Monogatari Series FR:Bakemonogatari Volume1/Hitagi Le crabe 004

From Baka-Tsuki
Jump to navigation Jump to search

004[edit]

Tout a commencé pendant les vacances de printemps.

J'ai été attaqué par un vampire.

À l'ère des téléphones portables et des voitures, celle où il est normal d'aller outre-mer pour un voyage scolaire... C'est assez gênant de le dire, mais j'ai été attaqué par un vampire.

Elle était d'une beauté à couper le souffle.

Un monstre magnifique.

Un monstre — vraiment magnifique.

Je les cache d'habitude sous le col de mon uniforme scolaire, mais les marques de sa morsure restent visibles sur ma nuque. Avant qu'il ne fasse chaud, je pense laisser mes cheveux pousser pour les couvrir, mais il y a plus important — il y a sûrement de nombreuses histoires où quelqu'un se fait attaquer par un vampire, par des chasseurs de vampire, par des tueurs spécialisés dans les vampires, ou par une division spéciale de l'église chrétienne, ou encore un groupe de vampire qui chassent leur propre race qui apparaissent pour te sauver — mais dans mon cas, j'ai été sauvé par un étranger de passage en ville.

Grâce à lui, j'ai pu redevenir un être humain — le soleil ne me gène pas, ni les croix ou encore l'ail — mais il y a eu des effets secondaires ; mes capacités physiques ont été améliorées. Enfin, ce n'est pas vraiment mes capacités physiques, mais plutôt mon métabolisme qui a amélioré une chose : ma capacité de régénération. Je ne sais pas ce qui serait advenu de ma joue si ce cutter l'avait tranchée, mais cela m'a pris moins de trente secondes pour soigner la plaie faite par l'agrafeuse. Comparé aux autres créatures vivantes, c'est plutôt rapide.

« Oshino — Oshino-san ? »

« C'est ça. Meme Oshino. »

« Meme Oshino... ce nom sonne assez moe. »

« N'en espère pas trop. Il a plus de trente ans. »

« Je vois. Mais il devait être un personnage moe quand il était jeune. »

« Ne juge pas les gens réels comme ça. Tu comprends ce que sont "moe" et "personnage" au moins ? »

« Tout le monde le sait, » répondit calmement Senjôgahara.

« On appelle mon personnage "tsundere", non ? »

« ... »

Je crois plutôt qu'on t'appellerait "tsundra".

On parle de la pluie et du beau temps.

Depuis le lycée Naoetsu, où Hanekawa, Senjôgahara et moi allons, ça prend environ vingt minutes pour aller à une école préparatoire située en dehors de la zone résidentielle.

Était située.

Il y a quelques année, à cause de l'afflux d'écoles préparatoires célèbres, celle-ci a dû fermer pour des problèmes financiers. Quand j'ai fini par apprendre l'existence de ce bâtiment de quatre étages, il était déjà tombée dans un état de délabrement effarant, donc tout ce que je connais de son histoire ne sont que des rumeurs.

Danger.

Propriété privée.

Accès interdit.

Alors que le bâtiment était entouré par une clôture et de nombreux panneaux d'interdiction d'entrer, il y avait des trous dans la clôture à profusion, ce qui rendait l'accès et la sortie simples et possibles.

Et au milieu de ces décombres vivait Oshino.

Là où il s'était établi.

Avec les vacances de printemps, ça faisait un mois maintenant.

« J'ai mal aux fesses. Et ma jupe est pleine de plis. »

« Ce n'est pas de ma faute. »

« Arrête de te trouver des excuses. Je vais les mettre en pièces. »

« Tu veux mettre quoi en pièces !? »

« Ne devrais-tu pas être plus gentil avec moi vu que c'est la première fois que je monte sur un vélo avec quelqu'un d'autre ? »

C'est pas toi qui disait que toute gentillesse serait considérée comme un acte hostile ?

Ses mots et ses actes se contredisent.

« D'accord, d'accord. Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? »

« Tu pourrais par exemple me prêter ton sac pour qu'il me serve de coussin. »

« Tu te fiches à ce point des autres ? »

« Ne me parle pas avec cette nonchalence. N'ai-je pas dit que c'était un exemple ? »

Qu'est-ce que je peux répondre à ça ?

Une excellente question.

« Tch. Marie Antoinette était sûrement plus modeste que toi. »

« C'est mon élève. »

« Il s'est passé quoi entre les deux cents ans qui vous séparent !? »

« Pourrais-tu arrêter de m'interrompre ? Tu te montres bien trop familier avec moi. Si on ne nous connaissait pas mieux, on pourrait croire qu'on est camarades de classe. »

« Mais on l'est ! »

Jusqu'à quel point compte-elle renier notre relation ?

C'était trop d'un coup.

« Ha.... Il va me falloir une bonne dose de patience pour pouvoir cotoyer quelqu'un comme toi... »

« Araragi-kun, cette phrase donne l'impression que c'est mon personnage, et non le tien, qui pose problème, tu sais ? » dit Senjôgahara.

« Bref, où est ton sac ? Tu es venue sans, non ? Tu n'en as pas ? »

Maintenant que j'y pense, je n'ai jamais vu Senjôgahara porter quoique ce soit.

« Les informations des livres scolaires sont déjà dans ma tête. C'est pourquoi je laisse tout dans mon casier. Je n'ai que mes fournitures sur moi. Un sac m'est inutile. Je n'ai pas non plus besoin de vêtements de rechange pour les cours d'éducation physique. »

« Je vois. »

« Si je n'ai pas les mains libres, je ne pourrai pas me battre quand l'heure viendra. »

« ... »

Tout son corps est une arme.

Une arme humaine.

« Même si je suis contre laisser des affaires d'hygiène féminine au lycée, je ne peux pas en emprunter aux autres, vu que je n'ai pas d'amies. »

« Ne dis pas ça comme si de rien n'était. »

« Pourquoi ça ? Vu que c'est une question d'hygiène, il n'y a pas de quoi être gênée. Le cacher serait bien plus dégoûtant, tu ne trouves pas ? »

Je pense que le cacher est tout aussi problématique.

Enfin, ça dépend de la personne.

Ce n'est pas à moi de commenter ça.

Quoiqu'il en soit, ce qui avait retenu mon attention était plutôt le fait qu'elle accepte son manque d'amis.

« Oh, j'y pense. »

Non pas que ça m'inquiétait, mais l'histoire de sa jupe m'avait fait comprendre que Senjôgahara était une fille après tout et qu'elle ne voulait pas salir ses vêtements. Je fis donc l'effort de chercher une plus grande entrée. Une fois trouvée, je me tournai vers elle.

« Je vais garder tes "fournitures". »

« Quoi ? »

« Je vais les garder pour toi, alors confie-les moi. »

« Qu'est-ce que tu viens de dire ? »

Elle me regardait comme si ma requête était stupide. Comme si quelque chose n'allait pas dans ma tête.

« Même si Oshino est un type assez bizarre, il m'a sauvé la vie. »

De plus.

Il a aussi sauvé Hanekawa.

« Je ne laisserai aucune personne dangereuse le rencontrer, alors confie-moi tes fournitures. »

« Je ne m'attendais pas à ce que tu me dises ça une fois arrivés. » Senjôgahara me fixait du regard. « Tu m'as roulée, n'est-ce pas ? »

« ... »

Est-ce que tu dois vraiment le formuler comme ça ?

Senjôgahara ne dit rien, mais son expression était un mélange d'intense réflexion et de conflit. Elle fixait un point invisible près de ses pieds, puis leva la tête pour me dévisager à de nombreuses reprises.

Je pensais qu'on allait finalement ne pas y aller mais, après un moment, Senjôgahara dit "Je comprends" comme si elle avait pris sa décision.

« Tends les mains. »

Sur ces mots, les fournitures tombèrent telles des milliers de pétales, comme si c'était un tour de magie et qu'elle faisait apparaître quelque chose de ses manches. Les fournitures avec lesquelles elle m'avait menacé dans le couloir n'était que le haut de l'iceberg. Ses poches devaient être en quatre dimensions. Sûrement une technologie du vingt-deuxième siècle. Même si j'avais dit que je les garderai pour elle, il y en avait tellement que je doutais de pouvoir toutes les mettre dans mon sac.

Le gouvernement devait bien négliger la sécurité publique pour laisser quelqu'un comme elle se balader librement dans les rues.

« Ne te méprends pas. Ça ne veut pas dire que je te fais confiance pour autant, » dit Senjôgahara après m'avoir confié toutes ses fournitures.

« Me faire confiance ? »

« Si tu penses pouvoir me faire marcher, m'emmener dans des ruines isolées et me faire payer la blessure à l'agrafeuse, alors tu fais une grosse erreur. »

« ... »

Je crois qu'elle se méprend encore.

« Écoute-moi bien. Si je ne les appelle pas toutes les minutes, cinq mille sous-fifres s'en prendront à ta famille. »

« Ça va aller. »

« Tu veux dire que ça ne va prendre qu'une minute ?! »

« Tu me prends pour quoi ? Un boxeur ? »

Et d'abord, comment oses-tu menacer ma famille ?

C'est du délire.

Cinq milles personnes, un mensonge grotesque.

Un mensonge osé pour quelqu'un qui n'a même pas d'amis.

« Tu as deux soeurs cadettes au collège, non ? »

« ... »

Elle est au courant pour ma famille.

Même si c'est un mensonge, la dernière partie ne l'est pas.

Quoiqu'il en soit, je lui ai montrée ma résistance aux blessures et apparemment elle ne me fait pas du tout confiance à cause de ça. Vu qu'Oshino me dit toujours que la confiance est importante, la situation n'est pas optimale.

Bah, on n'y peut rien.

De toute façon, c'est le problème de Senjôgahara.

Je ne suis qu'un guide.

Une fois la grille passée, on entra dans le bâtiment. Même si on n'était qu'en début de soirée, il faisait plutôt sombre. Comme le bâtiment avait été abandonné à son délabrement depuis longtemps, le sol n'était pas en bon état et il était facile de trébûcher si on n'était pas assez prudent.

C'est à ce moment-là que je m'en rendis compte.

Si une canette vide tombait, ça resterait une canette vide. Mais pour Senjôgahara, ce serait une canette qui fait dix fois son poids de base.

Si on faisait la comparaison...

Dix fois moins de gravité, un dixième de gravité, est un problème qui, en dehors des mangas, ne peut être clairement défini. La simple pensée qu'un poids léger signifie des capacités physiques plus élevées est erronée. De plus, c'était un lieu inhabituel pour elle. On ne pouvait pas reprocher à Senjôgahara d'être sur ses gardes tel un animal sauvage.

Même si elle est dix fois plus rapide, sa force n'est qu'un dixième de ce qu'elle était.

Je comprends pourquoi elle était si réticente à laisser ses fournitures.

Et aussi pourquoi elle ne porte pas de sac.

« C'est par là. »

Je tendis ma main vers Senjôgahara qui s'était arrêtée à l'entrée. J'attrapai son poignet et je la guidai. Senjôgahara semblait perplexe par ce geste soudain et murmura "que...", mais elle me suivit de près.

« N'espère même pas que je te remercie. »

« J'ai compris. »

« Ce serait même plutôt à toi de me remercier. »

« Ça, je ne comprends pas. »

« Après tout, j'ai fait exprès de te blesser à l'intérieur de la joue pour que ça ne soit pas visible. »

« ... »

Peu importe comment on y regarde, ça sonne comme ce que dirait un agresseur : « Je vais te frapper au ventre plutôt qu'au visage pour que ça ne se voit pas ».

« Quoiqu'il en soit, si tu avais transpercé ma joue, ça se serait quand même vu. »

« Mais comme tu as la peau dure, j'en ai plus ou moins conclu que ça irait. »

« Je suis censé en être soulagé ? Et c'est quoi ce "plus ou moins" ? »

« Mon intuition est juste dans 10% des cas. »

« C'est peu. »

« C'est vrai~ » dit Senjôgahara en gardant ses distances.

« Mais on dirait que ces précautions n'étaient pas nécessaires après tout. »

« ... on dirait. »

« Est-ce que c'est blessant si je dis qu'être immortel est plutôt pratique ? »

La question de Senjôgahara.

Je répondis. « Je ne le suis plus. »

Plus depuis les vacances de printemps.

Si on avait demandé à n'importe qui son avis... j'aurais dû mourir. Ça aurait dû être une blessure mortelle.

« Si tu penses que c'est pratique, alors ça l'est. Si tu penses que ça ne l'est pas, alors ça ne l'est pas. C'est tout ce qu'il y a à dire dessus. »

« Tu veux dire que ce n'est ni l'un ni l'autre ? C'est assez difficile à comprendre. » dit Senjôgahara en haussant les épaules.

« C'est comme savoir si "un danger potentiel" est dangereux ou non. »

« Le "ourai" de ce "danger potentiel" est "all right", non ? »[1]

« Vraiment ? »

« Bref, je ne suis plus immortel. Juste un humain qui guérit plus vite que la normale, c'est tout. »

« Hmm. Je vois, » dit Senjôgahara avec ennui.

« Moi qui espérais essayer toutes sortes de choses. Je suis déçue. »

« On dirait que tu avais préparé pas mal de plans sans m'en informer... »

« C'est insultant. J'avais juste prévu de te ___ et te ___, c'est tout. »

« C'est quoi ce ___ !? »

« Je voulais juste essayer ça et ça. »

« Explique-moi ces ça ! »

Oshino se trouvait d'habitude au quatrième étage.

Il y avait un ascenseur, mais bien sûr il ne fonctionnait pas. Par conséquent, il ne restait que deux options : passer par la cage d'ascenseur et grimper le long des cables jusqu'au quatrième étage, ou prendre les escaliers. Peu importe comment on y regardait, la deuxième option était la meilleure.

Tenant la main de Senjôgahara, je montai les escaliers.

« Araragi-kun. J'ai une dernière chose à te dire. »

« Laquelle ? »

« Même si on ne dirait pas, sous mes vêtements, mon corps ne vaut pas la peine d'aller en prison. »

« ... »

Hitagi Senjôgahara ne me fait vraiment pas confiance.

« Tu ne comprends pas une expression détournée ? Dans ce cas, je vais te le dire directement. Si tu révèles ta vraie nature et que tu décides de te déshabiller pour essayer de me violer, je me vengerai comme dans les Boy's Love, peu importe ce qu'il m'en coûte. »

« ... »

Elle ne fait preuve d'aucune prudence et n'a aucun sens de la honte.

Cette fille est terrifiante.

« D'après moi, pas seulement de ce que tu m'as dit, mais d'un point de vue général, tu m'as l'air d'être bien trop complexée, comme si tu te voyais comme une victime. »

« C'est déplaisant. Il y a des choses que l'on peut dire et d'autres non. »

« Tu en es consciente depuis le début !? »

« Quoiqu'il en soit, ton fameux Oshina a l'air de vivre dans un endroit délabré. »

« Ah... Il est plutôt excentrique. »

Ça reste difficile de répondre à Senjôgahara.

« N'aurions-nous pas dû d'abord le contacter — même s'il est un peu tard pour dire ça maintenant — vu que nous venons lui demander un service ? »

« C'est assez surprenant de t'entendre dire quelque chose de logique, mais hélas, il n'a pas de portable. »

« On dirait que ce n'est pas le genre de personnage à révéler sa véritable nature. Il m'a l'air douteux. Que fait-il pour vivre ? »

« Je ne connais pas les détails, mais c'est un expert en situation comme la nôtre. »

« Hmm. »

Même si mon explication n'en était pas vraiment une, Senjôgahara n'insista pas. Elle devait se dire qu'elle allait le rencontre de toute façon et qu'il n'y avait pas de raison de demander. On dirait que j'avais vu juste pour les deux points.

« Ah, Araragi-kun, tu portes ta montre au poignet droit, non ? »

« Hmm ? Ah, oui. »

« Est-ce que tu es tordu ? »

« Tu ne peux pas demander si je suis gaucher plutôt !? »

« Je vois. Est-ce que tu l'es ? »

« ... »

C'est elle qui est tordue.

Quatrième étage.

Comme c'était une école préparatoire à la base, les pièces étaient composées de trois salles de classe — pour chaque classe, la porte était cassée et traînait dans le couloir. Je jetai un oeil dans la première salle pour voir si Oshino y était.

« Te voilà, Araragi-kun. Je t'attendais. »

Oshino était là.

Il était assis les jambes croisées sur un lit de fortune fait à partir de nombreuses tables usées, rassemblées et collées ensemble avec des fils plastiques. Il nous faisait face.

Comme s'il savait que j'allais venir. Comme d'habitude — il voit à travers tout.

Et Senjôgahara était clairement — écoeurée. Même si je lui avais parlé d'Oshino, l'état de crasse de ce dernier devait être assez choquant pour le sens esthétique d'une lycéenne moderne. N'importe qui vivant dans une telle décharge serait sûrement dans un sale état, mais même un type comme moi peut dire qu'Oshino est bien loin d'être propre. On aurait même pû dire qu'il était sale. Et pour finir, la chemise hawaïenne psychédélique qu'il portait était la cerise sur le gâteau.

C'était toujours un choc de se dire que cet homme était mon sauveur...

Il ne ressemble en rien à Hanekawa.

« Ooh. Je vois que tu me ramènes une autre fille aujourd'hui. Je ne te vois jamais avec la même fille deux fois d'affilées. Sérieusement, je ne pourrais pas être plus heureux pour toi. »

« Arrête ça, ne me fais pas passer pour un sale type. »

« Hmm — tu ne l'es pas ? »

Oshino fixait Senjôgahara d'un air lointain.

Comme s'il regardait quelque chose derrière elle.

« Enchanté, ma p'tite dame. Je suis Oshino. »

« Enchantée. Je m'appelle Hitagi Senjôgahara. »

Quoiqu'il en soit, les présentations étaient faites.

Au moins, elle n'avait placé aucune insulte. On dirait qu'elle avait un certain respect pour les gens plus âgés.

« Je suis la camarade de classe d'Araragi-kun. C'est lui qui m'a appris votre existence. »

« Ah — Je vois, » dit Oshino d'un ton significatif.

Baissant les yeux, il sortit une cigarette et la plaça entre ses lèvres sans pour autant l'allumer. Les fenêtres, qui étaient incapables de garder cette fonction, ne contenaient plus que des bris de glace. Oshino semblait fixait un endroit au loin.

Après un long silence, il se tourna vers moi.

« Est-ce que tu aimes les filles à frange raide, Araragi-kun ?

« Je te l'ai déjà dit, ne me fais pas passer pour un sale type. Il n'y a que les lolicons qui aiment les franges raides. Ne m'inclus pas dans ta génération où Futari Taka passait encore à la télé. »[2]

« Comme tu veux, » dit Oshino en riant.

Senjôgahara fronça les sourcils.

Elle semblait se sentir insultée par le terme "loli".

« Bon — je pense que ce serait mieux que tu lui demandes directement, mais quoiqu'il en soit, Oshino — il y a deux ans, elle— »

« Ne parle pas de moi aussi familièrement, » dit Senjôgahara, résolue.

« Alors comment veux-tu que je t'appelle ? »

« Senjôgahara-sama. »

« ... »

Est-ce qu'elle est folle ?

« ... Sen-jô-ga-ha-ra-sa-ma. » Long, appuyé et sarcastique.

« Je n'aime pas la façon dont tu le prononces. Dis-le correctement. »

« Senjôgahara-chan. »

Elle enfonça deux doigts dans mes yeux.

« Tu m'as crevé les yeux ! »

« C'est parce que tu as été impoli. »

« C'est quoi cet échange équivalent !? »

« Mon langage grossier est composé de 40g de cuivre, 25g de zinc, 15g de nickel, 5g de honte et 97kg de dépit. »

« C'est quasiment que du dépit ! »

« Au passage, la dose de honte était une blague. »

« Tu enlèves l'ingrédient le plus important ! »

« Tu es vraiment bruyant. Si tu ne baisses pas d'un ton, je vais te surnommer "douleur menstruelle". »

« On dirait un monstre suicidaire ! »

« Quel est le problème ? Comme la phrase le sous-entend, il n'y a pas de raison d'être gêné. »

« Ça et être dépité sont deux choses différentes ! »

Senjôgahara semblait satisfaite par cette conclusion et se tourna vers Oshino.

« J'aimerais savoir une chose. » Le ton de sa voix impliquait qu'elle ne s'adressait pas seulement à Oshino, mais à moi aussi, en pointant du doigt un coin de la salle de classe.

Dans ce coin se trouvait une petite fille — assez jeune pour ne pas encore être lycéenne — qui serrait ses jambes dans ses bras. Elle avait l'air d'avoir huit ans, portait un vieux casque de pilote et ses lunettes et avait la peau blanche et les cheveux blonds. Elle se tenait dans le coin, les bras autour des jambes.

« C'est quoi cette fille ? »

"Quoi", plutôt que "qui", demanda-t-elle, ce qui voulait dire que Senjôgahara était perspicace. D'un autre côté, même si ça n'avait pas été Senjôgahara, la plupart des gens perspicaces auraient remarqué qu'il y avait quelque chose de différent chez cette fille, surtout en la voyant fixer Oshino d'un regard mauvais.

« Ah, tu n'as pas à t'en faire pour elle, » expliquai-je, avant qu'Oshino ne puisse intervenir.

« Elle est juste assise là, elle ne fera rien — tout va bien. Elle n'a pas d'ombre ni de forme. Une enfant sans nom, sans existence. »

« Oh, non, non, Araragi-kun, » m'interrompit Oshino. « C'est vrai qu'elle n'a pas d'ombre, ni de forme, ni d'existence, mais je lui ai donnée un nom hier. Vu qu'elle a été plutôt utile pendant la Golden Week et que ce serait moins pratique si elle n'avait pas de nom. Et aussi, tant qu'elle n'a pas de nom, elle restera une atrocité. »

« Hmm — un nom. Comment tu l'as appelée ? »

« Shinobu Oshino. »

« Shinobu — hmm. »

Un vrai nom japonais.

Même si ça n'a pas vraiment d'importance.

« Un coeur sous une lame. Un nom qui lui va bien, tu ne trouves pas ? Je lui ai donné mon nom de famille. Le hasard a fait que le kanji du mot "Shinobu" est aussi présent dans mon nom. C'est doublement utile et à trois sens. Un nom bien trouvé, tu ne penses pas ? Je l'aime bien moi. »

« Est-ce que ça importe vraiment ? »

Ou plutôt, ça n'a pas d'importance pour moi.

« J'y ai réfléchi un moment et j'hésitai entre Shinobu Oshino ou Oshino Oshino. Finalement, j'ai choisi celui qui sonnait le mieux et non pas celui qui jouait avec la phonétique. Je crois que miss déléguée serait plutôt contente de mon choix de kanji. »

« C'est bon. »

Ça ne m'intéresse vraiment pas.

Même si "Oshino" est hors de question.

« Comme je le disais. »

Senjôgahara nous interrompit d'une voix qui sous-entendait qu'elle en avait assez de notre discussion insondable, puis demanda,

« C'est quoi cette fille ? »

« Comme je te l'ai dit — rien. »

Les restes d'un vampire.

La coquille vide d'un monstre magnifique.

Que dire de plus ? De toute façon, elle n'était pas liée à Senjôgahara. C'était mon problème. Aussi longtemps que je vivrai, c'est un fardeau qui je devrai porter.

« Rien, tu dis. Très bien. »

« ... »

Quelle femme indifférente.

« Ma grand-mère paternelle me disait souvent que ce n'est pas grave si je suis indifférente, tant que j'ai été élevée insifigniante. »

« Insifigniante ? »

Elle a écorché le mot.

Comme si on disait ordothoxe au lieu d'orthodoxe.

« Bref. »

Senjôgahara tourna son regard de l'ancienne vampire, une fille à la peau blanche et aux cheveux blonds, aussi connue sous le nom de Shinobu Oshino, à Meme Oshino.

« J'ai entendu dire que vous pouviez m'aider. »

« Moi ? C'est impossible, » dit Oshino avec amusement.

« Il n'y a que toi qui peux t'aider, ma p'tite dame. »

« ... »

Ouah.

Les yeux de Senjôgahara étaient presque entièrement plissés.

Elle était clairement méfiante.

« Jusque-là, cinq personnes m'ont dit exactement les mêmes mots. C'était tous des escrocs. En êtes-vous un, Oshino-san ? »

« Haha. Tu es vraiment pleine d'énergie, ma p'tite dame. Quelque chose de bien t'est arrivé ? »

Pourquoi est-ce que tu la provoques avec ces mots-là ? Ils peuvent marcher sur des gens comme Hanekawa, mais pas avec Senjôgahara.

Elle est le genre à accepter les challenges.

« Ok, ok. »

À contrecoeur, je m'avancai pour jouer le médiateur.

Je m'insérai de force entre eux.

« Ne nous gêne pas, ou je te tue. »

« ... »

À l'instant, cette fille, de manière banale, vient de menacer de me tuer.

Pourquoi est-ce que je suis toujours dans la ligne de mire ?

Elle est comme une bombe.

Bon dieu, je n'ai pas de mots pour la décrire.

« Bah, dans tous les cas, » dit Oshino de manière désinvolte, ce qui faisait contraste à la situation tendue.

« Si tu ne me parles pas de ta situation, on ne pourra rien faire. Je ne suis pas doué pour lire dans les esprits. Si tu ne parles pas, je ne comprendrai pas le coeur du problème. Ne t'en fais pas, je garderai tes secrets. »

« ... »

« Ah. Ok. Je vais d'abord t'expliquer — »

« Ça ira, Araragi-kun. »

Senjôgahara m'interrompit à nouveau.

« Je vais le faire moi-même. »

« Senjôgahara. »

« Je peux le faire moi-même, » dit-elle.


Notes du traducteur[edit]

  1. En japonais, le terme anglais "all right" qui signifie "très bien, c'est bon" se prononce "ourai". Le terme "danger potentiel" se dit quant à lui en japonais "ouraikiken", d'où le jeu de mot de Senjôgahara.
  2. Futari Taka est un vieux dessin animé qui passait dans les années 90 au Japon.
Revenir à 003 Aller à la Page principale Avancer vers 005