Je n’arrive pas à saisir mes propres sensations, mais la température de mon corps chute encore davantage. Rapidement. Non, pire. Mon corps était déjà froid jusqu’aux os, mais maintenant il gèle, me fait mal, atteint le zéro absolu et ensuite se raidit complètement.


« Je m’appelle Aya Otonashi. Enchantée de vous rencontrer. »


L’"Élève Transférée" se comporte presque comme une véritable élève transférée et sourit doucement, semblant un peu gênée.

« … qu’est-ce que ? »

Je ne peux pas comprendre ce que ça veut dire.

Non, pour être honnête, je comprends.

« Je suis juste autant affectée par la Classe Rejetée que tous les autres. Si j’abandonnais et arrêtais d’essayer de préserver mes souvenirs, j’aurais été directement capturée. J’aurais vécu futilement dans cette récurrence sans fin. Céder serait aussi facile que de renverser un gobelet d’eau que tu as mis en équilibre instable au-dessus de ta tête. »

— une voix que j’ai déjà entendue se répète dans ma tête.

Je regarde la fille qui se tient là. J’examine son apparence, en viens à la conclusion que ça devait être elle, mais n’arrive toujours pas à y croire.

Elle est... Aya Otonashi ?

C’est impossible. Après tout, elle ne peut pas avoir abandonné.

Ouais, même si elle reconnaissait que la personne qu’elle a poursuivie depuis plus de 20000 "transferts d’école" n’était pas le coupable, et que de ce fait, tout ce qu’elle a fait jusqu’ici devenait dénué de sens... il était impossible qu’elle abandonne. C’est simplement impossible ! C’est simplement impossible qu’elle ait pu abandonner !

Ça ne... lui ressemble pas.

Notre classe ne fait plus que la moitié de sa taille originale parce que des personnes ont été "rejetées". Malgré cela, toutes les personnes restantes lui lancent des questions. Elle y répond brièvement et simplement, mais convenablement. Elle ne les rejette pas froidement comme elle en avait l’habitude.

Elle joue la comédie... presque comme une véritable élève transférée.

Cette scène ne devrait pas être possible, alors ce doit être une feinte. Un mensonge. Tout le monde est juste un mensonge. Tout est un mensonge. Alors... Aya Otonashi est-elle aussi un mensonge ?

... sûrement pas,

... sûrement pas,

« Je ne le permettrais pas ! »

Même si tous les autres le permettent, moi non.

Je ne laisserai pas Aya Otonashi devenir un imposteur.

« ... Qu’y a-t-il, Hoshino ? » me demande Monsieur Kokubo pour une raison que j’ignore. C’est seulement à ce moment-là que je me suis rendu compte que je m’étais levé brusquement.

Je glisse un coup d’œil vers Mogi. Les regards de mes camarades sont focalisés sur moi, le sien compris. Mais comme je m’y attendais, je suis incapable de deviner quelles pensées se trouvent derrière son visage inexpressif.

Elle ne répondrait certainement pas si je lui demandais ce qu’elle pense de ce que je suis sur le point de faire. Nous avons passé un long moment ensemble dans cette classe. Malgré ça, notre relation a cessé d’évoluer.

Il faut que demain arrive, de cette façon notre relation pourra dépasser le statut de simples camarades de classe.

C’est vrai, Mogi n’est pas là.

Il n’y a personne ici.

C’est pourquoi... j’en ai marre, maintenant.

J’ai abandonné tous mes camarades de classe qui oublieront mon comportement bizarre de toute façon.

Je regarde seulement vers Otonashi. Je marche vers l’estrade sur laquelle elle se tient.

L’action que je suis sur le point de faire est aussi anormale pour moi que cette tentative de confession l’était pour Mogi.

Je me tiens devant Otonashi.

Otonashi ne montre aucun signe de malaise et me regarde longuement de manière évaluative. Je deviens extrêmement irrité par son expression, puisqu’elle insinue qu’elle me voit pour la première fois.

« Hé, qu’est-ce qui ne va pas, Hoshino ? »

Au premier abord, la voix de Monsieur Kokubo est calme, mais je peux reconnaître son inquiétude profonde. Mes camarades de classe posent aussi des questions similaires.

Je les ignore tous et m’agenouille devant Otonashi. Je baisse la tête et tends la main.

« Qu’est-ce que tu fais ? » demande Otonashi. Elle prend un ton poli, complètement différent de la manière dont elle m’aurait normalement adressé la parole.

« Je suis venu vous rencontrer. »

Dans ce cas, je ferai de même, moi aussi !

« … qu’est-ce que tu dis ? »

« Je suis venu vous rencontrer, ma dame Maria. Je suis Hathaway, celui engagé afin de vous protéger, vous et seulement vous, même si cela signifie la trahison de tous les autres et leur hostilité éternelle. »

Le bruit de fond des personnes autour de nous disparaît avec une rapidité comique. Ouais, c’est ça. Afin de ramener Otonashi, ma première démarche est de lui faire réaliser que ces gens n’existent pas. Leur silence devrait être plutôt utile dans cet égard.

Sans relever la tête, j'attends qu'Aya Otonashi prenne ma main. J’attends, très calmement, qu’elle mette sa main dans la mienne et commence la danse.

Mais ça ne se passe pas ainsi.

Otonashi ne me prend pas la main.

À la place, je m’écroule sur le côté, produisant un son étouffé.

« … Tu es répugnant. »

Puisque ma tête était baissée, je ne sais pas par quelle sorte d’attaque j’ai été ciblé. Mais en levant les yeux vers elle depuis le sol, je me suis rendu compte qu’elle m’attaquait avec un coup de genou depuis la droite.

Aah, ouais. C’est complètement compréhensible. Pourquoi est-ce que je me suis fait des idées aussi naïvement, en pensant qu’elle me prendrait la main ?

« ... Eh. »

Sans aucun doute, si elle est réellement "Aya Otonashi", alors il n’y avait aucune chance qu’elle ait pu avoir la gentillesse de joindre sa main à la mienne.

« Ha, hahaha… »

Apparemment incapable de tenir plus longtemps, Otonashi se met à rire. Elle semble être amusée du fond de son cœur, dans une proportion que je n’ai probablement jamais vu pendant ces 20000 récurrences.

Je suis toujours étendu par terre et ma tête me fait mal, mais mes joues se relâchent en signe de soulagement.

« Vous m’avez fait attendre depuis un certain temps déjà, n’est-ce pas, mon bien-aimé Hathaway ? Je suis abasourdie que vous ayez osé faire attendre une frêle dame, qui ne peut à peine soulever plus lourd qu’une cuillère, aussi longtemps. Je n’aurais jamais pensé que vous m’abandonneriez 27743 fois sur le champ de bataille ! »

Otonashi se penche vers moi et tend sa main.

Elle me prend la main et me remet énergiquement sur les pieds d’un coup sec.

Ouais, voilà.

C’est la manière dont Aya Otonashi est censée agir.

« … mais grâce à ça vous êtes devenue assez robuste. »

Otonashi ouvre grand les yeux de surprise. Ensuite, elle sourit faiblement de nouveau.

« Hathaway... vous, d’autre part, avez plutôt développé vos beaux discours. »

Sur ces mots, sans lâcher mon poignet un seul instant, Otonashi me fait sortir de la classe.

En ignorant la salle. En ignorant le professeur. En ignorant les élèves. En ignorant tout. Nous sommes sortis de la classe, en ignorant tout ce que j’ai abandonné.



Après m’avoir traîné hors de la classe, Otonashi me fit m’asseoir à l’arrière d’une large moto et enfila un casque. Je n’ai jamais expérimenté de rapidité aussi effrayante avant, et lui demande d’une voix tremblante si elle possédait un permis, en enveloppant mes bras autour de sa taille étonnamment mince. (Eh bien, ce n’est en réalité pas du tout étonnant puisque c’est une fille, mais mon image d’elle est celle d’une fiabilité et d’une détermination absolues.) Elle répond sans ménagement à ma question en disant « Bien sûr que non. »

« J’avais tellement de temps libre dû à tous les "Transferts d’École", alors j’ai acquis cette compétence. J’ai dépensé mon temps de manière plutôt efficace, tu ne trouves pas ? »

Je dois admettre que son habilité en moto ne semble pas mauvaise.

Quand je lui demande si elle a acquis d’autres compétences, elle me répond « Bien sûr. » Je m’attendais à ce qu’elle sache conduire, mais elle a aussi appris divers arts martiaux, plusieurs sports, quelques langages supplémentaires, comment jouer à divers instruments de musique... et la liste n’en finit pas. De manière générale, elle a essayé presque tout ce qu’elle pouvait dans les contraintes de la Classe Rejetée. Mais Otonashi, qui apparemment avait été capable d’avoir des résultats quasi parfaits au Test du Centre national des admissions à l’université, proclame aussi « Eh bien, je connaissais déjà la plupart de ces trucs avant les "Transferts d’École. »

Ses spécifications de base pourraient avoir commencé haut, mais la quantité de temps qu’elle a passé dans ces 27 754 boucles temporelles est encore plus ridicule. Je ne peux pas le calculer exactement, mais ça équivaudrait grossièrement à 76 années, ou la durée de vie d’un humain. Quand j’y pense un peu plus, je trouve ahurissante la durée de temps qu’elle a vécu.

« Dis, Otonashi. Tu as le même âge que moi, non ? »

Sûrement dû au fil conducteur de ma pensée, je suis devenu curieux de son âge physique.

« ... Non, ce n’est pas le cas. »

« Hein ? Mais quel âge as-tu alors ? »

« Ça n’a aucune d’importance, d’accord ? » répond Otonashi d’une manière qui la montre quelque peu de mauvaise humeur. C’est peut-être un sujet sensible pour elle ? Eh bien, j’ai entendu dire qu’il était impoli de demander son âge à une femme... alors est-ce qu’elle est suffisamment âgée pour que ça s’applique à elle ?

À la réflexion, c’est impossible pour une étudiante aussi mature, qu’elle puisse être de la même année que moi. Elle a juste choisi d’être ma camarade de classe par commodité afin de s’échapper de la Classe Rejetée. Peut-être qu’elle est même assez vieille pour que le port d’uniforme scolaire compte comme du cosplay ?

« Hoshino, si tu penses à des idées grossières, je te jette de là. »

Elle me prend la main dans le sac sans même me regarder pendant qu’elle conduit. Elle est vive d’esprit !

« Au fait, tu as appris comment conduire une moto pendant les "Transferts d’École", c’est ça ? Si c’est le cas, ce n’est pas ta moto, n’est-ce pas ? À qui est-elle ? À ton père ? »

Je ne m’y connais pas vraiment en moto, mais celle-là ne donne pas l’impression d’avoir été pensée pour une fille.

« Je sèche. »

« … Hein ? »

« Tu ne trouves pas ça négligé de laisser sa moto seule devant une maison, avec les clés toujours sur le contact ? »

Eh bien, je suis d’accord avec ça, moi aussi, mais, attends, quoi ? Donc ça veut dire...

« Et aussi, la chaîne était mal conçue et facile à couper avec quelques outils communs. C’est toujours la même à chaque fois que je "transfère". Eh bien, cette partie va de soi. »

Ne demandons pas plus de détails. L’ignorance est le bonheur. Ouais, j’ai aucune idée de ce dont elle est en train de parler.

« Mais dis, si tu perds tes souvenirs, alors tes compétences de conduites, ainsi que toutes les autres habilités et connaissances que tu as acquises seront aussi perdues, n’est-ce pas ? »

Ce serait vraiment dommage.

« … »

Otonashi ne répond pas.

« Otonashi ? »

Elle ne répond toujours pas. Se pourrait-il que—

« Tu ne penses pas toi aussi que ce serait dommage ? »

Se pourrait-il qu’elle n’ait pas assimilé toutes ces connaissances et toutes ces habilités juste pour tuer le temps ? Même quelqu’un comme Otonashi regretterait de perdre toutes ces aptitudes acquises, c’est pourquoi elle ne veut pas perdre ses souvenirs. C’est ce que je pense.

Afin de produire ce sentiment de "regret", elle conserve ses nouvelles compétences acquises.

Ce qui me rappelle...

Bien que ce soit un peu tard, je commence à me demander.

... pourquoi est-ce qu’Otonashi agit comme si elle avait perdu tous ses souvenirs ?


Finalement, elle m’emmène dans l’hôtel qui semble le plus coûteux des environs. Bien que ce ne soit pas un cinq étoiles, ce n’est clairement pas un endroit dans les moyens d’un lycéen. Otonashi vérifie l’endroit avec une aisance experte, rejette le porteur qui nous offre de nous conduire à la chambre, et poursuit avec détermination.

Après que nous soyons rentrés dans la pièce, Otonashi s’assoit immédiatement dans le sofa.

Je m’assois sur le lit en réprimant les sentiments troublés que j’ai, du fait d’être dans un hôtel de haute classe... En réalité, être seul avec une fille dans une chambre d’hôtel aurait normalement été une situation plutôt fantastique. Mais avec Otonashi, je suis surpris de ne ressentir aucune tension sexuelle. Être avec elle est simplement trop surréaliste.

« Tu dois être riche, Otonashi. c’est l’impression que j’ai, en tout cas. »

« Que je sois riche ou non est sans importance. L’argent reviendra de toute façon quand je serai de nouveau "transférée". »

« ...c’est vrai, maintenant que tu le dis. Donc je pourrais acheter tous les Umaibōs de la supérette. Trop bien ! »

« Ça n’a aucune importance maintenant. Nous ne sommes pas venus ici pour discuter de telles broutilles, si ? »

« C-c’est vrai. De quoi veux-tu discuter, précisément ? »

« Quelles actions nous devrons faire pour avancer. Après tout, j’ai perdu mon intérêt quand il s’est avéré que tu n’étais pas le coupable. »

« Je suis vraiment désolé. »

« Super sarcasme. »

Mais je n’ai pas du tout...

« Mais, enfin, ce ne serait pas mieux de juste trouver le véritable coupable ? Rassure-toi, je sais que ce n’est pas aussi simple, mais n’es-tu pas beaucoup mieux apaisée, maintenant que tu as perdu cette préoccupation avec moi ? »

« … Hoshino. J’ai expérimenté 27 754 "Transferts d’École". En es-tu conscient ? »

« … Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« Je t’en ai un peu parlé la dernière fois, non ? Aussi présomptueuse que j’étais de ta culpabilité, ce n’est pas comme si je n’avais suspecté personne d’autre. J’ai aussi essayé d’entrer en contact avec les autres suspects en faisant page blanche… Bien sûr, j’ai sûrement été négligente dans une certaine mesure, étant donné que je t’ai pris pour le coupable. »

« Mais tu n’as trouvé aucun autre coupable possible à part moi ? »

« Non. Garde à l’esprit que nous sommes à la 27 754e itération. Ça veut dire que le possesseur de la boîte est quelqu’un qui a su dissimulé avec succès son identité pendant une immense période de temps. »

« Euh, ça ne se pourrait pas qu’il t’ait remarqué parce que tu agissais de manière trop vive ? »

« Même s’il se méfiait de moi, ça aurait été impossible. Nous parlons de la quantité de temps contenu dans 27 754 itérations, tu sais ? Ou tu penses que le possesseur a le courage et a la présence d’esprit de continuer à cacher ses vraies couleurs aussi longtemps ? Eh bien, pour être honnête, je ne l’ai toujours pas trouvé. Bon sang... le possesseur doit être quelqu’un qui entre dans cette classe, alors pourquoi je ne peux pas l’identifier ? »

« … Attends une seconde. Qu’est-ce que tu veux dire quand tu dis que le possesseur pouvait seulement être quelqu’un qui entre dans cette classe ? Que le possesseur doit être un de nos camarades de classe ? »

Je me suis rappelé que dans la dernière boucle temporelle, Otonashi a mentionné qu’il n’y avait pas beaucoup de suspects.

« Non. Les professeurs et les élèves des autres classes qui sont venus à chaque fois dans la classe 1-6 sont aussi suspects. L’étendue de cette Classe Rejetée est, comme le nom l’insinue, seulement la salle de la classe 1-6. Seuls les gens qui sont entrés dans la classe 1-6 pendant le 2 Mars et le 3 Mars sont réellement impliqués dans ce phénomène. »

… ? Mais je suis parti de la classe et j’ai vu beaucoup d’autres personnes, en fait.

« Ton visage me dit que tu ne comprends pas, Hoshino. Écoute, est-ce que tu penses qu’il est vraiment possible de remonter dans le temps ? »

« Hein… ? »

Qu’est-ce qu’elle veut dire ? Si je dis "non", alors le concept de base de la Classe Rejetée ne tient pas debout, n’est-ce pas ?

« … Mais ce n’est pas ce que la boîte fait ? »

« Je suppose que si. La boîte l’aurait rendu possible. Mais je demande ton avis. Peux-tu pleinement croire que cette boîte a le pouvoir de remonter le temps ? Est-ce que tu penses qu’un tel phénomène est même possible ? »

Je ne vois pas du tout ce que Otonashi est en train d’essayer de me dire.

« Je pense que... »

Alors je réponds juste à sa question honnêtement, sans m’attarder sur ses intentions.

« ... une fois que quelque chose s’est passé, il est impossible de revenir en arrière. »

Même si j’ai déjà pensé "si seulement je pouvais remonter le temps" un nombre incalculable de fois dans ma vie. Mais même si une machine a remonter le temps existait, je ne serais toujours pas capable de vraiment croire aux voyages dans le temps. Je n’y croirais probablement toujours pas même si je voyageais vraiment dans le passé, du moins jusqu’à ce que j’obtienne la preuve absolue que j’étais dans le passé. Et c’est possible que même jusque là, je n’aie pas été capable de l’accepter.

Je ne sais pas si c’est la bonne réponse, mais Otonashi hoche la tête en faisant "Mhm".

« Ton opinion est normale. Et apparemment, le créateur de cette Classe Rejetée pense aussi comme toi. »

« … Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« Une boîte fait se réaliser le souhait associé avec une complétude absolue. Soigneusement. Parfaitement. En d’autres termes... même les doutes du coupable concernant les voyages pour remonter dans le temps seront réifiés, parallèlement à tout ce qu’il y a d’autres de liés avec son souhait. Tu comprends ce que ça veut dire, pas vrai ? »

« Euh… »

Vouloir remonter le temps, mais ne pas être capable d’y croire. Le manque de conviction déformerait probablement la forme du souhait. Je comprends.

« Mais n’as-tu pas déjà remonté dans le temps en boucle ? »

« Hoshino. Est-ce que j’ai appelé ce phénomène "remonter dans le temps" ne serait-ce qu’une seule fois ? »

Il n’y a aucun moyen que je le sache étant donné que j’ai perdu la plupart de mes souvenirs d’elle.

« Soyons clairs : Si la Classe Rejetée était née du souhait de retourner dans le passé, alors c’est mal fait. Non, c’est complètement défectif. »

« Alors pourquoi as-tu expérimenté plus de 20 000 récurrences ? »

« N’est-ce pas la preuve même que c’est défectif ? Si le temps était réellement inversé, alors il aurait été impossible que mes souvenirs ne soient fortuitement pas affectés par ce phénomène. Sans parler du fait que si les récurrences étaient si parfaites, comment aurais-je pu me présenter en tant qu’"Élève Transférée" ? »

Elle me jette un coup d’œil méprisant.

« Puisque c’est toi, je parie que tu as pensé quelque chose de simple comme "Pour Otonashi, tout est possible," et tu as arrêté de réfléchir à partir de ce moment. »

Je ne peux pas contester, parce qu’elle a complètement raison.

« Pour faire simple, tout ce que j’ai fait n’était qu’entrer dans la boîte. Par exemple, je n’ai pas choisi de devenir une "élève transférée". C’est une position qui m’a été attribuée par le coupable alors qu’il divise les rôles. La scène de la Classe Rejetée est la classe 1-6, donc je suppose que c’était le moyen le plus naturel pour expliquer mon entrée soudaine ; après tout, nous avons à peu près le même âge. L’équilibre de sentiment du coupable préservait la cohérence. »

« … ? »

Je ne comprends rien à ce que Otonashi est en train de dire. En quoi est-ce qu’il est nécessaire de préserver une certaine cohérence ?

« Pourquoi es-tu complètement dépourvu de compréhension... quoi qu’il en soit, pour l’expliquer d’une manière simple... Supposons que la Classe Rejetée soit un film que le coupable réalise. Le tournage est terminé, donc il ne reste plus que le montage. Mais la société de production maintient qu’il y a un nouvel acteur qui doit apparaître dans le film. Il n’y a plus de rôle restant à distribuer. Mais c’est insensé de juste filmer cet acteur supplémentaire se tenir négligemment à l’écran sans lui donner un rôle à jouer; ce ne serait plus un film. Alors à la place, le réalisateur décide de modifier le script le moins possible afin de lui donner un rôle. C’est ce que je veux dire par "préserver la cohérence". »

« En d’autres termes il ne pouvait pas te garder glissée dedans et devait en quelque sorte t’intégrer. Alors il était obligé de soudainement faire de toi une "élève transférée" afin de préserver la vie scolaire du 2 Mars. »

« Oui. Et rien que ça devrait te faire estimer que quelque chose ne va pas avec cette Classe Rejetée. C’est trop incommodant d’expliquer chaque détail alors je vais aller droit au but. Ce n’est pas la "réalité". Ni une véritable récurrence. C’est seulement un petit "espace" séparé. Ce n’est qu’un souhait maladroit qui reste authentique tant que le coupable lui-même continue de le confondre avec une véritable boucle temporelle. »

« Euh… alors c’est pour ça que les récurrences étaient imparfaites ? »

« Exactement. Le coupable, qui au fond ne croit pas qu’il est possible de remonter le temps, ne va pas lui permettre de continuer, à la place. Il choisit de le rejeter. Le possesseur a seulement besoin de continuer à se tromper lui-même. »

« Cette imperfection est la raison pour laquelle nous pouvons conserver nos souvenirs ? »

« C’est ce que je pense. Les raisons spécifiques pour lesquelles nous pouvons conserver nos souvenirs peuvent différer, mais il y a indubitablement une brèche dans la Classe Rejetée. »

Mais il y a toujours quelque chose que je ne comprends pas.

« Au bout du compte, qui es-tu, Otonashi ? »

Otonashi fronce les sourcils. C’est peut-être une question qu’elle voulait éviter.

« Ah, non… tu n’es pas obligé de me le dire si tu ne veux pas... »

Toutefois, elle ouvre la bouche, tout en fronçant les sourcils.

« Il n’y a pas de titre cool pour mon statut. Je ne suis qu’une élève... c’est ce que j’aimerais dire, mais ça ne s’applique que depuis à peu près un an... Ma position, hein ? Je ne l’ai jamais révélée et exprimée, mais d’accord, il y a probablement un seul moyen de le déclarer. Je suis... »

Otonashi, semblant très contrariée, déballe ses quelques prochains mots.

« ... en réalité une boîte. »

« Tu es en réalité une boîte ? Qu’est-ce que tu veux dire ? »

Quand je répète ses mots parce que je ne comprends toujours pas, Otonashi accroît le froncement de ses sourcils.

« Il y aurait divers inconvénients à expliquer les détails, donc je ne peux pas te le dire. »

Je me sens un peu insatisfait, et ça se reflète apparemment par mon expression. Après m’avoir regardé, Otonashi continue.

« Mais je te dirai ceci : j’ai déjà obtenu et utilisé une boîte une fois. »

« Hein !! »

« Et mon souhait est toujours en train de se réaliser. »

Otonashi possède une boîte ?

« Tu es curieux à propos de ma raison de rechercher la boîte de toute façon, n’est-ce pas ? Très bien, je te le dirai. Mon souhait a été réalisé sans aucun doute. Mais au même moment, j’ai tout perdu. »

« … tout ? »

« Ma famille, mes amis, mes camarades de classe, mes parents, mes professeurs, mes voisins... J’ai perdu toutes les personnes proches de moi à cause de mon souhait. Toutes les personnes liées à moi ne sont... plus là. »

Je suis sans voix.

« Ce n’est pas... une sorte de métaphore, hein ? Tu parles bien littéralement ? »

« Oui. Je ne peux pas tolérer de tout délaisser dans l’oubli. C’est pourquoi je prends des mesures. »

Elle a tout perdu. Elle n’a plus rien à perdre. Il se pourrait que ce soit pour ça que Otonashi peut être très intrépide et téméraire.

Quoi qu’il en soit, pour souhaiter une telle situation, bordel, quelle sorte de souhait a-t-elle pu insérer dans sa boîte ?

« Ce n’est pas possible de détruire la boîte ? Le souhait ne pourrait pas être annulé de cette façon ? »

« Hoshino, » répond Otonashi à mon doute réflexif avec un ton fermement moralisateur, « la boîte est en train d’exaucer mon souhait. Est-ce que j’ai vraiment besoin d’en dire plus ? »

C’est vrai. Ce n’est pas possible qu’Otonashi ne se soit pas déjà imaginé ça d’elle-même. En d’autres termes :

La boîte lui a sans aucun doute tout emporté. Mais malgré tout... Otonashi ne veut pas abandonner son souhait.

Alors que je reste silencieux, Otonashi prend encore une fois les devants.

« Mon souhait et le souhait du possesseur de la Classe Rejetée ne peuvent pas coexister. Sa boîte a été créée de cette façon. Alors ils se repoussaient mutuellement quand j’ai été introduite et l’interférence contre moi a été réduite. Mais ce n’est toujours qu’une "réduction" de la résistance. Autrement dit, je ne suis pas non plus immunisée contre les effets de la Classe Rejetée. Même si je ne connais pas l’étendue de son impact sur moi. Si j’abandonnais, je serais aussi capturée pas la Classe Rejetée... tout comme je te l’ai déjà dit il y a longtemps, hein ? »

Si c’est le cas, comment le possesseur voit Otonashi ? En tout cas, il est peu probable qu’il soit heureux de sa présence.

« Tu devrais finalement comprendre la situation un peu mieux maintenant, alors je vais retourner au sujet initial. Je suppose qu’il n’est plus possible de récupérer la Classe Rejetée et de l’utiliser. La boîte est déjà utilisée par le possesseur, alors il suffit de simplement mettre fin à la Classe Rejetée. »

« Alors on fait ça comment ? »

« En arrachant la boîte des mains du possesseur. Autrement, en la détruisant avec son possesseur. C’est essentiellement ça. Une autre possibilité serait de le trouver, lui, le distributeur de la boîte, dès qu’il pourrait être capable de faire quelque chose. Mais il n’est pas près d’aller dans la boîte, alors ça ne semble pas être une option viable. »

Le distributeur de la boîte ?

Je suis sur le point de lui demander à propos de lui... et m’arrête.

Je ne me souviens pas de ce "*" que je devrais avoir déjà rencontré, mais je ne le veux pas, dans les deux cas.

« … Alors rien ne se produira tant que nous ne trouvons pas le coupable, c’est ça ? »

« Oh ? Rien ne se produira, tu dis, hein ? Donc tu te plains implicitement que notre conversation jusqu’à maintenant était complètement dénuée de sens, non constructive, et une perte de temps, c’est ça ? Tu as bien du courage. »

« N-Non ! Je voulais juste confirmer... »

« Hmph, alors tu estimes que ta connaissance et ta présence d’esprit peuvent résoudre un problème que même moi ne peux résoudre ? Je suis sûre que tu as interrompu ton commentaire avec une idée à l’esprit, pas vrai ? »

« Mhm… »

j’ai grimacé. Il m’était impossible d’en avoir une.

« Pour revenir au point important... si je le savais, alors il aurait été impossible pour le possesseur de m’échapper. Mais, c’est vrai... contrairement aux autres morts, la mort du possesseur n’est pas excusée dans la Classe Rejetée. Par exemple, je suis morte maintes fois dans la Classe Rejetée mais je suis là maintenant et je n’ai pas perdu ma boîte. »

« Mais le possesseur est différent ? »

« Ouais, exactement. Le possesseur et la boîte sont connectés. À l’instant où le possesseur meurt, la Classe Rejetée sera détruite. Ça devrait être sans aucun doute vrai, puisque je connais un cas similaire. La boîte sera détruite au moment où le possesseur meurt, au même moment les caractéristiques de la Classe rejetée seront anéanties, et le concept de la véritable mort sera restauré. »

« Donc il restera mort si ça se produit... ? »

« Exactement. »

« Alors on peut partir du principe que je ne suis pas le coupable. Tu n’es aussi évidemment pas le coupable non plus. »

« Bah, oui. »

Alors Mogi ne peut pas être la coupable. Je veux dire, Mogi a déjà rencontré cet accident.

« Dis, certains de nos camarades de classe ont disparu, n’est-ce pas ? Est-ce que ça a un rapport avec la mort à l’intérieur de la boîte ? »

« … Je ne peux pas l’affirmer avec certitude, mais il ne devrait pas y avoir de lien. Je ne sais toujours pas pourquoi ça se produit, mais c’est probablement une autre caractéristique de la Classe Rejetée. »

... Attends !

Je réalise soudain... il y a un moyen simple d’identifier le coupable.

Au même moment, je sens mon sang s’écouler de mon visage. À quoi je pense ? C’est juste trop abject. Mais, mais—

Aya Otonashi. Elle pourrait le faire.

Je ne dois pas lui dire. Mais pourquoi est-ce que Otonashi n’est pas consciente de cette méthode ? Il est impossible qu’elle ne l’ait pas remarquée. Mais elle ne l’utilise pas. Ça veut dire... Qu’est-ce que ça veut dire... ?

« Hoshino. »

Mon corps entier se contracte quand elle m’appelle.

« À quoi tu penses ? Tu n’es certainement pas arrivé à un moyen de trouver le possesseur... »

Mon corps se contracte de nouveau.

« ... alors tu penses effectivement à quelque chose, Hoshino ? »

« Ah, non... »

« Le cacher est inutile. Combien de temps penses-tu que nous avons passés ensemble, tous les deux ? Je t’ai poursuivi plus longtemps que n’importe qui d’autre dans ce monde. À contrecœur, mais quand même... »

J’en suis conscient. N’importe qui aurait réalisé que je suis en train de cacher quelque chose.

« ... »

Mais il m’est impossible de pouvoir lui dire ça sans hésiter.

« Hoshino. Même toi devrais être conscient que je ne suis pas vraiment patiente. »

Elle ne va pas tomber dans un mensonge au hasard. Même si j’essaie de fuir la question, je vais forcément révéler la méthode, au final.

Mais quand même...

« Hoshino !! »

Otonashi me saisit pas le col. Ah, comme c’est pénible. Elle est sérieuse. Eh bien, évidemment qu’elle l’est. Après tout, elle a enduré plus de 20 000 boucles temporelles juste pour obtenir la boîte.

« Dis-la-moi !! Dis-moi cette méthode !! »

Je le regretterais sans aucun doute si je lui dis. Mais puis-je vraiment rester silencieux dans une telle situation ?

« …tu as juste besoin de tuer tous nos camarades de classe. »

Alors je lui ai dit.

C’est simple. Si tu peux exclure toutes les personnes qui sont mortes au moins une fois du groupe de suspects, alors c’est facile. Tu as juste besoin de tuer tous les suspects. C’est une simple solution diabolique.

Mais les personnes qui meurent ici seront ressuscitées.

Il n’y a aucune raison de s’en faire. Je ne pourrais jamais exécuter un tel plan, mais je suis sûr que Otonashi en serait capable.

Après tout, elle a même produit des corps afin de conserver ses souvenirs.

Mais est-ce que ce plan ne lui a vraiment pas traversé l’esprit ? Pourquoi n’a-t-elle pas pensé à tuer des personnes afin de retrouver le coupable, en plus de conserver ses souvenirs ? Et si elle est arrivée à cette méthode ultra efficace, pourquoi ne l’a-t-elle pas exécutée quand tout ce dont elle avait besoin aurait été à peu près 40 itérations ?

Elle ne répond pas.

Elle ne montre aucune réaction.

Je regarde doucement vers son visage.

Otonashi me tient toujours par le col et me regarde fixement, sans ciller.

« Ce n’est... »

Otonashi retire calmement ses mains de mon col.

« Ce n’est... pas une méthode acceptable. »

« … Hein ? »

« Ça aurait été comme pratiquer des tests médicaux sur une personne vivante sans son consentement. Évidemment c’est la façon la plus efficace d’utiliser un humain si tu veux savoir comment les gens sont affectés. Mais cet acte devrait être immédiatement rejeté en tant que méthode inacceptable. »

Otonashi crache ces mots avec une voix basse sans regarder ailleurs une seule seconde.

« Tu veux savoir pourquoi ? Cela semble évident : un tel acte est inhumain. Dès le moment où quelqu’un fait une chose pareille, il n’est plus un humain... ouais, je suis une boîte, après tout. Est-ce à cause de ça ? Est-ce que c’est pour ça que... »

Les yeux d’Otonashi brulent indéniablement de colère.

« ... tu me traites comme si j’étais inhumaine !? »

Aah, bien sûr, si elle a interprété mes remarques comme ça, alors sa colère est naturelle. Je réalise que j’ai parlé sans réfléchir.

Mais je ne comprends toujours pas.

« Mais tu as tué des gens pour conserver tes souvenirs, non ? »

« … Qu’est-ce que tu es en train de dire ? »

Otonashi semble incapable d’endurer mes mots plus longtemps et me lance un coup d’œil vif.

« … Co-comme je le disais, tu as produit des évènements extrêmes qui ont provoqué des impressions fortes afin de conserver tes souvenirs, n’est-ce pas ? »

« Arrête de m’insulter maintenant !! Je ne viens pas de te l’expliquer à l’instant ?! Je peux seulement résister à la Classe Rejetée parce que je suis une boîte ! »

Aah, c’est vrai. Le fait qu’elle puisse conserver ses souvenirs en produisant et en étant témoin de corps était seulement une théorie infondée de Daiya.

Mais malgré tout, je ne peux toujours pas comprendre ses actions.

« Qu’est-ce que c’est que ce visage ? Si tu as quelque chose à dire, crache le morceau maintenant !! »

Otonashi me saisit par le col encore une fois et me fusille du regard de nouveau, mais cette fois, je lui rends la pareille.

Ouais... Je ne m’y étais pas préparé. Je n’ai pas vraiment réfléchi à ce que cela signifie que de la fusiller moi aussi du regard, c’est un acte vraiment difficile à engager pour moi.

Je suis complètement sous son contrôle. Et parce que j’en suis conscient, c’est la raison pour laquelle je lui résiste de cette façon.

Mais je dis quelque chose qui brise nos faibles liens.

« Alors pourquoi est-ce que tu m’as tué ?!! »

Et notre capacité à communiquer davantage est détruite.



Ces mots ont irrévocablement brisé notre relation.

Otonashi cesse de me parler, et arrête aussi d’adresser la moindre forme d’expression en ma direction. Complètement. Avec Otonashi qui se dresse devant moi comme ça, j’étais naturellement resté impuissant. Au final, je n’ai pas eu d’autre choix que de quitter l’hôtel.

Je traîne autour de l’hôtel, mais c’est juste une expression de ma réticence ridicule. Je tue le temps sans but. Je jette un coup d’œil à la moto avec laquelle nous avons roulé et m’éloigne. Je vais à la supérette. J’achète du thé en bouteille en PET. Je le bois petit à petit. La bouteille devient vide. Je remarque que je peux à peine me souvenir de ce que j’étais en train de boire.

Il se peut que ce soit la fin.

Contrairement à Otonashi, je ne suis pas certain de si je peux conserver mes souvenirs. Si elle ne me considère pas comme nécessaire à ses plans, je pourrais tout oublier avant que je ne le sache, je serais jeté de la Classe Rejetée. Alors je disparaîtrais comme une certaine personne l’a fait.

Je ne peux pas entendre le moindre bruit sur mon chemin... il n’y a pas de lampadaire non plus, ni aucune couleur.

C’est comme si la personne qui a fait tout ça n’était pas parvenue à finir tous les détails.

Je mets la bouteille vide contre ma bouche. J’ai l’impression que je serai englouti si je n’agissais pas comme si je buvais quelque chose. Englouti par quoi ? Je n’en ai aucune idée.

Soudain, la musique de mon artiste préféré résonne dans la rue silencieuse. Quoi ? ... Aah, je vois. C’est mon portable... mon portable ? C’est vrai. C’est vrai ! Je ne peux pas me souvenir avoir donné mon numéro de portable à Otonashi, mais dans un certain monde, je pourrais l’avoir fait !

Je sors mon téléphone portable de la poche de mon uniforme.

Le nom "Kokone Kirino" est affiché sur l’écran ACL.

Je lève les yeux vers le ciel. Comme si les choses allaient se résoudre aussi gentiment ! Je le savais. Mais je ne pouvais pas m’empêcher d’avoir quelques espoirs irréalistes, pas vrai ?

Je prends le contrôle de ma respiration et accepte l’appel.

« Ah, salut… Kazu. »

Je ne saisis pas l’atmosphère habituelle de sa voix, bien qu’il se pourrait que ce soit juste moi. Ou alors Kokone a toujours agi comme cela au téléphone ? Nous sommes peut-être intimes, mais j’ai rarement déjà parlé avec elle au téléphone, auparavant.

« Ah, euh... »

J’ai le pressentiment que je peux déjà prédire cette conversation.

Ah, non, je peux sans aucun doute savoir ce qu’il va se passer. Je ne peux seulement pas me rappeler des détails tout de suite.

« Est-ce que tu peux venir, un moment ? Je te dirai où me rejoindre. »

Qu’est-ce qu’il se passera ensuite ? Comment est-ce que ça va tourner, encore ?

« Il y a quelque chose que je dois te dire, Kazu. »


3087e fois[edit]


Je suis un très grand fan d’Umaibō, mais je n’apprécie pourtant pas tant que ça ceux au goût Teriyaki Burger.

Je suis au parc abandonné juste à côté de sa maison. Nous nous faisons face devant l’eau de la fontaine pendant que je mâche l’Umaibō qu’elle m’a donné.

« ... Alors ? »

« ... Hum, euh, c’est pas que je n’aime pas le goût, mais, eh bien... »

« ... Je ne parlais pas vraiment de... l’Umaibō. »

Je le sais bien. Mais vraiment, comment suis-je censé répondre ?

« ... Alors, est-ce que tu veux sortir avec moi ? »

Je n’ai pas suffisamment d’expérience dans les relations amoureuses pour éviter de me montrer troublé.

Mais elle doit être tout aussi troublée que je ne le suis. En tout cas, je ne l’ai jamais vue comme ça auparavant.

Peut-être est-ce à cause du nouveau mascara dont elle m’a parlé ce matin, mais ses yeux semblent plus larges que d’habitude. Et ces yeux me regardent fixement... Il m’est impossible de soutenir un tel regard.

Je ne sais pas quoi dire, mais je ne peux pas simplement rester silencieux, alors j’ouvre la bouche.

« Tu es donc... amoureuse de moi ? »

Son visage rougit d’une couleur cramoisie devant mes yeux.

« ... peut... être. »

« Peut-être ? »

J’ai involontairement répété sa réponse.

« ... C-c’est mesquin de poser une telle question, tu sais ? Tu connais ma réponse, pas vrai ? ... O-ou tu voudrais que je le dise à voix haute ? »

« Ah... ! »

Je remarque finalement mon insensibilité et baisse honteusement la tête.

« Je suis... désolé. »

Je m’excuse par réflexe. Elle me regarde avec des yeux tournés vers le haut et murmure.

« … Je t’aime. »

Puis elle se tient bien droite et parle directement en direction de mon visage.

« ... Je t’aime. »

Je ne peux pas m’empêcher de détourner le regard à cause de son visage incroyablement mignon. Mon cœur bat bel et bien plus vite... juste depuis sa preuve d’affection.

Je la trouve mignonne.

Sa personnalité est enjouée, et il y a toujours des gens rassemblés autour d’elle.

Je sais aussi que de nombreux garçons se sont confessés à elle, juste pour finir par se faire rejeter.

Ce serait super de sortir avec elle, c’est certain.

Mais...

« Désolé. »

Mais je lui réponds ainsi... tellement brutalement que je me suis presque surpris moi-même.

Je sais que la rejeter est une vraie honte, mais je ne peux simplement pas nous imaginer sortir ensemble. D’une certaine manière, la notion ne me semble pas réaliste.

Son impatience disparaît de ses yeux et est remplacée à la place par des larmes. Bien que je sache que je suis entièrement responsable, je ne peux pas la regarder directement.

Je ne peux rien dire, car je sais que tout ce que je pourrais dire serait "désolé."

« ... Tu as hésité un bon moment, n’est-ce pas ? »

Je hoche la tête en réponse à son murmure.

« ... Dis... Tu aimes les Umaibōs, pas vrai ? »

Mots hors contexte. Je hoche encore une fois la tête.

« Mais tu n’aimes pas le goût Teriyaki Burger tant que ça ? »

« ... Non. »

« Quel goût aimes-tu le plus ? »

« Euh... Corn Potage, je pense ? »

Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle elle me pose la question à propos des Umaibōs, mais réponds quand même d’un ton gêné.

« Je vois. Hmm, hmm, hmm hmm... »

Elle hoche la tête de façon répétée.

« Ahaha... J’ai perdu, alors. »

Ce qu’elle dit semble absolument insignifiant, mais pour une certaine raison, ses mots envoient un frisson qui traverse ma colonne vertébrale. J’ai la sensation étrange que je regarde une vidéo mal éditée.

Tout en levant les yeux vers moi, elle demande, « Est-ce que tu aurais accepté ma confession si j’avais choisi une approche différente ? »

Je ne sais pas... Peut-être ? Après tout, j’hésite déjà... Non, ce n’est pas vrai... Je le sais.

Je l’aurais sans aucun doute rejetée.

Je lui aurais sans aucun doute donné la même réponse encore et encore, à moins que je n’eusse été changé, ou qu’une certaine condition extérieure n’eût été changée.

Aussi longtemps que nous sommes aujourd’hui, je ne peux m’imaginer sortir avec elle. Par conséquent, aussi longtemps que nous sommes aujourd’hui, il est impossible que je puisse accepter sa confession.

« Ton visage me dit que tu ne sais pas. »

Je n’ai pas de réponse.

Mais elle le prend comme un "oui" et sourit gentiment.

« Aah, d’accord. Alors j’ai juste besoin de continuer à me confesser jusqu’à ce que je réussisse, n’est-ce pas ? »

Ça peut être une bonne idée. Je peux au moins prendre une petite responsabilité pour avoir rejeté ses sentiments.

Mais quand même... Tu dois attendre un autre jour pour te confesser, tu sais ?


27764e fois (2)[edit]


Je suis sûrement épuisé après l'effondrement complet de ma relation avec Otonashi et l'appel soudain de Kokone.

... Même si je suis vraiment juste en train de me trouver des excuses.

J'avais complètement oublié.

Qu'un accident se produirait sans aucun doute à cette intersection.

Je suis en sécurité. Je me souvenais instinctivement de la fois où je suis venu près de l'intersection, dû à l'immense choc dont j'ai souffert en mourant là avant. Je n'ai donc aucun problème pour m'assurer de ma propre sécurité.

Mais ce n'est simplement pas acceptable. Après tout, ça veut dire que quelqu'un d'autre va se faire écraser dans cet accident inévitable.

Je l'avais oublié. Et à cause de ça, il était trop tard pour que je sauve cette personne. Même si je savais que quelqu'un se ferait écraser, je ne l'ai pas arrêtée. « Parce que je l'avais oublié » ne peut même pas être qualifié d'excuse.

Je suis horrible. C'est comme si j'avais tué cette personne moi-même.

Kasumi Mogi est là.

La fille que j'aime est là.

Comme toujours, le camion s'avance vers elle à toute allure.

Je suis incapable de la sauver de l'endroit où je me trouve actuellement. Peu importe ma volonté pour essayer de la sauver, il m'est impossible de le faire de si loin.

Elle va être tachée de sang. La fille que j'aime va être tachée de sang. La fille que j'aime va être tachée de sang à cause de moi. La fille que j'aime n'arrête pas d'être tachée de sang, encore et encore, et c'est ma responsabilité, encore et encore, parce que je continue de l'oublier, encore et encore.

« A-AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !! »

Je cours en direction du camion. Pour sauver Mogi ? Non. Bien sûr que non. Je ne peux pas supporter mes sentiments de culpabilité et voulais juste avoir l'impression d'avoir fait quelque chose. C'est simplement de l'autosatisfaction.

Horrible. À quel point puis-je seulement être horrible ?


Puis je l'ai vu.

« Hein... ? »

La fille que je croyais être au-delà de tout espoir d'être sauvée a été poussée hors de la route.


Je ne l'ai pas fait.

Je suis trop loin pour l'atteindre à temps.

Par conséquent, il n'y a qu'une seule personne qui aurait pu l'avoir sauvée.

La fille qui a continué de se battre même quand j'ai abandonné mes souvenirs et agi comme si je ne la connaissais pas.

Même si elle ne l'aurait pas fait à temps pour se sauver elle-même.

Et pourtant, elle...

... Aya Otonashi a sauté.

Ah, c'est vrai. Je m'en souviens.

J'ai déjà assisté à exactement la même scène un nombre incalculable de fois.

Tout ça se répétera de toute façon. Même le fait qu'elle a sauvé quelqu'un disparaîtra. Tout ce qu'il restera est le souvenir de la douleur dont elle a souffert en mourant. La peur de la rencontre de la mort. Le désespoir qui émerge en sachant qu'elle aura à répéter cette expérience.

Et pourtant, Aya Otonashi saute devant le camion. Afin de sauver quelqu'un d'autre de se faire écraser.

Encore et encore. Plusieurs milliers de fois.

C'est vrai.

Comment aurais-je pu l'oublier ?

Il y a un fort bruit de fracas, mais le camion vient de s'éclater à travers le mur avec un énorme vrombissement. Je m'approche d'Otonashi en étant toujours à moitié submergé par le bruit. Mogi est allongée à côté d'elle, complètement figée. Apparemment elle a souffert d'un véritable choc.

Je regarde vers Otonashi.

Sa jambe gauche est courbée dans le mauvais sens.

Elle est couverte de sueurs froides, mais parle avec une telle résolution qu'elle semble complètement indemne

« La dernière fois, je t'ai tué. »

Même si parler devrait être douloureux, sa voix est claire.

« Je pensais que tout se serait terminé en tuant le possesseur. Je ne voulais pas le faire. Mais à l'époque je croyais que c'était le seul moyen d'échapper à la Classe Rejetée. J'étais prête à sacrifier mon humanité. Je ne veux pas l'admettre, mais je n'y ai pas repensé après. Je pensais que la honte que je m'étais infligée serait aussi réinitialisée et disparaîtrait après que je me sois échappée de la Classe Rejetée. »

Je comprends finalement pourquoi au début de cette boucle temporelle, Otonashi agissait comme si elle avait tout oublié.

Elle ne pouvait pas se le pardonner.

Pour accepter ma mort quand j'ai été tué dans cet accident.

Elle était tellement repentante qu'elle était sur le point d'abandonner sa fuite de la Classe Rejetée et la boîte dont elle était tellement obsédée.

"Alors pourquoi est-ce que tu m'as tué ?!!"

Elle regrettait tellement qu'elle était incapable de s'opposer à ces mots.

À quel point ai-je seulement été cruel ?

Et ces mots n'étaient même pas vrais.

La dernière fois, j'ai sauté pour sauver Mogi et je suis mort dans l'accident. Je croyais que c'était la faute d'Otonashi, tout comme j'ai toujours cru que la mort de Mogi était de la faute d'Otonashi.

À cause de mes idées préconçues, j'ai laissé échapper quelque chose comme "Tu m'as tué". J'aurais dû avoir remarqué ce malentendu le moment où elle a renoncé à l'acte de tuer. En vérité, elle était simplement incapable de me sauver.

Pour une raison que j'ignore, cet accident se produit toujours. Quelqu'un se fait écraser avec certitude. C'est juste une pure coïncidence si j'étais celui qui est mort cette fois.

« Hmph, je ne peux que rire de ma propre stupidité. La culpabilité ne disparaît pas seulement à travers l'étourderie. Et pour couronner le tout, la Classe Rejetée ne s'est pas terminée et je dois maintenant m'adapter au fait de n'être plus que l'ombre de moi-même. Je ne peux pas penser à une situation où le mot "châtiment" s'appliquerait mieux. »

Alors qu'elle dit ça, Otonashi crache du sang.

« Otonashi, ne parle pas si tu as mal... »

« Quand y aura-t-il une autre chance de parler ? Je suis déjà habituée à ce niveau de douleur. Ce n'est rien. C'est juste une douleur passagère, alors c'est bien mieux que de se faire ronger lentement mais sûrement par une maladie. »

On ne s'« habitue » pas à quelque chose comme ça !

« Je n'ai pas perdu mes souvenirs, je ne me suis pas échappée de la Classe Rejetée non plus. Fufu... Je le savais probablement au fond de moi-même... que je ne serais pas libérée de la Classe Rejetée. »

« ... Pourquoi ? »

« C'est simple. Ma ténacité ne me lâchera pas si facilement. »

Otonashi se lève tout en titubant d'avant en arrière. Elle aurait pu simplement rester allongée, mais je suppose qu'elle ne peut pas supporter que je la regarde en contrebas.

Sa jambe gauche est complètement détruite. Otonashi tousse violemment et du sang est projeté vers l'avant. Mais elle se tient alors droite en utilisant le mur comme support et me regarde.

Probablement parce qu'Otonashi s'est levée, Mogi s'échappe de son inexpression pétrifiée et commence aussi à bouger. Elle regarde alors timidement vers moi.

« Est-ce que tu vas bien, Mogi ? »

« ... !! » un cri perçant différé s'échappe de sa bouche.

« D-De quoi parliez-vous... à l'instant... ? Hum, pas juste à l'instant, depuis hier... vous êtes quoi, vous deux ? »

... Quoi ? Qui regardes-tu avec ces yeux ? Qui regardes-tu avec ces yeux craintifs ?

... Je le sais. Son regard est dirigé vers moi.

Pour une raison que j'ignore, je suis incapable de la laisser seule. Sans réfléchir, je tends le bras pour lui toucher la joue.

« N-ne me touche pas ! »

Aah... Tu as raison. Qu'est-ce que je suis en train de faire ? Pourquoi est-ce que je tends le bras vers elle, alors même que je suis celui qui la terrifie ? J'ai pensé que ça l'aurait calmé ? Comment est-ce que j'aurais pu penser ne serait-ce qu'un instant que je serais capable de la faire se calmer ? ... Il est impossible que j'en sois capable.

« ... Qu'est-ce... que tu... ? »

Je serre le poing. Je ne peux rien lui expliquer. Par conséquent, je n'ai pas d'autres choix que de subir son regard fixe.

J'aurais adoré lui expliquer la situation entière. Peut-être qu'elle l'aurait même comprise.

Mais... Je ne dois pas le faire.

Après tout je dois me battre. Je dois me battre contre la Classe Rejetée.

Et pour le bien de ce combat, je dois refuser le faux quotidien de la Classe Rejetée.

J'en suis venu à cette détermination avant, quand j'ai pris la main d'Otonashi. Alors je le rejette. Le sourire de Mogi, son visage rougissant, me laissant dormir sur ses genoux... Je rejette tout ça.

Mogi arrête d'essayer de comprendre ce qu'il se passe quand je refuse de briser mon silence, et elle se met debout soucieusement.

Elle chancelle à reculons sur ses jambes tremblantes, en nous suppliant avec ses yeux de ne pas la poursuivre. Puis elle s'échappe.

Je la fixe du regard alors qu'elle fuit.

Et fais attention de ne pas détourner mon regard fixe.

Parce que c'est censé être l'issue que je désire.

« ... Je saisis maintenant à quel point tu es déterminé, » dit Otonashi après avoir observé notre interaction. Elle est toujours appuyée contre le mur. « Alors, j'en suis aussi venue à une résolution. J'abandonnerai mon objectif d'obtenir la boîte. »

« ... Hein ? »

Ça m'ennuie. Ça m'ennuie vraiment. J'ai besoin de la force d'Otonashi. Sans réfléchir, j'ouvre la bouche pour essayer de l'arrêter.

Juste quand j'étais sur le point de le faire...


« ... Par conséquent, je te donnerai un coup de main. »


« ... Hein ? »

Je ne m'attendais pas à ça.

Me donner un coup de main ? Aya Otonashi va me donner un coup de main ?

« Pourquoi est-ce que tu me regardes bêtement comme un idiot qui bafouille ? Je viens de te dire que je vais te donner un coup de main. Tu es sourd ? »

Mais c'est aussi impossible que le soleil qui se lève à l'ouest et se couche à l'est.

« J'ai perdu mon chemin. Ta critique était en plein dans le mille, en te tuant, je suis devenue une sous-humaine. Non, bien pire. Je suis une lâche qui a abandonné son propre objectif et essayé de fuir parce qu'elle ne voulait pas l'admettre. Pour être claire, j'ai renoncé à la Classe Rejetée. Et j'ai continué à fuir en me disant qu'il ne reste rien d'autre à faire pour quelqu'un comme moi qui n'est rien de plus qu'une boîte vaincue. »

Même si elle s'abaisse, il y a toujours une flamme dans ses yeux.. Je me sens en réalité un peu soulagé.

« Mais il n'y a aucune raison d'hésiter. J'ai sans aucun doute fait quelque chose de honteux, mais ce n'est pas une raison pour me restreindre. Rien ne ressortira de regrets vides. Par conséquent je ne fuirai plus. Alors... »

Elle ferme la bouche, réticente à finir sa phrase.

Mais puisque je lui jette presque un regard noir, elle ouvre la bouche et déclare.

« Alors s'il te plaît... pardonne-moi. »

Aah, je vois. C'est ce qu'elle veut dire.

Ce discours bizarre était censé être des excuses.

Sa supplication est parfaitement dénuée de sens.

« Je ne peux pas te pardonner. »

En entendant mes mots directs, Otonashi semble momentanément surprise, mais son visage sérieux revient ensuite sur-le-champ.

« Je vois... S'être fait tuer est vraiment quelque chose que tu ne peux pas pardonner. »

« Ce n'est pas ça. »

Otonashi fronce les sourcils, ne réussissant pas à comprendre mes mots.

« Ce que je veux dire c'est que... Je ne vois pas ce qu'il y a à pardonner de toute façon.»

C'est vrai. Ce n'est pas comme si je ne la pardonnerais pas. Je ne peux simplement pas la pardonner. Parce qu'il n'y a rien besoin de pardonner pour commencer.

« ... Hoshino, qu'est-ce que tu dis ? Je... »

« Tu m'as tué ? »

« ... Ouais. »

« Tu veux rire ? »

Je souris spontanément.

« Je suis là ! »

C'est vrai. C'est simple et évident.

« Je suis juste là, Otonashi. »

Peu importe combien elle peut se sentir responsable, elle n'a rien fait qui ne puisse pas être inachevé.

Je ne comprends pas pourquoi elle se sent tellement responsable de toute façon. Ce n'est pas elle qui a créé la Classe Rejetée après tout. Otonashi a juste été impliquée dedans...

... Non, ce n'est vrai.

Otonashi n'est pas juste une victime. C'est une dirigeante qui saisissait nos personnalités et analysait tous nos modèles comportementaux. Elle sait comment l'onde de choc va s'étendre en jetant une pierre dans un endroit en particulier. C'est une dirigeante avec au moins le même degré de pouvoir que le créateur de la Classe Rejetée lui-même.

Mais à cause de ce pouvoir, elle se sent responsable des événements qui se produisent. Parce qu'elle pense que de mauvaises choses peuvent être empêchées si elle agit convenablement.

Par conséquent, puisqu'elle ne pouvait pas, et ne savait pas, empêcher la mort de quelqu'un, elle a l'impression qu'elle est la tueuse.

Mais Otonashi l'a dit elle-même. La mort dans la Classe Rejetée n'est qu'un spectacle.

« Ça m'est vraiment égal. Mais puisque tu insistes, et si tu utilisais un certain mot magique ? »

Otonashi est figée avec un froncement de sourcils sur son visage. Après quelques moments, elle bouge finalement de nouveau et regarde vers le bas.

« Eh... »

Ses épaules tremblent. Qu'est-ce que ça veut dire ? Je deviens nerveux et jette un coup d'œil furtif en sa direction.

« Héhé... Haha... HAHAHAHAHAHAHA !! »

... Elle est en train de rire ! En plus c'est un rire vraiment explosif !!

« H-Hé ! Pourquoi est-ce que tu ris ? Désolé, mais je ne comprends pas !? »

Otonashi continue d'éclater de rire pendant un moment, malgré mes protestations.

Bon sang... À quoi cela rime ? Je suis en fait certain que j'ai dit quelque chose de "cool", mais on dirait que mes mots ne sont rien de plus qu'un sujet de plaisanterie au final...

Otonashi s'arrête enfin de rire, revient à son expression vaillante habituelle et me parle en se pinçant les lèvres.

« J'ai expérimenté 27 754 transferts d'école

« ... Je le sais bien. »

« J'étais persuadé que j'avais maintenant compris tes modèles comportementaux. Mais je ne pouvais pas du tout prévoir ton affirmation à l'instant. Peux-tu imaginer à quel point c'est amusant pour quelqu'un d'habitué à l'ennui éternel ? », dit-elle, avec un regard enchanté.

Je n'arrive toujours pas à saisir ses intentions et incline la tête.

« Hoshino. Tu es vraiment amusant. À première vue tu ressembles à quelqu'un d'ordinaire sans opinion spéciale, mais en réalité il n'y a personne d'autre qui est autant attaché à la vie quotidienne que toi. C'est exactement pour cette raison que tu es capable de distinguer clairement cette fausse vie quotidienne de la réelle, encore mieux que je ne le puisse. »

Mieux qu'Otonashi ?

« Ce n'est vrai. Je ne peux pas du tout le distinguer clairement. Après tout, mon cœur me fait mal quand l'accident s'est produit, même si je sais que ce sera réinitialisé... »

« Évidemment. Ça n'a rien à voir avec ton trait de caractère. Par exemple, quand tu regardes un film ou lis un livre, tu te sens aussi gêné quand les personnages vivent une mésaventure, n'est-ce pas ? C'est la même chose ici. »

C'est vraiment comme ça ? Je me le demande.

« ... Hoshino. »

« Quoi ? »

« Je suis désolée. »

C'est si soudain que je ne comprends pas de quoi elle s'excuse. Avant que je ne le sache, le réjouissement a disparu de son visage.

« Vraiment, j'ai honte de ma propre impuissance. Je suis désolée. »

« P-Pas de problème... »

Je me sens vraiment mal à l'aise quand quelqu'un qui est si clairement mon supérieur me présente sincèrement des excuses. Je bafouille comme si elle était en train de me critiquer. Je suis vraiment pitoyable.

« C'était juste une simple excuse, mais tu es d'accord avec ça, non ? Je dois simplement continuer de te comprendre, saisir tes motivations, et t'indiquer exactement quoi faire. C'est ce que tu désires de moi, pas vrai ? »

« O-Ouais... »

« S'excuser, hein ? C'est naturellement nécessaire, mais j'ai l'impression que je ne l'ai pas fait depuis des années. »

… Je suis sûr qu'elle dit vrai.

« Eh bien, c'est l'heure. »

« L'heure ? »

« De la fin du 27 754e transfert d'école. Et le commencement du 27 755e. »

« Aah, je vois. »

J'accepte cet étrange phénomène avec un calme surprenant.

Je regarde les alentours et constate que des gens se sont rassemblés à cause de l'accident. Nombreux parmi eux portent des uniformes très familiers. Kokone est présente et nous regarde. Otonashi et moi avons parlé ensemble en ignorant tous les autres. Eh bien, je suppose que je peux comprendre pourquoi Mogi était tellement effrayée. Une discussion entre moi et Otonashi sanguinolente a certainement dû paraître perturbante.

J'offre ma main à Otonashi.

Sans hésitation, elle prend cette main ; la même main que quelqu'un d'autre a refusée.


Mon cœur se fait enfoncer par une force accablante, comme s'il se faisait écraser par un étau. Le ciel commence à se fermer comme un porte-monnaie. Bien qu'il soit fermé, le monde devient blanc. Blanc. Blanc. Le sol devient instable et a un goût sucré pour une raison que j'ignore — pas au niveau de la langue, mais sur la peau. La sensation ne me met pas mal à l'aise, mais est répugnante. Finalement, je comprends que cet événement marque la fin de la 27 754e itération.

Nous sommes entourés par le désespoir blanc, doux et pur.


0e fois[edit]

Je ne faisais que comprendre la vérité littérale de "l'amour peut changer le monde" quand j'avais seize ans.


Combien de fois ai-je déjà pensé que la vie est simplement trop pénible à supporter, avec sa répétition infinie d'habitudes et d'habitudes et d'habitudes ? J'ai sérieusement envisagé de finir ma vie tellement de fois... Je ne pourrais sans doute pas les compter avec mes deux mains et même en ajoutant mes deux pieds.

Je m'ennuyais affreusement.

Mais je n'ai jamais donné voix à mes sentiments, et je me comportais toujours gaiement. Après tout, il serait embêtant d'étaler ouvertement une attitude aussi négative à la vue de tous. J'ai essayé d'être en bons termes avec tout le monde, ce qui n'est pas si difficile. Si vous évitez de réfléchir sérieusement aux points forts et points faibles ou aux préférences, vous pouvez vous entendre avec tout le monde.

Un certain nombre de personnes s'était rassemblé autour de moi, et elles m'avaient tous dit la même chose.

« Tu es tout le temps si joyeuse. Tu ne dois certainement pas avoir de souci, pas vrai ? »

Mais oui. Tout le monde, merci beaucoup de vous laisser complètement duper. Merci beaucoup d'avoir été ignorant de ma laideur jusqu'à présent. Grâce à vous, j'en suis venue à vouloir tout laisser tomber.

Je pense savoir quand cet ennui à commencé.

Chaque individu est bien trop égocentrique.

Quand j'ai échangé mon adresse email avec un garçon et répondu régulièrement à ses emails, il était très enthousiaste et se confessa à moi sans aucun encouragement de ma part. Quand j'ai essayé d'éviter et d'ignorer un garçon qui était snobé par les autres filles, il le confondait avec de l'affection de ma part et se confessa à moi. Quand quelqu'un m'invita à aller voir un film et que j'avais accepté seulement parce qu'il était impoli de refuser, il se confessa à moi. Quand j'étais rentré à la maison avec quelqu'un à plusieurs reprises parce qu'il s'avérait que nous habitions dans la même direction, il s'était confessé à moi.

Après cela, ils faisaient tous des visages comme si je les avais trahis, même s'ils n'avaient qu'eux-même à blâmer, et finissaient par m'en vouloir. J'étais aussi vue d'un mauvais œil par les filles qui étaient amoureuses de ces garçons. Égoïste. Égocentrique. J'ai été blessée à chaque fois et devenais couverte de cicatrices. Finalement, je ne remarquais même plus les nouvelles cicatrices qui se formaient après avoir été blessée. C'est quand j'ai enfin remarqué que...

J'avais juste besoin de m'associer avec chaque individu sans enthousiasme sans même avoir à trop m'impliquer. J'avais juste besoin de lire l'état d'esprit correctement et de discuter superficiellement. Je ne leur montrerai pas ma vraie nature. J'avais juste besoin de fermer ma coquille afin de protéger mon intérieur délicat.

Et ensuite c'est devenu ennuyant.

Même quand je ne leur montrais que ma coquille extérieure, personne ne remarquait la moindre différence.

Ils m'ont tous dit la même chose.

« Tu es tout le temps si joyeuse. Tu ne dois certainement pas avoir de souci, pas vrai ? »

Quelle réussite fabuleuse.

Vous feriez mieux de tous disparaître.


C'était un jour ordinaire après l'école. Comme toujours, je souriais en bavardant de manière décontractée avec des étrangers autour de moi qui prétendaient être mes amis. Alors, tout d'un coup, sans impulsion spéciale...

J'étais frappée par un certain concept qui prit soudainement forme, et me fit penser à un certain mot.

"Solitude"

Aah, j'étais complètement... seule.

Seule. Je vois, alors j'étais seule. Malgré le fait que je fusse entourée de personnes, j'étais seule. Je me sentais étrangement satisfaite. Ce mot convenait parfaitement.

Mais ce mot dévoila rapidement ses crocs et m'attaqua. C'était la première fois que je réalisais qu'une telle solitude absolue était accompagnée par la douleur. Ma poitrine me faisait mal, je ne pouvais plus respirer. Et même quand j'arrivais finalement à reprendre mon souffle, c'était comme si l'air était rempli d'aiguilles. La douleur perçait mes poumons. Ma vue virait au noir pendant un moment, et je pensais que ma vie pourrait aussi bien être finie. Mais ma vue revenait sur-le-champs et la vie ne se finissait pas aussi facilement. Je ne savais pas quoi faire. Je ne sais pas. Au secours. N'importe qui, aidez-moi.

« Que se passe-t-il ? »

Quelqu'un avait remarqué mes difficultés et me dit :

« Tu à l'air vraiment heureuse à sourire comme ça. »

Hein ?

Je souris... ?

Je levai mes mains sur mes joues parce que je ne pouvais pas comprendre ces mots.

Les coins de mes lèvres étaient évidement levés.

« C'est vrai, tu es tout le temps si joyeuse. Tu ne dois certainement pas avoir de souci, pas vrai ? »

J'ai éclaté de rire. « Ouais, je suis heureuse ! » J'ai ri. J'ai ri sans même savoir pourquoi.

À ce moment-là, les gens autour de moi devenaient progressivement transparents. Un par un, ils devenaient transparents. Ils devenaient transparents et disparaissaient, jusqu'à ce que je ne pusse plus les voir. Quelques voix continuaient de s'adresser à moi, mais je ne pouvais plus les entendre. Pourtant j'étais toujours capable de répondre convenablement. Je ne comprenais pas.

Avant que je ne le sache, la classe était vide. J'étais la seule restante.

Mais je suis sûre que j'étais la personne qui l'avait rendue vide.

J'ai rejeté tout le monde.

« J'ai un rendez-vous, alors je vais y aller maintenant. »

Bien que je ne pusse voir personne, j'ai parlé avec un sourire et ramassé mon sac. Ma relation avec tous les autres ne me demandait probablement pas de m'adresser à quelqu'un spécifiquement. J'aurais dû juste parler à un mur depuis le début si c'était comme ça.


Et pourtant, pourquoi ?

« ... Excuse-moi, mais est-ce que tu vas bien ? »

Bien qu'il n'y aurait dû y avoir personne ici, pour une raison quelconque je pouvais clairement entendre ces mots. Je venais juste de passer les portes de l'école au moment où j'ai été ramenée en un éclair, et tout redevint visible à nouveau.

Quand je me suis retournée, j'ai vu qu'un garçon de ma classe se tenait là, tout essoufflé. Apparemment, il avait couru après moi.

Son nom était sans aucun doute Kazuki Hoshino. Nous n'étions pas très proche, ni quoi que ce soit de particulier – tout ce que je savais de lui était son nom.

« Qu'est-ce que tu veux dire ? »

Tandis que je lui posais cette question, j'ai réalisé qu'un étrange espoir m'avait enveloppé.

Après tout, il ne m'aurait pas demandé si j'allais "bien" à moins qu'il ne remarque que quelque chose n'allait pas. Ça voulait dire qu'il pouvait avoir été capable de sentir ma transformation – quelque chose d'impossible même pour les gens qui étaient près de moi et interagissaient avec moi à l'époque.

« Euh... Comment dire ? Tu sembles très "distante"... ou, je ne suis pas sûr, mais on dirait que tu ne fais pas partie de la vie de tous les jours... »

Il parlait avec beaucoup de difficultés et n'arrivait pas à aller droit au but.

« Euh... ne t'en fais pas si je lis trop entre les lignes. Désolé d'avoir dit des choses aussi bizarres. »

Il semblait se sentir embarrassé et était sur le point de partir.

« ... Attends un instant. »

Je l'ai empêché de partir. Il inclina la tête légèrement et me regarda.

« E-euh... »

Je pourrais bien l'avoir arrêté, mais qu'est-ce que je dois dire maintenant ?

Mais après tout... Il a été capable de me décrire comme "distante", même si j'étais en train de sourire dans cette classe désertée.

« Est-ce que j'ai tout le temps l'air joyeuse ? »

S'il répondait comme tous les autres, alors il était juste comme tous les autres.

Ah, je plaçais beaucoup d'espoir en lui. J'avais énormément espoir qu'il démentirait ma déclaration et me comprendrait réellement.

« Ouais. Bah... C'est vrai que tu as l'air comme ça. » répondit-il avec hésitation.

En entendant ces mots, j'étais complètement déçue de lui, j'ai perdu mon intérêt et commença immédiatement à le détester. J'étais surprise par la force de la pendule – dans le renversement de mes sentiments, mais j'ai probablement établi des attentes beaucoup trop élevées.

Mais le garçon que je détestais maintenant ajouta les mots suivants :

« Tu t'efforces vraiment, n'est-ce pas ? »

Mes sentiments se balançaient comme une pendule à nouveau et ma haine s'inversa encore une fois. Mon visage ne pouvait pas suivre ce changement soudain – mais mon cœur éprouvait une étrange chaleur.

S'efforcer. S'efforcer d'avoir l'air joyeuse.

C'est exact. Encore plus exact que de démentir que j'ai l'air joyeuse.

Et c'est ainsi que je... tombai amoureuse.



Je suis consciente du fait que je fais juste une hypothèse commode. Juste parce qu'il a dit que je m'efforçais ne voulait pas dire qu'il me comprenait réellement. J'en suis consciente. Mais malgré tout... cette hypothèse m'est constamment restée à l'esprit.

Au début, je pensais que ce serait simplement un sentiment temporaire. Mais il grandissait bientôt au point où il ne pouvait plus être inversé. Mes sentiments pour lui s'accumulaient, comme une congère d'hiver qui ne fond jamais, jusqu'à ce qu'ils recouvrent complètement mon cœur. Malgré le fait que je sois consciente qu'il puisse devenir plus important que tout pour moi, si les choses se développaient de cette manière, pour une raison que j'ignore je m'en fichais complètement.

Après tout, Kazuki Hoshino m'a sauvée de cette classe désertée et a chassé mon ennui.

S'il se volatilisait de mon cœur, j'étais sûre que je retournerais dans ce désert.

Je retournerais à cette classe désertée où j'étais toute seule.

Mon monde a été changé tellement facilement. Le fait que je me sois ennuyée semblait être un mensonge. Je me sentais comme si mes émotions avaient été branchées dans un puissant amplificateur. Maintenant, simplement le saluer me rend heureuse. En même temps, je me sens triste de pouvoir à peine faire plus que le saluer. Je suis heureuse quand je lui parle. Je suis triste parce que je ne peux que parler avec lui un petit peu. Je sens mon cœur s'irriter et s'effondrer... pourtant je suis curieusement satisfaite.

Ouais ! Je serai en bons termes avec toi sans faute !

Tout d'abord, j'aimerais que l'on commence par s'appeler par nos prénoms.[4]


—————-......


« As-tu un souhait ? »

Il semble exister partout, mais n'existe nulle part. Il semble ressembler à tout le monde, mais il ne ressemble à personne. Je ne peux même pas dire si la personne qui est en train de me parler est un homme ou une femme.

Un souhait ?

Évidemment que j'en ai un.

« Ceci est une "boîte" pouvant accorder n'importe quel souhait. »

Je l'accepte de mes mains tachées de sang.

Je comprends immédiatement qu'il m'a bien dit la vérité. Par conséquent, je suis déterminée à ne pas renoncer à cette boîte.

Tout le monde en ferait autant, n'est-ce pas ? Je ne crois pas que qui ce soit puisse être capable d'abandonner un tel trésor.

Alors je fais un souhait.

Tout en sachant que c'est impossible, je fais un souhait de tout mon cœur.

« ... Je ne veux plus avoir aucun... regret. »

27755e fois[edit]


« Allez, n'y a-t-il pas quelque chose de différent chez moi aujourd’hui ? Hm ? »

Kokone s'approche de moi, ressemblant toujours à la même. Elle m'avait déjà posé cette question avant. C'était déjà quoi la bonne réponse ?

« ... Tu t'es mise du mascara. »

« Oh ! Bien joué, Kazu-kun ! »

On dirait que j'ai raison.

« ... Alors, c'est comment ? »

« Oui, tu es mignonne », dis-je sans hésitation. Encore une fois, la réponse est correcte. Je n'étais pas trop sérieux, mais Kokone est satisfaite au moment où elle entend « mignonne » et hoche la tête avec un sourire.

« Mhm, mhm. Je vois, tu as de l'avenir, Kazu-kun. Hey, toi—celui à la personnalité tordue ! Tu devrais suivre son exemple. » Elle croise les bras avec satisfaction et tourne sa tête vers Daiya.

« Je préfère arracher cette langue plutôt que de dire ça. »

« Ah, la planète entière pousserait un soupir de soulagement. S'il-vous-plait faîtes donc. »

« Non, pas ma langue... Je parle de la tienne »

« Haha ! Donc tu désires un intense baiser langoureux avec moi ? Pitié ne te laisse pas emporter par ta fascination pour moi~ »

Sans même prendre conscience de la situation où je suis, ils commencent à s'insulter à la vitesse de la lumière, comme d'habitude.

Peu après, Daiya soulève la question de l'étudiante transférée.

« S'il-te-plaît, viens vite Otonashi-san »



« Je suis Aya Otonashi. Je ne suis intéressée par personne sauf Kazuki Hoshino et le propriétaire. »

À ce moment, la salle de classe devient bruyante.

Umm, Otonashi-san ? Tu es une nouvelle élève, alors bien sûr tu peux éviter tes camarades de classe le premier jour. Mais ça fait presque un an que je suis dans cette classe, donc ça marche pas pour moi, tu vois ?

« Qu'est-ce qu'elle veut dire par "le propriétaire" ? De quoi est-il propriétaire ? Veut-elle dire "la personne qui possède Hoshino" ? »

« Ne serait-ce pas tout simplement sa "petite copine" ? »

« Ce qui veut dire que Kazuki-kun a une "petite copine" et que la nouvelle élève Otonashi-san la cherche, mais pourquoi ? »

« Je suppose qu'il y avait quelque chose entre lui et Otonashi-san. Peut-être qu'ils sortaient ensemble... Donc il joue double jeu ?! »

« Exactement ! Ça doit être ça ! Et c'est plus marrant ! »

« Donc tout en étant troublé par des sentiments d'haine et d'amour, elle a pourchassé Hoshino et a intégré notre école. Je suis sûre de ça. »

« Ce qui veut dire... que Hoshino a séduit une telle beauté ?! Sérieux !! »

Nos camarades de classe continue à leur guise tout en nous ignorant, nous, le centre de leur discussion. Où diable leurs viennent ces idées ?

« Donc, Hoshino... tu ne faisais que te jouer de moi... »

« Quoi ?! Tu étais l'autre victime ?! »

« Non... J'étais probablement juste un extra... La troisiè... non, il doit y en avoir d'autres. »

« Quoi... le salaud ! »

Kokone fait semblant de pleurer pendant que Daiya en profite pour faire entendre sa voix d'une manière inhabituelle. Sérieusement, pourquoi ces deux-là s'entendent seulement dans ces situations...

« ... Voilà qui est ennuyeux » murmura Otonashi-san. « Grâce à toi, je suis devenue encore plus sujette à curiosité. »

Err... En quoi est-ce que c'est ma faute ?



Juste après le premier cours, Otonashi-san et moi nous précipitons dehors. Alors que certains de mes camarades m'encouragent naturellement, je sens aussi quelques regards assoiffés de sang de certains des garçons—Mais pas le temps de se tracasser à ce sujet.

On se pose à notre endroit habituel : l'arrière du bâtiment de l'école.

On ne prendra pas la peine de revenir en classe.

« Je vois. Travailler avec toi veut dire que je m'engouffre directement dans ton réseau de relations. Mince... voilà qui n'est pas pratique. »

Non, je suis à peu près sûr que le problème vient de ce que tu leur a dit.

« Mais c'est la première fois en 27 755 itérations que les rejeter a eu un effet négatif. C'est vraiment amusant. »

« Umm, je ne sais pas si tu devrais trouver ça drôle... »

« Ne dis pas ça. Même pour moi les nouvelles expériences sont assez palpitantes. Et les circonstances ont beaucoup changé juste parce qu'on travaille ensemble. Voilà un changement bienvenu. »

« Qu'est-ce que tu veux dire ? »

« Il y a pu avoir des indices que je n'ai pas remarqué quand j'étais seule. »

De mon point de vue, ça vaut définitivement le coup de coopérer, mais... euh...

Étonnamment, elle pourrait avoir raison. Après tout, elle ne savait pas comment la classe 1-6 marchait avant aujourd'hui. Elle ne peut pas comparer aujourd'hui avec les jours d'avant. Par exemple, elle ne sait pas que mon amour pour Mogi-san a évolué entre aujourd'hui et hier—c'est-à-dire pendant la Classe Rejetée.

« Mais qu'est-ce qu'on fait maintenant, spécifiquement ? »

« ... À propos de ça, Kazuki. J'y réfléchissais encore et suis arrivée à la conclusion que tu pourrais encore être la clé de la Classe Rejetée. »

« Hein ? Tu me suspectes encore ? »

« Ce n'est pas ça. Laisse-moi te poser une question : comment est-ce que tu gardes ta mémoire ? »

« Eh... Qui sait ? »

« C'est un vrai mystère, hein...? Je peux sentir certaines différences entre toi et les autres, mais n'est-ce pas étrange que tu sois le seul qui conserve sa mémoire ? »

« Eh bien... je suppose oui. »

« Donc, je suppose que ta faculté est également motivée par les objectifs du propriétaire. »

« E..ehh...? »

« Tu es lent, comme toujours. En d'autres termes, il pourrait aussi être dans l'intérêt du propriétaire que tu gardes tes souvenirs. »

Le but de la Classe Rejetée est que je conserve ma mémoire ?

« C'est impossible. Je ne garde pas tout le temps ma mémoire, non ? Sans toi, j'aurais probablement continué à perdre ma mémoire comme tout le monde. »

« Effectivement, c'est le défaut de mon hypothèse. Cependant, il est possible que le maintien de la mémoire est tout aussi corrompu que la reproduction de ce monde du passé. On pourrait expliquer cela si tu prends en compte cette contradiction: le passé ne peut être complètement reproduit si tu conserves ta mémoire. »

Cela serait effectivement possible. Mais cela me semble absurde.

« Déjà, pourquoi est-ce qu'on me laisserait conserver ma mémoire ? »

« Comment est-ce que je devrais le savoir ? » répond-elle crûment. « Mais je sais quel sentiment anime le plus les gens. »

« Quoi ? »

Otonashi-san me fixe profondément des yeux et dit.

« L'amour. »

« ... l'amour... ? »

Son regard terrifiant m'empêche un instant de lier le mot à son sens. Aah l'amour ?

« Otonashi-san, c'était assez romantique de ta part. »

Otonashi-san me regarde froidement.

« Pourquoi ? Un amour suffisamment intense n'est pas différent de la haine de toute façon. »

« Pas différent de la haine ? » Je suis déconcerté. « ... I-Ils sont complètement différents ! »

« Ce sont les mêmes choses... Non, ils sont différents. L'amour est juste pire que la haine, les gens ne se rendent pas compte à quel point c'est dégoûtant. C'est juste répugnant. »

Répugnant, hein...

« Ça n'a pas d'importance maintenant. Kazuki, y a-t-il une personne que tu as en tête ? »

« Tu veux dire quelqu'un qui est amoureux de moi? Impossible qu'il— »

J'allais dire qu'il n'y avait personne comme ça, mais je me rappelle tout d'un coup.

Il y a une personne.

Si elle ne rigolait pas quand elle m'a avoué au téléphone, alors il y a une candidate.

« On dirait que tu as pensé à quelqu'un. »

« ... »

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

« ... Err, eh bien. Cette fille qui m'aime, elle n'est pas forcément le coupable, pas vrai ? »

« Bien sûr que non. Ce n'est pas suffisant pour prouver sa culpabilité. Mais il n'y a aucune raison de ne pas enquêter sur cette possibilité »

« Enfin... je veux dire, c'est impossible qu'elle soit la coupable. »

« Qu'est ce qui te fait dire ça ? »

Je sais que je ne veux juste pas qu'elle soit le coupable.

« Nous avons autant de temps que nous voulons tant que nous restons à l'intérieur de la Classe Rejetée. Nous devons profiter de chaque occasion pour se rapprocher du propriétaire. »

« ... Mais jusqu'à maintenant tu n'as jamais réussi avec cette méthode, non ? »

« Tu es vraiment effronté aujourd'hui, tu sais ? Mais tu as raison. Pourtant, nous avons comme nouvel indice que la conservation de ta mémoire fait partie des intentions du propriétaire. Je n'ai encore jamais enquêté avec cette hypothèse. On pourrait obtenir de nouvelles informations comme ça. »

« Mais— »

« Ne voudrais-tu pas l'innocenter le plus rapidement possible justement parce que tu lui fais confiance ? »

Oui. Otonashi-san a raison.

Je dois également avoir mes doutes sur cette personne, ce qui ne me donne pas envie d'enquêter sur elle.

« ... Ok j'ai compris. Je vais t'aider. »

« Tu ne devrais pas juste m'aider, mais prendre les devants. »

Elle a raison. Je suis celui qui veut sortir de cette Classe Rejetée.

... Mais... Quelque chose m'a fortement dérangé depuis un bout de temps maintenant. Il y a quelque chose de bizarre.

« Eh bien, allons-y. »

« A-Attends une seconde. »

« Pourquoi tu hésites ?! Ma patience commence à atteindre ses limites ! »

Ce qui me dérange— ah, je vois.

Quand j'identifie la source de ce malaise, mes oreilles s'échauffent.

« Mh ? Qu'est ce qui se passe Kazuki ? Ton visage est rouge. »

« Ah, non, c'est juste que— »

Pourquoi est-ce qu'elle m'appelle "Kazuki" au lieu de "Hoshino" ?

« Quoi ? De quoi tu parles ? ... Hé, pourquoi ton visage ne s'arrête pas de rougir ? »

« ... D-Désolé. Oublie »

Depuis quand est-ce qu'elle m'appelle par mon prénom ? Pas même mes parents ne s’adressent à moi comme ça. [5] Je suppose que mon visage est encore plus rouge maintenant.

« ...? ... Euh OK, je suppose ? En tout cas, allons-y. »

"Otonashi-san" me tourna son dos et commença à marcher.

« O-Ouais... »

Est-ce que je devrais aussi commencer à l'appeler par autre chose que "Otonashi-san" ? Si je suivais son exemple, je devrais l'appeler... "Aya" ?

... Nononononon !!! Je peux pas ! Je peux pas ! Hors de question !!!

Il faut au moins "Aya-san"... Non, c'est toujours inadmissible. Mais "Otonashi-san" fait trop réservée. Il faut quelque chose de plus facile à dire et un peu plus décontractée.

« Ah... »

Une idée me vient. C'est aussi assez embarrassant à dire, mais puisque j'ai déjà utilisé ce nom plusieurs fois, ça devrait marcher.

« ... Maria. »

Quand je murmure son nom à voix basse, "Otonashi-san" s'arrête et se retourne. Ses yeux écarquillés.

« Ahh ! D-Désolé !! » Je m'excuse instinctivement après avoir remarqué son brusque réflexe.

« ... Pourquoi tu t'excuses ? Tu m'as juste surprise. »

« ... Alors tu n'es pas en colère ? »

« Pourquoi je serais en colère ? Appelle-moi comme tu veux. »

« J-Je vois... »

Otonashi-sa... non, la bouche de "Maria" se détend.

« Mais parmi tous les choix possible, tu as quand même choisi Maria... Heh »

« Ah, euh... si tu n'aimes pas... »

« Ça ne me dérange pas. J'ai juste une nouvelle fois confirmé quelque chose. »

« Err... Qu'est-ce que tu as confirmé ? »

Pour une raison qui m'est inconnue, Maria sourit tendrement.

« Que toi, Kazuki, es un compagnon amusant. »



Je fouille dans quelque chose.

Nous sommes revenus dans la salle de classe, et maintenant je fouille dans les affaires de la fille qui avait l'air de m'aimer.

Bien sûr, je ne le fais pas car je le veux, et je me sens aussi très miteux.

Là, elle est en Éducation Physique. Maria a décidé qu'au lieu de lui parler directement, on devrait saisir cette opportunité pour chercher des indices dans ses affaires.

Puisque je suis silencieusement arrivé à la même conclusion, j'ai obéi tout en me sentant miteux.

Au fait, cette fouille ne peut porter ses fruits que si je suis celui qui le fait. Maria a déjà cherché à travers les affaires de tout le monde, plusieurs fois. À en juger par l'état actuel des choses, elle n'a rien trouvé d'utile jusqu'à maintenant, ce qui était assez attendu. Maria ne va pas remarquer les changements suspects puisqu'elle ne nous a connus qu’une journée.

« Euhhh... »

La fille a tracé des traits propres et colorés pour structurer ses manuels. Ses notes sont écrites soigneusement avec des petites et rondes lettres. Et elle a utilisé beaucoup de couleurs ici aussi. Un chat est dessiné sur le bord gauche de l'une est page. Et voilà un autre dessin sur la page suivante, au même endroit. Le même chat à la page suivante... À ce moment-là j'ai réalisé que c'était un folioscope. Quand je le feuillette, le chat s'envole sur une fusée, fusée qu'elle a faite à partir d'une boîte de conserve. Je souris avant que le regard noir de Maria me contrôle.

Tout compte fait, j'ai trouvé un tas de trucs de filles. Ses affaires sont généralement de couleur rose ou blanche. Son iPod est rempli de J-Pop. Son portefeuille n'est pas à l'intérieur de son sac, elle doit probablement le porter sur elle.

« Oh ! »

Je trouve un téléphone portable soigneusement décoré, une mine de renseignements personnels.

J'espérais trouver des indices, mais le portable est verrouillé, je ne peux pas creuser plus loin... mais d'un autre côté, je suis soulagé que je ne puisse pas le faire.

Je vérifie la trousse à maquillage à côté du miroir rose. Ça, ça devrait être le fond de teint, ça un rouge à lèvre, ça un eye-liner, et là les ciseaux qu'elle utilise pour égaliser ses sourcils, et enfin un objet qui semble tout à fait nouveau... du mascara, je suppose.

« — »

Oh ?

Quelque chose est étrange.

« As-tu trouvé quelque chose, Kazuki ? »

« ... Je ne sais pas encore... »

Je fouille à travers le contenu de trousse une fois encore. Je ne pense pas qu'il y a un indice à l'intérieur.

« Maria, est-ce que tu remarques quelque chose d'étrange à propos de cette trousse ? »

« Non ? J'ai déjà cherché à l'intérieur avant, mais je n'avais rien trouvé de spécial— »

Son visage se fige en plein milieu de sa phrase.

« —attends, ça ne se peut pas. Elle ne devrait pas avoir cet objet. Impossible qu’en 27 755 boucles j'ai raté ça. Mais... apparemment— »

« Hein ? Tu as trouvé quelque chose ? »

« ...Kazuki. Après avoir vu ça, tu aurais tu sentir quelque chose. »

« ...Hein ? ...Mhh, bah, je pensais qu'elle n'était pas du genre à se maquiller. »

« Bon sang ! »

Maria se crispe amèrement son visage.

Je continue de chercher à l'intérieur de la pochette pour trouver plus d'indice. À l'intérieur je sens quelque chose de familier et le sort.

« Ah— »

Ça se déclenche...

Quand je vois les emballages familiers, mes souvenirs refont surface.

«  Est-ce que tu aurais accepté ma confession si j'avais choisi une approche différente ? »

« Aah, d'accord. Alors j'ai juste besoin de continuer à me confesser jusqu'à ce que je réussisse, n'est-ce pas ? »

Pas possible.

Pas possible.

Pas possible.

Je ne peux pas croire à une telle absurdité.

C'est juste une coïncidence. Cela doit être juste une coïncidence, mais les souvenirs qui refont surface dans mon esprit sont bien trop ridicules pour n'être que le produit de mon imagination…

« — Maria, qu'est-ce que t'adore grignoter ? »

« ... Pourquoi est-ce que tu parles de ça ? » Maria me regarde et fronce les sourcils. « ... Hé, qu'est-ce qu’il se passe Kazuki ? Tu n'as pas l'air de se sentir bien ! »

« ... Tu sais, mon snack préféré, c'est l'Umaibō. »

Je montre l'objet que j'ai enlevé de la trousse.

C'est un emballage d'Umaibō.

« J'aime particulièrement la saveur Corn Potage. Mais je suis le seul à le savoir parce que ça n’intéresse personne. Je mange souvent des Umaibō dans la salle de classe, mais pour ce qui est de la saveur, j'en mange de tous les goûts tout le temps. Personne ne devrait savoir que je préfère les Umaibō aromatisé au Corn Potage ! »

«  Mais tu n'aimes pas le goût Teriyaki Burger tant que ça ? »

« Quelle saveur aimes-tu le plus ? »

Je prie m'être trompé et jette un œil à l'emballage encore une fois.

Peu important combien de fois je le regarde, rien ne change.

Ce n'est pas assaisonné au Teriyaki Burger. C'est un Umaibō au Corn Potage.

Les souvenirs qui sont revenus me crient dessus.

Même si c'est juste une coïncidence qu'elle ait un Umaibō au Corn Potage dans son sac, les images de mes souvenirs tout justes récupérés sont indéniables.

Elle est la propriétaire.

« Kazuki. »

Maria saisit fermement mes épaules. Ses ongles s’enfoncent dans ma chair et me ramène à la réalité.

« Elle est définitivement la propriétaire. Nous sommes arrivés à notre but... enfin, pas totalement. »

Après que Maria crache ces mots avec beaucoup d'amertume, je demande « Qu'est-ce que tu veux dire ? »

« Quelqu'un qui fait une erreur aussi stupide ne pourrait pas me tromper pendant 27 755 "transferts d'écoles". »

« Mais Maria, tu dois admettre que tu ne savais pas qui était le propriétaire. »

« Ce n'est pas vrai. J'ai probablement découvert son identité plusieurs fois déjà, mais je n'ai pas pu retenir qu'elle était la propriétaire ».

« Hein ? Pourquoi pas ? »

« Je ne peux pas dire avec certitude, mais je suppose que la Classe Rejetée a une autre fonction. Cela serait logique. La Classe Rejetée fonctionne tant que la propriétaire croit qu'elle est dans une boucle immuable. Mais si quelqu'un d'autre savait qu'elle était la propriétaire, cette condition préalable s'effondrerait. Par conséquent, dès que quelqu'un découvre qu'elle est la propriétaire, ce souvenir est effacé. »

« ... Mais on sait qui est la propriétaire cette fois. »

« Certes. Mais ce n'est pas une raison pour se réjouir. » Dit Maria avec un ton vexé. « Si l'on ne fait rien, nous allons perdre cette indice encore un fois. »

Je vois. À moins de battre le propriétaire pendant ce tour, nous allons oublier tout de cette itération et chercher le coupable depuis le début une nouvelle fois.

Maria est clairement ennuyée et mastique ses lèvres. N'avoir qu'une chance d'accomplir quelque chose pourrait être très frustrant, surtout qu'elle s'est habituée à tout refaire si besoin.

« ... Mais Maria, la vie n'est-elle pas aussi n'est décidé qu'en une fois ? Peu importe à quel point le problème est trivial, il n'y a aucun bouton reset pour le dernier point de sauvegarde. »

Je suis assez fier de cette réplique, mais Maria m'effraie avec ses yeux impitoyables.

« À quoi sert cet encouragement maladroit ? »

Elle soupire même.

« D-Désolé... tu avais l'air un peu irrité. »

En entendant mes excuses, Maria se détend un petit peu.

« Ouais, je le suis. Mais pas parce que notre situation est défavorable. »

« ... Mais plutôt parce que ? »

« Ne comprends-tu pas ? Même si j'ai déjà découvert à plusieurs reprises qu'elle était la propriétaire, la Classe Rejetée est encore là. Tu vois ce que je veux dire ? »

Je lui fais signe de la tête que non.

Je ne sais pas si c'est dirigé à moi, le coupable, ou elle-même, mais Maria exprima ses mots avec beaucoup d'agacement:

« J'ai perdu face au propriétaire de nombreuses fois déjà. »



« Kokone. »

« Oh, l'expert de l'amour, Kazuki Hoshino, est finalement arrivé ! »

Comme toujours, Kokone me taquinait.

C'est la pause déjeuner pour le moment. Maria et moi avons fini par sauter tous nos cours du matin, donc tout le monde a commencé à nous taquiner. Mais grâce au désintérêt complet de Maria, nos camarades ont très vite abandonné. Leurs regards curieux sont toujours concentrés sur nous par contre. Bah, il fallait s'y attendre.

« Écoute, Kokone. Pour te dire la vérité… »

Je m'arrête. Parce que le visage de Kokone est passé de doux à grave, et elle me tirait par mes manches.

Après avoir jeté un coup d’œil à Maria, Kokone me dirige hors de la salle de classe.

« Kazu-kun, s'il-te-plaît n'évite pas ma question et donne-moi une réponse honnête. »

Juste à côté de la porte, Kokone lâche ma manche et continue de parler.

« Quelle est la nature de ta relation avec Otonashi-san? »

« ... Pourquoi tu me demandes ça ? »

Dis-je, en sachant déjà la réponse. Kokone baisse son regard, sans me répondre.

« Je ne peux pas décrire ma relation avec Maria très facilement. »

Kokone reste silencieuse, tout en fixant le sol.

« Mais j'aime quelqu'un d'autre qu'Otonashi-san. »

Kokone écarquille ses yeux quand elle entend mes paroles et me regarde.

« Donc… »

Mais Kokone ne dit pas autre chose. Mais elle déplace son regard, ce que je remarque tout de suite.

Elle scrute la salle de classe à la recherche de quelqu'un.

Ses yeux s'arrêtent.

Et ils sont fixés sur… Kasumi Mogi.

Le premier jour de mars, je n’étais pas encore tombé amoureux de Mogi-san. Et pendant cette itération, la 27755è, je ne suis pas entré en contact avec elle de quelque manière que ce soit.

« Kokone, pour te dire la vérité, il y a quelque chose que je voudrais que tu fasses. C'est… »

« Ouais. Tu n'as pas besoin de le dire. Je pense que notre discussion a tout éclairci pour moi » dit Kokone avec un sourire. La salle d'éducation cuisinière[6], après l'école—ça marche pour toi ? Je te dirais tout à ce moment-là ! »

Pourquoi la salle de cuisine, je m'étonne un moment mais je me rappelle que Kokone est membre du club d'Éducation Domestique.

« On sera probablement les seuls là-bas aujourd'hui. »

Quand j'hoche la tête, elle me regarde encore. Je n'arrive pas à deviner ses pensées.

« Kazuki. »

Maria, qui nous surveillait d'à travers la porte, m'appelle. Voilà probablement le signe pour moi de faire marche arrière.

« À plus tard » dis-je à Kokone, je suis sur le point de me retourner

« Ah, attends une seconde ! »

Kokone m'arrête. Je la regarde dans les yeux encore une fois.

« Euh, je peux te demander ? Ah, mais tu n'es pas obligé de répondre bien sûr... »

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Qui est la personne que tu aimes, Kazu-kun ? »

Je réponds sur le coup.

« Mogi-san ! »

Au moment où elle entend ça, Kokone baisse sa tête tout en cachant son visage. Mais j'ai déjà remarqué.

Kokone souriait.



Les cours sont finis.

On entend quelqu'un crier à l'intérieur de la cuisine. Au moment où on entre, nous nous rendons compte immédiatement que quelque chose a mal tourné.

Nous avions raté cette exceptionnelle occasion.

Comme prévu, Kokone Kirino et Kasumi Mogi sont dans la cuisine. Non, plus précisément Kokone Kirino et ce qu'était avant Kasumi Mogi sont présentes.

La salle est tachée de sang.

Le coupable tient un couteau de cuisine ensanglanté.

« Kazu-kun. »

Alors qu'elle remarque ma présence, son expression reste la même.

« ... P-Pourquoi… »

Je ne comprends pas. Pourquoi a-t-elle fait ça ?

Couverte de sang, Mogi-san me regarde. Elle est aussi inexpressive que toujours. Mais je remarque une lumière qui scintille dans ses yeux et me juge.

Aah, oui. C'est vrai. Je suis tout autant à blâmer pour cette situation.

« Ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal… »

Mogi-san murmure sans relâche quelque chose ressemblant à une malédiction.

Je ne veux pas écouter ça. Je veux juste couvrir mes oreilles. Mais même ça je ne peux pas le faire. J'ai perdu contrôle de mon corps aussitôt que j'ai vu Mogi-san couverte de sang. Ses mots envahissent mes oreilles. Je tente désespérément d'éviter de saisir le sens de ces mots. Mais c'est vain… les mots me submergent tel une avalanche, ils déferlent sur moi et couvrent mon corps paralysé.

Mogi-san est en train de parler.

Mogi-san prononce les mots qui me condamnent.

« Ça fait mal ! »

27755e fois (2)[edit]

« Ça peut paraître un peu tardif, mais j'ai remarqué que je n'ai plus besoin de toi. »

Elle incline sa tête. Peut-être que tout ça se produit trop rapidement pour elle.

« En vérité, j'ai remarqué depuis longtemps que tu es une entrave, tu sais ? Mais je ne voulais pas être cruelle. Après tout, nous étions initialement "amies". »

Mais nous ne sommes plus amies.

Je suppose qu'elle me considère encore comme une "amie". Jusqu'à hier, nous étions tellement proches que nous aurions discuté des épreuves de nos vies amoureuses respectives. Mais maintenant que j'ai changé, je ne peux plus penser comme ça. Par conséquent, nous ne sommes plus "amies".

Mais je ne suis pas entièrement responsable ici : peu importe comment je la traite, elle est incapable de conserver le moindre doute à mon propos. Même quand je lui parle complètement différemment que je le faisais avant, elle est incapable de le remarquer.

... Personne ne peut troubler ma transformation.

C'est la règle de ce monde.

Supposons que, dans le monde habituel, je change tandis que les autres restent les mêmes. Elle me croit être son amie. Alors si je change, elle le perçoit comme quelque chose d'inhabituel. Rien que ça restreint déjà ma liberté à me transformer. C'est similaire à la réaction que les gens auraient envers quelqu'un qui se serait soudainement teint les cheveux en blond pendant les vacances d'été. Mes options seraient limitées si je suis placée dans un environnement où je ne peux pas évoluer librement.

Dans ce cas, je ne serais pas capable d'accomplir mon seul et unique souhait, "passer la journée sans regret".

C'est pourquoi cette règle confortable existe.

C'est vrai. Ce monde a été créé uniquement pour mon confort.


Et pourtant —


Et pourtant... quoi ? Je ne peux pas penser à ce qui va se passer.

J'ai le sentiment que je ne dois pas penser à ce sujet.

Alors j'évoque un autre sujet à la place.

« Tu ne trouves pas que "l'amour" est comme répandre de la sauce de soja sur une robe blanche ? »

Elle ne semble pas comprendre ma métaphore et incline la tête d'un air narquois.

« Disons que tu as renversé de la sauce de soja sur ta robe blanche, d'accord ? Eh bien, essaye de l'essuyer : la robe sera toujours tachée. Ces taches sont éternelles. Ainsi, tu te rappelleras toujours "aah, j'ai renversé de la sauce de soja ici..." à chaque fois que tu la verras. Il n'y a aucun moyen que tu puisses l'oublier puisque les taches restent là pour toujours. »

J'ouvre un tiroir dans le placard.

« Tu sais ce qui me rend malade ? »

J'empoigne fermement le manche d'un couteau de cuisine à l'intérieur du tiroir.

« Que ce soit une tache comme ça qui m'a brisée ! »

Je sors le couteau de cuisine.

J'ai utilisé ce couteau de cuisine plusieurs fois déjà dans le même but. Ce couteau de cuisine particulier se trouve être le plus tranchant.

Elle blêmit quand elle voit que je tiens le couteau de cuisine. Elle me demande, « Qu'est-ce que tu veux faire avec ça ? » même si je parie qu'elle a une petite idée de ce qui est sur le point de se produire. Mais elle ne peut pas croire que j'aurais pu faire ce qu'elle est en train de "prédire".

« Tu veux savoir ce que je vais faire avec ça ? Ufufu... »

Mais tu sais quoi ? Je suis vraiment désolée de le dire, mais c'est probablement...

« Je vais te rejeter ! »

... exactement ce à quoi tu t'attendais.


J'ai *******dé ****** avec un *******.


J'essaye d'éviter de comprendre le sombre et douloureux sentiment qui est sur le point de survenir. Bien que toute résistance soit futile, bien que ce soit nécessaire pour mes objectifs, j'essaye de résister... parce que je ne veux pas me sentir de cette façon ; parce que je veux continuer de faire comme si je ne comprenais pas ce sentiment.

Elle s'est écroulée et crache du sang.

Elle doit être en train de souffrir. C'est pitoyable.

J'ai probablement échoué. Je devrais l'avoir **ée de la manière la moins douloureuse possible.

« Tu sais, échouer comme ça peut s'avérer être vraiment effrayant. Les garçons développent une puissance absurde quand ils sont désespérés. Même un garçon faible est plus fort que je ne le suis. Être frappé par une telle force est très douloureux. Mais le regard dans leurs yeux quand ils me frappent est encore plus effrayant. Ils me regardent comme si j'étais un déchet. Pourquoi est-ce que j'ai encore échoué ? ... Ah, c'est vrai. Parce que j'ai utilisé un couteau bon marché juste parce qu'il semblait cool. C'est très dur de tuer des gens avec ce genre de chose, tu sais ? Et c'est désagréable pour ça. Poignarder ou trancher des gens c'est... C'est répugnant ! Je pouvais vomir à cause de ça. J'ai aussi pleuré, me demandant pourquoi je devais faire des choses aussi désagréables. Mais tu sais ? Au final, la même chose se produira encore et encore tant que la personne en question prend les mêmes actions. Et à cause de ça, mon avenir convoité n'arrivera jamais. Alors je n'ai pas d'autre choix que de supprimer cette personne, n'est-ce pas ? C'est inévitable, pas vrai ? Ce n'est pas simplement cruel ? Pourquoi est-ce que je dois faire des choses pareilles ? »

Elle me regarde avec des yeux impuissants.

« Mais pour te dire la vérité, peut-être que je n'aurais même pas eu besoin de te poignarder comme ça. Au final, "rejeter" est juste une question de mentalité. Mais tu sais ? Je ne pouvais pas trouver d'autres façons. Je ne pouvais "rejeter" personne autrement qu'en le tuant de mes propres mains. Ce n'est pas si facile de "rejeter" quelqu'un du fond de mon cœur. J'ai placé un poids sur mon cœur. Et en créant ces sentiments de culpabilité, je me suis forcée à me sauver de cette personne. Grâce à ça, je peux réellement sentir que je ne veux plus voir cette personne — Je l'ai "rejetée". Personne ne sera plus capable de se souvenir de cette personne, peu importe ce qu'il se passe. »

Sa tête tombe. Elle semble incapable de la soutenir plus longtemps.

« Je sais ! C'est de ma faute, n'est-ce pas ? Mais dis-moi, qu'est-ce que je devrais faire alors ? ... Désolée. Tu n'en as pas la moindre idée, hein ? Aah, pourquoi est-ce que je parle autant ? Je sais pourquoi. Je suis si anxieuse, si anxieuse, si anxieuse, que je ne peux pas me taire. J'espère secrètement que tu pourrais me pardonner après m'être expliquée. Mais il est impossible que tu me pardonnes, n'est-ce pas ? Je suis désolée. Vraiment, je suis désolée. Je suis désolée, je suis désolée. Je suis désolé d'être aussi égoïste. Mais tu sais ? Je suis celle qui souffre le plus, après tout. J'accepte bien la faute. Je sais que je fais quelque chose de mal. Alors, pour être honnête, je ne pourrais pas me préoccuper moins de ce que tu penses de moi. »

Je me demande à qui je parle ?

Mais j'ai le pressentiment que ça n'a pas d'importance. Je n'ai jamais parlé avec qui que ce soit en particulier, de toute façon. Je n'ai jamais ne serait-ce que considérer la personne qui s'est écroulée au sol comme une "amie".

Je suis seule de toute façon.

« N-Non... »

Et pourtant, je ne veux pas l'admettre.

Même si ça me rend d'autant plus consciente d'à quel point je suis seule dans une telle position, je ne peux pas m'empêcher de crier :

S'il-te-plaît, viens !

Dépêche-toi de venir !

« Kazu ! »

Je me demande quand... quand est-ce que j'ai commencé à m'adresser à lui de manière tellement informelle ? Même si j'ai à maintes reprises eu la permission de m'adresser à lui de cette façon pendant ces boucles temporelles, il ne s'en souvient jamais.

À l'instant, la porte s'ouvre.

Il est là.

Celui que je désirais, Kazuki Hoshino, est là.

Kazu perd sa capacité à parler en voyant ce spectacle horrible. À côté de lui se trouve cette fille énervante, Aya Otonashi, qui vit dans ma boîte tel un parasite.

« ... Alors tu es enfin venu, Kazu. »

Je suis étonnée de mes propres mots.

À quel point puis-je seulement être stupide ?

Combien de fois Kazu a-t-il seulement trahi mes attentes ? N'ai-je pas déjà renoncé à lui plusieurs fois après ce nombre incalculable de trahisons ?

Ce n'est même pas une coïncidence qu'il apparaisse ici. J'ai décidé de l'inviter ici, afin de lui montrer cette scène.

Et pourtant je ne peux pas m'empêcher d'attendre un miracle de sa part parce qu'il s'est montré, tout comme cette fois il y a longtemps. Je commence à espérer qu'il me fera retourner dans le monde réel.

Même si... il est impossible que ça se produise.

Kazu a les yeux écarquillés.

« Kazuki. Je peux deviner comment tu te sens. Mais tu aurais dû le savoir. »

La fille inutile dit quelque chose.


« Que le possesseur est... Kasumi Mogi. »


Kazu tourne ses yeux élargis vers le ******* écroulé.

C'était quoi son nom déjà ? Tant pis. J'ai oublié. J'ai même oublié quand j'oubliais.

« ... P-Pourquoi— »

Tu veux savoir pourquoi est-ce que j'ai fait ça ?

Je ne peux pas cacher mon agacement devant la lenteur de Kazuki.

Le blâmant de mes yeux, je lui crie mes pensées à haute voix.

« Ça fait mal ! »

Ce n'est pas suffisant.

« Ça fait mal, ça fait mal »

Ce n'est toujours pas suffisant.

« Ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal, ça fait mal… »

Il ne faut simplement pas que je...

« Je veux vivre ! »[7]

27755e fois (3)[edit]


Une fois que Maria l'a mentionné, j'ai aussi réalisé que Mogi n'était pas maquillée. En tant que garçon, je n'y connais évidemment rien en ce qui concerne le maquillage... alors il était beaucoup plus facile pour Maria de constater ce changement.

Mais Mogi a quand même une pochette de maquillage.

Pourquoi ça ?

Voici le raisonnement de Maria :

... Elle en a eu assez de l'utiliser.

Je ne peux pas me fier à mes souvenirs effacés mais je suppose que Mogi se préoccupait beaucoup de son apparence à l'origine. Toutefois, elle a arrêté de s'embêter à mettre du maquillage puisqu'il n'y avait plus de raison de le faire dans la Classe Rejetée. Elle a laissé sa pochette intacte dans son sac depuis le 1er Mars, avant que la Classe Rejetée ne commence.

Mogi commençait à en avoir marre de sortir le maquillage de son sac et de le mettre.

Cela ne se serait produit qu'à quelqu'un qui se souvient de plus de 20 000 boucles temporelles.

Et cette personne ne peut qu'être que... le possesseur.

Par conséquent, la fille que j'aime, la fille qui m'aime, Kasumi Mogi, doit être... le possesseur.


« Il y a quelque chose que je dois te dire, Kazu. »

C'est ce que Kokone a dit quand elle m'a appelé pendant l'itération précédente, la 27 754ème boucle temporelle. Elle m'a dit :

« Kasumi est amoureuse de toi ! »

Kokone connaissait l'amour que Mogi portait envers moi. Je suis sûr que Mogi lui en a parlé puisqu'elles étaient bonnes amies jusqu'à hier.

Maria et moi voulions piéger Mogi.

Mais si c'était nous qui l'aurions fait, elle aurait été naturellement sur ses gardes. Si possible, nous voulions éviter de donner à Mogi la moindre chance de se préparer, bien qu'elle ait déjà vaincu Maria tellement de fois.

À la place, nous décidions d'utiliser Kokone en tant qu'intermédiaire. Nous avions conclu qu'elle pourrait entraîner Mogi dans notre piège, si elle lui faisait croire que j'avais prévu de me confesser à elle.

Notre plan se termina... sur la mort de Kokone.

Je me rappelle les mots de Mogi.

« ... Alors, est-ce que tu veux sortir avec moi ? »

Combien de fois est-ce qu'elle s'est confessée à moi ? Combien de temps a-t-elle été amoureuse de moi ? Si notre amour était réciproque, alors pourquoi...

« S’il te plait, attends jusqu’à demain. »

Pourquoi avait-elle dit ça ?

Mogi semble être inconsciente du sang qui couvre ses vêtements et son corps. Elle est inexpressive.

... Comme toujours.

A-t-elle toujours été aussi inexpressive ? Non, dans mes souvenirs fragmentés, je peux hisser une image de Mogi en train de sourire joyeusement. Mais la Mogi souriante ne semble pas du tout réelle à mes yeux. Mon image cérébrale de Mogi est celle d'une fille inexpressive et réticente.

Mais et si cette vraisemblablement fausse, joyeuse et souriante Mogi est en vérité l'originale ?

Qu'est-il arrivé à la fille appelée Kasumi Mogi ?

« Elle s'est faite submerger, » grommelle Maria comme si elle répondait à ma question silencieuse. « Elle s'est complètement faite absorber par cette récurrence sans fin, » déclare-t-elle, les yeux ciblés sur Mogi avec mépris.

Cette idée m'est déjà venue à l'esprit : le psychisme humain ne peut sans doute pas endurer un nombre aussi vaste de récurrences.

Mais Mogi a expérimenté le même jour 27 755 fois.

Et après l'avoir expérimenté autant de fois, Mogi est désormais tachée de sang.

« ... C'est ta faute, Kazu. » dit-elle, en me fixant. « Ça s'est passé parce que tu m'a piégée ! »

« ... Mogi, qu'est-ce que j'ai fait ? »

« "Mogi". » Mogi répète son nom et pince ses lèvres. « Je te l'ai dit. Je te l'ai résolument dit. Je te l'ai dit des centaines de fois, n'est-ce pas ? »

« D-De quoi tu parles... ? »

« Je t'ai dit de m'appeler "Kasumi", n'est-ce pas... !? »

... Je ne le savais pas. Je ne m'en souviens pas du tout...

« Je te l'ai dit des centaines de fois et tu as accepté de le faire des centaines de fois, n'est-ce pas ? Alors, pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu l'oublies toujours juste après ? »

« C'est... inévitable... »

« Inévitable ?! Dis-moi, pourquoi est-ce que c'est inévitable ?! » hurle Mogi hystériquement. Pendant tout ce temps, son visage reste presque inexpressif.

Vraisemblablement, elle a oublié de changer son expression au cours de ces milliers de récurrences parce qu'elle n'a plus de raison de le faire. Elle ne peut plus rire, pleurer ou se mettre en colère convenablement.

« Kazuki, ne l'écoute pas. »

Mogi me libère de son regard et jette un regard noir à Maria.

« Ne t'adresse pas à Kazu aussi familièrement ! »

« Je peux l'appeler comme j'en ai envie. »

« Tu ne peux pas ! ... Pourquoi est-ce que Kazu se souvient de toi, mais pas de moi... ? »

« Mogi, tu as conçu les choses pour qu'elles marchent de cette manière, parce que ça les rend plus facile afin de faire la même chose encore et encore. »

« Tais-toi ! Je n'ai pas eu l'intention de faire ça ! »

À bien y penser, pendant la 27 754ème boucle temporelle, Mogi semblait effrayée quand elle a vu que je me souvenais de Maria.

Sur le coup, j'étais sûr que Mogi était simplement terrifiée par mon comportement étrange. Mais maintenant que je sais qu'elle est le possesseur, mon point de vu a changé : en vérité, elle a laissé son mécontentement accumulé jaillir parce que je me souvenais de Maria mais pas d'elle.

« Kazu... »

Moi non plus je ne suis pas habitué à ce qu'elle s'adresse à moi de cette façon.

Peut-être m'a-t-elle une fois demandé la permission de m'appeler "Kazu", tout comme elle m'a demandé de l'appeler "Kasumi".

Il se peut que j'ai oublié ça mais Mogi se souvient de tout ce qu'il s'est passé dans ces boucles temporelles.

« Kazu, tu as dit que tu m'aimais. »

« ... Ouais. Je l'ai probablement dit. »

« J'en étais heureuse ! Je t'ai dit que je t'aimais, moi aussi ! »

« ... ... »

Je me rappelle seulement qu'elle disait "S’il te plait, attends jusqu’à demain." C'est tout. Je ne me souviens de rien d'autre.

« Tu t'en souviens pas, hein ? »

Je ne peux pas lui répondre.

« Est-ce que tu peux imaginer combien j'étais heureuse ? J'ai fais de mon mieux pendant toutes ces boucles temporelles pour attirer ton attention. Je me suis coiffée, j'ai essayé de mettre du mascara, j'ai essayé de te plaire, j'ai étudié tes passe-temps, j'ai appris de quoi tu aimais parler... Et tu sais ce qui s'est passé ? Un miracle s'est produit ! Ton attitude a clairement changé. J'ai réalisé que tu avais commencé à t'intéresser à moi. Tu commençais à accepter ma confession, bien que tu m'avais rejetée auparavant. Tu t'es même confessé à moi. À chaque fois que tu le faisais, tu me donnais de l'espoir. Chaque fois, je pensais qu'une joyeuse "continuation" m'attendait. J'ai pensé que cette récurrence pourrait enfin se terminer. Mais tu sais quoi ? ... Kazu... »

Mogi me regarde de manière inexpressive.

« ... à chaque fois, tu oubliais. »

Je ne peux pas supporter son regard et je baisse les yeux.

« Même quand tu oubliais, j'avais de grands espoirs que tu t'en souviennes la prochaine fois. Chaque fois que tu acceptais ma confession, chaque fois que tu te confessais à moi, tu me faisais espérer encore et encore. Mais en fin de compte, tu ne te souvenais de rien. J'abandonnais bientôt tout espoir. Mais tu sais, si quelqu'un se confesse à toi, tu ne peux pas t'empêcher d'espérer quand même ! Un miracle pouvait se produire après tout. Et c'est pourquoi chaque fois que ça se produisait, j'étais de nouveau blessée. »

Je ne peux pas m'imaginer sortir avec elle. Mais Mogi a vraiment fait quelque chose que je n'étais même pas capable d'imaginer. Elle m'a fait tomber amoureux d'elle. Peut-être que c'est pour ça que certains de mes souvenirs sont vaguement préservés.

Mais en fin de compte, me conquérir comme ça était insensé.

Il n'y a rien à attendre avec impatience.

Après qu'elle me conquière, c'est là que tout se termine.

Ce qui l'attendait était un parfait amour à sens unique.

Un amour entièrement à sens unique qui reste non réciproque même après avoir gagner mon affection.

« Alors je ne voulais plus que tu te confesses à moi. Mais tu venais quand même. Tu disais toujours que tu m'aimais. Et même si j'étais tellement heureuse, la douleur n'en était que plus grande... Alors je n'avais pas d'autres choix que de te dire ça à chaque fois : »

Mogi dit ces mots que j'ai sans aucun doute entendu à maintes reprises.

« "S’il te plait, attends jusqu’à demain". »

Mon cœur est déchiré.

Tout ce temps, elle était la plus blessée par ces mots... bien plus que je ne l'étais.

Mais pourquoi ne met-elle pas simplement fin à la Classe Rejetée, alors ? Autrement, son amour à sens unique restera non réciproque. Même si elle a d'autres raisons de préserver sa boîte, elle est définitivement en train de souffrir grandement.

« Kazu... tu comprends ? C'est de ta faute si je souffre. Tout, tout, tout est de ta faute. »

« C'est quoi toutes ces absurdités que tu nous débites là ? » l'interrompt Maria avec un regard de mauvaise humeur sur son visage. « Quel manque de responsabilité extrême. Tu es juste en train d'imposer la responsabilité de ta douleur sur Kazuki parce que tu ne peux plus endurer la torture de ta propre Classe Rejetée. »

« ... Non ! C'est la faute de Kazu si je souffre ! »

« Pense tout ce que tu veux mais Kazuki n'est pas responsable. Il ne peut même pas se souvenir de toi. Kazuki a seulement protégé ses souvenirs dans l'intérêt de son propre objectif, pas pour ton cœur corrompu. »

« Pourquoi... pourquoi est-ce que tu saurais ça !? »

« Tu me demandes pourquoi ? » Maria se lève sec et la regarde de haut. « La réponse est simple, » dit-elle nonchalamment. « Parce que c'est moi qui ai observé Kazuki Hoshino plus que quiconque au monde. »

« Qu— »

En entendant ces mots caustiques, Mogi perd le fil de ses pensées.

Elle essaye de prononcer une objection, mais sa bouche s'agite simplement, s'ouvrant et se fermant sans former aucun mot.

Je ferme ma bouche pour une raison différente. Je veux dire, c'est embarrassant quand quelqu'un dit quelque chose comme ça ! Sérieusement.

« N-Non, je l'ai regardé pendant le même nombre de... »

« Ton temps est inutile. » Maria écarte sa déclaration avec une réponse désinvolte. « Tu ne comprends pas combien ton temps est inutile, juste en regardant ce à quoi tu as accompli ? Regarde-toi dans le miroir. Regarde tes mains. Regarde à tes pieds. »

Le visage de Mogi est couvert de sang solidifié qui a viré au noir.

Les mains de Mogi agrippent un couteau de cuisine.

Les pieds de Mogi reposent juste à côté du cadavre de Kokone.

« N'hésite pas à contester. Insiste si tu as regardé Kazuki aussi longtemps que je ne l'ai fait... si tu crois vraiment que tes mots ont le moindre poids. »

Mogi semble frappée par le regret et baisse son regard.

Je suis incapable de lui dire quoi que ce soit.

« ... ... Heh, fufufu. Tu as observé Kazu plus que quiconque au monde ? Oui, je suppose. C'est peut-être comme tu le dis. Ufufufu, mais ça n'a aucune importance ! Pourquoi cela le devrait-il ? »

Elle glousse en faisant face au sol.

« Hmpf, j'ai pitié de toi. Alors tu te brises enfin. »

« Enfin... ? Ufufu... qu'est-ce que tu dis ? »

Sans même lever les yeux, elle pointe le couteau de cuisine vers Maria.

« Est-ce que tu pensais que j'avais toujours toute ma tête pour commencer ? »

Elle relève la tête.

« Laisse-moi t'apprendre un belle leçon, Otonashi ! Tous ceux que je tues disparaissent de ce monde ! »

Comme toujours, son visage reste inexpressif.

« Alors peu importe ! Peu importe combien de temps tu as observé Kazu si tu es sur le point de disparaitre de toute façon !! »

Mogi charge vers Maria avec le couteau de cuisine. Je crie le nom de Maria par réflexe. Mais Maria fixe juste Mogi avec ennui, semblant complètement imperturbable. Elle agrippe simplement le bras de Mogi et l'immobilise de cette façon.

« Ugh... »

Leur différence de force est claire, tellement que je suis embarrassé d'avoir appelé son nom.

« Désolée, mais j'ai maîtrisé tous les arts martiaux majeurs. Voir à travers tes mouvements simples est aussi facile que de tordre le bras d'un bébé. »

Le couteau de cuisine tombe des mains de Mogi et se fracasse contre le sol.

Désarmée, Mogi regarde fixement sous le choc vers le couteau de cuisine.

« ... Aussi facile que de tordre le bras d'un bébé... ? » chuchote Mogi douloureusement, son regard fixe toujours dirigé vers le couteau. « ... ... Ufufufu »

Et alors, bien qu'elle devrait souffrir, Mogi sourit.

« Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? »

« Qu'est-ce qu'il y a de si drôle, demandes-tu ? Ufu... haha, HAHAHAHAHAHAHA ! »

Elle rit avec sa bouche grande ouverte. Néanmoins, il n'y a pas de sourire sur son visage taché de sang. Malgré son rire, les coins de sa bouche ne sont pas levés. Ses yeux sont grands ouverts plutôt que légèrement plissés.

Maria plisse son front en entendant son bruyant rire.

« Bien sûr que c'est drôle !! Après tout, tu compares le fait d'agripper mon bras avec tordre le bras d'un bébé ! Toi, entre tous ! Toi, Aya Otonashi, tu as dis ça ! Merveilleux ! Absolument MERVEILLEUX ! »

« Je n'arrive pas à comprendre ce que tu trouves de si amusant. »

« Vraiment ? Alors dis-moi, est-ce que tu pourrais vraiment tordre le bras d'un bébé ? »

Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi elle riait, mais Maria semble être dépourvue de parole.

« C'est ça, tu m'as attrapée. Tant mieux pour toi. Félicitation. Alors ? C'était quoi ton but déjà ? »

« ... ... »

« Je le sais. Je l'ai entendu de nombreuses fois après tout. C'est de mettre fin à ce monde récurrent, pas vrai ? C'est d'obtenir une boîte, pas vrai ? Alors qu'est-ce que tu vas faire ? Tu as juste à me tuer pour la terminer, pas vrai ? »

« ... C'est vrai. »

« Je sais que tu as maîtrisé tous ces arts martiaux, Aya Otonashi ! Tu me l'as dit toi-même ! Pourquoi est-ce que... Pourquoi est-ce que tu fais comme si tu voulais te montrer plus maligne que moi ? N'est-ce pas ridicule ? Tu pensais que je ne l'avais pas réalisé ? Comme c'est embarrassant ! C'est embarrassant, n'est-ce pas ? Écoute... J'ai remonté le temps autant de fois que toi, tu sais ? Je te connais très bien ! Tu m'as désarmée. Tu tiens mon bras. Et alors... ? »

Mogi redevient sérieuse et commence à parler d'une voix étouffée.

« Qu'est-ce que tu comptes me faire après ? »

« ... ... »

Maria ne répond pas.

« Oh toi la gentille, si gentille Otonashi. Toi qui ne peux pas me tuer. Toi qui ne peux pas me torturer. Toi qui ne peux même pas casser un seul os de mon corps. Es-tu capable de tordre le bras d'un si faible bébé en restant si élégante quant il s'agit de rejeter la violence ? Non. Tu ne peux pas. Bien sûr que tu ne peux pas. »

Je vois. Alors c'est la raison principale pour laquelle Maria continue de perdre.

Dès que la violence est la seule solution, Maria ne peut rien faire. Et Mogi en est consciente.

« Réfléchis-y pour une fois. N'avais-tu jamais réalisé que j'avais l'opportunité de te tuer et de te "rejeter" pendant tout ce temps ? Est-ce que tu sais pourquoi je me suis abstenue, bien que tu sois clairement une nuisance ? Pour une chose, tu es tellement gentille que tu m'as sauvée de cet accident ! Mais ce n'est pas tout. Je l'ai remarqué la première fois que tu as découvert que j'étais le possesseur et que tu as perdu contre moi. »

Maria serre les dents.

« Tu n'es même pas digne... d'être mon adversaire. »

Il y a longtemps, Daiya m'a dit que le protagoniste est inférieur à l'élève transféré à cause de la supériorité informationnelle de ce dernier.

Mais sa théorie était fausse.

La Kasumi Mogiprotagoniste a plus d'information que Aya Otonashil'élève transférée.

« J'en avais assez de ce schéma, » dit Mogi d'un ton exagérément ennuyé. « ... Mais contrairement au fois précédentes, Kazuki est maintenant là. »

« Ben oui. Alors, devrait-on essayer quelque chose de nouveau ? »

Mogi donne un coup sur le manche du couteau de cuisine. Le couteau tourne au-dessus du sol couvert de sang et glisse en s'arrêtant net à mes pieds.

« Ramasse-le, Kazu. »

Ramasser quoi ? Le couteau de cuisine ?

Je baisse de nouveau les yeux vers le couteau de cuisine.

Il y a encore plus de sang dessus maintenant. Il émet un profond éclat, rouge rubis.

« Hé, Kazu ? Est-ce que tu m'aimes ? Si c'est le cas... »

Je relève mon visage et regarde ses lèvres.

« ... Donne-moi ce couteau et laisse-moi te tuer. »

—- Quoi ?

Je ne comprends pas. Je sais ce que ses mots signifient mais je ne peux pas comprendre ce qu'elle vient juste de me dire.

« Tu ne m'as pas entendue ? Je t'ai dit de me donner ce couteau pour que je puisse te tuer. »

Elle se répète. Je suppose que je l'ai entendue correctement.

« Mogi, tu es devenue folle ?! N'aimes-tu pas Kazuki ?! Pourquoi est-ce que tu voudrais une chose pareille ?! »

« Tu as raison. Je l'aime ! Mais c'est exactement pourquoi je veux qu'il meure. N'ai-je pas dit que c'est la faute de Kazuki si je souffre ? Par conséquent, je veux qu'il sorte de ma vue. N'est-ce pas la conclusion logique ? » dit Mogi comme si son raisonnement était complètement naturel. « Pour commencer, pourquoi penses-tu que j'ai mordu à l'hameçon même si je savais que Kazu viendrait ? Eh bien, j'ai un objectif justifié ! J'ai pris la décision... la décision de le tuer, » déballe-t-elle en me jetant un coup d'œil. « Je peux "rejeter" Kazu en le tuant. Il sortira de ma vue. Si ça se produit, je suis sûre que je ne souffrirai plus. Je serai capable de rester là pour toujours. »

« Mogi, qu'est-ce que c'est que ce non-sens— eh ! Ah— »

Maria grogne soudainement et tombe sur ses genoux. Elle tient son flanc gauche.

« ... ? Maria ? »

Quelque chose ressort de son flanc gauche.

... Hein ? Poignardée ?

« Ah... Ma-Maria ! »

Maria regarde vers l'objet dépassant de son flanc gauche. En serrant ses dents, elle retire ce corps étranger sans hésitation. Elle gémit de nouveau de douleur. En fusillant Mogi du regard, elle jette l'objet qu'elle venait d'enlever.

Je regarde vers l'objet déferlant sur le sol. C'est un canif.

« Tu baisses ta garde. Tu peux avoir maîtrisé tous types d'arts martiaux, mais ça ne t'immunise pas contre les attaques surprises. Ce couteau bon marché n'est pas du tout efficace contre les garçons, mais il devrait être plus que suffisant pour ton corps mince, pas vrai ? Je suis désolée mais ta constitution reste la même en ce monde peu importe combien tu t'entraînes ! »

Maria essaye de se lever et échoue... Visiblement, sa blessure est plutôt sérieuse. Du sang s'échappe sans interruption de son flanc gauche.

« J'en ai aussi traversé beaucoup, tu sais. Alors je pensais qu'il serait mieux de le garder sur moi. Ce couteau est toujours caché sur moi. »

Mogi s'approche de moi. Elle s'accroupit et ramasse le couteau de cuisine laissé tomber.

« Ah... »

Bien qu'elle soit complètement à découvert en se penchant, je suis incapable de faire quoi que ce soit si ce n'est émettre un bruit faible. Je ne peux pas bouger ; je me sens pétrifié. Je ne peux rien faire d'autre que me tenir là comme un clou au mur.

Mon corps a été abandonné. Mon esprit est figé parce qu'il ne peut pas accepter la réalité prenant place devant mes yeux.

« Ne l'ai-je pas déjà dit, Aya Otonashi ? Les gens qui disparaîtront n'ont de toute façon aucune importance. »

Mogi s’assoie au dessus de Maria et lève le couteau de cuisine.

Elle le bascule sans hésitation. Encore et encore. Encore et encore. Jusqu'à ce que la respiration de Maria se soit définitivement arrêtée.

Durant tout le processus, Maria n'a pas laissé un seul gémissement honteux.

« Si tu étais restée une simple nuisance comme un groupe de mouches qui grouille autour d'excréments, je t'aurais épargnée. Mais non, il fallait que tu fasses un pas vers mon Kazu ! » se plaint Mogi en se relevant.

Maria ne bouge plus.

Mogi regarde vers le couteau de cuisine avec lequel elle a poignardé à maintes reprises Maria.

Je regarde pensivement vers le couteau qui a été imprégné du sang de Kokone et de Maria.

« Bon, eh bien, à ton tour, Kazu. »

Je m'accroupis et attrape le couteau à contrecœur. je retire brusquement ma main immédiatement quand je sens le touché visqueux du sang. Je déglutis et y mets plus de force. Ma main tremble. Je ne peux pas saisir le couteau convenablement. Je ferme les yeux et me force à le prendre. Je rouvre les yeux. Parce que je tiens l'arme qui a tuée Kokone et Maria, ma main tremble encore plus. Je l'ai presque laissé tomber. Je l'empoigne de mes deux mains pour contenir les tremblements.

Aah, je ne peux pas.

Je ne peux vraiment rien faire avec ce couteau.

« Qu'est-ce que tu fais, Kazu ? Allez... donne-moi le couteau ! »

Non, pas seulement moi. Personne ne pourrait faire quoi que ce soit avec ce couteau.

Ce qui veut dire que...

«... Qui t'as fait faire tout ça, Mogi ? »

Mogi ne devrait pas non plus avoir été capable de commettre ces atrocités. Elle ne peut pas éventuellement avoir été capable de le faire seule.

À moins qu'elle ait été manipulée par quelqu'un.

Elle me regarde fixement dans la confusion.

« ... De quoi est-ce que tu parles ? Est-ce que tu essayes de suggérer que quelqu'un m'a fait faire ça ? Y a-t-il quelque chose qui ne va pas dans ta tête, Kazu ? C'est impossible ! »

« Mais je suis tombé amoureux de toi. »

« ... ... Où veux-tu en venir ? »

« Même après avoir expérimenté plus de 20 000 récurrences, même après avoir été piégée, tu n'aurais jamais fait une chose pareille, Mogi. La fille pour laquelle je suis tombé amoureux n'aurait jamais fait une chose pareille ! »

Pendant un instant Mogi semble profondément affectée par mes mots mais elle me jette ensuite un regard noir et répond. « ... Je vois. Alors tu veux me faire t'épargner en faisant recours à mes émotions, hein ? Je suis déçue. Je n'aurais jamais pensé que tu étais un tel lâche. Alors tu ne veux vraiment pas mourir pour mon bien, hein ? »

Il est impossible que je le veuille. Je ne veux pas mourir et je ne crois pas que ma mort lui apporterait le salut.

« ... ... Kazu, est-ce que tu penses que le meurtre est un tabou absolu ? »

« ... Ouais. »

« Ufufu, quelle honnêteté. Ouais, tu as raison. Tu as parfaitement raison ! » dit-elle en jetant un coup d'œil à mes yeux. « Eh bien, profite bien de ton séjour ici pour ta vie entière... non, pour toute l'éternité, » dit-elle froidement... probablement parce qu'elle sait que c'est l'exact opposé de ce que je souhaite. « Après tout... céder ma boîte me tuerais. »

En d'autres termes, elle mourra si la Classe Rejetée arrive à sa fin ? Maria n'y a jamais fait allusion.

« Est-ce que tu comprends ? Si tu t'échappes de cette boîte, tu me tues. Est-ce que tu crois que je mens ? Est-ce que tu crois que j'invente juste des excuses venues de nulle part afin de protéger la boîte ? Eh bien non ! Tu comprendrais si tu y réfléchissais un peu ! Je veux dire, pourquoi est-ce que tu penses que mon souhait est de remonter le temps ? »

Pourquoi est-ce que quelqu'un voudrait inverser le flot du temps ? Peut-être parce qu'une tragédie s'est produite... ?

« Tu ne t'es jamais demandé pourquoi je me fais toujours écraser par ce camion ? C'est vrai qu'il y a eu des fois où Aya Otonashi s'est sacrifiée pour moi... ah, au fait, il y a aussi eu des fois où tu t'es sacrifié. Mais la plupart du temps c'était moi qui mourais, pas vrai ? »

« Ah... »

Ne me dites pas que...

Je suis enfin arrivé à une explication plausible.

Pourquoi est-ce que Mogi ne met pas fin à la Classe Rejetée ?

Cet accident de circulation est un phénomène inévitable à l'intérieur de la Classe Rejetée. Quelqu'un, en général Mogi, est victime de cet accident. Je ne sais pas pourquoi, mais ça se produit tout le temps.

"Je pense que... une fois que quelque chose s'est passé, il est impossible de revenir en arrière."

J'ai autrefois dit ces mots. La réponse de Maria était : "Ton opinion est normale. Et apparemment, le créateur de cette Classe Rejetée pense aussi comme toi."

Alors, disons que j'ai l'opportunité de détruire la boîte. Faire ça voudrait aussi dire...

« Es-tu prêt à me laisser être la victime d'un accident ? »

... tuer la fille que j'aime ?

J'entends un bruit métallique sourd. Je ne réussis pas à le reconnaitre au début mais je réalise alors que le couteau est tombé sur le sol.

« Tu n'es même pas capable de me rendre le couteau ? Comme c'est pitoyable... »

Mogi s'approche de moi. Elle ramasse le couteau de cuisine.

Elle va probablement me tuer maintenant.

Parce qu'elle a commis tellement de péchés, c'est seulement en continuant de les commettre qu'elle peut justifier ses actes. Si elle ne le fait pas elle sera écrasée par le poids de sa conscience. Elle ne peut plus revenir à elle. Elle a perdu le contrôle d'elle-même alors elle va devenir folle furieuse et me tuer.

Le plus probable c'est que... "Kasumi Mogi" a arrêté d'être "Kasumi Mogi" après qu'elle ait tuée sa première victime.

Son visage inexpressif est éclaboussé du sang de deux filles.

Elle s'accroupit à mon niveau parce que je ne peux pas me lever.

Elle enveloppe ses bras autour de moi en tenant le couteau. Elle croise ses bras derrière mon cou et touche la lame sur mon cou, juste au-dessus de mon artère carotide.

Le visage de Mogi se rapproche du mien et elle ouvre la bouche.

« S'il te plaît, garde les yeux fermés. »

Je fais ce qu'elle m'ordonne.


Quelque chose de doux touche mes lèvres.


Je me suis tout de suite rendu compte de ce que c'est.

Finalement, une certaine émotion monte du profond de mon être. C'est l'émotion qui n'est pas montée même quand j'ai vu le corps de Kokone ou quand Maria a été poignardée.

C'est la colère.

Je... ne peux pas le pardonner.

« Ce n'est pas la première fois que je t'embrasse, tu sais ? Mais je suis désolée si c'est toujours aussi embarrassant. »

Je ne peux pas le pardonner. Je veux dire, je ne peux même pas me souvenir de quoi elle parle. Et je suis sûr que je ne me souviendrais pas de cette occasion non plus.

« Au revoir, Kazu. Je t'ai aimé ! »

Est-ce que Mogi est vraiment satisfaite avec des souvenirs qu'elle ne peut partager avec personne ? Eh bien, c'est possible, en considérant à quel point elle s'est habituée à la solitude.


Une douleur vive s'étend à travers le côté de mon cou.

Je trahi la demande de Mogi et ouvre mes yeux.

Mogi est contrariée, mais elle ne peut pas détourner le regard à temps. Aah, nos yeux se sont enfin rencontrés convenablement.

Je lui saisit la main.

Du coin de l'œil, je peux voir que le liquide rouge s'écoule de mon cou jusqu'à ses mains pour ensuite tomber goutte à goutte.

« ... Qu'est-ce que tu fais ? »

« Je ne... peux pas le pardonner... »

« Tu ne peux pas me pardonner ? Fufu... Ça m'importe peu. J'en suis consciente. Mais ça n'a aucune importance ! C'est déjà l'heure des adieux de toute façon. »

« Ce n'est pas ça. »

« ... Qu'est-ce que c'est, alors ? »

« Ce n'est pas toi... Je ne peux pas pardonner que la Classe Rejetée soit si loin de la vie quotidienne ! »

Je resserre mon emprise sur son poignet. Sa main délicate est immobilisée par la mienne. Mon regard vire au noir pendant un instant. La blessure à mon cou peut être fatale.

« Lâ-lâche moi... ! »

« Non ! »

Je ne sais toujours pas quoi faire. Je suis sûr de ne pas pouvoir la tuer. Mais je réalise clairement une chose : cette Classe Rejetée est impardonnable. Par conséquent, je ne dois surtout pas disparaitre.

« Laisse-moi te tuer ! Je t'en pris, laisse moi te tuer ! » hurle-t-elle. Bien que ce soient supposés être des mots de rejet, ils me donnent l'impression qu'elle pleure de douleur, presque comme une complainte.

... Ah, je vois. Je le remarque enfin.

Elle pleure.

De l'extérieur, elle est inexpressive comme toujours. Elle n'a pas versé une larme. Je regarde droit vers elle. Elle détourne le regard immédiatement. Ces jambes fines et fragiles étaient tremblantes pendant tout ce temps. Elle ne peut pas relever ses propre sentiments, ayant perdue ses expressions du visage il y a longtemps. Elle ne peut même pas se rendre compte qu'elle est en train de pleurer. Ses larmes ne coulent plus, probablement parce qu'elles ont séché il y a longtemps.

Je suis désolé de ne pas l'avoir remarqué avant.

« Je ne te laisserai pas me tuer. Je ne te laisserai pas me rejeter. »

« Ne me touche pas ! Arrête de me tourmenter ! »

Je suis désolé mais je ne peux pas écouter sa demande.

Pas conséquent...

« Je refuse complètement de t'abandonner à la solitude ! » ai-je hurlé.

Peut-être est-ce juste mon imagination mais j'ai eu le sentiment que Mogi s'est détendue pendant une seconde.

Et pourtant... !

« Ah... »

Ma vision vire complètement au noir. Un souffle sur ma joue rétablit temporairement mon regard. Le décor a changé. Les chaussons tachés de sang de Mogi sont juste devant mes yeux. Mes mains ne tiennent plus son poignet ; elles reposent, impuissantes, sur le sol.

Ce n'est pas qu'elle m'ait fait quoi que ce soit d'autre. Je me suis juste écroulé de moi-même.

Même si j'étais sûr d'avoir enfin trouvé un moyen de la convaincre, je ne peux plus bouger. J'ai même du mal à bouger ma bouche.

« Je suis une idiote. »

J'entends sa voix.

« Juste à cause de ça, juste à cause d'une phrase pareille, je... »

Incapable de relever la tête, je ne sais pas à quoi son visage ressemble alors qu'elle parle.

« ... ... ... ... Je dois... tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. Je dois tuer. »

Comme si elle se donnait des instructions, elle répète la même phrase encore et encore.

Ses chaussons bougent. Le sang de quelqu'un éclabousse mon visage. Un reflet de lumière réfléchit le couteau de cuisine dans mes yeux. —Ah, elle compte l'utiliser.

« C'est maintenant réellement l'heure des adieux, Kazu. »

Elle s'accroupit et me caresse doucement le dos.

« Je dois tuer... »

Puis elle plonge la lame...

« Je dois me tuer. »

... dans son propre corps.

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« Je dois me tuer.»

... C'est ce que je me suis forcé à penser. C'est le seul moyen. Le seul moyen de m'empêcher de me faire posséder par mon Faux "moi".

Je vais tout abandonner.

C'est le seul moyen qui me permettra d’expier mes pêchés.

J’enfonce le couteau de cuisine au milieu de mon torse.

Je tombe sur Kazu-kun. Son visage est juste en face du mien. Il vient tout juste de réaliser ce que j'ai fais et me regarde les yeux écarquillés.

S'il te plait ne fais pas cette tête. J'essaye de le calmer en souriant mais je remarque que je ne peux plus sourire. Après tout, je n'ai ni souri ni pleuré depuis des lustres.

La température de mon corps chute rapidement.

J'espère que cela ferra disparaître l'immondice qui est en moi...


Je refuse complètement de t'abandonner à la solitude !

Merci. Mais ce n'est pas possible. Ça n'a été pas possible depuis le tout début.

Comment pourrais-tu refuser ? Car après tout...

— Je suis morte depuis bien longtemps.

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Aah, je vais mourir.

Malgré le fait que j’ai vécu incroyablement longtemps après m’être fait percuter par le camion, ces pensées n’ont cessé de me hanter. Je ne peux pas survivre à un tel impact. Je vais mourir. Ma vie s’arrête ici.

N-Non, je ne veux pas...

Ce sont les pensées de quelqu’un qui n’a jamais réellement considéré le concept de mort, bien que l’envie de mourir lui soit déjà venue en considération.

Mourir. Finir. Il n’y a plus rien qui m’attend. J’ai enfin réalisé l’épouvante que cela représente, maintenant que ma mort est imminente.

Si cela devait arriver, alors cela n’aurait-il pas pu arriver avant que l’amour ait changé mon monde ?!

Maintenant que je comprends l’amour !

J’ai un but !

Je n’ai encore rien fait pour la personne que j’aime !

— c’est vraiment trop cruel.


« Hmm, c’est une situation qui pique ma curiosité. »

Une personne apparaît soudainement. Je ne sais pas d’où elle est arrivée. Comment peut-elle me parler si normalement ? Je n’arrive même pas à voir où elle se trouve. Mon corps est tordu au point que je ne sais même pas où je regarde. Malgré ça, cette personne me regarde directement, comme si elle se trouvait partout. Cette situation n’est pas censée être possible. Aah, non... J’ai été transportée je ne sais comment dans un endroit qui ne m’est pas familier et je fais maintenant face à cette personne. Malgré le fait que cet endroit ne semble avoir rien de particulier, je sens qu’il est très spécial.

« Ne te méprends pas, je ne parlais pas de ton accident. Des accidents comme ça sont parfaitement normaux et se produisent dans le monde entier. Ce qui m’intéresse est que cet incident s’est produit non loin du garçon qui m’intéresse. »

De quoi est-il en train de parler ?

J’ai entendu dire que l’on voit un flash de lumière avant de mourir, mais je n’avais jamais entendu parler de cet endroit ou de parler à cette étrange personne.

Est-ce que cette personne est La Faucheuse ?

Cet individu ne ressemble à personne en particulier, tout en ressemblant à tout le monde.

Je suis sure d’une chose: il est séduisant.

Son apparence, sa voix et son parfum me fascinent.


« Je veux voir comment ce garçon réagira aux 'boites' qui apparaîtront autour de lui. Ah, mais je suis aussi intéressé dans l’utilisation que tu feras de ta boite. Cela dit, tu n’es qu’un "extra". »

Cet individu sourit tout en disant ces choses incompréhensibles.

« As-tu un vœu ? »

« Un vœu ? »

Évidemment que j’en ai un.

« Ceci est une boite qui réalise n’importe quel vœu. »

Je l’accepte.

J’ai immédiatement réalisé que cette boite pouvait exaucer n’importe quel vœu. C’est pourquoi je suis absolument certaine qu’il faut que je m’accroche à cette boite.

Si je ne peux pas changer la fin de ma vie, alors s’il vous plaît, laissez-moi la revivre un peu. Tout m’ira, même si je ne pourrais changer que ce que j’ai fait hier. Il me reste quelque chose à faire. Même si ce n’est qu’hier, je peux encore transmettre mes sentiments. Si je ne peux faire que ça, alors je suis sure que je n’aurai pas de regret. Peu importe sa réponse, je n’aurai pas de regret. Alors s’il te plaît, remonte le temps, ne serait-ce que d’un jour. Je suis consciente que ce n’est pas possible. Mais malgré ça, c’est ce que je souhaite.

Après avoir effectué mon vœu la boite s’ouvre comme la bouche d’un carnivore et disparut, fusionnant avec l’espace qui m’entoure.

Les choses devraient fonctionner comme ça.

« Fufu... »

Cette charmante personne qui sourit ne dit qu’une chose à propos de mon vœu.

« C’est ce qui arrive quand on garde ces choses pour soi.»

Puis il disparaît.

Je me fais ensuite éjectée de cet endroit étrange dont je ne me rappelle que vaguement.

Je suis maintenant à l’intérieur d’une chambre qui est engloutie dans les ténèbres. Une odeur nauséabonde arrive à mon nez, comme si des cadavres avaient été abandonnés ici. C’est une salle répugnante, au point où une prison ressemblerait au paradis à côté d’elle. Si je reste ne serait-ce qu’une heure ici je vais sûrement m’évanouir. Mais la chambre commence à se peindre en blanc. La blancheur ne me permet plus d’établir les limites de la salle. Puis, comme si quelqu’un avait allumé de l’encens, une odeur agréable efface totalement la puanteur. Et à chaque fois que je cligne des yeux, des choses comme un tableau, des bureaux des chaises commencent à apparaître. La salle est enfin remplie et il ne reste plus qu’à invoquer les acteurs. Ajouter les personnes qui étaient présentes hier. Si c’est possible, je pourrai recommencer certaines choses. Je pourrai revivre hier.

Mais peu importe à quel point cet endroit sera décoré, son fond restera cette chambre répugnante et bien plus effrayante que n’importe quelle prison.

C’est le monde après ma mort, emplie de blanc — oh si blanc — et d’un doux espoir.

Et s’il me semble que je ne pourrais pas achever mon but...

... je devrais détruire cette boite moi-même. Avant que les belles décorations de cet endroit ne s’envolent, exposant ainsi la honteuse et répugnante apparence de cette chambre.


5000e fois[edit]


« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki me propose cette idée en plaisantant après que lui avoir demandé son avis.


6000e fois[edit]


« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki me propose la même solution en plaisantant après la n-ième fois après lui avoir demandé son avis.


7000e fois[edit]


« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki me propose cette solution raisonnable en plaisantant.


8000e fois[edit]


« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki plaisante en m'offrant cette conclusion logique.


9000e fois[edit]


« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki me propose cette évidente vérité en plaisantant.


9999e fois[edit]


Haruaki m’a déjà enseigné la méthode pour le tuer.

« Comment faire pour que l’on ne veuille absolument plus croiser une certaine personne ? »

Il m’a proposé la même méthode à plusieurs reprises. Je l’ai tellement entendue qu’elle commence vraiment à m’énerver. Je suis arrivée à la conclusion qu’avoir des sentiments de culpabilité envers quelqu’un est le meilleur moyen pour ne plus avoir envie de rencontrer cette personne.

Comme toujours. Et comme toujours, il m’a appris comment avoir des sentiments de culpabilité envers quelqu’un.

« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

Haruaki suggéra en plaisantant l’unique méthode qui se présentait à moi.

« Si vraiment il n’y a plus de choix. Après, si tu le tues, tu n’auras plus de problème à ne plus le croiser, héhé ! »

Pourquoi devrait-on "rejeter" Haruaki ? C’est tout simplement parce que, quand il disparaîtra cela aura sûrement le plus d’impact sur Kazu et moi.

Vivre dans ce monde, c’est comme jouer à une partie de Tetris que l’on ne peut pas finir. Au début, vous essayez d’avoir le plus haut score. C’est amusant, au début. Mais à mi-chemin, vous commencez à vous désintéressé de votre score. Après tout, ça n'a pas d'importance si vous atteignez un nouveau meilleur score ou non; c'est un jeu qui va être relancé et vous devrez tout recommencer encore une fois. Rien ne change même si vous perdez. Malgré tout, vous continuez de faire de votre mieux pour vous amuser, mais si vous jouez sans le moindre enthousiasme, l'écran se remplit en moins de deux. mais Ccela devient ennuyant, inintéressant, difficile, voire même blessant. Vous perdez même l’envie de tourner les blocs. Vous vous en fichez simplement. Cependant, avec ou sans nous les blocs ne s’arrêteront pas de tomber, de s’entasser. Et peu importe le nombre de fois qu’ils atteignent le sommet, vous ne pouvez pas arrêter la partie. Car, si vous arrêtez, vous mourrez.

Et je n’ai pas envie de mourir.

Après tout, j’ai un but à atteindre. Je dois vivre cette journée sans regret.

Alors je dois changer le système d’une manière ou d’une autre.

Haruaki est une partie importante de ce système.

C’est pourquoi je dois le rejeter.

« ... Peux-tu me dire encore une fois la méthode pour faire naître des sentiments de culpabilité ? »

« … Kasumi, qu’est-ce qui ne va pas ? Mais bon, ça me dérange pas... »

Haruaki dit comme à son habitude.

« Pourquoi ne pas simplement le tuer ? »

En comptant celle-là, c’est la 1000e réponse.

C’est vrai ! C’est le seul moyen. Je ne peux pas faire autrement alors.

Tu comprends, n’est-ce pas ?

Après tout, tu l’as répétée 1000 fois, alors tu devrais comprendre, non ?

Ou plutôt tu veux que je le fasse ?

- Tu veux mourir de mes mains, n’est-ce pas ?


10000e fois[edit]


« Arrête, s'il te plait ! Ne me tue pas ! »

Je n'écoutais absolument pas ce qu'il disait.

Je vais tuer Haruaki Usui.

Après tout, c'est sa propre proposition !


J'ai t** Haruaki Usui.

Puis, je disparus. La personne qui était une fois Kasumi Mogi disparut. Je présume que je ne pourrai plus « me » retrouver, celle qui était écrasée par la douleur. Néanmoins, mon corps ressuscitera éternellement. Il ressuscitera même s'il est vide à l’intérieur.

Je sens que quelque chose entrer dans mon corps vide.

Quelque chose qui était né à l’intérieur de cette boîte. Quelque chose de grotesque, qui avait une odeur nauséabonde, d’excrément. Je rejette cette entité. Je la rejette continuellement . Mais je sais déjà que... Que même si, je la refuse des centaines de fois, cette entité va graduellement infiltrer mon corps. Elle repère mes parties vulnérables et les dévore comme une hyène, colorant peu à peu l’intérieur de mon corps en noir. Je deviens complètement noir à l’intérieur et perd conscience de mon identité. Je deviens une contrefaçon qui porte encore le visage de Kasumi Mogi.

Mais je ne peux quand même pas la laisser finir.

Je vais définitivement passer cette journée sans éprouver de regret !

— Passer la journée sans éprouver de regret ?

« Hahaha. »

Suis-je idiote ? Comment pourrais-je faire quelque chose comme ça ici ? C'est le monde après ma mort. Alors comment mes regrets dans le monde réel disparaîtront si je fais quelque chose dans un monde parallèle ? Même si Kazuki se confessait à moi dans ce monde, cela ne servirait à rien. Je veux dire, comment pourrais-je être satisfaite par un « aujourd'hui » parallèle ?

... Rien ne me vient à l'esprit.

Le résultat auquel je veux aboutir.

Pour le poursuivre, j'ai fait tout mon possible pendant ces itérations.

Alors que, je ne savais même plus pourquoi je désirais ce résultat.

Je m'y suis accroché tout ce temps sans même savoir ce qu'il était.

Finalement, je me suis rendu compte qu'un tel résultat ne pouvait arriver.

« Je ne veux pas mourir ! »

Aah... eh. J'ai enfin compris.

Alors, c’était ça mon vœu.

C'est pourquoi mon vœu ne peut jamais être accompli.

Et parce que je n'ai pas pu comprendre plus tôt, j'ai horriblement déformé ma boîte. Ce vœu déformé s'est changé en « chaînes » qui ne disparaîtront plus. Elles sont déjà à l’intérieur de la boîte, alors elles ne pourront plus disparaître.

Ces « chaînes » resteront en moi et continueront d'animer ma contrefaçon.

Alors je suis sure que même si je disparais, cette boîte ne disparaîtra pas. À jamais.


27755e fois (5)[edit]


« Je ne veux pas t’abandonner à la solitude ! »

Juste l’impact de ces mots a pu me transformer en la Kasumi Mogi que j’étais autrefois.

« Je suis une idiote. »

N’avais-je pas déjà décidé ? N’avais-je pas décider de détruire la boîte avant de perdre de vue mon but et de me trahir ?

Mais toutes ces récurrences ont affaibli ma détermination jusqu’à ce qu’elle disparaisse.

Une fois que j’avais tué une certaine personne dont je ne me rappelle pas le nom, j’aurai dû avoir perdu ma capacité à revenir.

Mais...

« Juste à cause ce ça, juste à cause d’une telle phrase, je... »

— C’était encore possible.

Mon amour m’avait sauvée au dernier moment.

Mais je sais que, dans quelques instants, je vais me refaire capturer.

Je vais me faire capturer par la boîte.

Par conséquent, pendant que je suis encore « Kasumi Mogi », je dois me tuer.


« Au revoir, Kazu. »


Et maintenant, la boîte qui ne pouvait pas me rendre heureuse malgré tout ce qu’elle offrait allait prendre fin.

Je vais mourir si près de la personne que j'aime. Peut-être que c’est une bonne fin après tout.

Je ferme mes yeux

Je ne vais sûrement pas les rouvrir de si...


« Qui t’a permis de mourir ? »


J’ouvre les yeux sous le coup de la surprise.

L’inidentifiable personne qui m’a donné la boîte se tenait à côté de Kazu. Ce dernier ne semble pas le voir, je semble être la seule qui le puisse.

Quand nos yeux se sont rencontrés, cette personne arbora un sourire rassurant.

« Je veux encore observer ce garçon. Ça me dérangera si tu termines cette rare opportunité d’observation infinie de ta propre initiative. »

Quoi ? ... Qu’est-ce qu’il dit ?

« Mais bon, je suppose que ce n’est pas très amusant d’observer les mêmes situations aussi longtemps. Voyons voir... c’est contre mes principes, mais puis-je prendre soin de ta boîte ? Je vais légèrement la changer. Tu voulais la détruire alors cela ne te dérangera pas, non ? »

Sans attendre ma réponse, il mit sa main sur ma poitrine. Au moment où il fit cela...

« Ugh, aaaaah ! AAaaAAahhh !! »

Je ressentis une intense douleur qui excéda tout ce que j’ai pu connaître. Cette douleur m'a fait pousser des hurlements, malgré le fait que je me suis habituée à me faire percuter par un camion et je n’ai même pas bronché quand je me suis poignardée. Ce genre de douleur est différent. C’est comme si l'on découpait mon âme en un millier de pièces. C’est une douleur qui attaque directement les nerfs et elle ne peut être apaisée.

Il prend la petite boîte et sourit.

« Aah, je pense que tu le sais déjà, mais cette boîte ne peut plus fonctionner sans toi. Alors, tu dois rentrer dans la boîte. »

Alors qu’il dit ça, il commence à me plier.

Il me plie et me replie, puis il me met dans la boîte.


Kazu. Je t’en prie, Kazu.

Je sais que j’agis d’une manière égoïste. Je sais aussi que cette requête est ridicule après tout ce que je t’ai fait. Mais, mais... je ne peux plus... je ne plus retenir ça plus longtemps...


Kazu, aide-moi...

27756e fois[edit]


Je dois mettre fin à la Classe Rejetée et retrouver ma vie de tous les jours.

Quelle est la plus grande difficulté à laquelle je pourrais faire face ?

Un genre d’obstacle géant ? Par exemple, être forcé d’utiliser un câble fin pour passer d’un bâtiment à un autre ? En ayant à répéter le même jour un million de fois ?

Je ne pense pas que ce soit cela. Je veux dire, je peux encore imaginer comment surmonter ces obstacles. Aussi difficiles qu’ils puissent être, je peux toujours acquérir le talent suffisant pendant le temps presque infini qui m’est accessible.

Non, je crois que la pire chose à laquelle je pourrais faire face serait de ne pas savoir quel est l’obstacle en question.

Si je ne sais pas ce que je dois faire, je suis plutôt impuissant. Mais comme ici, le temps est figé, mon problème ne se résoudra pas avec.

Et à présent, je fais face au pire des scénarios.

« Un problème, Hoshii ? Tu es plutôt bizarre aujourd’hui. »

Pendant la pause suivant le premier cours, Haruaki me parle tout en riant légèrement.

Le cours vient de se terminer, donc personne n’a encore quitté la salle de classe. Mogi-san est encore assise à sa place. Oui… tous mes 38 camarades de classe sont présents.

J’essaye de comprendre pourquoi les personnes « rejetées » sont de retour, mais pour une raison que j’ignore, j’ai déjà presque tout oublié de la précédente boucle. J’ai l’impression qu’on a découvert quelque chose, mais je ne me souviens plus de rien.

Mais c’est bon. Ce n’est pas encore problématique.

Si nous avons réussi à découvrir quelque chose d’important, nous le redécouvrirons en moins de deux. Le retour de tous mes camarades de classe reste un mystère, mais ça n’affecte pas ma mission.

Ce n’est pas le problème.

« Mais on s’ennuie vraiment aujourd’hui~. Rien ne s’est passé ! »

Rien de particulier n’est arrivé.

La remarque de Kokone me cause une douleur gênante qui parcourt ma poitrine.

Je ne veux pas le croire. Je ne veux pas accepter la situation actuelle.

« Daiya. »

Je m’adresse à Daiya, qui se trouve derrière moi, avec une voix suppliante. Il tourne sa tête vers moi, prêt à écouter ma requête.

« Est-ce que tu as entendu parler d’une élève transférée aujourd’hui ? » lui dis-je, espérant légèrement qu’il acquiescera en réponse. Mais ma question est…

« Hah ? De quoi tu parles ? »

… nié avec un froncement, comme prévu.

Oui… Aya Otonashi n’est plus du tout « transférée ».

Donc, je suis incapable de savoir quoi faire à présent.

Trouver le propriétaire. Et ensuite, quoi ? Retirer sa boîte ? Détruire la boîte ? Comment je fais ça ?

Je comptais trouver une solution avec Maria. Mais j’étais simplement paresseux. J’étais complètement dépendant d’elle, donc je ne savais pas quoi faire maintenant qu’elle n’était plus là.



« Mais écoute, y a pas aucune différence entre vivre notre vie quoditienne et être capturé par cette Classe Rejetée ? » dit Haruaki en réponse à ma question.

J’en ai discuté avec lui parce que je ne savais pas quoi faire d’autre. Je l’ai donc amené derrière le lycée pendant la pause déjeuner ; c’est la réponse qu’il m’a donnée après avoir fini de lui raconter toute l’histoire.

Je connais bien Haruaki. Il ne répond pas ça parce qu’il ne peut pas croire à mon histoire absurde.

« Aucune différence… ? »

« Ah, non. C’est pas que je te crois pas, je te jure. Juste que, comment dire, disons que nous sommes vraiment à l’intérieur de la Classe Rejetée. En quoi c’est différent de la vie de tous les jours à laquelle tu aspires ? »

« Ce qui est différent ? Ils sont complètement… »

« Pareil, pas vrai ? Les gars qui semblent avoir disparu, moi inclus, sont revenus. Aya Otonashi n’était pas un membre de cette classe de toute façon. Tout est revenu à son état d’origine. Ou j’ai tort ? »

Tout est juste revenu à son état d’origine ?

… Peut-être.

Après tout, je n’aurais peut-être jamais rencontré Maria sans la Classe Rejetée.

Personne ne sait qui elle est. C’est parfaitement normal. L’existence d’Aya Otonashi n’a jamais fait partie à proprement parlé de la classe 1-6 pour commencer.

Ce n’était peut-être juste qu’un rêve ? Peut-être que j’ai juste imaginé toute son existence ?

… Je ne sais pas. Mais nous sommes toujours le « 2 mars » aujourd’hui.

« Mais tu sais, si on est toujours dans la Classe Rejetée, alors le "2 mars" d’aujourd’hui ne se terminera jamais. Alors comment tu peux l’assimiler avec notre vie quotidienne ? »

J’étais sûr qu’Haruaki serait d’accord avec moi. Mais…

« En fait, j’ai déjà réfléchi à ça. »

Contrairement ce que je pensais, il incline sa tête sur le côté et continue.

Je reste bouche bée par sa réponse directe. Haruaki se gratte la tête d’un air gêné quand il voit l’expression sur mon visage.

« Je sais ce que tu veux dire. Mais regarde, ça te dérange que quand t’es conscient d’être pris dans une boucle temporelle, non ? Et si, par exemple, ta vie de tous les jours jusqu’à aujourd’hui a toujours été remplie de jours répétés aussi longuement ? Tu l’aurais pas remarqué, hein ? En fait, je ressens rien de différent là maintenant, moi non plus. Je suis convaincu que je vie ma vie de d’habitude en ce moment même. Même si, purement hypothétiquement, je suis en fait bloqué dans la Classe Rejetée. »

Il… a raison.

Je ne ressens de l’inconfort et du dégoût que parce que je suis conscient de cette récurrence. Si ce n’était pas le cas, je ne serais pas du tout troublé.

Je ne serais pas en train de ressentir ce conflit si je ne savais rien de la Classe Rejetée. Même si les jours se répétaient, je pouvais complètement profiter cette sorte de la vie quotidienne qui m’est présentée. Je pourrais passer mon temps sans être au courant du destin tragique d’une certaine personne. Ma vie serait convenable et pleine de bonheur.

La détruire n’est rien d’autre que du simple égoïsme.

« Je suis sûr que tu comprends maintenant, Hoshii. Tu sais ce que tu devrais faire, pas vrai ? »

« Ouais. Je sais ce que je dois faire. »

« T’as vu ? Alors… »

Haruaki s’arrête soudainement. Je me retourne avec surprise, et je vois Mogi-san debout à côté de moi.

« Qu’y a-t-il ? » je demande.

« J’aimerais parler à Kazuki. D’accord ? »

Haruaki et moi nous échangeons un regard.

« Hmm, Hoshii. Tu y es prêt ? S’il y a quoi que ce soit que tu veux me dire, je serai là pour toi. »

« Ouais… merci, Haruaki. »

Haruaki part en disant « De rien. »

Je me demande ce qu’elle me veut. Elle a pris la peine de me chercher ?

Je me concentre sur son visage. Quel joli visage. Après l’avoir remarqué, je ne peux plus supporter de la regarder et je détourne mes yeux.

« … »

Même si elle est celle qui est venue vers moi, Mogi-san fronce ses sourcils.

« … Je vais te poser une question étrange, mais j’aimerais que tu y répondes sans hésitation. »

« Ah, d’accord… »

Je hoche la tête, mais Mogi-san continue de froncer ses sourcils. Elle a du mal à le faire. Au bout d’un certain temps, elle semble parvenir à une décision et me regarde droit dans les yeux.

« Est-ce que je suis Kasumi Mogi ? »

… Hah ?

Comme cette question est complètement inattendue, je ne peux même pas sembler surpris. Au lieu de cela, je reste sur place avec une expression sérieuse.

« … Euh, Mogi-san ? Est-ce que tu as perdu ta mémoire ou quelque chose dans le genre ? »

« … Je peux comprendre ta confusion. Mais réponds à ma question s’il te plaît. »

« Bien sûr que tu es Kasumi Mogi, Mogi-san… »

Oh wow, je ne dirai jamais quelque chose comme ça dans ma vie de tous les jours.

Pour une raison que j’ignore, elle murmure « Je vois… » Mogi-san semble un petit peu désespérée.

« Eh bien. Ça semble un peu incroyable, mais prépare-toi à m’écouter. Je suis… »

Alors, Kasumi Mogi, la fille que j’aime, dit quelque chose complètement bizarre.

« … Aya Otonashi. »

« … Hein ? Aya Otonashi… ? Mogi-san est Maria ? Qu’est-ce que ça veut dire ? »

Je suis emporté sous le coup de la surprise, mais Mogi-san continue.

« Ouais, je suis Aya Otonashi. J’étais sur le point de perdre confiance en moi parce que, aussi absurde que ça semble, tout le monde s’adresse à moi par Kasumi Mogi. Ils le font malgré mon apparence différente et ma façon de parler, mais je suis véritablement Aya Otonashi. »

Eh bien, la personne qui se tient devant moi est Kasumi Mogi. J’admets que j’ai aussi le sentiment que son apparence et sa façon de parler correspondent parfaitement à la Aya Otonashi dont je me souviens, mais…

« Euh… d’accord, il y a ce dédoublement de personnalité qui arrive tout le temps dans les mangas, pas vrai ? Tu es peut-être confronté à ce genre de problème en ce moment… ? »

C’est tout à fait absurde, mais ça reste dans la limite de la raison.

« J’ai aussi considéré cela. Mais si c’était le cas, tu devrais être déconcerté par mon nouveau comportement, et tu ne devrais pas connaître le nom "Aya Otonashi". Pas vrai ? »

Oui, je n’ai jamais prononcé le nom « Aya Otonashi » en sa présence.

« Attends, pourquoi tu t’es soudainement transformée en Mogi-san ? »

« … ne dis pas ça de façon aussi ambigüe. On m’a simplement échangé de place avec "Kasumi Mogi". C’est pas comme si je m’étais transformée en elle. Enfin… quoi qu’il en soit, comment je pourrais expliquer cette situation… Bon, tu as compris qu’il ne peut pas y avoir de "Kasumi Mogi" dans cette 27756e itération si je suis "Aya Otonashi", pas vrai ? »

J’acquiesce.

« "Kasumi Mogi" a disparu. Sa position est devenue vide. Tu te souviens encore de ce que je t’ai dit : Je ne suis pas devenue une élève transférée de mon propre choix ? Peut-être que j’ai été placée dans cette position vide cette fois à la place d’être une élève transférée. »

C’est beaucoup trop… farfelu.

« Il n’y a aucune chance que je, non, que toute la classe te confonde avec Mogi-san ! »

« En effet, je trouve aussi ça problématique. Mais tout en me confrontant à ce problème, j’ai trouvé simultanément une conclusion à un autre problème. Le propriétaire de la Classe Rejetée a vécu toutes les 27755 boucles. Du coup, sa personnalité a dû changer aussi. Pourtant, personne ne l’a remarqué. »

C’était probablement vrai.

« On peut supposer qu’il existe une règle dans la Classe Rejetée qui empêche les autres de remarquer les changements du propriétaire. En plus, le changement du propriétaire n’est pas affecté par ses relations. Kasumi Mogi était le propriétaire, mais elle a disparu pour une raison quelconque. Et je l’ai remplacée. La règle intervient, donc personne ne remarque quoi que ce soit, bien que mon apparence et ma personnalité, celles d’"Aya Otonashi" sont complètement différentes. »

Les explications de Mogi-san semblent plausibles pour le moment.

Si elle est vraiment Maria, ce serait une raison de se réjouir. Ce devrait l’être. Je veux dire, tout seul, je suis un incapable. Mais Maria sera sûrement en mesure de me guider.

Cependant…

« Je ne crois pas cela. »

— Je ne peux pas l’accepter.

Mogi-san semble surprise par ma résistance vigoureuse et écarquille les yeux.

« … Je sais que ça semble incroyable, mais ce n’est pas une raison pour m’opposer. »

Je me mords la lèvre.

« Ah, je vois. Tu ne veux simplement pas accepter les faits. Les accepter reviendrait à accepter que Mogi est la propriétaire. Et tu ne veux pas l’admettre, ce qui est tout à fait normal. Après tout tu aimes M… »

« Arrête !! » je crie par réflexe.

Tu as complètement raison ! Je ne veux absolument pas accepter ça. Mais je ne parle pas de l’affirmation comme quoi elle est la propriétaire. Ce que je ne peux pas accepter est que…

« … j’aime Mogi-san, » étouffai-je.

« Je sais. »

Mogi-san lève un sourcil, comme pour indiquer que je n’ai pas besoin de le dire maintenant.

« Donc… tu ne peux pas être Maria… !! »

Je serre les poings. En les voyant trembler, elle devrait comprendre ce que j’essaye de dire. Elle ouvre ses yeux en grand et ferme sa bouche.

J’aime Mogi-san.

Ce sentiment n’a pas changé, même maintenant.

Ce sentiment n’a pas changé… même si Mogi-san agit maintenant exactement comme « Aya Otonashi ».

Tout ce que dit Mogi-san est vrai, donc je suis un imbécile désespéré. Ne pas avoir remarqué que la personne que j’aime a changé. Ne pas avoir remarqué que la personne que j’aime a été remplacée par Maria. Je n’ai pas de problème avec elle, c’est juste que je n’arrive pas à faire face à mes propres sentiments.

L’amour rend aveugle, comme on dit. Mais cette expression prend un tout autre niveau.

Une imitation.

L’amour que j’ai ressenti pendant un temps aussi incroyablement long se révèle être un mensonge.

Donc, je ne peux pas l’accepter. Je ne peux pas accepter qu’elle soit « Aya Otonashi ». Au moment où je l’accepte, cet amour prendra fin.

« J’aime Mogi-san ! », je crache comme si je lui déclarai la guerre.

Elle baisse la tête sans dire un mot.

J’ai fait la pire déclaration d’amour possible. Je n’ai même pas pensé à mon interlocuteur lorsque je me déclare. Je ne l’ai fait que pour nier la réalité.

Je serre mes poings encore plus fermement. Mais tout de même, je dois le dire.

« Si tu insistes que tu es Maria, alors prouve-le-moi ! »

Elle continue de regarder le sol pendant quelques instants.

Mais elle ouvre rapidement ses yeux et parle avec détermination.

« Kazuki. Même si tu abandonnes la Classe Rejetée, ma mission ne changera pas. Donc d’abord, j’ai envisagé de te laisser seul. Cependant, j’ai décidé de ne pas le faire. Je ne veux pas que tu ‘effondres juste à cause de quelque chose de ce genre. »

Elle agrippe ma main droite. Mon regard se reporte vers son visage. Elle regarde droit dans mes yeux.

« Je veux m’assurer que tu comprennes que je suis véritablement "Aya Otonashi". »

Elle porte ma main vers sa poitrine.

« Q-Quoi ? »

« Je suis une boîte, » dit-elle avec dédain. « Donc je ne suis pas l’humaine "Kasumi Mogi". »

« Mais ton vœu n’est qu’à peine réalisé, non ? Il en va de même pour Mogi-san ! Me montrer ta boîte ne me prouvera pas que tu es "Aya Otonashi" ! »

Elle secoue sa tête.

« Dans les contes de fées, il y a des fées qui n’accordent qu’un seul vœu, pas vrai ? Quand tu entends parler d’une telle histoire, tu n’as jamais pensé :"Pourquoi ne pas simplement demander une infinité de vœux" ? »

J’acquiesce. En faisant cela, on obtiendrait un nombre infini de vœux. J’ai déjà songé à cela.

« C’est un peu embarrassant, mais mon vœu était quelque chose de similaire, » dit-elle avec un ton moqueur. « Mon vœu était… d’exaucer les vœux des autres. Je suis devenue un être qui exauce des souhaits. »

« C’est… »

Tout comme la boîte.

Mais cela semble être un vœu très beau et honorable, alors pourquoi sourit-elle avec autant de mépris envers elle-même ?

« Mais je ne pouvais pas pleinement croire en sa faisabilité. La boîte n’a pas pu complètement réaliser mon vœu. Chaque personne qui m’a utilisée en tant que boîte a disparu, parce la boîte a incorporé mes doutes selon lesquels "il est impossible que des vœux soient exaucés aussi commodément dans le monde réel". »

Je reste sans voix. Y a-t-il un nombre limite de fois où les boîtes ont besoin de s’amuser avec nos vies avant qu’elles ne soient satisfaites ?

« Kazuki, je vais te laisser toucher ma boîte. Après cela, tu ne seras plus du tout capable de poser une question stupide comme "qui es-tu ?". »

Elle étend ma main et la pousse contre sa poitrine.

Je ressens son rythme cardiaque.

À ce moment…

« Ah… »

Je coule au fond de la mer. Bien que je sois au fond de la mer, il fait jour, presque comme si le soleil se trouvait avec moi. C’est magnifique. Je suis fasciné par l’eau. Mais il fait froid. Je ne peux pas respirer.

Tout le monde semble heureux. Tout le monde semble heureux. Tout le monde semble heureux. Au fond de la mer. Les personnes gambadent avec les poissons des profondeurs, suffoquent, gonflent, s’immobilisent, se font écraser par la pression de l’eau, sourient. Il n’y a pas de signification. Il n’y a pas d’interaction. Les gens jouent leurs propres spectacles de marionnettes, leurs propres spectacles d’images, leurs propres comédies. Une tragédie où tout le monde est heureux.

Quelqu’un est en train de pleurer.

Seule une personne pleure, entourée de personnes en train de HAHAHAHAHAHAHAHA rire joyeusement.

Je secoue ma tête. C’est mon imagination. Juste mon imagination. Je ne vois rien ici !

Mais j’ai déjà compris une chose. J’ai saisi le sentiment d’une certaine personne, et il est peu probable que ce sentiment ne me laisse tranquille.

Une solitude absolue.


Je me glisse vers le fond de la mer et retourne à l’endroit où je me trouvais avant.

Elle a relâché ma main.

Je retire lentement ma main de sa poitrine et tombe à genoux, épuisé.

Au même moment, je remarque aussi que mes joues sont humides de larmes.

Je ne peux plus le nier. Après m’avoir montré cela, je ne peux plus le nier.

« C’est ma boîte… Le Bonheur Défectueux. »

C’est "Aya Otonashi".

Mogi-san détient aussi une boîte ? Ça n’a pas d’importance. Ce n’est pas un argument qui peut être utilisé pour nier Maria. Il n’y a pas besoin de logique. Je m’en suis rendu compte en la touchant. J’ai compris qu’elle est Maria.

Je ne suis pas sûr qu’elle souhaite que quiconque voie cela. Néanmoins, elle me l’a montré.

De sorte que je ne perde pas face à la Classe Rejetée.

« Maria, je suis désolé… »

Maria secoue sa tête avec un sourire.

« … »

Je ne supporte pas mes sentiments.

J’ai compris… J’ai compris qu’elle est « Aya Otonashi » et non « Kasumi Mogi ». Pourtant, mes sentiments pour elle n’ont pas changé. Son sourire me semble terriblement mignon. Les restes de mon amour continuent de m’embrouiller au lieu de disparaître.

Je me sens mortifié par la force de mon attachement à cet amour que mes larmes ne s’arrêtent simplement pas de couler.

« Kazuki. »

Maria prononce mon nom.

« Eh ? »

Elle fait alors quelque chose d’incroyable.

Elle m’enlace.

Je sais ce qu’elle fait, mais je ne comprends pas pourquoi.

Son étreinte est timide, c’était tout à fait inattendu de la part de Maria.

« Tu étais le seul qui s’est souvenu de mon prénom. »

Maria parle mystérieusement.

« Sans toi, j’aurais été seule. Je n’aime pas l’admettre, mais tu m’as soutenue, même quand je pensais que tu étais le propriétaire. Donc… »

Je reconnais enfin ce qu’elle fait.

« … laisse-moi te soutenir cette fois. »

Elle m’enlace de près. Contrairement à ses paroles, son étreinte est faible. Elle est plus en train de m’envelopper que de me soutenir.

« Je suis heureuse de t’offrir de la gentillesse, au moins tant que tu sembles encore m’aimer. »

Je ne sais pas.

Je ne sais pas si cette émotion est dirigée vers « Kasumi Mogi », « Aya Otonashi » ou les deux.

La seule chose que je sais est que je suis incroyablement heureux.

« Ah. »

Peut-être…

Peut-être que Maria ne m’a pas laissé toucher sa boîte pour mon bien. Après tout, Maria ne voulait pas que je l’appelle « Kasumi Mogi ». Cela veut dire qu’elle voulait que je reconnaisse son existence.

Après avoir considéré cette hypothèse pendant un bref instant, j’admets que je réfléchis trop et je ris involontairement.



« Hoshii, de quoi t’as parlé avec Kasumi quand je suis parti ? »

Les cours sont finis. Haruaki me frappe la poitrine avec un gros sourire sur son visage.

« Je sais. Elle t’a fait une déclaration, c’est ça ? »

« Ah… non… »

Enfin, elle m’a déclaré qu’elle est « Aya Otonashi », donc en quelque sorte, il a raison.

« Oh ? Tu essayes d’esquiver ma question ! Il y a anguille sous roche ! Me dis pas que j’ai touché dans le mille !? Merde, je suis jaloux ! Kasumi est devenue vraiment jolie, pas vrai ? »

Ah, je vois.

En écoutant les propos enjoués d’Haruaki, je comprends enfin ce que je dois faire.

Bien que la réunification avec Maria fût très rassurante, j’étais incapable de savoir quoi faire par la suite parce que « Kasumi Mogi », la propriétaire, avait disparu.

"Si tu fais de Kazuki Hoshino ton ennemi, tu te confronteras aussi à un immortel !"

Je me souviens de ces mots qu’Haruaki avait une fois prononcés à Maria. Cela s’était produit il y a bien longtemps, donc je ne suis pas sûr que ce soit vraiment ses mots exacts.

Oui. Je dois obtenir son soutien, quoi qu’il arrive.

« Haruaki. Est-ce qu’on peut reprendre la discussion qu’on avait tout à l’heure ? »

Il est surpris pendant un instant quand je lui demande ça d’un coup, mais il sourit et hoche la tête.

« Je t’ai dit tout à l’heure que j’ai compris ce que je devais faire, pas vrai ? Laisse-moi te faire part de ma conclusion. »

Je regarde dans les yeux d’Haruaki et déclare la guerre.

« Je vais me battre contre la Classe Rejetée. »

Il écarquille les yeux quand il entend ma vive déclaration.

« Euh, écoute… Je te l’ai pas expliqué clairement ? Même si on est dans la Classe Rejetée, ça devrait pas avoir d’importance tant que t’es pas au courant. »

« Ouais, mais je ne peux simplement pas l’accepter ! Je ne peux pas accepter une vie quotidienne où je peux rien faire progresser parce que tout se répète ! »

« Pourquoi ? »

« Parce que… je le sais, là, maintenant. »

Peut-être que ma vie continuera sans incident si j’oublie simplement que je suis dans la Classe Rejetée.

Cependant, j’en suis conscient. Je sais que ce monde n’est rien d’autre qu’une fausse vie quotidienne.

Par conséquent, je ne peux l’ignorer.

Peut-être est-ce de l’autosatisfaction. Néanmoins, je suis convaincu que j’ai raison et je ne peux pas agir différemment.

« … Bah, ça dépend que de toi, mais il y a une raison qui t’as décidé à devenir aussi obstiné ? » me demande Haruaki avec curiosité.

Une raison… ? La raison pour laquelle j’insiste aussi fortement pour mener une véritable vie quotidienne ? … En effet, mon attachement à ma vie de tous les jours n’est peut-être pas normal.

« Tu donnes l’impression que ta vie en dépend, » murmure Haruaki.

Ah, c’est vrai. C’est ça. La raison est tellement évidente.

« C’est… le sens de la vie. »

Haruaki ouvre grand les yeux sous le coup de la surprise.

« Le sens de la vie ? C’est quoi ça ? Tu veux dire quoi par ça ? »

« Je ne peux pas l’exprimer exactement, mais… par exemple, obtenir 100 points à un test auquel t’as pas étudié du tout ne te rendra pas heureux, pas vrai ? Mais quand tu obtiens 100 points après avoir bossé très dur pour essayer d’avoir une bonne note, tu deviens très heureux, non ? »

« Tu marques un point là : J’apprécie beaucoup plus les choses quand je travaille dur pour, même si le résultat reste le même ! »

« À mon avis, poursuivre quelque chose est la raison de la vie. Je ne pense pas que ce soit une exagération. Je veux dire, tout le monde meurt un jour ou l’autre. La conséquence de la vie est la mort ! Ne se soucier que du résultat final me fait peur. »

« Tout le monde meurt un jour ou l’autre… C’est vrai. »

« Si c’est la Classe Rejetée où tout devient invalide, alors je ne peux pas l’accepter. Je dois m’engager dans ma véritable vie de tous les jours dans le but de protéger le sens de ma vie. Donc, je nie la boîte qui nie la véritable vie quotidienne. »

Haruaki écoute ma déclaration avec grand intérêt.

… Peut-être que je n’avais pas besoin de lui dire tout ça. Haruaki m’aurait probablement aidé de toute façon.

« Haruaki, comptes-tu m’aider ? »

Sans perdre un instant, Haruaki me lève son pouce.



Comme Haruaki l’avait suggéré, nous décidâmes d’impliquer aussi Kokone et Daiya. Nous nous rassemblâmes tous les cinq autour du lit de l’hôtel haut de gamme que j’avais précédemment visité avec Maria.

J’explique toute l’histoire à Kokone et Daiya.

En fait, je m’attendais à ce que Maria se plaigne en disant que ce serait une perte de temps, mais elle resta principalement silencieuse et ajouta quelques commentaires de temps en temps. Peut-être qu’elle souhaitait entendre d’autres opinions sur le sujet.

« Hmm… Donc tu nous dis que Kasumi est en fait Aya Otonashi-san et non Kasumi, que la véritable Kasumi est la propriétaire qui a créé la Classe Rejetée et qu’on ne sait pas où elle se trouve… Et maintenant tu veux une solution, hein… ? … Je ne comprends rien de ce que tu diiiiiis ! Tu m’as perdue ! » Kokone se laisse tomber sur le lit. « Oh, ce lit est génial. »

« Je ne t’ai pas demandé tes impressions sur le lit, par contre. »

« Je sais ! » crie-t-elle en réponse à ma plaisanterie. Kokone est probablement en train de réfléchir sérieusement sur le sujet malgré son comportement.

« Laisse-moi poser une question, » déclare Daiya. « Si on est à l’intérieur de la Classe Rejetée, cet accident supposément inévitable va se reproduire, pas vrai ? »

« Il devrait, ouais, » répond Maria.

Hein… ? Daiya prend ça au sérieux ?

« C’est quoi ce regard stupide, Kazu ? À ouvrir et fermer ta bouche comme ça… T’es une carpe devant un hameçon ? »

« Ah, non… J’étais juste surpris que tu croies aussi facilement ce qu’on a dit au sujet de la Classe Rejetée. »

« Ha ! C’est ça, » crache Daiya.

« Euh, hein… ? »

« Je m’en ficherais si c’était juste vous deux qui étiez timbrés, mais même Mogi dit des choses bizarres en ce moment. Il doit y avoir d’autres explications sur ce qu’il se passe, mais c’est trop fatigant de le théoriser. Donc j’ai décidé d’arrêter d’être sceptique et d’accepter momentanément la Classe Rejetée par commodité. »

En gros, il va nous aider ?

« Et alors, Daiyan ? L’accident pourrait se reproduire. Et donc ? » Haruaki le presse de continuer.

« Ouais. Qui sera la victime si l’accident se produit comme d’habitude ? Mogi n’est plus là, non ? »

« Ça va être moi, j’imagine… Ce serait normal que je prenne aussi ce rôle, vu que sa position m’a été forcée. »

« La victime a toujours été Kasumi ? » demande Haruaki.

« Non, d’autres personnes se font parfois écraser en essayant de la sauver. Il y a eu Kazuki, Mogi, moi et même toi parce que tu as essayé de me sauver pendant que j’essayais de sauver Mogi. En vrai, tu as même fait ça plusieurs centaines de fois. »

« Ouah ! Tu déconnes ? Attends, plusieurs centaines de fois, c’est pas un peu impossible ? … Ah, non, pas nécessairement, hein. C’est plutôt plausible que la même personne agisse de la même façon dans la même situation. »

« Encore pire, dans la plupart des cas, tu me fais une déclaration au préalable, » soupire Maria.

« Un homme qui se sacrifie pour sauver la femme qu’il aime… Génial ! J’suis pas trop cool !? »

« Pour être honnête, tu aurais mieux fait de te mêler de tes affaires. »

« T’es cruelle. »

« Bah, essaye d’imaginer ce que j’ai ressenti. Tu n’as aucune idée d’à quel point c’est insoutenable de regarder quelqu’un se sacrifier pour toi parce qu’il t’aime… Ce que tu as fait était de mettre l’accent sur l’arrogance de ma poursuite de la boîte. C’était de loin la méthode la plus douloureuse pour briser ma volonté, haut la main. »

« Hmm… » Haruaki grimace.

Mais j’imagine qu’il n’a pas de regret, puisque ses actions en elles-mêmes n’étaient pas méchantes.

« Tant qu’on y est, combien de fois je me suis déclaré, Aya-chan ? »

« Exactement 3000 fois. »

« Ouah, je suis dévoué… »

« Donc tu t’es fait rejeter 3000 fois ! Ce doit être un tout nouveau record ! T’es si mauvais que c’en est presque adorable, Haru ! »

« Ta gueule, Kiri ! »

Ces deux-là ne cessent jamais de m’amuser.

« Mogi… Ah, non, je vais t’appeler Otonashi pour le moment. Otonashi, pourquoi est-ce que Mogi se dirige vers la scène de l’accident à chaque fois alors qu’elle sait ce qu’il va s’y produire ? »

Maria hausse un sourcil devant la question de Daiya et répond :

« Parce que ça fait partie des règles de la Classe Rejetée. Oomine, il n’est sûrement pas nécessaire de te le dire, mais j’ai essayé de prévenir l’accident à de nombreuses reprises. »

« Oui, évidemment que tu te sacrifierais pas directement. C’est bien plus normal de penser que t’es arrivée à ce mode de conduite après un certain temps. Moi, par exemple, je choisirai jamais de me faire renverser. »

« Hé, pourquoi vous parlez de l’accident ? Rien ne sera résolu si on ne trouve pas Kasumi, non ? »

Kokone incline sa tête sur le côté en les interrompant. Daiya détourne le regard avec mécontentement.

« Ce générateur de bruit humanoïde me tape sur les nerfs. »

« Hahaha. Si seulement tu te faisais renverser 20000 fois par un camion, hein ? ☆ »

« Juste pour savoir, Kiri, mais comment comptes-tu trouver Mogi pour nous ? »

« Bah… j’en sais rien. Pourquoi ? T’as une meilleure idée !? »

« Aucune. »

« Hoho… je suis étonnée que tu puisses jouer les innocents en me traitant de générateur de bruit. Pourquoi tu ne laisserais pas tomber ton nom "Oomine" pour t’appeler "M. Innocent" à la place ? Daiya Innocent. Ouah, ça colle parfaitement ! »

« Je ne suis pas le seul sans idée. Personne d’autre n’en a. Pas vrai ? »

Haruaki et moi nous échangeons des regards. Bah, Daiya a raison. Si on le savait, on aurait proposé quelque chose directement.

« Donc, on doit chercher une autre solution. Du coup, j’ai abordé l’accident de camion, qui est évidemment un événement particulier dans cette récurrence. C’est raisonnement tout ce qu’il y a de plus logique. Mademoiselle l’humanoïde génératrice de conneries, est-ce que mes explications vous sont parvenues ? »

« Argh… »

Kokone claque des dents avec contrariété, vaincue par ses explications.

« En tout cas, on pourrait progresser en empêchant l’accident, donc ça vaut le coup d’essayer. C’est ton point de vue, c’est ça, Daiyan ? »

Daiya hoche la tête en réponse au résumé d’Haruaki.

« Exactement. Mais il n’y a aucun intérêt si on peut pas l’empêcher. »

« Non… » Maria conteste sa remarque. « Ça peut valoir le coup d’essayer. Mes actions étaient limitées quand j’étais seule, mais avec autant de monde, le résultat pourrait être différent. »

« Le nombre de personnes est vraiment important ? Zéro reste toujours zéro, peu importe par quoi on le multiplie. C’est pas la même chose pour le genre d’impossibilité à laquelle on est confrontés ? » objecte Daiya.

« Je comprends où tu veux en venir, mais je pense qu’il y a encore une possibilité. Les conditions ont changé après tout ; Je ne suis pas Mogi, mais "Aya Otonashi", donc la probabilité n’est peut-être plus du tout zéro. Il n’y a aucune raison de ne pas améliorer ses chances en augmentant le nombre de personnes impliquées, tu ne trouves pas ? »

Daiya croise ses bras et réfléchit un moment. Il finit par hocher la tête en répondant « Tu as raison. »

« Très bien ! C’est décidé, on fait ça ! On va empêcher l’accident d’une façon ou d’une autre ! Des objections ? »

Personne ne conteste l’exclamation d’Haruaki.

Ouais. Ça devrait probablement fonctionner.



Il est tôt dans la matinée, une heure avant l’heure habituelle de l’accident.

Nous nous trouvons avec des parapluies à la scène de l’accident, au carrefour.

Haruaki et moi sommes supposés sauver Maria si nécessaire. Ce sera dangereux si l’accident se produit encore, mais nous avons tous les deux choisi nos rôles de nous-mêmes.

Maria était supposée trouver et entrer par effraction dans le camion en question. Elle avait conclu que ses chances de se faire renverser par le camion seraient minimisées si elle s’asseyait simplement sur le siège du conducteur.

Je suis nerveux. On ne doit pas échouer. Je n’ai pas fermé un œil hier. Pour calmer mon anxiété et avec le désir de confirmer quelque chose, j’ai parlé avec Maria par téléphone pendant plusieurs heures.

Je regarde le visage d’Haruaki.

Contrairement à moi, il ne semble pas nerveux. Son expression est complètement normale. C’est le visage que j’ai toujours vu dans la Classe Rejetée.

Cette fois, on arrivera peut-être à détruire la « Classe ».

Que l’accident se produise ou non.

« Haruaki, j’aimerais te parler un peu pendant qu’on attend, OK ? »

« Pourquoi tu es si formel ? Bien sûr que c’est OK ! »

Je regarde instinctivement le ciel quand j’entends le bruit des gouttes de pluie tomber sur mon parapluie.

« C’est au sujet de Mogi-san. »

« Kasumi ? Hmm, pas Otonashi-san, mais l’originale ? »

Je hoche la tête.

« Je ne t’ai pas dit qu’elle… nous a tués, pas vrai ? »

« … Oula ça semble plutôt violent, eh ? » Haruaki lève un sourcil.

Je n’avais pas spécialement essayé de l’empêcher de le découvrir. Je ne pouvais simplement pas m’en souvenir jusqu’au au moment où je me suis rendu compte que Mogi-san est la propriétaire.

Et comme si mes menottes s’étaient brisées au moment où je me suis rappelé de l’identité du propriétaire, j’ai regagné tous mes souvenirs de l’itération précédente.

« Elle m’a tué moi, Maria, Kokone et même probablement toi. »

« … On s’est fait tuer ? Par Kasumi ? Pourquoi ? Dans quel but ? »

« Elle l’a fait dans le but de "rejeter" les autres ! À la base, tout est rendu invalide et vide au sein de la Classe Rejetée. Donc même si tu tues quelqu’un, cette action reste réversible. Mais on dirait que Mogi-san est capable de "rejeter" les autres en les tuant de ses propres mains. Je pense qu’elle le fait parce qu’elle peut alors souhaiter de ne jamais revoir cette personne du plus profond de son cœur. »

Haruaki hoche la tête avec une expression sérieuse. Je lui ai déjà expliqué le phénomène de « rejet », et qu’une fois qu’il se produit, plus personne ne peut se souvenir dela personne « rejetée ».

« Notre Kasumi a fait ça, euh… c’est plutôt incroyable. Mais… bon, c’est pas surprenant que même Kasumi soit devenue comme ça après avoir expérimenté presque 30000 itérations, j’imagine. Normal. »

« Tu le penses vraiment ? » je demande.

« Hmm ? Je veux dire, c’est peut-être difficile à imaginer, mais n’importe qui deviendrait fou dans une telle situation, non ? »

« C’est vrai. Mais tu sais ? Même si tu devenais fou, tu ne commettrais toujours pas de meurtre. C’est normal de penser de cette façon ! »

« Tu crois ? T’es pas trop fixé sur ton propre point de vue ? »

Peut-être. Mais je ne peux pas le croire. Je veux dire, commettre un meurtre ne pouvait devenir qu’une méthode efficace pour « rejeter » parce que ça la faisait culpabiliser. Je ne peux pas croire qu’une telle personne puisse penser à un acte aussi inhumain d’elle-même.

« … tu t’es déclarée à Maria 3000 fois et t’es fait renverser des centaines de fois à sa place, pas vrai ? »

« J’imagine. Même si dans mon état actuel, je ne peux pas m’en souvenir. »

« Ouais, mais au bout du compte : tes actions l’ont tourmentée, pas vrai ? »

« Ah… pas volontairement, par contre, » dit Haruaki avec un sourire amer.

« Elle s’est sentie tourmentée parce que le moindre message, aussi absurde qu’il soit, gagne du poids une fois répété autant de fois. Par exemple : peu importe à quel point tu as confiance en ta beauté, si quelqu’un te dit que tu es hideux un millier de fois, tu perdras cette confiance en toi… même si la remarque n’était qu’une plaisanterie. »

« Ouais, j’imagine. »

« Donc, Maria n’a pas pu s’empêcher d’être consciente de toi quand tu t’es déclaré à elle 3000 fois. Et on parle de Maria. Crois-moi, elle n’était pas insensible quand tu t’es opposée à elle. »

"Si tu fais de Kazuki Hoshino ton ennemi, tu te confronteras aussi à un immortel !"

Je me rappelle ses mots une fois de plus.

« … Oh ? J’ai déclenché le flag pour la route d’Aya-chan ? »

Je souris légèrement et ignore sa blague.

« Du coup, et si quelqu’un suggérait le meurtre comme solution à Mogi-san un millier de fois ? Est-ce que ça ne ferait pas croire à Mogi-san qu’il n’y a aucune autre alternative ? Après tout, elle ne pouvait même pas compter sur quelqu’un et était sur le point de devenir folle. »

Haruaki hoche la tête.

« … J’admets que ce serait dur. C’est même tout à fait probable. Après tout, la personne qui lui parle resterait neutre. Ses actions et ses valeurs ne changeraient pas. Ce serait tout à fait normal qu’il dise la même chose encore et encore. S’il dit quelque chose une fois, il dira probablement la même chose des milliers de fois. »

« Tu as raison. Mais je ne suis pas inquiet par ce scénario. Ce serait une sorte d’accident, où personne n’est en tort. Mais… »

Je détourne enfin le regard du ciel menaçant.

« … et si quelqu’un avait choisi ses mots et agit uniquement dans le but de l’acculer ? »

Puis… je me concentre sur Haruaki.

Haruaki ne montre pas le moindre signe de gêne même si je l’observe.

« Hmm ? Mais c’est impossible, non ? »

L’expression sur le visage d’Haruaki est parfaitement normale.

« Au contraire ! Par exemple, Maria et moi aurions pu le faire, si on le voulait. Si quelqu’un avait continué de prétendre avoir perdu ses souvenirs quand il interagissait avec Mogi-san, c’est possible ! »

Haruaki écoute silencieusement mes paroles sans soulever d’objection.

« J’ai d’abord pensé qu’être capable de conserver ses souvenirs serait un avantage. Après tout, plus on a d’information, mieux c’est, pas vrai ? Mais ce n’est pas toujours vrai. Conserver ses souvenirs signifie aussi que tu te feras attaquer continuellement par ceux qui ont perdu leurs souvenirs, et par ceux qui prétendent les avoir perdus. Les personnes qui ont perdu leurs souvenirs se trouvent en lieu sûr. Ils peuvent attaquer ceux d’entre nous qui se tiennent en première ligne depuis leur position. »

J’ai fait l’expérience d’une telle attaque quand la fille que j’aime m’a répondu avec un "Attends jusqu’à demain s’il te plaît" à ma déclaration. Même si pour être honnête, elle ne se trouvait pas en lieu sûr.

« Et si quelqu’un avait délibérément attaqué Mogi-san depuis ce lieu sûr ? Quelqu’un qui était au courant de sa douleur, qui s’est arrangé qu’elle ne s’échappera pas et qui lui a présenté l’option "meurtre". Dans ce cas… »

« Dans ce cas, ce gars a manipulé Kasumi et a délibérément contribué aux meurtres, » dit Haruaki avec désinvolture.

Il ne dément pas mes propos.

« On ne peut pas être sûrs que Mogi-san est la seule cible. »

« … mais ? »

« Je veux dire, elle n’était pas la seule personne à se tenir en première ligne. Maria et moi y étions aussi. Selon les objectifs de cette personne, il pourrait aussi essayer de nous manipuler, moi et Maria. Non… on est déjà plus ou moins sous son contrôle. »

"…tu veux essayer de me tuer ?"

Je me rappelle d’une personne m’ayant dit cela à un moment.

En fait, j’entends ces mots plus d’une fois. Cette personne répète cette phrase sans fin. Ces mots restent bloqués dans ma tête telle une malédiction.

De surcroît, j’ai l’impression qu’une pile de cadavres s’expose devant moi.

Maria, à qui quelqu’un s’était déclaré, avait dû voir cette même personne se sacrifier pour son bien, et s’était également attirée son hostilité.

Ce sont toutes les informations pertinentes que j’ai réussi à extraire de ma mémoire fragmentée. Il pouvait y avoir quelques petits pièges que je n’ai pas relevés.

Attaquant continuellement depuis un lieu sûr sans inconvénient. Même si ses plans ne se sont pas déroulés comme prévu, il pouvait répéter cette attaque autant de fois qu’il le souhaite.

« Si on suppose que nos actions ont été contrôlées par cette personne jusqu’à un certain degré… »

Je déglutis.

« … il a aussi prévu qu’on se retrouve dans notre situation actuelle. »

Haruaki reste silencieux. Son visage est caché par son parapluie, donc je ne peux pas voir son expression.

Le silence demeure. Le bruit de la pluie semble étrangement lourd. J’entends un léger son. Au début, je ne sais pas ce que c’est, mais quand je tends l’oreille, je comprends que c’est un rire étouffé.

Haruaki déplace son parapluie sur le côté de sorte que je vois son visage.

Il me regarde et rit d’un ton amusé.

« D’accord, hmm, Hoshii. C’est quoi le but de cette blague, ou plutôt, de cette grande hypothèse ? D’abord, c’est complètement impossible. C’est pas simple de contrôler les autres, hein ? Bien sûr, c’est une drôle d’histoire, mais pour être honnête, je ne sais pas si c’est acceptable de rire ou non parce que tu sembles si sérieux… Non, oublie ça ; je veux dire, j’ai déjà commencé à rigoler. »

« Oh, j’ai été un peu trop indirect ? »

« … Indirect ? En tout cas, je comprends même pas le but de ce gars. Mais quel qu’il soit, il devrait y avoir une approche plus directe. »

Haruaki parle encore d’une voix claire.

« Ouais. Je ne connais pas non plus son motif. Donc je songeais à te le demander. »

« Me le demander… ? »

Une fois que j’ai dit ça, je serai irrévocablement impliqué.

« Haruaki… »

Mais j’ai perdu toute ma volonté de me retirer il y a longtemps.


« … Pourquoi tu nous as acculés comme ça ? »


Il ne répond pas.

Il cache une fois de plus son visage derrière son parapluie.

Il ne dit rien. Il ne compte probablement pas me dire quelque chose.

« Je ne me souviens pas exactement de comment ça s’est passé, mais nous sommes devenus amis juste après que l’école commence. Et grâce à toi, je suis aussi devenu ami avec Kokone et Daiya. Ma vie scolaire aurait probablement été un peu plus ennuyeuse sans toi. Toutes ses bonnes choses sont arrivées grâce à toi. »

Dans ce cas, je dois parler à sa place.

« Nous n’avons même pas été ami pendant une année complète, mais… »

« Tu ne peux donc pas juger si je ferais quelque chose comme ça ? »

Je secoue ma tête, bien qu’Haruaki ne puisse probablement pas me voir.

« Il y a beaucoup de choses que je ne sais pas à ton su jet. Mais il y a une chose dont je suis sûr. Je peux le dire avec assurance. »

Je déclare.

« Haruaki Usui ne nous acculerait jamais comme ça. »

Je peux enfin voir son expression.

Haruaki me regarde les yeux écarquillés.

« Alors… »

J’en viens enfin au point.


« Alors… qui es-tu ? »


"Oh ? Tu essayes d’esquiver ma question ! Il y a anguille sous roche ! Ne me dis pas que j’ai touché dans le mille !? Merde, je suis jaloux ! Kasumi est devenue vraiment jolie, pas vrai ?"

Haruaki ne faisait que me taquiner à ce moment-là.

Mais quelque chose clochait.

Il y a une règle que la Classe Rejetée impose. Les autres personnes ne remarquent jamais le moindre changement de Mogi-san… pas même lorsqu’elle a été remplacée par « Aya Otonashi ». Alors comment ? Comment ?

… comment a-t-il pu dire que Kasumi est devenue vraiment jolie ?

Ce n’est pas la seule raison pour le suspecter.

Haruaki a été « rejeté ».

Je l’ai moi-même oublié. Mais j’ai d’une certaine façon réussi à me souvenir de lui.

"Je me rappelle de lui parce que c’est un ami cher." C’est comme ça que je l’ai justifié. Mais pourquoi je me souviendrais de lui quand je ne pouvais pas me souvenir de la moindre autre personne qui avait été « rejetée » ?

C’est juste une hypothèse, mais je pense que je ne l’ai pas complètement oublié parce que quelqu’un d’autre a été mélangé à Haruaki.

Ces deux arguments ne servent pas à prouver quoi que ce soit. Je remarque qu’ils ont bien des défauts.

Mais ça n’a plus d’importance.

Parce que je me suis souvenu.

Parce que je me suis souvenu de quelque chose dont je n’aurais pas dû être capable de me rappeler.

"As-tu un souhait ?"

"Ceci est une boîte pouvant accorder n'importe quel souhait."

Les paroles d’une personne qui pouvait prendre l’identité de n’importe qui, mais qui, en même temps, ne ressemblait à personne.

« Dis-moi ce que tu essayes de faire ! »

Et ainsi je prononce son nom.

Je prononce le nom de l’être qui a distribué cette boîte, l’être que j’avais oublié jusqu’à maintenant.

Son nom est…

« … O. »

Et au moment où je prononce son nom…

« Fufu… »

… Haruaki disparaît de son propre visage.

Ce n’est pas comme si son visage avait changé de forme. Haruaki n’est juste plus présent dans le sourire de son visage ; c’est une imitation qui s’est déguisée en utilisant la peau d’Haruaki.

Au moins, la menace qui nous a poursuivis prend forme.

— O.

« Incroyable, personne ne devrait réellement connaître mon nom à l’exception du propriétaire actuel de cette boîte, tu sais ? C’est bizarre. »

« Tu as été négligent avec tes mots. »

« Négligent ? »

O rigole. Il semble véritablement amusé.

« Je n’ai pas du tout été négligent ; pour commencer, il n’y avait aucune raison pour que je sois prudent. Tu es anormal parce que tu es devenu conscient da présence à travers ces indices ! »

« Tu le penses vraiment ? »

« Alors dis-moi, quand tu vois quelqu’un agir un peu étrangement, suspectes-tu directement que quelqu’un l’a remplacé ? »

Je dois admettre qu’il a raison. Peu importe à quel point une personne agit suspicieusement, il est déraisonnable de penser qu’une personne ait pu voler son identité.

« Et pourtant, tu m’as découvert. Ce qui signifie que tu étais au courant de ma présence, une cause possible d’une telle occurrence, même si personne ne devrait être capable de se souvenir de mon existence. »

« Si c’est vrai, comment je me suis souvenu de toi ? »

« Qui sait ? C’est vraiment mystérieux, mais peut-être que l’existence d’Aya Otonashi t’a influencé ? Quand bien même, tu ne devrais toujours pas être capable de me remarquer juste parce que quelqu’un t’a appris quelque chose. »

O parle agréablement et ouvertement. Mais en ce moment, je me fichais de ce dont il parlait.

« … Aah, tu veux comprendre mes intentions ? D’accord ! Il n’y a rien à cacher. Je veux juste t’observer de près. »

En l’entendant dire cela, je commence à la ressentir.

Aah, encore.

Cette sensation étrange et inconfortable que j’ai ressentie quand je l’ai rencontré pour la première fois. Je la ressens à nouveau.

Qu’est-ce que c’est ? Quel est ce sentiment déjà ?

« … Je ne comprends pas ! Pourquoi ça t’as donné envie d’acculer Mogi-san ? »

« Pourquoi ai-je acculé le propriétaire ? Comme je l’ai dit, je voulais t’observer. Bon, laisse-moi être un peu plus clair, » commence à dire O avec amusement. « Je voulais voir comment tu réagirais face à la boîte de quelqu’un d’autre. Quand le vœu impur de Kasumi Mogi consistant à altérer son passé a été accordé, je me suis d’abord inconsciemment réjoui. J’étais heureux parce que j’étais capable d’observer ton implication avec une boîte sur un bon laps de temps… Mais ça ne m’a pas pris longtemps pour comprendre que c’était imparfait. Je préfèrerais t’observer dans autant de situations différentes que possible, mais je ne peux pas faire ça dans la boîte que vous autres appelez Classe Rejetée. Tout le monde agit de la même façon à chaque fois, y compris toi. Peu importe à quel point Kasumi Mogi et Aya Otonashi stabilisent leurs souvenirs, ce n’est pas du tout intéressant si la personne principale – c’est-à-dire toi – ne conserve pas ses souvenirs. »

Je me prends dans mes bras en réponse au malaise que je ressens.

« J’ai donc décidé d’interférer avec vous autres. J’ai pris le contrôle d’Haruaki Usui parce que sa position centrale me permettait facilement de vous influencer tous les trois. Enfin, j’ai construit un joli petit coin pour moi en utilisant Haruaki Usui, Aya Otonashi et Kasumi Mogi, et je me suis assuré que tu conserves ta mémoire. Grâce à ça, j’ai pu t’observer bien comme il faut ! »

« Donc, tu veux dire que tu as manipulé Mogi-san pour qu’elle me tue parce que tu le voulais… ? »

« Oui, je voulais voir comment tu réagirais face à une attaque mortelle de la part de la fille que tu aimes. »

… Pour cette simple raison, Mogi-san a été forcée de souffrir continuellement.

« Ah, c’est aussi pourquoi je t’ai induit à l’aimer, bien sûr. »

« Que… »

Mes sentiments ont été induits ?

« Oh ? J’étais sûr que tu l’avais remarqué. Ah, je vois. Alors tu ne voulais pas le remarquer. Eh… C’est pour ces moments-là que cela vaut le coup d’être proche de toi. Pour dire la vérité, je n’ai pas besoin d’être dans cette boîte pour t’observer. Mais alors je négligerais probablement des moments comme celui-là. Regarder depuis l’extérieur de la boîte est très ennuyeux ; c’est presque comme observer à travers les lentilles d’un télescope super efficace de très loin depuis l’espace. Tu peux voir ce que tu veux, mais il est pour ainsi dire impossible de rester concentré. C’était donc vraiment une chance que je puisse t’observer de près en tant qu’Haruaki Usui ! »

Je comprends enfin ce sentiment inconfortable.

Oui. C’est de… l’effroi.

Ce n’est pas comme si je n’avais jamais été effrayé jusqu’à maintenant, mais cette frayeur est si différente de la normale que je n’ai pas pu la reconnaître au début.

« Eh bien, Kazuki Hoshino-kun. Que vas-tu faire ? »

Je ne peux pas formuler de mot.

Comme je suis devenu conscient de cette terrible frayeur, je ne peux même pas ouvrir la bouche.

« Croyais-tu que tout serait résolu une fois que tu aurais démontré que "je suis à l’intérieur d’Haruaki Usui" ? J’ai une apparence totalement humaine actuellement, et comme je suis aussi un meurtrier, tu pourrais juste me remettre à la police et t’arrêter là pour aujourd’hui. Mais ce n’est pas ça, pas vrai ? Ton but est de regagner ta vie quotidienne, n’est-ce pas ? Me parler ne résout rien ! »

Il est dangereux. Bien plus dangereux que tout ce que j’ai pu rencontrer.

« C’est aussi pourquoi je n’ai pas pris la peine de camoufler ma transformation en Haruaki Usui. En effet, la boîte est en ma possession en ce moment parce que je l’ai volée à son propriétaire. Je pourrais te la montrer tout de suite, mais il est inutile de le faire. Je n’ai pas à te la remettre juste parce que tu t’es souvenu de moi. Et tu n’as pas non plus la force de m’y contraindre. »

Il s’intéresse à moi. Mais seulement en tant que cobaye. Ni plus ni moins. Et bien évidemment je n’ai aucune idée de comment m’occuper de quelqu’un qui me traite de cette façon.

Donc…

« Eh bien, tu as tout à fait raison. »

… la personne qui lui répond comme ça n’était clairement pas moi.

« Kazuki seul n’a pas ce pouvoir. »

O me regarde, essayant de comprendre d’où provient cette voix.

Elle vient de mon sac.

Le klaxon d’un camion résonne lourdement. Avec son moteur rugissant, un grand camion accélère vers nous. O regarde dans sa direction et fronce légèrement ses sourcils. Le camion qui fonce vers nous me semble terriblement familier.

Assise sur le siège du conducteur… se trouve Maria.

« Tu m’as manquée, O ! »

La voix résonne depuis mon sac. Elle provient du portable avec lequel j’ai appelé pendant toute notre conversation.

Le camion tourne dans notre direction, mais nous restons sur place. J’entends le son d’un freinage d’urgence retentir, mais la pluie empêche les freins de fonctionner correctement. Le camion se rapproche de plus en plus près, mais O ne bouge pas d’un pouce. Quand je le vois rester immobile, j’en fais autant, mais je ferme instinctivement les yeux.

Le son du freinage d’urgence disparaît.

J’ouvre mes yeux. Le camion s’est littéralement arrêté devant mes yeux.

« Qu’est-ce que cela était supposé accomplir ? » O sourit légèrement en posant cette question à la personne sur le siège conducteur.

« C’est juste un petit bonjour. Quelle chance que tu ne te sois pas fait écraser comme substitut pour Kasumi, hein ? »

J’entends sa voix en stéréo, de devant moi et depuis mon sac. Après m’être écarté du camion, Maria retire enfin ses écouteurs Bluetooth et met fin à notre appel.

O regarde Maria. Elle se trouve devant nous sans parapluie.

« Alors tu as écouté toute notre conversation ? En d’autres mots, cette stratégie ridicule était une diversion depuis le début ? Quel dommage… J’aurais adoré voir Kazuki-kun être découragé par son échec. »

« Je prenais cette stratégie au sérieux au moment où tu l’as proposée. Mais finalement, on dirait que Kazuki était au courant de ta véritable forme et m’a laissée dans le noir. »

Ce n’était pas mon intention, cela dit. Je ne savais juste pas quand lui annoncer que j’avais fait cette découverte.

Cependant, je m’étais assuré de pouvoir avoir une discussion en privé avec Haruaki en obtenant sa coopération.

« Mais c’était la bonne décision finalement. Si j’avais été auprès de Kazuki, tu aurais pu continuer de jouer les ignorants. »

« As-tu volé le camion juste pour apparaître comme si tu venais de loin ? Eh bien, j’apprécie tes efforts, mais pourquoi devrais-je jouer l’ignorant si tu étais présente ? Tu es peut-être une boîte, mais cela ne veut pas dire que tu es capable de faire quoi que ce soit pour m’opposer. »

« Oh, alors tu ne l’as pas remarqué ? On dirait que mes efforts ont été complètement inutiles ! Eh bien, laisse-moi te demander : Tu es au courant de mon Bonheur Défectueux, pas vrai ? »

« Oui, je suis au courant. Et je sais aussi qu’il ne t’aidera pas contre moi. »

Maria se moque de O.

« Ha, tu ne comprendras vraiment jamais les humains. Peut-être que tu pigeras si je le formule ainsi : "Je me suis préparée à t’effacer". »

O réagit à ses mots avec un sourire en coin.

« Tout ce que tu peux faire est d’entasser les autres dans ta propre boîte, non ? Alors comment seras-tu capable de faire cela ? »

« On dirait que tu ne sais toujours pas pourquoi j’étais obsédée par Kazuki. »

Elle prononce soudainement mon nom. O me regarde. Bien que ses yeux soient bienveillants, ils m’effrayent. Ce sont les yeux de quelqu’un regardant un morceau de porc et réfléchissant à comment le cuisiner.

« … Je vois. »

O sourit.

« Alors tu l’as enfin compris. Kazuki a un don pour utiliser les boîtes. Il pourrait même être capable de maîtriser mon Bonheur Défectueux. Et il souhaiterait certainement que sa vie de tous les jours continue. Que sa vie de tous les jours soit débarrassée des êtres qui la menacent. Comme les boîtes. Comme toi. »

Maria jette un regard noir à O en déclarant cela.

O n’est pas submergé par ses mots. Il n’est ni surpris ni étonné. Il baisse juste douloureusement les yeux.

« Je vois. Alors tu n’as pas du tout changé, » dit O.

À la fille qui est devenue plus qu’une humaine après avoir vécu 27755 boucles.

« Mais une boîte inférieure comme toi disparaîtrait aussi, n’est-ce pas ? »

Maria ne tressaillit même pas.

« J’en suis consciente. »

« J’imagine. »

O, cependant, semble toujours attristé. Il ne semble même pas s’inquiéter de la possibilité de se faire effacer.

« Ne peux-tu toujours pas vivre pour ton bien ? Ne peux-tu vivre que pour le bien des autres ? Je te plains du fond de mon cœur pour vivre aussi misérablement ! »

« Va en enfer avec ta pitié. »

« Au début, j’étais intéressé par tes traits de personnalité insolites, mais c’est inutile. Un humain qui n’a pas le moindre désir personnel n’est pas différent d’un robot. Je pourrais tout aussi bien observer un aspirateur. Tu es l’existence la plus ennuyeuse au possible ! »

Maria serre ses dents, vexée après avoir entendu sa critique. Rien de plus normal. Au lieu d’être perçue comme un adversaire, l’ennemi la prend en pitié.

« D’accord. Je ne veux pas être effacé, alors faisons un marché. Je vais te remettre la boîte. En échange, je veux que tu me laisses partir. Qu’en penses-tu ? »

« … Hmpf, ces conditions ne sont pas trop en ta faveur vu que tu es sur le point d’être effacé ? »

« Tu devrais être reconnaissante que je prenne même la peine de répondre à ta misérable menace. Il n’y a aucune garantie que Kazuki-kun utilise vraiment ta boîte. Je ne veux même prendre la peine d’estimer à quel point la probabilité que je disparaisse serait faible, si jamais il utilisait ta boîte. Je fais ce geste de conciliation inutile seulement pour exprimer mon respect à Kazuki-kun pour m’avoir découvert, tu sais ? »

« De conciliation ? Ce que tu vas nous remettre est une vieille cage à oiseau dans laquelle tu as emprisonné Kazuki. Tu peux préparer autant de cages à oiseau que tu veux, non ? Tu étais déjà lassé de celle-ci, et tu allais la changer pour une nouvelle bien assez tôt, pas vrai ? »

« Je laisse cela à ton imagination. »

« Hmpf… Kazuki, tu es d’accord avec ce marché ? »

Maria demande mon approbation. Je hoche la tête. Ça me va tant qu’on peut faire quelque chose au sujet de la Classe Rejetée.

« Kazuki Hoshino-kun. Puis-je te donner un conseil ? » me demande O. « Tu es quelqu’un qui ne souhaite pas le changement. Mais la plupart des propriétaires le souhaitent exactement quand ils obtiennent une boîte. Ils veulent peut-être gagner quelque chose, ils veulent peut-être devenir quelque chose, ils veulent peut-être se débarrasser de quelque chose… ils essayent tous de faire de leurs désirs une réalité. Par conséquent, tu te retrouveras automatiquement en conflit avec eux. »

Je fronce les sourcils parce que j’échoue à comprendre l’intention derrière ses mots.

« Kazuki Hoshino-kun. Te considères-tu anormal ? » me demande-t-il.

« … Je suis normal. »

Il sourit à ma réponse.

« Je vois. Mais j’ai bien peur que ce ne soit pas le cas ! Cependant, il n’y a pas besoin de t’inquiéter si tu n’aimes pas être anormal. Tu ne peux pas rester ainsi bien longtemps. Les gens comme toi finissent soit rejetés par la société soit finissent par s’y adapter avant de perdre leur anormalité. Ne t’inquiète pas ! Tu fais définitivement partie de la seconde catégorie. » Il me dit tout cela sans perdre son sourire.

« Et c’est cela… que tu es véritablement infortuné, » dit-il avec régal. « Ce que je veux dire, c’est que tu sais désormais que ces failles existent. À chaque fois que tu feras face à la malchance, tu souhaiteras avoir eu une boîte. Peu importe à quel point tu te débattras dans le but de les oublier, les boîtes existent bien. Les boîtes qui exaucent n’importe quel vœu existent bien. Tu seras incapable d’oublier l’existence de cette faille. Et finalement, quand tu auras vécu en en étant conscient pendant longtemps, le moment viendra où tu auras besoin d’une boîte ! »

Il sourit toujours.

Aah, je vois…

Je lui redonne la boîte. Mais il était futile de faire cela. J’étais déjà prisonnier de la malédiction de O.

« Le moment venu, quand tu auras besoin d’une boîte, tu auras peut-être déjà perdu ton anormalité. Si c’est le cas, tu ne seras plus capable de contrôler la boîte. Cela réduira un peu mon intérêt à ton sujet. Donc, je vais continuer d’interférer avec toi et ton entourage à partir de maintenant… pour susciter ton intérêt envers une boîte. »

Qu’aurais-je dû faire pour éviter d’être maudit ?

— Il n’y avait probablement aucun moyen d’éviter cela.

Je… non, nous avons déjà perdu dès le moment où nous avons rencontré O pour la première fois.

« Naturellement, je te fournirai une boîte même si tu perds ton anormalité. Je m’en fiche, tant que tu me laisses écouter ton son. »

« … Mon son ? »

« Oui, j’aime toute la palette de couleurs que l’humain peut produire, mais il y a un son que je préfère. Si possible, j’aimerais que tu me laisses écouter ce son. … Hmm ? Quel genre de son, tu me demandes ? Mon goût est complètement ordinaire, donc je pense que tu le sais déjà. C’est… »

Il sourit et continue,


« … le son des cœurs qui craquent. »


À ces mots, le O qui ressemble à Haruaki disparaît.

Une petite boîte tombe au sol là où O se tenait. Quand je tends le bras vers elle, elle commence à s’étendre.

Immédiatement après, le paysage entier autour de nous commence à se démonter. Je peux voir les murs de ce monde. Le papier peint blanc commence à tomber en miettes. La douceur qui s’était collée à ma peau disparaît, laissant derrière elle une sensation inconfortable. L’intérieur de mes oreilles commence à s’affoler et tout commence à tourner. Le son de la destruction. Le son de la destruction. Le son de la destruction d’une personne. Cet endroit est rempli de désespoir. D’un indéniable désespoir.

Le faux paysage s’est fait effacer et nous nous trouvons dans une chambre sombre. Une petite, petite chambre qui me rendrait sûrement malade en une demi-journée.

C’est probablement… l’intérieur de la boîte.

Et dans cette sorte de prison, elle est accroupie. Son front pressé contre ses genoux et ses bras entourant ses jambes.

C’est la fille que j’aime.

« … Mogi… san. »

En entendant mes mots, elle lève lentement son visage.

« Ah… »

Ses yeux semblaient presque morts jusqu’à maintenant, mais une faible lueur s’y allume.

« J’y crois pas ! C’est impossible que tout puisse aller aussi bien pour moi ! »

Des larmes coulent le long de ses joues.

Au début, je suis très confus, mais je comprends vite pourquoi.

« Tu es vraiment venu me sauver. »

Je vois.

Elle est enfin capable de pleurer à nouveau.

« Mogi-san, je suis désolé. Mais je compte détruire la Classe Rejetée. »

« … Oui. »

Mogi-san hoche la tête en pleurant.

« Je compte te laisser mourir dans l’accident. »

« … Oui. »

Elle sèche ses larmes.

« Tu peux détruite la boîte. Tu peux aussi mettre fin à ma vie. Mais attends un peu s’il te plaît. Il y a quelque chose que j’aimerais te dire. »

Mogi-san commence à chercher quelque chose dans son sac. Elle le sort et le cache dans son dos.

Maria fronce les sourcils devant le comportement de Mogi-san.

« Mogi… pas encore… »

Mogi-san ignore Maria et s’approche de moi, cachant ses mains derrière son dos.

« … Attends, Mogi ! Arrête ça s’il te… »

« Tu te trompes, Maria, » lui réprimandé-je. Je ne peux pas voir ce que Mogi-san cache. Mais je sais déjà ce que c’est.

Maria réagit à mes mots avec une expression douteuse et marche derrière Mogi. Quand elle reconnaît l’objet dans ses mains, elle sourit ironiquement avec stupéfaction.

« Kazu-kun, penses-tu qu’il y a des sentiments éternels ? » me demande Mogi-san.

Je sais quoi répondre tout de suite, mais ce ne sera pas une réponse plaisante pour elle.

Donc, j’ai du mal à le dire.

J’imagine que ma réponse aurait été différente si je n’avais pas vécu la Classe Rejetée. Mais je l’ai vécue. J’ai fait l’expérience du monde qui ressemble à l’éternité. Je ne peux donc pas m’empêcher de penser autrement. Les sentiments éternels…

« … Je ne pense pas qu’ils existent. »

Mogi-san écoute patiemment ma réponse.

Puis elle sourit.

« Oui, je suis d’accord. »

Je regarde dans ses yeux sans réfléchir. Elle semble avoir déjà prévu cette réaction, donc elle continue de sourire et poursuit.

« Mes sentiments pour toi ne sont pas du tout restés les mêmes. Tu as arrêté de m’être cher. J’ai commencé à ne plus t’aimer, je t’ai détesté, je t’ai considéré comme une nuisance. J’étais même sur le point de te tuer une fois. Mais tu sais quoi ? Ça veut dire que je dépendais de toi tout ce temps. Parce que j’ai toujours cru que me sauverais. Toujours, toujours… Je ne pouvais pas t’ignorer. Je sais que c’est le sentiment le pire et le plus égoïste qui soit. Mais tu sais ? Je ne pouvais pas m’en empêcher. Même si je savais que j’étais égoïste. Je sais comment s’appelle ce sentiment. Même si tu ne crois pas aux sentiments éternels, crois cela s’il te plaît. Pendant tout le temps que j’ai passé dans la Classe Rejetée… »

Mogi-san m’enlace très timidement.

Et me donne l’objet qu’elle cachait.

Ses lèvres tremblent juste à côté de mon oreille.

« Je t’ai aimé, Kazu-kun. »

Ses lèvres s’approchent des miennes. Juste quand elles sont sur le point de se toucher, elle s’arrête. Après avoir gardé cette position un moment, elle se retire calmement sans même avoir touché les miennes.

Je lui demande presque pourquoi elle s’est arrêtée, mais je reconsidère parce qu’elle me tend quelque chose.

« Ah… »

Dans mes mains se trouve la raison pour laquelle elle ne pouvait rien faire.

Je comprends et me ronge la lèvre.

Ce n’est pas ce à quoi je m’attendais.

C’est un Umaibō.

Tout va bien, mais ce n’est pas ma saveur favorite, Corn Potage. C’est au Teriyaki Burger. La saveur que je n’aime pas tant que ça. De plus…

… c’est la saveur que Mogi-san était supposée me donner à l’origine.

Pourquoi Mogi-san m’a prise dans ses bras aussi timidement ? Pourquoi ne m’a-t-elle pas embrassé ?

Ce n’était pas la déclaration de la Kasumi Mogi à qui je m’étais déclaré d’innombrables fois, qui m’avait déjà embrassé et qui avait fait l’expérience de la Classe Rejetée.

C’était la première déclaration de la Kasumi Mogi qui existait avant la Classe Rejetée, qui ne pouvait m’appeler que par « Hoshino-kun ».

Je veux revivre le 2 Mars.

Le plus profond regret auquel elle s’était accrochée ce jour-là.

Elle l’avait fait à ce moment-là.

Donc… dois-je répondre comme si c’était le véritable 2 Mars… ?

Je regarde Mogi-san.

Mogi-san me sourit gentiment. Elle attend avec un doux sourire, bien qu’elle sache déjà ce que je vais répondre.

« C’est… »

C’est juste trop cruel !

Je ne veux pas dire une telle chose.

Je veux dire, j’ai aimé Mogi-san. Même si ces sentiments ont été manipulés par O, mes sentiments eux-mêmes n’étaient pas artificiels.

Pourquoi je n’ai pas le choix que de prononcer les mots qui la blesseront ?

Aah, bien sûr.

J’ai « rejeté » cette boîte. J’ai refusé le vœu de Mogi-san. Je vais la laisser mourir dans un accident. Je n’ai pas le droit de lui dire des mots chaleureux.

J’ouvre ma bouche.

Toujours est-il que, c’est plutôt dur de le dire. J’hésite, j’ouvre et ferme ma bouche à de nombreuses reprises, et je suis surpris par le goût d’un liquide salé dans ma bouche.

Mais je ne peux pas penser à d’autres mots à lui dire.


« Attends jusqu’à demain s’il te plaît. »


Mogi-san baisse tristement ses yeux.

Elle était véritablement blessée par mes paroles. Et pourtant, son expression changea instantanément une fois de plus. Elle me dit,

« Merci. »

… avec un sourire.

Avec un sourire du fond de son cœur.


Aah…

Ce sourire me fait finalement souvenir d’une conversation d’il y a bien longtemps.

La conversation qui m’a fait tomber amoureux d’elle.

La conversation qui était le déclenchement de cet amour éphémère.

Un précieux souvenir.


« Hoshino-kun. Puis-je te demander de m’appeler Kasumi… ? »

« Eh ? P-Pourquoi, tout à coup ? »

« Ça peut te sembler soudain, mais j’ai toujours voulu que tu m’appelles comme ça tout ce temps, tu sais ? »

« Je… vois. »

« Alors… c’est d’accord ? »

« D-D’accord… »

« D-Donc, euh… je peux t’appeler Kazu-kun ? »

« Euh… oui, je t’en prie. »

« D-D’accord, alors vas-y. »

« … Kasumi. »

« … Redis-le une fois s’il te plaît. »

« Kasumi. »

« … Merci. »

« Que… ! P-Pourquoi est-ce que tu pleures… !? »

« Hmm ? Je pleure ? »

« O-Oui… ! »

« Eh bien… c’est parce que je suis très heureuse, Kazu-kun. »

Puis Kasumi se mit à rire, même si des larmes coulaient de ses yeux.

Je n’ai jamais vu un tel sourire auparavant.

C’était un sourire rempli d’un pur bonheur.

C’était la première fois que j’étais capable d’apporter autant de bonheur à quelqu’un. C’était une sensation toute nouvelle, donc je me sentais extrêmement heureux.

Apporter du bonheur est quelqu’un est du bonheur en soi.

J’étais heureux d’avoir découvert cette partie de moi, et la fille qui m’a appris ce sentiment devint une existence spéciale pour moi.

Peut-être que je suis simple d’esprit.

Mais sans l’ombre d’un doute, ce sourire a réussi à me changer.


Mais je suis sur le point d’effacer ce souvenir.

Je suis sur le point d’effacer ce tout nouveau sentiment.


Je pense que c’est trop cruel. Je pense qu’il n’y avait pas besoin de faire face à un tel obstacle au dernier moment. Je pense que c’est impitoyable de me faire détruire une telle chose de mes propres mains.

Mais pourtant, j’ai déjà fait mon choix.

J’ai déjà fait ce choix il y a bien longtemps.

Je veux dire, même ce remord disparaîtra directement avec la Classe Rejetée, pas vrai ?

« Maria, tu peux m’accorder une demande ? »

Donc je veux simplement que quelqu’un me donne un petit coup de pouce pendant que j’hésite.

« Vas-y. »

« Tu devrais savoir ce que je vais faire maintenant. »

« Ouais, parce que je t’ai observé bien plus que quiconque dans le monde. »

« Ce que je vais faire maintenant. Je veux simplement que tu me le dises. »

Maria hoche la tête avec une expression sérieuse. Aucun doute, elle sait exactement pourquoi je lui demande ça.

« Tu vas le piétiner ! »

Mais Maria ne mâche pas ses mots.

« Tu vas piétiner le vœu maladroit de quelqu’un d’autre pour le bien du tien ! C’est la seule chose que tu n’abandonneras pas sous aucune circonstance, Kazuki. »

Ouais. Je crois que j’ai raison.

« Donc, tu vas… détruire la boîte. »

Je hoche la tête aux mots de Maria.

J’utilise tout mon bras gauche pour sécher mes larmes.

« Tu as raison. »

Je me place devant le mur.

Le mur gris nous entourant est fin, comme s’il était fait de papier. La boîte n’a plus de pouvoir. Elle renferme à peine mes souvenirs et les empêche de disparaître un peu plus longtemps.

Je veux me retourner et voir l’expression de Kasumi.

Mais je sens que je ne dois pas le faire.

Je lève ma main droite.

Dans le but de détruire la boîte, le vœu de Kasumi, et mes propres souvenirs.

« Merci. Au bout du compte, c’est vraiment toi qui m’as sauvée, Kazu-kun. »

Arrête s’il te plaît !

Tu n’as aucune raison de me remercier. Je ne suis qu’un destructeur. Je ne fais que piétiner ton vœu erroné.

Désolé.

Pardonne-moi de ne pas avoir pu te sauver.

Alors j’ignore sa voix.

Mais, merci.

Comme tu as souri à la fin, je peux enfin croire en moi.

« UAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH ! »

Je crie de tous mes poumons et frappe le mur aussi fort que possible.

Dans un bruit lourd, le mur éclate facilement, comme du verre.

Je peux me voir avec Kasumi dans l’un de ses fragments. Nous nous sourions l’un à l’autre.

Ce fragment tombe sur le sol, se casse et s’émiette.

Des lumières blanches commencent à briller de l’extérieur. Plus le mur s’effondre, plus l’obscurité est engouffrée par la lumière. Tout se fait repeindre et disparaît à l’exception de nous.

C’est lumineux ; je ne peux rien voir.

Mais quelle cruauté, Kasumi est présente. La Kasumi originale est clairement présente.

Kasumi est allongée sur la route, les membres de travers. Elle est tachée de sang. Ça semble si douloureux que je veux détourner le regard.

Mais Kasumi sourit. Elle sourit de toutes ses forces pour moi.

Sa bouche s’ouvre.

« Adieu. »


Nous sommes ensuite engouffrés dans un blanc pur et nous disparaissons.

La lumière blanche entre dans mon corps. Elle cherche des ouvertures et les envahit violemment, peignant mes entrailles, mon sang, mon cœur et mon cerveau de blanc. Elle envahit même ma mémoire et la blanchit.

Que ce soit mes faux mais précieux souvenirs, les sentiments dont j’ai fait l’expérience, les mots que nous nous sommes échangés…

Tout s’efface et se fond dans le blanc.

Tout s’efface et se fond dans le blanc.

Tout s’efface et se fond dans le blanc…

1re fois[edit]


« Je m’appelle Aya Otonashi. Heureuse de vous rencontrer, » dit l’élève transférée avec un léger sourire.

Époustouflés par sa grande beauté, les filles commencent à discuter bruyamment tandis que les garçons restent complètement dénués de parole.

Bien sûr, je ne fais pas exception. Je ne pense avoir déjà vu quelqu’un d’aussi attirant qu’elle autrefois. Je ne peux pas détourner mon regard même si je le veux. L’étudiante transférée agit comme si elle est habituée à ma réaction et me sourit tendrement.

J’ai presque des vertiges.

Tomber amoureux d’elle est probablement impossible. Nous sommes juste trop différents. C’est presque comme si on vivait dans des mondes différents. Ça semble un peu méchant, mais je pense que tout le monde penserait la même chose après l’avoir vue.

« J’aimerais faire une déclaration », dit Aya Otonashi sans perdre son sourire parfait.

« S’il vous plaît, ne devenez pas ami avec Aya Otonashi, avec moi. »

La classe se plonge soudainement dans le silence.

La déclaration est suffisante pour faire taire notre bruyante classe comme par magie.

« Je vous prie de ne pas être offensé par ma remarque. Si possible, j’aimerais être amie avec tout le monde. Cependant, ce n’est pas possible. Parce que… », dit-elle d’une voix ferme, mais affligée, « … l’existence d’Aya Otonashi doit être une illusion. »

Je déglutis même si je n’ai aucune idée de quoi elle parle.

« On ne s’entendrait pas de toute façon. Nous sommes juste des bateaux qui se rencontrent dans la nuit. Comme je suis "l’étudiante transférée", je ne connais personne, et personne ne me connait… et je retournerai sans arrêt à cet état. Je devrai endurer et maintenir cet état de non-relation pendant un long moment. Donc je pense qu’il est correct de dire que je suis un fantôme. Mais même en tant que fantôme, je garde encore un sens d’existence. Je suis aussi triste de mon état, mais je n’ai pas d’autre choix que de l’accepter. Parce que si j’arrête d’être capable d’accepter d’être une illusion… si je ne peux plus l’endurer, je serai engloutie par cette fausse récurrence à cet instant même. »

Je ne comprends toujours rien. La seule chose que je comprends est qu’elle est vraiment sérieuse et que personne n’est capable de se moquer de ce qu’elle dit.

« Dans le but de devenir une illusion, j’ai abandonné mon véritable nom dans cette boîte. J’ai peur que si j’utilise mon véritable nom, je devienne mon propre fardeau. Et si je me fais engloutir dans cette fausse récurrence, vous serez tous vraisemblablement effacés. »

Elle continue d’une voix ferme.

« De ce fait, je… dois rester une illusion en devenant Aya Otonashi. »

Je vois. Je ne sais pas ce que ça signifie, mais elle n’est pas encore « Aya Otonashi ».

Elle va devenir « Aya Otonashi ».

Elle ne le veut probablement pas. Ce n’est pas ce qu’elle souhaite.

Pourtant, elle n’a pas d’autre choix que de devenir « Aya Otonashi ».

« Mais je ne suis pas forte », dit-elle amèrement. Je suppose qu’il y aura des moments où je vais vouloir me plaindre. Cependant, une fois que les choses commenceront, je cesserai d’être "Aya Otonashi" dès le moment où je ferai preuve du moindre signe de faiblesse. Puisque c’est ma dernière chance, je me permets d’afficher un petit peu de ma faiblesse en ce moment. Je… »

C’est par chance.

Ouais, je pense que c’est juste par chance, mais sans aucun doute…

… elle me regarde quand elle dit :

« Je veux que quelqu’un soit à mes côtés. »

Puis elle me sourit.

« Bon, laissez-moi refaire les présentations », dit-elle comme pour se convaincre elle-même.

« Je suis "Aya Otonashi". J’espère que nous pouvons être en bons termes tant que nous marchons le long de la route qui se trouve devant nous. »

Aya Otonashi s’inclina fortement.

Incertains de comment réagir, nous restons tous silencieux.

Donc, je commence à applaudir.

Mon applaudissement est le seul son audible.

Finalement, quelqu’un en fait de même. Une autre personne commence aussi à applaudir. Les applaudissements deviennent de plus en plus bruyants.

Quand tous nos camarades de classe sont en train d’applaudir, elle relève enfin sa tête.

Mais elle ne sourit plus du tout.

Les poings serrés, elle regarde droit devant elle avec une ardente volonté dans ses yeux.

Utsuro no Hako vol1 pic3.jpg

Épilogue[edit]


Le temps est magnifique, et le ciel est bleu foncé.

Dès que je me réveille, je confirme la date d’aujourd’hui sur mon portable. « 7 Avril ». Nous sommes le « 7 Avril ». Je vérifie aussi le journal et la télé pour confirmer qu’on est vraiment le « 7 Avril ». Bien sûr, je comprends que je suis irrationnel, mais depuis que j’ai été enfermé dans la Classe Rejetée, je deviens très anxieux si je ne passe pas par tous ces rituels.

J’ai conservé les événements de la Classe Rejetée dans mes souvenirs. Cependant, ma capacité à m’en souvenir est imparfaite… J’ai l’impression de regarder une image d’un endroit que je n’ai jamais vu ou visité. La boîte, Maria, O… je sais ce qu’ils sont. Mais les émotions correspondantes ne s’y trouvent plus du tout. Pas de colère, pas de tristesse… rien du tout. Donc même si j’ai été amoureux de quelqu’un, je l’ai probablement oublié à présent. Peut-être que j’oublierai graduellement ces souvenirs parce qu’ils étaient vraiment flous à la base.

Maria avec.

Je veux dire, nous n’étions pas supposés nous rencontrer à la base, donc je suis sûr qu’on ne se verra plus.

Quoi qu’il en soit, nous sommes le « 7 Avril », le jour de la cérémonie d’ouverture.

Je suis devenu un élève de Seconde Année[8].

Ma classe se trouve désormais au 4e étage plutôt qu’au 3e. Le paysage ne s’est pas amélioré juste parce que je suis à un étage différent et localisé plus à l’ouest. Cependant, l’air semble complètement différent lorsque j’entre dans la salle de la classe 2-3. Je suis si excité que je porte même ma main à ma poitrine.

Après avoir vérifié l’emplacement des élèves sur le bureau du professeur, je m’assois sur ma nouvelle chaise. Quand j’accueille légèrement mes nouveaux camarades avec un « Passons une bonne année », leurs réponses sont pleines d’entrain. Ouais, c’est une bonne atmosphère.

Une autre personne entre dans la salle de classe.

Il me voit et lève sa main.

« Hého, Hoshii ! On est encore dans la même classe ! »

Même si sa remarque est totalement générique, les quinze autres personnes dans la salle reportèrent leur attention sur nous. Ouais, Haruaki est toujours aussi bruyant.

« … Haruaki. »

« Hmm, qu’y a-t-il ? »

Je le regarde avec suspicion.

« Tu es le vrai Haruaki ? »

« … Pourquoi, j’ai l’air d’un faux ? Tu crois peut-être que je suis mon jumeau ? Tu as été influencé par ce manga super connu[9] donc maintenant tu penses que tous les lycéen jouant le rôle de lanceur au baseball sont des jumeaux !? »

« … non. »

Je ne sais pas pourquoi, mais je commence à me demander si je peux croire la moindre chose de sa part…

« Très bien, Hoshii ! Maintenant que j’y pense… »

« Salut Haru, Kazu-kun ! »

Une nouvelle voix interrompt Haruaki.

Kokone se tient à la porte de la salle de classe. Daiya se trouve à côté d’elle.

Ah, est-ce qu’ils sont venus tendrement ensemble aussi ? Si je mentionne ça, Daiya me punira en me harcelant psychologiquement pendant toute la journée, donc je ne dis rien.

« Se faire dire bonjour par une fille, mon cœur s’est mis à battre plus vite pendant un instant… mais mec, c’est juste toi, Kiri ? J’ai gâché mon excitation. »

« Hé Haru… C’est quoi cette réaction ? Pour qui tu te prends ? »

« Hmm, bon, j’aimerais que tu arrêtes d’être obsédée à mon sujet au point de me poursuivre jusque dans la même classe. »

« Haa… alors tu essayes de cacher à quel point ça t’embarrasses d’être autant obsédé par moi en utilisant une telle formulation ? Tu es vrai~ment un gamin, Haru-chan, hein ? Ah, c’est vrai. Tu peux aussi arrêter de remplir ton téléphone de ma voix Moe ? »

« Qui ferait une telle chose !? »

« "Maître~"… allez ! C’est ta chance d’ajouter des données à ta collection de voix Moe-Moe ! Ne t’inquiète pas ! Si tu t’agenouilles et que tu embrasses mon pied, je dirais "Onii-chan" pour toi, fétichiste des petites sœurs ! Ne suis-je pas la meilleure !? »

« Et si tu disais "Désolée d’être née" ? »

… rien n’a changé dans cette nouvelle classe.

Mais c’est que je désire.

Je me sens un peu seul sans Maria et Mogi-san, mais regagner cette vie de tous les jours est la raison pour laquelle je me suis battu contre la Classe Rejetée.

« … pourquoi est-ce que tu souris dans ton coin ? C’est repoussant, Kazu ! »

Daiya s’adresse à moi.

« Ah vraiment. Kazu-kun est en train de sourire. À quel point il est excité ? Je parie qu’il s’imagine une fille en train de s’assoir à côté de lui, trébuchant maladroitement… »

« Pas du tout. »

Je le nie immédiatement, du coup Kokone fait une bouche en cul de poule.

« Mais qui est assis là d’ailleurs ? Tu le sais ? C’est une fille mignonne ? » Haruaki me demande ça tout s’asseyant sans honte sur ladite chaise. Comme j’ai vérifié les noms des personnes assises à côté de moi tout à l’heure quand j’ai regardé la position des élèves, je sais à qui cette chaise appartient.

« Ouais. C’est une fille mignonne ! »

« Vraiment !? Qui c’est !? »

Je suis content qu’elle ait cette place. Parce qu’elle a une place, la possibilité qu’elle s’y assoie existe aussi.

Sa place ne sera plus à côté de la mienne quand elle sera de retour, mais je m’en fiche.

Avec un sourire, je déclare le nom de la fille assise à côté de moi :

« C’est Mogi-san ! »



Je pensais que la pluie ne cesserait pas ce jour-là.

Je me dirigeai vers l’hôpital juste après que Daiya m’ait parlé de l’accident de Mogi-san, et sécha un jour d’école. Je dus prendre un taxi vu que son hôpital se trouvait en dehors de la ville. C’était un comportement extraordinaire venant de moi, vu la priorité que je place envers ma vie tranquille.

Mais je devais le faire. Comme je me suis rebellé contre la Classe Rejetée, je devais connaître le résultat.

Personne ne me renvoya à l’hôpital, pas même sa famille. Après qu’on ait cru que j’étais son amoureux, j’ai attendu avec sa famille le temps qu’elle se fasse opérer.

L’opération a réussi… il semblait. Mais Mogi-san ne reprit pas conscience ce jour-là.

Comme je ne pouvais pas accéder à l’Unité de Soins Intensifs, je ne pus que la voir deux jours plus tard. Entre temps, elle avait été déplacée dans le service des Soins Généraux.

Mogi-san était couchée sur son lit, semblant un peu pitoyable. Les sons de l’électrocardiogramme et de la respiration artificielle firent vibrer mes tympans. Ses jambes et ses bras étaient retenus par des attaches, son visage était couvert de bleus et sa perfusion avait rendu un de ses bras violet.

Voir le corps seul et blessé d’une personne que je connaissais dans un hôpital me fit presque pleurer. Mais je savais que je n’étais pas celui qui voulait pleurer. Je n’étais pas autorisé à pleurer devant elle. Je retins mes larmes et regarda son visage, l’observant juste un petit peu.

Mogi-san sembla un peu surprise quand elle me vit. Je ne suis pas très sûr, cela dit, puisqu’elle ne bougea pas les muscles de son visage.

Sa famille m’avait informé qu’elle avait repris conscience, mais à cause du choc, elle n’avait pas encore prononcé un mot.

Mais Mogi-san ouvrit la bouche et essaya de me dire quelque chose de toutes ses forces. Je lui dis de ne pas se fatiguer, mais elle m’ignora et essaya quand même de parler.

Mogi-san noircit son masque d’oxygène avec son souffle, et m’adressa ses premiers mots.

« Je suis si contente. J’ai survécu. »

Je ne pouvais pas la comprendre aussi bien, mais c’est ce qu’elle sembla dire.

Mogi-san éclata en sanglots juste après avoir dit ça. Je n’avais aucune idée de quoi faire, donc je laissai errer mon regard. À côté du lit se trouvait son sac abimé, et je vis quelque chose d’argenté à l’intérieur. Je savais ce que c’était, et attrapa instinctivement l’objet dans l’emballage argenté. C’était un Umaibō saveur Teriyaki Burger, écrasé et plus du tout intact. En continuant de le toucher inconsciemment, je ne pus soudainement plus me retenir et j’éclatai en sanglots.

Je ne savais pas pourquoi j’avais commencé à pleurer à ce moment. Je me souviens qu’elle m’avait donné cet Umaibō dans l’autre monde, mais je ne pouvais plus me souvenir de pourquoi elle l’avait fait.

Mes larmes étaient sincères.


Je visitai sa chambre d’hôpital dans le service des Soins Généraux plusieurs fois après cela. Mogi-san essaya de paraître aussi joyeuse que possible quand nous nous parlions.

« Pendant que j’étais inconsciente, j’ai fait un long rêve », me raconta une fois Mogi-san. Apparemment, elle pensait que tout n’était qu’un rêve.

Une pensée traversa soudainement mon esprit. Mogi-san ne pouvait pas échapper au destin d’être renversé par un camion dans ce monde. Et à chaque fois qu’elle y survivait, cela ne changeait rien. C’est peut-être pour cela que la Classe Rejetée restait intacte, peu importe le nombre de fois où elle se fit renverser.

Bien qu’elle ait survécu, elle était paralysée jusqu’à la taille. Un coup à son dos avait endommagé sa moelle épinière, donc la possibilité d’une récupération complète n’était pas juste désespérée, elle était en fait impossible.

Je n’avais aucune idée de comment répondre, alors je restai silencieux. Pour couvrir le silence désagréable, Mogi-san dit :

« J’ai toujours cru que dans une telle situation, je préfèrerais être morte. Tu comprends pourquoi, n’est-ce pas, Hoshino-kun ? Je ne serai plus capable de marcher sur mes deux jambes, et même quelque chose aussi simple que d’acheter un dessert à la supérette d’à côté ne sera plus une décision prise à légère pour moi. Je peux le faire que si je dépends de quelqu’un d’autre ou si je prends mon fauteuil roulant. Toutes ces difficultés juste pour acheter un dessert ! N’est-ce pas cruel ? Mais c’est assez étrange. Je ne pense pas du tout au suicide. Je me demande pourquoi. Je pense, vraiment, du fond de mon cœur… »

… que je suis contente d’être en vie.

Mogi-san dit cela sans laisser penser le moins du monde qu’elle bluffait ou mentait.

« Donc je vais bien. Je ne quitterai pas non plus l’école. Peu importe le temps que ça prendra, je m’en remettrai. Peut-être que je n’irai plus à la même que vous, mais je n’abandonnerai pas. »

Elle sourit et releva faiblement ses biceps vers moi.

C’est embrassant de l’admettre, mais j’ai éclaté en sanglots devant elle à ce moment. J’étais content. Content que son vœu le plus important soit accordé.

… Puis-je faire quelque chose pour toi ?

Je lui demandai cela en toute sincérité, parce que je voulais l’aider autant que possible.

Mogi-san commença avec un « Je suis très heureuse de ta proposition » et continua timidement,

« Je veux que tu me gardes une place à laquelle revenir. Je veux que tu me construises une place pour exister une fois de plus. »

— Une fois de plus ? Ai-je déjà construit une telle place pour toi ?

« … à l’intérieur de mon long rêve, tu l’as fait. »

Après cette réponse, Mogi-san détourna son regard pour une raison que j’ignorais.



Je suis à la cérémonie d’ouverture dans le gymnase.

Quelque chose me vient à l’esprit quand Haruaki soupire et grogne pendant le discours du principal.

« Au fait, Haruaki, tu n’allais pas me dire quelque chose ce matin ? »

« Hmm ? … aah, oui ! Oui ! J’ai entendu des rumeurs comme quoi il y a une fille super mignonne parmi les nouveaux élèves ! »

Haruaki frappe mes épaules et me fait un clin d’œil.

« Ouais, alors je m’en fiche. En tant que deuxième année, je n’aurai pas de raison de lui parler de toute façon. »

« T’es idiot !? Rien qu’être capable de voir une fille mignonne, c’est déjà du bonheur ! »

Je ne veux pas croire que c’est comme ça qu’un homme normal pense.

« Mais quand est-ce que tu as entendu cette rumeur ? Aujourd’hui c’est bien la première fois qu’on voit les premières années, non ? »

« On n’est jamais au bout de ses surprises ! Je tiens ça de Daiyan ! »

« De Daiya ? »

Je ne peux pas vraiment croire Haruaki. Je n’ai jamais entendu Daiya parler de filles de cette façon.

« Tu ne me crois pas, hein ? Mais il y a une raison pour laquelle Daiyan est au courant ! Tu sais qu’il n’a fait que deux erreurs au test d’admission, hein ? »

« Ouais. Il s’est toujours vanté d’avoir battu le record de l’école. »

« Le record a été battu juste un an après ! » dit Haruaki avec une grande allégresse. Il abuse… mais je peux comprendre son amusement.

« Euh ? Quel est le rapport avec le fait que Daiya connaisse cette fille mignonne ? »

« T’es vraiment lent à la détente, Hoshii. Je te dis que cette fille mignonne a battu son record en obtenant un score parfait dans tous les sujets. Un professeur en a informé Daiyan, puisqu’il était le précédent détenteur du record. Le professeur a aussi dit qu’elle était si belle que même en tant qu’adulte, il s’était senti confus en sa présence. »

C’est juste une exagération. Pourquoi se sentirait-il confus alors qu’il a évidemment bien plus d’expérience que n’importe quel lycéen ?

Le discours de cérémonie du principal s’acheva pendant que nous parlions.

Le président des élèves alluma son micro.

« Merci beaucoup monsieur le principal… Procédons au discours du représentant des premières années… »

« Enfin une chance de voir cette nana sexy dont tout le monde parle ! »

Je vois. Comme elle est la meilleure élève, elle est celle désignée pour parler.

Moi-même je commence à développer de l’intérêt, donc je me mets à regarder aux alentours.

« Représentante des premières années… Maria Otonashi. »

Maria… Otonashi ?

Un nom qui me semblait extrêmement familier. … non, non. Impossible. Maria s’appelait Aya Otonashi après tout.

« Oui. »

Mais cette voix est définitivement la sienne. C’est la voix de Maria.

Aah, je vois. J’ai enfin compris.

"Si tu as oublié, rappelle-t’en maintenant. Mon nom est Maria."

Ha. Alors elle disait la vérité à ce moment-là.

… Oh ? Alors j’appelais Maria par son prénom depuis tout ce temps… ? UWAA ! UWAAAAA !

« … Pourquoi est-ce que tu deviens tout rouge, Hoshii ? »

Elle monte la plateforme avec plus d’élégance qui quiconque. Ayant vécu plus longtemps que n’importe qui d’autre ici, elle possède déjà une présence imposante.

Des murmures s’élève dans la salle rien qu’en la voyant.

Un visage que je connaissais très bien. Le visage qui s’est trouvé auprès de moi le plus longtemps.

Elle porte un tout nouvel uniforme.

Ouais, c’est n’importe quoi… Je n’aurais jamais pensé qu’elle était plus jeune que moi.

Tout en se tenant sur la plateforme, Maria laisse vagabonder son regard. Ses yeux rencontrent les miens. Son regard s’arrête sur moi pour une raison que j’ignore.

Puis elle sourit.

Mon corps est instantanément et complètement paralysé.

Maria commence son discours sans me lâcher du regard. Même les étudiants les plus bruyants se taisent en entendant sa voix imposante.

« Elle ne regarderait pas par là ? Oh merde, elle est peut-être tombée sous mon charme ? »

Haruaki fait une blague, mais je suis si absorbé par le regard de Maria que je ne peux même pas répondre.

Je ne regarde que Maria.

Maria ne regarde que moi.

« … et ainsi se conclut ce discours d’entrée. C’était la représente des premières années, Maria Otonashi. »

Maria descend de la plateforme.

Et dès qu’elle le fait, les étudiants redeviennent à nouveau bruyants. Non, pas seulement les étudiants… même les professeurs sont en panique.

Mais je suis, sans aucun doute, la personne la plus confuse de la salle.

Parce que Maria ne retourne pas à sa place d’origine, mais se dirige à la place droit vers moi.

Les étudiants la laissent automatiquement passer, repoussés par son aura autoritaire. Maria en profite complètement et avance en ligne droite vers moi.

Elle crée un chemin direct entre nous.

Aah, mince. Elle n’a pas encore réussi à perdre ses habitudes de cet ancien monde ? Ce serait peut-être bien d’agir sans réserve là-bas, mais le monde réel ne fonctionne pas comme ça, non ?

Je réalise déjà que ma vie de tous les jours est sur le point d’être détruite.

« Haha… »

Mais néanmoins, je ris.

C’est vraiment ennuyeux.

C’est vraiment ennuyeux, mais non… quelque part, ça ne semble pas si ennuyeux.

Au moins, les étudiants devant moi s’écartent. Haruaki s’écarte aussi de moi. Maria et moi sommes entourés par un espace vide, comme si nous étions dans l’œil d’un cyclone.

Au milieu de cet espace vaste, béant, elle se tient devant moi.

Je pensais qu’on ne se reverrait jamais.

Mais en y réfléchissant à nouveau, il était impensable qu’elle ne me rejoigne pas.

Après tout, c’est son but d’obtenir une boîte. Elle n’a pas d’autre choix que de m’approcher, celui que O a visé.

Maria sourit, et commence à parler.

« Je suis toujours à tes côtés, peu importe le temps qui passe… c’est comme ça que je t’ai déclaré la guerre, il fut un temps, mais il semble que notre guerre ne s’est pas encore terminée. »

Après avoir fait son discours, elle fit sa présentation une fois de plus.


« Je suis "Maria Otonashi". Heureuse de te rencontrer. »

La nouvelle élève s’inclina fortement, comme elle l’avait fait il y a longtemps.

En réponse, j’applaudis, comme je l’ai fait il y a longtemps.

Pendant quelques instants, seuls mes applaudissements sont audibles dans le gymnase.

Puis Haruaki commence à applaudir sans rien comprendre à la situation. Attiré par son applaudissement, quelqu’un d’autre se met à applaudir. Bien que Maria et moi soyons les seuls à comprendre ce qu’il venait de se passer, les applaudissements retentissent de plus en plus.

Au milieu de ces magnifiques applaudissements, Maria lève sa tête.

Mais elle ne sourit plus du tout.

Les poings serrés, elle regarde droit devant elle avec une ardente volonté dans ses yeux.

Notes de l'auteur[edit]


Bonjour, je suis Eiji Mikage.

Bientôt trois années sont passées depuis que mon dernier travail a été publié. Si des lecteurs anticipaient mon nouveau livre, je vous en demande pardon. Et aussi, merci de ne pas m'avoir oublié.

Il y a eu une période durant laquelle j'ai fait une pause, mais ce n'est pas comme si j'abandonnais l'écriture. La raison pour laquelle je n'ai pas publié de livre pendant ces trois années était simplement mon propre manque d'énergie.


J'ai écrit ce livre en mettant un accent plus fort sur la valeur de divertissement qu'avant. Ma position concernant mon objectif dans l'écriture de romans a aussi changée.

Mais je ne pouvais rien faire d'autre que d'être anxieux par rapport à tous ces changements. Est-ce que la qualité de mon écriture disparaîtra ? Est-ce que mes lecteurs fidèles ne vont pas se sentir trahis ? Ce livre sera-t-il enterré sous une pile de beaucoup d'autres excellents livres ?

C'était contre cette anxiété et cette peur que je devais lutter à chaque tour en écrivant « Utsuro no Hako to Zero no Maria. »

Mais avant que je ne m'en rende compte, cette anxiété et cette peur avaient déjà disparues.

Parce que j'ai compris que ce livre n'est rien de plus que mon propre livre.

Je crois que c'est devenu un livre pour lequel je suis capable de dire « Essayez de le lire » : aux lecteurs qui ont aimés mes travaux précédents, à ceux qui ne les ont pas aimés, et aussi aux lecteurs qui ne me connaissaient absolument pas.

Comment était-ce ? Était-ce amusant, maintenant que vous l'avez lu ?

Si la réponse est « OUI », alors je ne pourrais pas être plus enchanté.


Au fait, c'est mon quatrième livre et aussi mon premier avec des illustrations.

Pour être honnête, au début j'avais peur que l'opinion de mes lecteurs puisse changer à cause des illustrations, mais quand j'ai reçu une copie d'un croquis, mes inquiétudes ce sont envolées.

C'était la sensation de mes propres personnages ne restant plus ma propriété seule.

C'était la sensation que mes personnages échappent à mon contrôle.

Cette fois-ci, je n'ai pas regardé comment mes personnages ont été dessinés jusqu'à ce que j'avais pratiquement finit d'écrire, alors l'influence était relativement petite, mais je vais bientôt perdre cette « indépendance sur mes personnages » dans mes prochains travaux.

Je suis pressé de savoir à quoi ressemblera l'aboutissement.


J'ai aussi reçu le soutien de beaucoup de personnes durant l'écriture de ce livre. Pour être clair, mon degré de gratitude est complètement différent cette fois-ci, parce que j'ai finalement réalisé combien d'individus sont impliqués avant qu'un livre comme celui-là puisse être publié.

Par conséquent, ma section de remerciement va aussi être très longue. Je vous en suis désolé.

Toutes les personnes de l'équipe éditoriale de ASCII Media Arts. Le relecteur. Le concepteur. Mes remerciements vont en chacun de vous.

415-san qui a dessiné ces illustrations pour moi. J'étais anxieux à l'idée d'avoir des illustrations au début, cette anxiété est partie. Depuis mes jours ont été transformés; toute la journée, divers illusions me parcourent l'esprit pendant que je regarde ses illustrations avec le sourire aux lèvres.

Mes amis qui m'ont aidé à me développer, tous mes collègue de mon emploi à temps partiel.

Ma famille, qui veillait sur moi quand j'ai eu quelques difficultés à sortir ce livre.

Yuu Fujiwara-san. Je suis vraiment reconnaissant que vous m'ayez encouragé quand j'étais sur le point de moisir parce que mes manuscrits n'arrêtaient pas d'être rejetés.

Et bien sûr Kawamoto-san, qui se charge de moi. Si ce n'était pas pour vous, mon livre n'aurait jamais vu le jour. Je suis étonné que vous ne m'ayez pas abandonné, vue la manière dont je me comporte, sans plaisanter. Vous m'avez aidé à grandir de tellement des manières, et pas seulement dans le domaine littéraire. je suis vraiment reconnaissant. Toutes mes amitiés dans vos avancées à vous aussi.

Et alors bien sûr, j'aimerais remercier tous mes lecteurs qui ont pris ce livre.

Les romans existent parce qu'il y a des lecteurs pour les lire. Chacun d'entre vous fait parti de ce livre... Ce qui est un peu indélicat à dire de ma part, mais peu importe, vous êtes des composants indispensables.

J'espère avoir transmis ma gratitude à tout le monde avec au moins un peu d'originalité.

J'espère que nous continuerons à nous associer pendant longtemps dès maintenant si possible.


Ah, et désolé d'avoir écris un mot de la fin aussi ennuyeux !


- Eiji Mikage



Commentaires


  Eiji Mikage

Je vis à Saitama. Mes pieds font du 24,5. C'est difficile de trouver des chaussures pour hommes de cette taille. Quand je suis allé faire du bowling avec des amis l'autre jour, mes chaussures de location étaient les seules à avoir un Hello Kitty imprimé dessus. Bon Dieu.


  415

Je vis paisiblement dans un coin de l'aire métropolitaine de Tokyo avec un crayon mécanique à la main.

Ma chambre est toujours en désordre avec tous les mangas et documents qui s'y trouvent, alors j'ai fait de mon objectif cette année de garder cette pièce impeccable pendant plus d'un mois.



Références[edit]

  1. Umaibō (うまい棒) ou « bâton délicieux » est un petit casse-croûte de maïs soufflé cylindrique que l’on trouve souvent dans le sac des étudiants japonais
  2. Un Trouble de Stress Post-Traumatique.
  3. Une référence à un remède folklorique qui implique d’utiliser des poireaux (enfin, techniquement, des oignions de printemps) en tant que suppositoires afin de guérir du froid. http://detail.chiebukuro.yahoo.co.jp/qa/question_detail/q1233508952
  4. C'est bien connu, au Japon, c'est une preuve de familiarité que d'appeler quelqu'un par son prénom, et encore plus sans honorifique. On s'adresse plutôt via le nom de famille. Bien que dans les light novels/mangas et autres, les auteurs ont tendance à exagérer la gêne de ces situations.
  5. C'est bien connu, au Japon, c'est une preuve de familiarité que d'appeler quelqu'un par son prénom, et encore plus sans honorifique. On s'addresse plutôt via le nom de famille. Bien que dans les lights novels/mangas et autres, les auteurs ont tendance à exagérer la gêne de ces situations.
  6. Au Japon comme dans d'autres États, on y enseigne une matière qu'on ne fait pas en France, "Home Economics" traduisible par "Éducation Domestique" . Ils y apprennent notamment à cuisiner ou coudre. La "cooking room" est la salle où ils apprennent à cuisiner.
  7. En vérité, Kasumi dit "イタイ".

    Ça peut vouloir dire à la fois "痛い" (ça fait mal) ou "居たい" (Vouloir exister/vivre). Étant donné le contexte initial, il aurait été naturel d'adopter la première forme. Mais elle utilise plus tard le Kanji, ce qui clarifie le sens.
  8. Seconde Année de lycée, donc un élève de Première.
  9. Touch, en l’occurrence.
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